TL y WE contra Mandataire liquidateur de Getin Noble Bank S.A., anciennement Getin Noble Bank S.A.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2023:992
Date14 December 2023
Docket NumberC-28/22
Celex Number62022CJ0028
CourtCourt of Justice (European Union)
62022CJ0028

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

14 décembre 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Article 6, paragraphe 1, et article 7, paragraphe 1 – Effets de la constatation du caractère abusif d’une clause – Contrat de prêt hypothécaire indexé sur une devise étrangère contenant des clauses abusives concernant le taux de change – Nullité de ce contrat – Actions en restitution – Délai de prescription »

Dans l’affaire C‑28/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie, Pologne), par décision du 19 novembre 2021, parvenue à la Cour le 12 janvier 2022, dans la procédure

TL,

WE

contre

Mandataire liquidateur de Getin Noble Bank S.A., anciennement Getin Noble Bank S.A.,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de Mme O. Spineanu‑Matei, présidente de chambre, M. S. Rodin (rapporteur) et Mme L. S. Rossi, juges,

avocat général : M. A. M. Collins,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour WE et TL, par Me M. Woźniak, radca prawny,

pour le mandataire liquidateur de Getin Noble Bank S.A., anciennement Getin Noble Bank S.A., initialement par Mes Ł. Hejmej, M. Przygodzka et A. Szczęśniak, adwokaci, puis par M. M. Pugowski, aplikant radcowski et Mes J. Szewczak et Ł. Żak, adwokaci,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna et Mme S. Żyrek, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. N. Ruiz García et Mme A. Szmytkowska, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 1, et de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre du litige opposant TL et WE au mandataire liquidateur de Getin Noble Bank S.A., anciennement Getin Noble Bank S.A., au sujet du remboursement de sommes versées à cette dernière au titre d’un contrat de prêt hypothécaire annulé au motif qu’il contenait des clauses abusives.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Le dixième considérant de la directive 93/13 énonce :

« considérant qu’une protection plus efficace du consommateur peut être obtenue par l’adoption de règles uniformes concernant les clauses abusives ; [...] »

4

L’article 6, paragraphe 1, de cette directive est ainsi libellé :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

5

L’article 7, paragraphe 1, de ladite directive prévoit :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

Le droit polonais

6

L’article 117 de l’ustawa – Kodeks cywilny (loi portant code civil), du 23 avril 1964 (Dz. U. no 16, position 93), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « code civil »), énonce :

« §1. Sous réserve des exceptions prévues par la loi, les créances pécuniaires sont soumises à un délai de prescription.

§2. Au terme du délai de prescription, le débiteur peut se soustraire à son obligation, sauf s’il renonce à invoquer la prescription. Toutefois, la renonciation à la prescription avant l’expiration du délai est nulle.

§21. Après expiration du délai de prescription, il n’est plus possible de faire valoir une créance contre un consommateur. »

7

L’article 1171 de ce code prévoit :

« §1. Dans des cas exceptionnels, la juridiction peut, après avoir mis en balance les intérêts des parties, ne pas tenir compte de l’expiration du délai de prescription d’une action contre un consommateur si l’équité l’exige.

§2. Dans l’exercice du pouvoir visé au paragraphe 1, la juridiction doit notamment prendre en considération :

1)

la durée du délai de prescription ;

2)

la durée de la période entre l’expiration du délai de prescription et l’introduction de la demande ;

3)

la nature des circonstances qui ont fait que le créancier n’a pas fait valoir sa créance, y compris l’incidence du comportement du débiteur sur le retard pris par le créancier pour faire valoir sa demande. »

8

L’article 118 dudit code, dans sa version en vigueur jusqu’au 8 juillet 2018, se lisait comme suit :

« Sauf clause spécifique contraire, le délai de prescription est de dix ans, et de trois ans pour les créances sur des paiements périodiques et les créances liées à l’exercice d’une activité commerciale. »

9

L’article 118 du même code, dans sa version en vigueur depuis le 8 juillet 2018, énonce :

