R.M. y E.M. contra Eesti Vabariik (Põllumajanduse Registrite ja Informatsiooni Amet).

JurisdictionEuropean Union
Celex Number62022CJ0437
ECLIECLI:EU:C:2024:176
Date29 February 2024
Docket NumberC-437/22
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

29 février 2024 (*)

« Renvoi préjudiciel – Agriculture – Politique agricole commune – Soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) – Protection des intérêts financiers de l’Union européenne – Règlement (CE, Euratom) no 2988/95 – Article 7 – Mesures et sanctions administratives – Règlement no 1306/2013 – Articles 54 et 56 – Règlement délégué no 640/2014 – Article 35 – Recouvrement des sommes indûment versées auprès des personnes ayant participé à la réalisation de l’irrégularité – Notion de “bénéficiaire” »

Dans l’affaire C‑437/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Riigikohus (Cour suprême, Estonie), par décision du 1er juillet 2022, parvenue à la Cour le 4 juillet 2022, dans la procédure pénale contre

R.M.,

E.M.,

en présence de :

Eesti Vabariik (Põllumajanduse Registrite ja Informatsiooni Amet),

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. T. von Danwitz, P. G. Xuereb (rapporteur), A. Kumin et Mme I. Ziemele, juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour le gouvernement estonien, par Mme M. Kriisa, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement danois, par Mme C. Maertens, en qualité d’agent, assistée de Me P. Biering, advokat,

– pour la Commission européenne, par Mmes F. Blanc, E. Randvere et M. A. Sauka, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 octobre 2023,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 7 du règlement (CE, Euratom) nº 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO 1995, L 312, p. 1), de l’article 54, paragraphe 1, et de l’article 56, premier alinéa, du règlement (UE) nº 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) nº 352/78, (CE) nº 165/94, (CE) nº 2799/98, (CE) nº 814/2000, (CE) nº 1290/2005 et (CE) nº 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549, et rectificatif JO 2016, L 130, p. 13), ainsi que de l’article 35, paragraphe 6, du règlement délégué (UE) nº 640/2014 de la Commission, du 11 mars 2014, complétant le règlement (UE) nº 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les conditions relatives au refus ou au retrait des paiements et les sanctions administratives applicables aux paiements directs, au soutien au développement rural et à la conditionnalité (JO 2014, L 181, p. 48, et rectificatif JO 2015, L 209, p. 48).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée en Estonie contre R.M. et E.M., accusés, respectivement, d’être l’auteur de trois fraudes aux subventions au bénéfice de X OÜ (ci-après la « société X »), et la coauteure de deux de ces fraudes.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement no 2988/95

3 Le quatrième considérant du règlement nº 2988/95 énonce :

« [C]onsidérant que l’efficacité de la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés requiert la mise en place d’un cadre juridique commun à tous les domaines couverts par les politiques communautaires ».

4 L’article 1er de ce règlement prévoit :

« 1. Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire.

2. Est constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit communautaire résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue. »

5 L’article 2 dudit règlement dispose :

« 1. Les contrôles et les mesures et sanctions administratives sont institués dans la mesure où ils sont nécessaires pour assurer l’application correcte du droit communautaire. Ils doivent revêtir un caractère effectif, proportionné et dissuasif, afin d’assurer une protection adéquate des intérêts financiers des Communautés.

[...]

3. Les dispositions du droit communautaire déterminent la nature et la portée des mesures et sanctions administratives nécessaires à l’application correcte de la réglementation considérée en fonction de la nature et de la gravité de l’irrégularité, du bénéfice accordé ou de l’avantage reçu et du degré de responsabilité.

4. Sous réserve du droit communautaire applicable, les procédures relatives à l’application des contrôles et des mesures et sanctions communautaires sont régies par le droit des États membres. »

6 L’article 4 du même règlement, qui précise la portée de la notion de « mesures administratives », visée à l’article 2 de celui-ci, est libellé comme suit :

« 1. Toute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l’avantage indûment obtenu :

– par l’obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus,

– par la perte totale ou partielle de la garantie constituée à l’appui de la demande d’un avantage octroyé ou lors de la perception d’une avance.

[...]

4. Les mesures prévues par le présent article ne sont pas considérées comme des sanctions. »

7 L’article 5 du règlement nº 2988/95, qui précise la portée de la notion de « sanctions administratives », visée à l’article 2 de celui-ci, dispose, à son paragraphe 1, que les irrégularités intentionnelles ou causées par négligence peuvent conduire aux sanctions administratives prévues à cette disposition, notamment au paiement d’une amende administrative.

8 L’article 7 de ce règlement prévoit :

« Les mesures et sanctions administratives communautaires peuvent s’appliquer aux opérateurs économiques visés à l’article 1er, à savoir les personnes physiques ou morales, ainsi que les autres entités auxquelles le droit national reconnaît la capacité juridique, qui ont commis l’irrégularité. Elles peuvent également s’appliquer aux personnes qui ont participé à la réalisation de l’irrégularité, ainsi qu’à celles qui sont tenues de répondre de l’irrégularité ou d’éviter qu’elle soit commise. »

Le règlement no 1306/2013

9 Le considérant 39 du règlement nº 1306/2013 énonçait :

« Afin de protéger les intérêts financiers du budget de l’Union [européenne], il convient que les États membres arrêtent des mesures afin de s’assurer que les opérations financées par [le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader)] ont effectivement lieu et sont correctement exécutées. Il est également nécessaire que les États membres préviennent, détectent et traitent efficacement toute irrégularité ou tout cas de non-respect de leurs obligations de la part des bénéficiaires. Il importe à cette fin que le [règlement nº 2988/95] s’applique. En cas d’infraction à la législation agricole sectorielle, si des actes juridiques de l’Union n’ont pas fixé de règles précises en matière de sanctions administratives, les États membres devraient imposer des sanctions nationales qui doivent être effectives, dissuasives et proportionnées. »

10 L’article 2, paragraphe 1, sous g), de ce règlement définissait la notion d’« irrégularité », au sens de celui-ci, comme étant une irrégularité au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 2988/95.

11 L’article 54 dudit règlement, intitulé « Dispositions communes », prévoyait :

« 1. Pour tout paiement indu résultant d’irrégularités ou de négligences, les États membres exigent un recouvrement auprès du bénéficiaire dans un délai de 18 mois suivant l’approbation et, le cas échéant, la réception par l’organisme payeur ou l’organisme chargé du recouvrement, d’un rapport de contrôle ou document similaire, indiquant l’existence d’une irrégularité. Parallèlement à la demande de recouvrement, les montants correspondants sont inscrits au grand livre des débiteurs de l’organisme payeur.

[...]

3. P our des motifs dûment justifiés, les États membres peuvent décider de ne pas poursuivre le recouvrement. Cette décision ne peut être prise que dans les cas suivants :

[...]

b) lorsque le recouvrement s’avère impossible à cause de l’insolvabilité du débiteur ou des personnes juridiquement responsables de l’irrégularité, constatée et admise conformément au droit national de l’État membre concerné.

[...] »

12 L’article 56 du même règlement, intitulé « Dispositions spécifiques au Feader », disposait, à son premier alinéa :

« Les États membres effectuent les redressements financiers résultant des irrégularités ou des négligences détectées dans les opérations ou les programmes de développement rural par la suppression totale ou partielle du financement de l’Union concerné. Les États membres prennent en considération la nature et la gravité des irrégularités constatées, ainsi que le niveau de la perte financière pour le Feader. »

13 L’article 58 du règlement nº 1306/2013, intitulé « Protection des intérêts financiers de l’Union », prévoyait, à son paragraphe 1 :

« Les États membres prennent, dans le cadre de la [politique agricole commune (PAC)], toutes les dispositions législatives, réglementaires et administratives, ainsi que toute autre mesure nécessaire pour assurer une protection efficace des intérêts financiers de l’Union, en particulier pour :

[...]

e) recouvrer les paiements indus et les intérêts et engager les procédures judiciaires nécessaires à cette fin, le cas échéant. »

14 L’article 92...

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