Commission of the European Communities v Portuguese Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:465
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-171/02
Date16 September 2003
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62002CC0171
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. SIEGBERT ALBER
présentées le 16 septembre 2003(1)



Affaire C-171/02

Commission des Communautés européennes
contre
République portugaise


«Libre circulation des travailleurs – Liberté d'établissement – Libre prestation des services – Activité de services de sécurité privée – Exigence d'un établissement permanent – Prise en considération des pièces justificatives produites dans un autre État membre – Exigence d'un capital minimum – Exigenc de la personnalité juridique – Exigence d'une carte professionnelle nationale – Reconnaissance d'attestations de compétence»






I – Introduction 1. La procédure d’infraction que la Commission a engagée à l’encontre de la République portugaise porte sur la réglementation des services de sécurité privée qui proposent au Portugal des activités de surveillance des personnes et des biens. La Commission reproche à la législation portugaise d’être incompatible avec les dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des travailleurs, à la liberté d’établissement et à la libre prestation de services. II – Le cadre juridique A – La directive 92/51/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive 89/48/CEE (2) 2. La directive 92/51 définit en son article 1er, sous c), premier tiret, l’«attestation de compétence» comme «tout titre: ‑ qui sanctionne une formation ne faisant pas partie d’un ensemble constituant un diplôme au sens de la directive 89/48/CEE ou un diplôme ou un certificat au sens de la présente directive [...]». 3. Au même article, sous f), l’«activité professionnelle réglementée» est définie comme «une activité professionnelle dont l’accès ou l’exercice, ou l’une des modalités d’exercice dans un État membre, est subordonné, directement ou indirectement par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives, à la possession d’un titre de formation ou d’une attestation de compétence [...]». B – La réglementation nationale 1. Le décret-loi n° 231/98, du 22 juin 1998 (3) (ci-après le «décret-loi») 4. L’article 1er, paragraphe 3, sous a), du décret-loi définit les activités de sécurité privées comme «la prestation de services par des entités privées, légalement constituées à cet effet, en vue de la protection de personnes et de biens ainsi que de la prévention de la commission de crimes». 5. L’article 3 dispose que «l’activité de services de sécurité privée ne peut être exercée que par des entités régulièrement fondées et agréées à cette fin selon les dispositions du présent décret-loi». 6. L’article 7 fixe les conditions auxquelles des services de sécurité privée peuvent être proposés. D’après l’article 7, paragraphe 2, sous b), en fait partie, «à la suite d’un cursus professionnel fondamental, conforme aux exigences de l’article 8, paragraphe 2, le passage avec succès d’examens des connaissances et de l’aptitude physique dont le contenu et la durée sont fixés par décret du ministre de l’Intérieur», auquel s’ajoute, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, la participation à un cursus d’introduction à la profession. 7. L’article 9, paragraphes 1 et 2, régit l’émission de la carte professionnelle «1. Les membres du personnel de surveillance, d’accompagnement, de défense et de protection des personnes doivent être en possession d’une carte professionnelle émise par le secrétaire général du ministère de l’Intérieur, valable pour une durée de deux ans et susceptible d’être prolongée de la même durée. 2. L’émission de la carte professionnelle est subordonnée à la présentation au secrétaire général du ministère de l’Intérieur de pièces attestant que les conditions fixées à l’article 7 sont remplies.» 8. L’article 21, paragraphe 1, soumet l’exercice de l’activité de dirigeant d’un service de sécurité privée à l’obtention d’un agrément préalable. 9. L’article 22, paragraphes 1 et 2, dispose ce qui suit: «1. Les entités qui exercent l’activité de sécurité privée prévue à l’article 1er, paragraphe 3, sous a), doivent être constituées conformément à la législation d’un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen, posséder un siège ou un établissement au Portugal et se conformer aux dispositions de l’article 4 du code des sociétés commerciales. 2. Le capital social des entités au sens du paragraphe 1 doit s’élever au moins
a)
à 10 000 000 PTE, lorsqu’elles fournissent l’une des prestations visées à l’article 2, paragraphe 1, sous a) et b);
b)
à 25 000 000 PTE, lorsqu’elles fournissent l’une des prestations visées à l’article 2, paragraphe 1, sous c) et d);
c)
à 50 000 000 PTE, lorsqu’elles fournissent l’une des prestations visées à l’article 2, paragraphe 1, sous e).»