« Sauf clause spécifique contraire, le délai de prescription est de six ans, et de trois ans pour les créances sur des paiements périodiques et les créances liées à l’exercice d’une activité commerciale. Toutefois, le délai de prescription expire le dernier jour de l’année civile, sauf s’il est inférieur à deux ans. »

10

Aux termes de l’article 120, paragraphe 1, du code civil :

« Le délai de prescription commence à courir le jour où la créance est devenue exigible. Si l’exigibilité d’une créance dépend de l’accomplissement d’un acte spécifique par le titulaire du droit, le délai commence à courir à partir de la date à laquelle la créance serait devenue exigible si le titulaire du droit avait accompli l’acte dans les meilleurs délais. »

11

L’article 355 de ce code est libellé comme suit :

« §1. Le débiteur doit agir en bon père de famille (devoir de diligence).

§2. Pour définir le devoir de diligence dans le cadre d’une activité économique, il faut tenir compte de la nature professionnelle de cette activité. »

12

L’article 3851 dudit code dispose :

« §1. Les clauses d’un contrat conclu avec un consommateur qui n’ont pas fait l’objet d’une négociation individuelle ne lient pas le consommateur lorsqu’elles définissent les droits et obligations de celui-ci d’une façon contraire aux bonnes mœurs, en portant manifestement atteinte à ses intérêts (clauses contractuelles illicites). La présente disposition n’affecte pas les clauses qui définissent les obligations principales des parties, dont le prix ou la rémunération, si elles sont formulées de manière non équivoque.

§2. Lorsqu’une clause du contrat ne lie pas le consommateur en application du paragraphe 1, les parties restent liées par les autres clauses du contrat.

§3. Les clauses d’un contrat qui n’ont pas fait l’objet d’une négociation individuelle sont des clauses contractuelles sur le contenu desquelles le consommateur n’a pas eu d’influence réelle. Il s’agit en particulier des clauses contractuelles reprises d’un modèle de contrat proposé au consommateur par le cocontractant.

§4. Il appartient à quiconque allègue qu’une clause a été négociée individuellement d’apporter la preuve de cette allégation. »

13

L’article 405 du même code prévoit :

« Toute personne qui, sans base juridique, a obtenu un avantage patrimonial aux dépens d’une autre personne est tenue de fournir l’avantage en nature et, si cela n’est pas possible, d’en restituer la valeur. »

14

L’article 410 du code civil se lit comme suit :

« §1. Les dispositions des articles précédents s’appliquent notamment en cas de prestation indue.

§2. Une prestation est indue si la personne qui l’a fournie n’était absolument pas tenue de la fournir ou n’était pas tenue de la fournir à la personne à qui elle a été fournie, ou si le fondement de la prestation a disparu ou si le but visé par la prestation n’a pas été atteint, ou si l’acte juridique exigeant la prestation était nul et n’est pas devenu valable après que la prestation a été fournie. »

15

Aux termes de l’article 455 de ce code :

« Si le délai d’exécution d’une prestation n’est pas précisé ou ne découle pas de la nature de l’obligation, celle-ci doit être exécutée sans délai après que le débiteur a été invité à s’exécuter. »

16

L’article 481, paragraphe 1, dudit code énonce :

« Si un débiteur est en retard dans l’exécution d’une prestation pécuniaire, le créancier peut exiger des intérêts moratoires, même s’il n’a subi aucun préjudice et même si le retard est dû à des circonstances dont le débiteur n’est pas responsable. »

17

L’article 496 du même code prévoit :

« Si, à la suite de la résiliation du contrat, les parties doivent restituer des contreparties, chacune d’elles dispose d’un droit de rétention jusqu’à ce que l’autre partie offre de restituer la prestation obtenue ou garantisse le droit à restitution. »

18

L’article 497 du code civil est libellé comme suit :

« L’article précédent s’applique mutatis mutandis en cas de résiliation ou de nullité du contrat. »

19

L’article 5, paragraphes 1, 3 et 4, de l’ustawa – Kodeks cywilny oraz niektórych innych ustaw (loi portant modification de la loi établissant le...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT