Servet Kamberaj v Istituto per l’Edilizia sociale della Provincia autonoma di Bolzano (IPES) and Others.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:827
Date13 December 2011
Celex Number62010CC0571
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeCuestión prejudicial - inadmisible
Docket NumberC‑571/10
62010CC0571

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 13 décembre 2011 ( 1 )

Affaire C-571/10

Servet Kamberaj

contre

Istituto per l’Edilizia Sociale della Provincia autonoma di Bolzano (IPES),

Giunta della Provincia autonoma di Bolzano,

Provincia Autonoma di Bolzano

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale di Bolzano (Italie)]

«Directive 2000/43/CE — Mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique — Directive 2003/109/CE — Statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée — Droit à l’égalité de traitement en ce qui concerne la sécurité sociale, l’aide sociale et la protection sociale telles qu’elles sont définies par la législation nationale — Faculté des États membres de limiter l’égalité de traitement en matière d’aide sociale et de protection sociale aux prestations essentielles — Refus d’une demande d’aide au logement — Motif du refus — Épuisement des fonds destinés aux ressortissants de pays tiers»

1.

La présente demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 2 TUE et 6 TUE, 18 TFUE, 45 TFUE et 49 TFUE, 1er, 21 et 34 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( 2 ), ainsi que des dispositions des directives 2000/43/CE du Conseil, du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique ( 3 ), et 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ( 4 ). Le Tribunale di Bolzano (Italie) soulève également des questions relatives à l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 ( 5 ), et à l’article 1er du protocole additionnel no 12.

2.

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige introduit par M. Kamberaj, le requérant au principal, contre l’Istituto per l’Edilizia Sociale della Provincia autonoma di Bolzano (IPES) (institut pour le logement social de la province autonome de Bolzano), la Giunta della Provincia autonoma di Bolzano (conseil provincial de la province autonome de Bolzano, ci-après la «Giunta provinciale») ainsi que la Provincia Autonoma di Bolzano (province autonome de Bolzano) quant au refus de l’IPES de lui octroyer, pour l’année 2009, l’aide au logement prévue à l’article 2, paragraphe 1, sous k), de la loi provinciale no 13 (legge provinciale n. 13), du 17 décembre 1998, dans sa version en vigueur au moment des faits du litige au principal (ci-après la «loi provinciale»). Cette aide mensuelle, qui vise à compléter le loyer, est destinée aux locataires les moins aisés.

I – Le cadre juridique

A – La réglementation de l’Union

3.

Nous nous contenterons de reproduire ici les dispositions pertinentes de la directive qui sera au centre de nos développements à venir, à savoir la directive 2003/109.

4.

Les deuxième à quatrième, douzième et treizième considérants de cette directive sont libellés comme suit:

«(2)

Lors de sa réunion extraordinaire de Tampere des 15 et 16 octobre 1999, le Conseil européen a proclamé que le statut juridique des ressortissants de pays tiers devrait être rapproché de celui des ressortissants des États membres et qu’une personne résidant légalement dans un État membre, pendant une période à déterminer, et titulaire d’un permis de séjour de longue durée devrait se voir octroyer dans cet État membre un ensemble de droits uniformes aussi proches que possible de ceux dont jouissent les citoyens de l’Union européenne.

(3)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes, qui sont reconnus notamment par la [CEDH] et par la [charte].

(4)

L’intégration des ressortissants des pays tiers qui sont installés durablement dans les États membres est un élément clé pour promouvoir la cohésion économique et sociale, objectif fondamental de la Communauté, énoncé dans le traité.

[…]

(12)

Afin de constituer un véritable instrument d’intégration dans la société dans laquelle le résident de longue durée s’est établi, le résident de longue durée devrait jouir de l’égalité de traitement avec les citoyens de l’État membre dans un large éventail de domaines économiques et sociaux, selon les conditions pertinentes définies par la présente directive.

(13)

En ce qui concerne l’assistance sociale, la possibilité de limiter les bénéfices des résidents de longue durée aux bénéfices essentiels est à comprendre dans le sens que cette notion couvre au moins le revenu minimal de subsistance, l’aide en cas de maladie ou de grossesse, l’aide parentale et les soins de longue durée. Les modalités d’attribution de ces prestations devraient être déterminées par la législation nationale.»

5.