10. L’article 24, paragraphe 1, énumère les documents qui doivent être produits à l’appui d’une demande d’autorisation d’exercer l’activité de services de sécurité privée et dont font partie, selon le point d), des justificatifs attestant que les conditions énoncées à l’article 22 sont remplies. 2. Le code des sociétés commerciales 11. D’après l’article 4, paragraphe 1: «La société qui n’a pas de siège effectif au Portugal mais désire y exercer son activité pendant plus d’un an doit y établir un établissement permanent et se conformer aux dispositions de la loi portugaise sur le registre du commerce». III – La procédure précontentieuse 12. Par lettre du 6 mai 1999, la Commission a fait savoir aux autorités portugaises qu’elle considérait que les dispositions du décret-loi étaient incompatibles avec celles du traité sur la libre circulation des travailleurs, la liberté d’établissement et la libre prestation de services. Elle invitait la République portugaise à lui communiquer à ce sujet des informations établissant la compatibilité du décret-loi avec le droit communautaire. Par lettre du 10 septembre 1999, la République portugaise a communiqué une série de documents à la Commission. 13. L’examen de ces documents ne l’ayant pas convaincue de la légalité de la législation portugaise, la Commission a adressé à la République portugaise, le 1er février 2000, une lettre de mise en demeure dans laquelle elle réitérait ses griefs. La République portugaise y a répondu le 23 mai 2000. 14. Ces explications de la République portugaise n’ont pas davantage convaincu la Commission de la légalité de la législation portugaise. Partant, la Commission a adressé le 29 décembre 2000 un avis motivé à la République portugaise. Celle-ci lui a répondu le 20 mars 2001. 15. Étant parvenue, après examen de ces dernières explications, à la conclusion que la législation portugaise était incompatible avec les règles du traité, la Commission a engagé le présent recours le 8 mai 2002. IV – Observations et conclusions des parties 16. Dans sa requête, la Commission énonce en tout six griefs. Elle critique le fait que, dans le cadre du régime d’agrément à délivrer par le ministre de l’Intérieur, les entreprises étrangères qui désirent exercer au Portugal, dans le secteur des services de sécurité privée, des activités de surveillance des personnes et des biens
doivent avoir leur siège ou un établissement permanent sur le territoire portugais,
ne puissent pas faire valoir les justifications et garanties déjà présentées dans leur État membre d’établissement,
doivent revêtir la forme d’une personne morale,
doivent avoir un capital social spécifique,
Elle critique en outre le fait que:
les membres du personnel de ces entreprises étrangères doivent posséder une carte professionnelle émise par les autorités portugaises
et, enfin, que:
les professions du secteur de la sécurité privée ne soient pas soumises au régime communautaire de reconnaissance des qualifications professionnelles.
17. En ce qui concerne la condition, imposée par l’article 22, paragraphe 1, du décret-loi, d’avoir son siège ou un établissement permanent au Portugal, la Commission considère qu’elle s’applique aussi aux entités qui ne désirent exercer qu’à titre temporaire (en vertu de l’article 49 CE), dans le secteur des services de sécurité privée, des activités de surveillance des personnes et des biens au Portugal. Cette exigence rend de fait impossible la prestation de services, car la création d’un siège ou d’un établissement au Portugal impliquerait qu’il soit fait usage de la liberté d’établissement et non plus de la libre prestation de services, qui a pour caractéristique la nature temporaire de la prestation. D’après la jurisprudence Gebhard (4) , cette nature temporaire n’exclut certes pas la création d’une certaine infrastructure, mais l’existence de cette infrastructure ne saurait être posée en condition de l’exercice de la libre prestation de services. 18. La Commission n’est pas convaincue par l’argument de la République portugaise selon lequel l’article 4 du code des sociétés commerciales limite le champ d’application de l’article 22 du décret-loi aux entités qui proposent des services de sécurité pendant plus d’un an. D’après elle, la référence à l’article 4 du code des sociétés commerciales que comporte l’article 22 du décret-loi ne peut se comprendre que comme une invitation à respecter les dispositions relatives au registre du commerce. En effet, l’obligation faite aux prestataires de posséder un siège ou un établissement permanent au Portugal résulte déjà du texte de l’article 22, paragraphe 1, du décret-loi. 19. Pour la Commission, la seule interprétation plausible de l’article 22 du décret-loi est qu’il exige au moins un établissement au Portugal, même lorsqu’il ne s’agit que de la...

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