Bank Melli Iran v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:426
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-548/09
Date28 June 2011
Celex Number62009CC0548

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO Mengozzi

présentées le 28 juin 2011 (1)

Affaire C‑548/09 P

Bank Melli Iran

contre

Conseil de l’Union européenne


«Pourvoi – Mesures restrictives prises à l’encontre de la République islamique d’Iran dans le but d’empêcher la prolifération nucléaire – Liste des personnes et des entités auxquelles s’applique le gel des fonds imposé par la législation communautaire – Régime de sanctions économiques et financières adopté pour lutter contre une politique menée par un État tiers – Inclusion du nom de la requérante – Violation des formes substantielles – Absence de notification individuelle – Conséquences – Défaut de base juridique – Violation du droit de propriété – Violation des droits de la défense et des principes d’une protection juridictionnelle effective et de proportionnalité»






Table des matières


I – Les antécédents du litige et l’arrêt attaqué

II – La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

III – L’analyse juridique

A – Sur le premier moyen à titre principal tiré d’une erreur de droit du Tribunal quant à l’appréciation des conséquences devant découler d’une violation de l’obligation de notification

1. Arrêt attaqué

2. Argumentation des parties

3. Appréciation

a) Sur l’existence d’une obligation de notification individuelle de la décision litigieuse

b) Sur les conséquences de la violation de l’obligation de notification

B – Sur le deuxième moyen à titre principal tiré d’une erreur de droit dans l’interprétation des bases juridiques du règlement n° 423/2007

1. Arrêt attaqué

2. Argumentation des parties

3. Appréciation

C – Sur le troisième moyen à titre principal tiré d’une erreur de droit dans l’appréciation de l’obligation de motivation, des droits de la défense et du droit à une protection juridictionnelle effective

1. Arrêt attaqué

2. Argumentation des parties

3. Appréciation

D – Sur le premier moyen à titre subsidiaire tiré de la méconnaissance du pouvoir d’appréciation du Conseil

1. Arrêt attaqué

2. Argumentation des parties

3. Appréciation

E – Sur le deuxième moyen à titre subsidiaire tiré d’une erreur d’appréciation en droit du Tribunal quant au droit de propriété de la requérante

1. Arrêt attaqué

2. Argumentation des parties

3. Appréciation

a) Remarque préalable

b) Analyse du moyen

F – Sur le troisième moyen à titre subsidiaire tiré d’une erreur manifeste d’appréciation du Conseil lorsqu’il a inclus la requérante sur la liste des entités dont les avoirs doivent être gelés

1. Argumentation des parties

2. Appréciation

IV – Sur les dépens

V – Conclusion

1. Le présent pourvoi, introduit par la Bank Melli Iran (ci-après la «Bank Melli» ou la «requérante»), tend à l’annulation de l’arrêt Bank Melli Iran/Conseil (2) (ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel le Tribunal de première instance des Communautés européennes a rejeté le recours en annulation de la requérante à l’encontre du point 4 du tableau B de l’annexe de la décision 2008/475/CE du Conseil, du 23 juin 2008, mettant en œuvre l’article 7, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 423/2007 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (3) (ci-après la «décision litigieuse»), décision par laquelle le Conseil de l’Union européenne a procédé à l’inscription de la requérante sur la liste des entités dont les avoirs doivent être gelés.

2. Ce pourvoi est le premier introduit à l’encontre de mesures de gel de fonds adoptées dans le cadre d’un régime de sanctions contre un État tiers. Il soulève, par ailleurs, un certain nombre de questions d’importance, notamment eu égard à l’intensité des droits de la défense dont les personnes et entités visées par les mesures suscitées peuvent se prévaloir dans un tel contexte.

I – Les antécédents du litige et l’arrêt attaqué

3. Il résulte des points 1 et suivants de l’arrêt attaqué que la Bank Melli est une société commerciale iranienne détenue par l’État iranien et que l’affaire introduite devant le Tribunal trouve son origine dans le régime de mesures restrictives instauré en vue de faire pression sur la République islamique d’Iran pour qu’elle mette fin aux activités nucléaires présentant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires (ci-après la «prolifération nucléaire»). Ledit régime trouve sa source dans la résolution 1737 (2006) (4), du 23 décembre 2006, du Conseil de sécurité des Nations unies (ci-après le «Conseil de sécurité») dont l’annexe listait les personnes et entités qui, selon le Conseil de sécurité, étaient impliquées dans la prolifération nucléaire en Iran et dont les fonds et ressources économiques (ci-après les «fonds») devaient être gelés. Cette liste a été régulièrement mise à jour par le Conseil de sécurité par le biais de différentes résolutions. La requérante elle-même n’a cependant pas fait l’objet de mesures de gel de fonds décidées par le Conseil de sécurité.

4. La résolution 1737 (2006) a été mise en œuvre, pour ce qui concerne l’Union européenne, par la position commune 2007/140/PESC du Conseil, du 27 février 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (5). L’article 5, paragraphe 1, sous a), de ladite position commune prévoyait le gel des fonds que possédaient, détenaient ou contrôlaient, directement ou indirectement, les entités et personnes désignées par la résolution. Son article 5, paragraphe 1, sous b), étendait cette mesure aux personnes et aux entités reconnues par le Conseil comme participant, étant directement associées ou apportant un appui à la prolifération nucléaire. Ladite position commune prévoyait encore, en son article 7, paragraphe 2, que la liste des personnes et des entités visées en vertu de l’article 5, paragraphe 1, sous b), devait être établie et modifiée par le Conseil à l’unanimité.

5. Dans la mesure où des compétences de la Communauté européenne étaient concernées, la position commune 2007/140 a été suivie par l’adoption, sur le fondement des articles 60 CE et 301 CE, du règlement (CE) n° 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007 (6). D’un contenu très comparable à celui de la position commune, l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement prévoit le gel des fonds appartenant aux personnes, aux entités et aux organismes désignés par la résolution 1737 (2006), ainsi que de tous les fonds que ces personnes, entités ou organismes possèdent, détiennent ou contrôlent. L’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 423/2007 étend cette possibilité de gel aux personnes, aux entités ou aux organismes désignés par le Conseil et reconnus, conformément à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la position commune 2007/140, comme participant, étant directement associés ou apportant un appui à la prolifération nucléaire. Les personnes, les entités et les organismes désignés par le Conseil au titre de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 423/2007 sont listés à l’annexe V dudit règlement.

6. L’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 423/2007 prévoit, en outre, que «[l]e Conseil, statuant à la majorité qualifiée, établit, révise et modifie [l’annexe V] en pleine conformité avec les décisions du Conseil [adoptées en vertu de l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la position commune 2007/140]». Toujours aux termes de cette même disposition, le Conseil doit examiner ladite liste à intervalles réguliers, et au moins tous les douze mois.

7. L’article 15, paragraphe 3, du règlement n° 423/2007 énonce que «[l]e Conseil donne les raisons individuelles et spécifiques pour les décisions prises en vertu du paragraphe 2 et les porte à la connaissance des personnes, des entités et des organismes concernés».

8. Quelque temps après l’adoption du règlement n° 423/2007, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1803 (2008) (7), du 3 mars 2008, par laquelle il demande «à tous les États de faire preuve de vigilance s’agissant des activités menées par les institutions financières sises sur leur territoire avec toutes les banques domiciliées en Iran, en particulier la [Bank] Melli et la Banque Saderat, ainsi qu’avec leurs succursales et leurs agences à l’étranger, afin d’éviter que ces activités concourent à des activités posant un risque de prolifération» (8).

9. En adoptant, le 23 juin 2008, la position commune 2008/479/PESC (9), le Conseil a modifié la position commune 2007/140. En vertu de l’annexe de la nouvelle position commune, la requérante a été incluse parmi les entités visées par le gel des fonds conformément à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la position commune 2007/140. Son inscription a été maintenue par la position commune 2008/652/PESC (10) qui, à son tour, a modifié la position commune 2007/140.

10. Le 23 juin 2008, soit le même jour que l’adoption de la position commune 2008/479, le Conseil a adopté la décision litigieuse. Aux termes du point 4 du tableau B de l’annexe de ladite décision, la requérante a été inscrite sur la liste figurant à l’annexe V du règlement n° 423/2007. Cette inscription a eu pour conséquence le gel de ses fonds.

11. Ainsi le point 4 du tableau B de l’annexe de la décision litigieuse mentionne-t-il le nom de la requérante, son adresse postale à Téhéran et la date de son inscription (à savoir le 26 juin 2008). Au titre des motifs ayant poussé le Conseil à l’inscription de la requérante, le point 4 énonce que la Bank Melli «[a]pporte ou tente d’apporter un soutien financier à des sociétés participant aux programmes nucléaire et de missiles de l’Iran ou achetant des biens destinés à ces programmes (AIO, SHIG, SBIG, AEOI, Novin Energy Company, Mesbah Energy Company, Kalaye Electric Company et DIO). La Bank Melli sert de facilitateur pour les activités sensibles de l’Iran. Elle a facilité de nombreux achats de matériels sensibles pour les programmes nucléaire et de missiles iraniens. Elle a fourni une série de services financiers pour le compte d’entités liées aux industries nucléaires et de missiles de l’Iran, y compris...

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