Arrêts nº T-104/07 of Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes, July 11, 2013

Resolution DateJuly 11, 2013
Issuing OrganizationTribunal de Première Instance des Communautés Européennes
Decision NumberT-104/07

Concurrence – Ententes et abus de position dominante – Marché des diamants bruts – Système de distribution SOC – Décision de rejet d’une plainte – Défaut d’intérêt communautaire – Base juridique – Droits procéduraux d’un plaignant – Accès aux documents – Obligations en matière d’instruction d’une plainte – Effets d’exclusion du marché – Erreur manifeste d’appréciation

Dans les affaires jointes T‑104/07 et T‑339/08,

Belgische Vereniging van handelaars in- en uitvoerders geslepen diamant (BVGD), établie à Anvers (Belgique), représentée initialement par Mes L. Levi et C. Ronzi ainsi que, dans l’affaire T-104/07, par Me G. Vandersanden, puis par Mes Levi et M. Vandenbussche, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. F. Castillo de la Torre, R. Sauer et J. Bourke, puis par MM. Castillo de la Torre et Sauer, en qualité d’agents, assistés, dans l’affaire T‑104/07, initialement de Me S. Drakakakis, avocat, et de M. T. Soames, solicitor, puis de M. Soames, et, dans l’affaire T‑339/08, de M. Soames,

partie défenderesse,

soutenue par

De Beers, établie à Luxembourg (Luxembourg),

De Beers UK Ltd, anciennement The Diamond Trading Co. Ltd, établie à Londres (Royaume-Uni),

représentées initialement par M. W. Allan et Mme S. Horwitz, solicitors, puis par M. Allan, Me J. Ysewyn, avocat, et Mme N. Gràcia Malfeito, solicitor, et enfin par Mme Gràcia Malfeito, Mes B. van de Walle de Ghelcke, J. Marchandise, avocats, et Mme P. Riedel, solicitor,

parties intervenantes,

ayant pour objet des demandes d’annulation des décisions de la Commission du 26 janvier 2007 (affaire COMP/39.221/B‑2 – BVGD/De Beers) et du 5 juin 2008 (affaire COMP/39.221/E-2 – De Beers/DTC Supplier of Choice) rejetant la plainte introduite par la requérante à l’encontre des intervenantes pour violation des articles 81 CE et 82 CE sur le marché des diamants bruts, résultant de l’application par celles-ci des accords de distribution connus sous le nom de « Supplier of Choice » (SOC),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot (rapporteur), président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. A. Popescu, juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 octobre 2012,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1. Affaire COMP/E-3/38.139 et lettre administrative de classement du 16 janvier 2003

1 Le 3 mai 2001, The Diamond Trading Co. Ltd (ci-après la « DTC »), qui appartient au groupe de sociétés De Beers, a notifié à la Commission des Communautés européennes, en vue d’obtenir une attestation négative ou, à défaut, une exemption en application de l’article 81, paragraphe 3, CE, une série d’accords types conclus entre elle et ses clients, dits « sightholders » (« teneurs de vues » ou clients privilégiés) (ci-après les « accords SOC »), visant à ce que soit mis en place un système de fourniture de diamants bruts par elle à ses clients, appelé « Supplier of Choice » (ci-après le « SOC »).

2 Les accords SOC ont pour objectif d’accroître la demande de bijoux en diamants, en favorisant la croissance à long terme en ce qui concerne le niveau de commerce de détail grâce à la création d’un environnement multimarques et de canaux de distribution plus courts. À cette fin, la DTC entend, par le biais des accords SOC, limiter le nombre de « sightholders » sélectionnés, les encourager à coopérer avec des partenaires en aval pour améliorer l’efficacité de la distribution de diamants et à investir dans des marques de distributeur.

3 Les documents fournis dans le cadre de la notification des accords SOC étaient les suivants :

– un questionnaire envoyé aux « sightholders » existants et aux candidats, dit « profil de ‘sightholder’ », destiné à obtenir les informations sur la base desquelles ils seront sélectionnés et évalués ;

– un document intitulé « Critères applicables aux ‘sightholders’ et autres considérations » énonçant des critères prédéfinis auxquels le « sightholder » doit répondre pour être sélectionné ;

– une « Déclaration de principe » (« Policy Statement ») définissant les principes généraux applicables à la relation commerciale entre les contractants ;

– un code de conduite (« Best Practice Principles ») auquel les « sightholders » doivent adhérer, destiné à donner aux consommateurs qui achètent des bijoux en diamant la garantie de l’application de normes professionnelles et éthiques ;

– des conditions de vente qui sont incorporées à chaque contrat.

4 Le 25 juillet 2001, la Commission a ouvert une procédure à l’encontre de la DTC (affaire COMP/E-3/38.139) et lui a adressé une communication des griefs relative aux accords SOC.

5 Les griefs formulés par la Commission étaient tirés de la violation des articles 81 CE et 82 CE. Selon la Commission, la mise en œuvre des accords SOC donnerait au groupe De Beers la possibilité de restreindre l’autonomie commerciale de ses clients. Ces restrictions résulteraient des modalités d’application des critères de sélection, du nombre d’informations confidentielles détaillées demandées aux candidats « sightholders » et des engagements contractuels que ceux-ci seraient tenus de prendre, une fois sélectionnés. En outre, comme ces restrictions seraient imposées par une société en position dominante, la mise en œuvre des accords SOC constituerait également un abus de position dominante.

6 Le 8 octobre 2001, la DTC a répondu aux griefs formulés par la Commission. Elle s’est déclarée prête à étudier les modifications qu’il aurait été possible d’apporter aux accords SOC pour répondre aux préoccupations de la Commission, tout en préservant l’orientation générale du projet.

7 Plusieurs propositions de modification des accords SOC ont été présentées à la Commission. La dernière version des accords SOC modifiés a été transmise à la Commission le 24 septembre 2002. Les principales modifications apportées étaient les suivantes :

– la nomination d’un médiateur (ci-après le « médiateur ») : cette nomination est soumise à l’approbation de la Commission ; le médiateur est compétent pour déterminer si la DTC a mis en œuvre des procédures inappropriées lors de l’adoption des décisions de sélection et d’exclusion des « sightholders » et de celle des décisions concernant l’offre semestrielle de marchandises aux « sightholders » ; toute plainte concernant la sélection ou l’évaluation des « sightholders » peut être adressée au médiateur, lequel peut formuler des recommandations, qui ont un caractère contraignant pour les parties et définitif, sauf si l’affaire est soumise à arbitrage ou fait l’objet d’un recours juridictionnel ; s’ils ne sont pas satisfaits des recommandations du médiateur, la DTC ou le demandeur peuvent porter le litige devant la London Court of International Arbitration (Cour internationale d’arbitrage de Londres) ou saisir les tribunaux ;

– la modification du profil de « sightholder » : le nombre de questions a été réduit et certaines des questions restantes ont été reformulées ; des notes sur la confidentialité ont été insérées dans le questionnaire afin de donner l’assurance à ceux qui le remplissent que les secrets d’affaires seront respectés ;

– la modification des documents intitulés « Critères applicables aux ‘sightholders’ et autres considérations » et « Déclaration de principe » ainsi que des conditions de vente.

8 Par communication du 9 novembre 2002 (JO C 273, p. 2, ci-après la « communication de 2002 »), la Commission a annoncé qu’elle avait l’intention d’adopter une position favorable à l’égard des accords SOC et a donné aux tiers intéressés l’occasion de faire connaître leur point de vue, conformément à l’article 19, paragraphe 3, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204).

9 Le 16 janvier 2003, la Commission a clos la procédure par une lettre administrative de classement, tout en se réservant le droit de la rouvrir « si la situation de fait ou de droit devait changer en ce qui concerne tout aspect essentiel des accords [SOC] affectant la position prise à leur sujet ». La Commission a également souligné qu’elle « veillera[it] à ce que la mise en œuvre des accords SOC n’ait pas pour effet que De Beers limite artificiellement la disponibilité de certaines catégories de diamants sur le marché ou que les critères de sélection/attribution du SOC ne permettent pas aux négociants d’être approvisionnés en quantités de diamants appropriées pour assurer une liquidité suffisante sur le marché ».

2. Plainte de la requérante

10 Le 14 juillet 2005, la requérante, la Belgische Vereniging van handelaars in- en uitvoerders geslepen diamant (BVGD), l’association belge de négociants, d’importateurs et d’exportateurs de diamants taillés, a déposé une plainte contre De Beers et la DTC, alléguant que le SOC mis en place par celles-ci constituait une infraction aux articles 81 CE et 82 CE. Dans ladite plainte, la BVGD a demandé à la Commission de rouvrir la procédure concernant le SOC.

11 Dès 2004, à la suite d’autres plaintes déposées contre le SOC, la Commission a envoyé des demandes de renseignements aux opérateurs ayant la qualité de « sightholders » à cette date, aux anciens « sightholders » qui avaient été écartés en 2003 (ci-après les « ’sightholders’ exclus »), aux courtiers, aux producteurs de diamants bruts et aux bourses diamantaires.

12 La Commission a reçu des réponses confidentielles de 54 « sightholders », de treize « sightholders » exclus, de onze bourses diamantaires, de cinq courtiers et de quatre producteurs de diamants bruts. Des résumés non confidentiels de ces réponses ont été mis à la disposition de la requérante.

13 Le 17 mars 2006, la requérante a présenté des arguments supplémentaires complétant sa plainte, à la suite de l’adoption de la décision 2006/520/CE de la Commission, du 22 février 2006, relative à une procédure d’application de l’article 82 [CE] et de l’article 54 de l’accord EEE (Affaire...

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