Document Security Systems, Inc. v European Central Bank (ECB).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2007:243
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-295/05
Date05 September 2007
Celex Number62005TO0295
Procedure TypeRecurso por responsabilidad

Affaire T-295/05

Document Security Systems, Inc.

contre

Banque centrale européenne (BCE)

« Union monétaire — Émission de billets de banque en euros — Prétendue utilisation d'une invention brevetée destinée à éviter la contrefaçon — Action en contrefaçon d'un brevet européen — Incompétence du Tribunal — Irrecevabilité — Recours en indemnité »

Ordonnance du Tribunal (première chambre) du 5 septembre 2007

Sommaire de l'ordonnance

1. Procédure — Action en contrefaçon d'un brevet européen — Incompétence du juge communautaire

(Art. 7 CE et 220 CE à 241 CE)

2. États membres — Obligations — Obligation de coopération loyale avec les institutions communautaires

(Art. 10 CE)

3. Recours en indemnité — Délai de prescription — Point de départ

(Art. 288, al. 2, CE)

4. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Illicéité — Préjudice — Lien de causalité

(Art. 235 CE et 288, al. 2 et 3, CE)

1. En vertu des articles 7 CE et 220 CE, le Tribunal ne peut exercer que les compétences qui lui ont été attribuées par le droit communautaire. À défaut d'une telle attribution de compétence, le Tribunal ne saurait statuer sur un recours sans étendre sa compétence juridictionnelle aux litiges auxquels la Communauté est partie et dont la compétence relève, selon l'article 240 CE, des juridictions nationales.

S'agissant d'une action en contrefaçon tendant à faire constater que la Banque centrale européenne a violé les droits conférés par un brevet européen relatif, notamment, à des éléments de protection contre la contrefaçon de billets de banque, la compétence pour constater l'existence de cette contrefaçon relève des juridictions nationales et non du Tribunal.

En effet, aucune disposition de droit communautaire ne confère au Tribunal la compétence pour statuer en matière de contrefaçon de brevets. L'action en contrefaçon de brevets ne figure pas parmi les voies de recours dont la compétence est attribuée aux juridictions communautaires par les articles 220 CE à 241 CE. Par ailleurs, le droit national des brevets, à la différence d'autres droits de propriété intellectuelle, tels que le droit national des marques, n'a fait l'objet d'aucune harmonisation communautaire. S'agissant d'un domaine dans lequel la Communauté n'a pas encore légiféré et qui, par conséquent, relève de la compétence des États membres, la protection de certains droits de propriété intellectuelle, tels que les brevets, et les mesures prises à cette fin par les autorités judiciaires ne relèvent pas du droit communautaire.

(cf. points 50-51, 56-57, 71)

2. Le Tribunal ne saurait mettre en cause la légitimité d'un titre national de propriété industrielle sans porter atteinte au principe de coopération loyale qui, en vertu de l'article 10 CE, doit régir les relations entre les États membres et les institutions communautaires et qui non seulement oblige les États membres à prendre toutes les mesures propres à garantir la portée et l'efficacité du droit communautaire, mais impose également aux institutions communautaires des devoirs réciproques de coopération loyale avec les États membres.

(cf. point 70)

3. Le délai de prescription de l'action en responsabilité non contractuelle de la Communauté ne saurait commencer à courir avant que ne soient réunies toutes les conditions auxquelles se trouve subordonnée l'obligation de réparation. Dans le cadre d'une contrefaçon d'un brevet européen reprochée à la Banque centrale européenne, le délai de prescription de l'action en responsabilité du titulaire du brevet contre la Communauté ne saurait commencer à courir qu'à compter du moment où il aura obtenu une constatation par les juridictions nationales compétentes de l'existence de la contrefaçon dont il accuse la Banque.

(cf. point 75)

4. L'engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté au sens de l'article 288, deuxième alinéa, CE pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d'un ensemble de conditions, à savoir l'illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l'existence d'un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué.

S'agissant de la condition tenant à l'illégalité d'un comportement reproché à la Banque centrale européenne et consistant dans la contrefaçon d'un brevet, ce n'est que sur la base d'une décision d'une autorité nationale compétente constatant l'existence de la contrefaçon par la Banque que le Tribunal serait en mesure de juger si ladite contrefaçon est susceptible d'engager la responsabilité de la Communauté.