Conformément à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2003/109, les États membres accordent le statut de résident de longue durée aux ressortissants de pays tiers qui ont résidé de manière légale et ininterrompue sur leur territoire pendant les cinq années qui ont immédiatement précédé l’introduction de la demande en cause.

6.

L’article 5 de cette directive prévoit les conditions relatives à l’acquisition du statut de résident de longue durée. Les États membres peuvent, conformément au paragraphe 1 de cette disposition, exiger du ressortissant d’un pays tiers de fournir la preuve qu’il dispose pour lui et pour les membres de sa famille qui sont à sa charge de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et à ceux des membres de sa famille sans recourir au système d’aide sociale de l’État membre concerné, et d’une assurance maladie pour tous les risques normalement couverts pour leurs propres ressortissants dans l’État membre concerné.

7.

En vertu de l’article 5, paragraphe 2, de ladite directive, les États membres peuvent exiger que les ressortissants de pays tiers satisfassent à des conditions d’intégration conformément à leur droit national.

8.

L’article 11, paragraphe 1, de la directive 2003/109 est libellé comme suit:

«Le résident de longue durée bénéficie de l’égalité de traitement avec les nationaux en ce qui concerne:

[…]

d)

la sécurité sociale, l’aide sociale et la protection sociale telles qu’elles sont définies par la législation nationale;

[…]

f)

l’accès aux biens et aux services et la fourniture de biens et de services à la disposition du public, ainsi que l’accès aux procédures d’attribution d’un logement;

[…]»

9.

L’article 11, paragraphe 4, de cette directive dispose que, en matière d’aide sociale et de protection sociale, les États membres peuvent limiter l’égalité de traitement aux prestations essentielles.

B – La réglementation nationale

10.

En vertu de l’article 117 de la Constitution italienne, l’État ne peut légiférer à titre exclusif, en matière d’aide sociale, qu’aux fins de la détermination des niveaux essentiels des prestations aux droits civils et sociaux qui doivent être garantis sur tout le territoire national. Au-delà de cette finalité, la compétence revient aux régions.

11.

Le décret législatif no 3 (decreto legislativo n. 3), du 8 janvier 2007 ( 6 ), a transposé la directive 2003/109 et a intégré les dispositions de cette directive dans le cadre des dispositions du décret législatif no 286 (decreto legislativo n. 286) du 25 juillet 1998 ( 7 ).

12.

L’article 9, paragraphe 1, du décret législatif no 286/1998 prévoit que l’étranger titulaire, depuis au moins cinq ans, d’un permis de séjour en cours de validité, qui démontre qu’il dispose d’un revenu non inférieur au montant annuel de l’allocation sociale et, dans le cas d’une demande concernant les membres de sa famille, d’un revenu suffisant et d’un logement approprié satisfaisant aux conditions minimales prévues par les dispositions pertinentes du droit national, peut demander au préfet de police la délivrance d’un permis de séjour pour résidents de longue durée, pour lui-même et pour les membres de sa famille.

13.

L’article 9, paragraphe 12, sous c), du décret législatif no 286/1998, tel que modifié par le décret législatif no 3, du 8 janvier 2007, dispose que, outre les dispositions prévues pour l’étranger résidant régulièrement en Italie sur le territoire national, le titulaire du permis de séjour pour résidents de longue durée peut bénéficier des prestations d’assistance sociale, de sécurité sociale, de celles relatives aux subventions en matière sanitaire, scolaire et sociale et de celles relatives à l’accès aux biens et aux services à la disposition du public, y compris l’accès à la procédure pour l’obtention de logements gérés par les autorités publiques, sauf dispositions contraires et à condition qu’il soit démontré que l’étranger réside effectivement sur le territoire national.

14.

En vertu de l’article 3, troisième alinéa, du décret no 670 du président de la République (decreto del Presidente della Repubblica n. 670), du 31 août 1972 ( 8 ), qui constitue un décret de rang constitutionnel, la Provincia Autonoma di Bolzano, en raison de la composition particulière de sa population qui est répartie en trois groupes linguistiques (italien, allemand et ladin), bénéficie de conditions d’autonomie particulières.

15.

En vertu de l’article 8, sous 25), du décret no 670/1972, cette autonomie inclut, notamment, le pouvoir d’adopter des dispositions de niveau législatif en matière d’assistance et d’aide publiques.

16.

L’article...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT