Colin Wolf v Stadt Frankfurt am Main.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:509
Docket NumberC-229/08
Celex Number62008CC0229
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date03 September 2009

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES Bot

présentées le 3 septembre 2009 (1)

Affaire C‑229/08

Colin Wolf

contre

Stadt Frankfurt am Main

[demande de décision préjudicielle formée par le Verwaltungsgericht Frankfurt am Main (Allemagne)]

«Directive 2000/78/CE – Interdiction des discriminations en fonction de l’âge – Limite d’âge de 30 ans pour le recrutement dans le service technique intermédiaire des pompiers – Justification – Objectif visant à établir une structure des âges équilibrée permettant de garantir le caractère opérationnel et le bon fonctionnement du corps des pompiers»





1. Dans la présente demande de décision préjudicielle, le Verwaltungsgericht Frankfurt am Main (Allemagne) cherche principalement à savoir si une disposition nationale, qui fixe à 30 ans l’âge maximal pour être recruté dans le service technique intermédiaire des pompiers, est une mesure justifiée au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (2).

2. Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Wolf à la Stadt Frankfurt am Main (ville de Francfort‑sur‑le‑Main) à propos du refus de cette dernière de prendre en compte la candidature de M. Wolf à un recrutement dans le service technique intermédiaire des pompiers, en raison du fait qu’il avait dépassé la limite d’âge de 30 ans.

3. Dans les présentes conclusions, nous expliquerons pourquoi nous considérons que la réglementation allemande prévoyant une telle limite d’âge est justifiée au regard des articles 4, paragraphe 1, et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

I – Le cadre juridique

A – La directive 2000/78

4. Aux termes de son article 1er, la directive 2000/78 a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement.

5. Selon le dix‑huitième considérant de cette directive, celle‑ci «ne saurait, notamment, avoir pour effet d’astreindre les forces armées ainsi que les services de police, pénitentiaires ou de secours à embaucher ou à maintenir dans leur emploi des personnes ne possédant pas les capacités requises pour remplir l’ensemble des fonctions qu’elles peuvent être appelées à exercer au regard de l’objectif légitime de maintenir le caractère opérationnel de ces services».

6. L’article 2 de ladite directive énonce:

«1. Aux fins de la présente directive, on entend par ‘principe de l’égalité de traitement’ l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.

2. Aux fins du paragraphe 1:

a) une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er;

[...]»

7. L’article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 2000/78 précise:

«Dans les limites des compétences conférées à la Communauté, la présente directive s’applique à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne:

a) les conditions d’accès à l’emploi, aux activités non salariées ou au travail, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d’activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion.»

8. L’article 4, paragraphe 1, de cette directive est libellé ainsi:

«Nonobstant l’article 2, paragraphes 1 et 2, les États membres peuvent prévoir qu’une différence de traitement fondée sur une caractéristique liée à l’un des motifs visés à l’article 1er ne constitue pas une discrimination lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, pour autant que l’objectif soit légitime et que l’exigence soit proportionnée.»

9. L’article 6, paragraphe 1, de ladite directive dispose:

«Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

Ces différences de traitement peuvent notamment comprendre:

a) la mise en place de conditions spéciales d’accès à l’emploi et à la formation professionnelle, d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, pour les jeunes, les travailleurs âgés et ceux ayant des personnes à charge, en vue de favoriser leur insertion professionnelle ou d’assurer leur protection;

b) la fixation de conditions minimales d’âge, d’expérience professionnelle ou d’ancienneté dans l’emploi, pour l’accès à l’emploi ou à certains avantages liés à l’emploi;

c) la fixation d’un âge maximum pour le recrutement, fondée sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d’une période d’emploi raisonnable avant la retraite.»

10. L’article 17 de la directive 2000/78 est libellé ainsi:

«Les États membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations des dispositions nationales adoptées en application de la présente directive et prennent toute mesure nécessaire pour assurer la mise en œuvre de celles‑ci. Les sanctions ainsi prévues qui peuvent comprendre le versement d’indemnités à la victime doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. [...]»

B – La réglementation nationale

1. La réglementation du Land de Hesse

11. Le règlement sur les carrières des fonctionnaires des services d’intervention des pompiers professionnels du Land de Hesse (Hessische Feuerwehrlaufbahnverordnung), du 21 décembre 1994 (3), prévoit, à son article 3, paragraphe 1, point 1, que peut être recrutée dans la carrière du service intermédiaire toute personne qui est âgée de 30 ans au plus.

12. Les articles 194 et 197 de la loi sur la fonction publique du Land de Hesse (Hessisches Beamtengesetz), du 21 mars 1962 (4), sont rédigés ainsi:

«Article 194 – Mise à la retraite

(1) Les agents de police à vie sont mis à la retraite à la fin du mois au cours duquel ils atteignent soixante ans révolus (limite d’âge).

(2) Dans l’intérêt du service et à la demande de l’agent de police, la mise à la retraite peut être reportée au‑delà de l’âge de soixante ans révolus, pour une durée définie qui ne peut dépasser une année à chaque fois, au maximum jusqu’à l’âge de soixante‑deux ans révolus.

[…]

Article 197 – Statut juridique

(1) Les dispositions des articles 187 et 192 à 194 s’appliquent par analogie aux fonctionnaires des services d’intervention des pompiers professionnels.

[...]»

2. La réglementation fédérale

13. La loi sur la pension des fonctionnaires et des juges fédéraux et régionaux (Gesetz über die Versorgung der Beamten und Richter in Bund und Ländern), du 24 août 1976 (5), dispose, à ses articles 4 et 14, dans leur version applicable au jour des faits au principal:

«Article 4 – Ouverture et calcul du droit à pension

(1) Une pension n’est octroyée qu’à condition que le fonctionnaire

1. ait effectué une période de service d’au moins cinq années

[…]

Article 14 – Montant de la pension

(1) Pour chaque année de service ouvrant droit à la pension, la pension s’élève à 1,79375 % des traitements ouvrant droit à la pension (article 5), sans toutefois dépasser au total 71,75 %.

[...]

(4) La pension s’élève au moins à 35 % des traitements ouvrant droit à la pension (article 5).

[...]»

14. La loi générale sur l’égalité de traitement (Allgemeines Gleichbehandlungsgesetz), du 14 août 2006 (6), a transposé la directive 2000/78.

15. L’article 15 de l’AGG est libellé ainsi:

«Article 15 – Indemnisation et...

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