(cf. points 80-81)







ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

5 septembre 2007 (*)

« Union monétaire − Émission de billets de banque en euros − Prétendue utilisation d’une invention brevetée destinée à éviter la contrefaçon − Action en contrefaçon d’un brevet européen– Incompétence du Tribunal – Irrecevabilité – Recours en indemnité »

Dans l’affaire T‑295/05,

Document Security Systems, Inc., établie à Rochester, New York (États-Unis), représenté par Mme L. Cohen, MM. H. Sheraton, et B. Uphoff, solicitors, et M. C. Stanbrook, QC,

partie requérante,

contre

Banque centrale européenne (BCE), représentée par Mme C. Zilioli et M. P. Machado, en qualité d’agents, assistés de Mes E. Garayar Gutiérrez et G. de Ulloa y Suelves, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet une action en contrefaçon tendant à faire constater que la BCE a violé les droits conférés par un brevet européen de la requérante et une demande en réparation du préjudice que la requérante prétend avoir subi comme conséquence de la violation du brevet,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et V. Ciucă, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

Cadre juridique

Législation communautaire

1 L’article 235 CE dispose :

« La Cour de justice est compétente pour connaître des litiges relatifs à la réparation des dommages visés à l’article 288, deuxième alinéa. »

2 L’article 288, deuxième et troisième alinéas, CE prévoit :

« En matière de responsabilité non contractuelle, la Communauté doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des États membres, les dommages causés par ses institutions ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions.

Le deuxième alinéa s’applique selon les mêmes conditions aux dommages causés par la [Banque centrale européenne] ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions. »

3 L’article 35, paragraphe 3, du protocole sur les statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne annexé au traité instituant la Communauté européenne (JO 1992, C 191, p. 68, ci-après le « statut de la BCE »), tel que révisé et modifié, dispose :

« La BCE est soumise au régime de responsabilité prévu à l’article 288 du traité [...] »

Convention sur le brevet européen

4 La convention sur la délivrance de brevets européens du 5 octobre 1973 (également appelée « convention sur le brevet européen » ou « convention de Munich », ci-après la « CBE »), telle que modifiée par l’acte portant révision de l’article 63 de la CBE du 17 décembre 1991 et par les décisions du conseil d’administration de l’Organisation européenne des brevets en date du 21 décembre 1978, du 13 décembre 1994, du 20 octobre 1995, du 5 décembre 1996, du 10 décembre 1998 et du 27 octobre 2005 et comprenant les dispositions de l’acte portant révision de la CBE du 29 novembre 2000 qui s’appliquent à titre provisoire, est un traité international multilatéral qui ne relève pas du droit communautaire et dont l’objet est de mettre en place une procédure simplifiée d’obtention de la protection par brevet en Europe pour un certain nombre de pays. La CBE est entrée en vigueur le 7 octobre 1977 et, à l’heure actuelle, a été ratifiée par 32 États, parmi lesquels tous les États membres de l’Union européenne.

5 L’article 4 de la CBE a institué l’Organisation européenne des brevets qui a pour tâche de délivrer les brevets européens. Cette tâche est exécutée par l’un des ses organes, à savoir l’Office européen des brevets (ci-après l’« Office »).

6 L’article 2, paragraphe 2, de la CBE dispose que, « [d]ans chacun des États contractants pour lesquels il est délivré, le brevet européen a les mêmes effets et est soumis au même régime qu’un brevet national délivré dans cet État, pour autant que la présente convention n’en dispose pas autrement ».

7 L’article 64 de la CBE prévoit :

« 1. Sous réserve du paragraphe 2, le brevet européen confère à son titulaire, à compter du jour de la publication de la mention de sa délivrance et dans chacun des États contractants pour lesquels il a été délivré, les mêmes droits que lui conférerait un brevet national délivré dans cet État.

2. Si l’objet du brevet européen porte sur un procédé, les droits conférés par ce brevet s’étendent aux produits obtenus directement par ce procédé.

3. Toute contrefaçon du brevet européen est appréciée conformément aux dispositions de la législation nationale. »

8 La CBE contient quelques règles applicables dans tous les États contractants. Ces règles communes sont celles relatives aux critères de brevetabilité (articles 52 à 57 de la CBE), aux causes de nullité d’un brevet communautaire (article 138 de la CBE, voir ci-après) ainsi qu’à la portée et à la durée de la protection du brevet (article 63, article 64, paragraphe 2, et article 69 de la CBE).

9 L’article 138 de la CBE prévoit les cas dans lesquels un brevet européen peut être déclaré nul, en vertu de la législation d’un État contractant et avec effet sur le territoire de cet État.

Faits à l’origine du litige

10 La requérante est une société de droit américaine qui, en 2004, serait devenue titulaire d’un brevet européen relatif, notamment, à des éléments de protection contre la contrefaçon de billets de banque. Cette invention serait due à M...

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