Ovidio Rodríguez Mayor and Others v Succession vacante de Rafael de las Heras Dávila and Sagrario de las Heras Dávila.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date10 December 2009

Affaire C-323/08

Ovidio Rodríguez Mayor e.a.

contre

Herencia yacente de Rafael de las Heras Dávila e.a.

(demande de décision préjudicielle, introduite par

le Tribunal Superior de Justicia de Madrid)

«Procédure préjudicielle — Protection des travailleurs — Licenciements collectifs — Directive 98/59/CE — Cessation de contrats de travail en raison du décès de l’employeur»

Sommaire de l'arrêt

1. Questions préjudicielles — Compétence de la Cour — Limites

(Art. 234 CE; directive du Conseil 98/59, art. 1er et 5)

2. Politique sociale — Rapprochement des législations — Licenciements collectifs — Directive 98/59 — Notion de licenciement collectif

(Directive du Conseil 98/59, art. 1er, § 1, al. 1, a))

3. Politique sociale — Rapprochement des législations — Licenciements collectifs — Directive 98/59 — Champ d'application

(Directive du Conseil 98/59)

1. La directive 98/59, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs, prévoit, à son article 5, qu’elle ne porte pas atteinte à la faculté des États membres d’appliquer ou d’introduire des dispositions législatives, réglementaires ou administratives plus favorables aux travailleurs, ou de permettre ou de favoriser l’application de dispositions conventionnelles plus favorables à ceux-ci.

Or, dès lors qu’un législateur national a choisi d’englober dans la notion de licenciements collectifs, au sens de cette directive, des cas ne relevant pas du champ d’application de celle-ci, tels que certains types de cessation de contrat de travail concernant un nombre de travailleurs inférieur aux seuils prévus à l’article 1er de la directive 98/59, tout en tenant à l’écart de ladite notion des cas tels que ceux où la cessation des contrats de travail de l’ensemble du personnel, pouvant concerner un même nombre de travailleurs, intervient en raison du décès de l’employeur, il existe un intérêt communautaire certain à ce que, pour éviter des divergences d’interprétation futures, cette notion ainsi que les solutions du droit communautaire qui y sont attachées reçoivent une interprétation uniforme, quelles que soient les conditions dans lesquelles elles sont invoquées.

(cf. points 23, 27-28)

2. L’article 1er, paragraphe 1, de la directive 98/59, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale selon laquelle la cessation des contrats de travail de plusieurs travailleurs, dont l’employeur est une personne physique, en raison du décès de cet employeur n’est pas qualifiée de licenciement collectif.

En effet, la notion de licenciements collectifs au sens de l’article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, sous a), de ladite directive présuppose l’existence d’un employeur ayant envisagé de tels licenciements et qui soit en mesure, d’une part, d’accomplir, dans cette perspective, les actes visés aux articles 2 et 3 de ladite directive et, d’autre part, d’effectuer, le cas échéant, de tels licenciements.

Par ailleurs, l'objectif principal de la directive 98/59, qui est de faire précéder les licenciements collectifs d’une consultation des représentants des travailleurs et de l’information de l’autorité publique compétente, ne saurait être atteint en cas de qualification en tant que «licenciement collectif» de la cessation des contrats de travail de l’ensemble du personnel d’une entreprise exploitée par une personne physique en raison de l’arrêt des activités de cette entreprise résultant du décès de l’employeur, étant donné qu’une telle consultation ne saurait avoir lieu et qu’il ne serait possible, ainsi, ni d’éviter ou de réduire les cessations de contrat de travail ni d’en atténuer les conséquences.

(cf. points 41, 44, 53, disp. 1)

3. La directive 98/59, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs, ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui prévoit des indemnités différentes selon que les travailleurs ont perdu leur emploi par suite du décès de l’employeur ou d’un licenciement collectif.

En effet, d’une part, la cessation de contrats de travail liée au décès d’un employeur qui est une personne physique ne relève pas de la notion de licenciements collectifs au sens de la directive 98/59. D’autre part, ladite directive n’assure qu’une harmonisation partielle des règles de protection des travailleurs en cas de licenciements collectifs et ne vise pas à établir un mécanisme de compensation financière générale au niveau communautaire en cas de perte d’emploi. Dans ce contexte, la question de l’étendue de l’indemnisation des travailleurs en cas de cessation de leur relation de travail ne relève pas de l’application de ladite directive.

(cf. points 55-57, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

10 décembre 2009 (*)

«Procédure préjudicielle – Protection des travailleurs – Licenciements collectifs – Directive 98/59/CE – Cessation de contrats de travail en raison du décès de l’employeur»

Dans l’affaire C‑323/08,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Tribunal Superior de Justicia de Madrid (Espagne), par décision du 14 juillet 2008, parvenue à la Cour le 16 juillet 2008, dans la procédure

Ovidio Rodríguez Mayor e.a.

contre

Herencia yacente de Rafael de las Heras Dávila e.a.,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de la troisième chambre, faisant fonction de président de la quatrième chambre, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. E. Juhász (rapporteur), G. Arestis et T. von Danwitz, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: M. R. Grass,

considérant les observations présentées:

– pour le gouvernement espagnol, par Mme B. Plaza Cruz, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement hongrois, par Mme R. Somssich, M. M. Fehér et Mme K. Veres, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme I. Rao et M. T. de la Mare, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par MM. J. Enegren et R. Vidal Puig, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 juillet 2009,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 1er à 4 et 6 de la directive 98/59/CE du Conseil, du 20 juillet 1998, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs (JO L 225, p. 16).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Rodríguez Mayor et six autres personnes à la Herencia yacente de Rafael de las Heras Dávila (succession vacante de Rafael de las Heras Dávila), aux héritiers de celui-ci et au Fondo de Garantía Salarial (fonds de garantie salariale) au sujet de la demande des premiers d’obtenir une indemnité pour licenciement collectif irrégulier.

Le cadre juridique

Le droit communautaire

3 Figurant dans la section I de la directive 98/59, intitulée «Définitions et champ d’application», l’article 1er, paragraphe 1, de cette dernière dispose:

«Aux fins de l’application de la présente directive:

a) on entend par ‘licenciements collectifs’: les licenciements effectués par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs lorsque le nombre de licenciements intervenus est, selon le choix effectué par les États membres:

i) soit, pour une période de trente jours:

– au moins égal à 10 dans les établissements employant habituellement plus de 20 et moins de 100 travailleurs,

– au moins égal à 10 % du nombre des travailleurs dans les établissements employant habituellement au moins 100 et moins de 300 travailleurs,

– au moins égal à 30 dans les établissements employant habituellement au moins 300 travailleurs;

ii) soit, pour une période de quatre-vingt-dix jours, au moins égal à 20, quel que soit le nombre des travailleurs habituellement employés dans les établissements concernés;

b) on entend par ‘représentants des travailleurs’: les représentants des travailleurs prévus par la législation ou la pratique des États membres.

Pour le calcul du nombre de licenciements prévus au premier alinéa, point a), sont assimilées aux licenciements les cessations du contrat de travail intervenues à l’initiative de l’employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs, à condition que les licenciements soient au moins au nombre de cinq.»

4 L’article 2 de la même directive, contenu dans la section II de celle-ci, intitulée «Information et consultation», prévoit:

«1. Lorsqu’un employeur envisage d’effectuer des licenciements collectifs, il est tenu de procéder, en temps utile, à des consultations avec les représentants des travailleurs en vue d’aboutir à un accord.

2. Les consultations portent au moins sur les possibilités d’éviter ou de réduire les licenciements collectifs ainsi que sur les possibilités d’en atténuer les conséquences par le recours à des mesures sociales d’accompagnement visant notamment l’aide au reclassement ou à la reconversion des travailleurs licenciés.

[…]

3. Afin de permettre aux représentants des travailleurs de formuler des propositions constructives, l’employeur est tenu, en temps utile au cours des consultations:

a) de leur fournir tous renseignements utiles et

b) de leur communiquer, en tout cas, par écrit:

i) les motifs du projet de licenciement;

ii) le nombre et les catégories des travailleurs à licencier;

iii) le nombre et les catégories des travailleurs habituellement employés;

iv) la période au cours de laquelle il est envisagé d’effectuer les licenciements;

v) les critères envisagés pour le choix des travailleurs à licencier dans la mesure où les législations et/ou pratiques nationales en attribuent la compétence à l’employeur;

vi) la méthode de calcul envisagée pour toute indemnité éventuelle de licenciement autre...

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