Arrêts nº T-548/14 of Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes, December 15, 2016

Resolution DateDecember 15, 2016
Issuing OrganizationTribunal de Première Instance des Communautés Européennes
Decision NumberT-548/14

Union douanière - Importation de produits dérivés du thon en provenance de l’Équateur - Recouvrement a posteriori de droits à l’importation - Demande de non-recouvrement des droits à l’importation - Article 220, paragraphe 2, sous b), et article 236 du règlement (CEE) n° 2913/92 - Avis aux importateurs publié au Journal officiel - Bonne foi - Demande de remise des droits à l’importation - Article 239 du règlement (CEE) n° 2913/92

Dans l’affaire T-548/14,

Royaume d’Espagne, représenté par M. A. Rubio González, abogado del Estado,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. P. Arenas, A. Caeiros, et B.-R. Killmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de l’article 2 de la décision C(2014) 3007 final de la Commission, du 15 mai 2014, constatant que, dans un cas particulier, la remise des droits à l’importation est justifiée pour un certain montant, mais qu’elle ne l’est pas pour un autre montant (REM 03/2013),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz (rapporteur) et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 6 avril 2016,

rend le présent

Arrêt

Faits à l’origine du litige

1 Entre le 30 juin 2009 et le 24 septembre 2010, ACTEMSA SA (ci-après le « redevable »), entreprise établie en Espagne, a importé dans l’Union européenne des produits issus de la transformation du thon, à savoir des conserves de thon et des longes de thon congelées, déclarés comme étant originaires de l’Équateur (ci-après les « importations litigieuses »).

2 Le redevable a sollicité des autorités douanières espagnoles l’application du schéma de préférences tarifaires généralisées (ci-après le « SPG ») pour les importations litigieuses, en produisant à l’appui de ses déclarations douanières des certificats d’origine « formule A », délivrés par les autorités équatoriennes sur la base d’un formulaire déposé par l’exportateur, qui déclarait que l’origine des produits était bien l’Équateur et que les conditions pour obtenir les certificats d’origine étaient remplies.

3 Sur la base des certificats d’origine présentés par le redevable, les autorités douanières espagnoles ont accordé le bénéfice du traitement tarifaire préférentiel aux importations litigieuses.

4 Durant la période des importations litigieuses, rappelée au point 1 ci-dessus, à savoir le 21 mai 2010, la Commission européenne a publié un avis aux importateurs intitulé « Importations dans l’[Union] de thon en provenance de Colombie et d’El Salvador » (JO 2010, C 132, p. 15, ci-après l’« avis »), dont les passages pertinents aux fins de la présente affaire, pour délimiter la portée de l’avis et déterminer s’il concerne les importations litigieuses sont les suivants :

La Commission […] informe les opérateurs de l’Union […] qu’il existe des doutes fondés sur la bonne application du régime préférentiel et sur l’applicabilité des preuves d’origine présentées dans l’Union […] en ce qui concerne les conserves de thon et les longes de thon congelées relevant de la sous-position 1604 14 du SH importées de Colombie et d’El Salvador.

Il ressort de diverses enquêtes que des quantités importantes de conserves de thon et de longes de thon congelées relevant de la sous-position 1604 14 du SH sont déclarées être originaires de Colombie ou d’El Salvador et qu’elles ne bénéficient pas du régime préférentiel.

Par ailleurs, il ne peut être exclu que les importations proviennent d’autres pays bénéficiant du [SPG] et qu’elles ne répondent pas aux règles d’origine du SPG relatives au cumul de l’origine.

5 Du 14 au 30 septembre 2010, une mission conjointe rassemblant des représentants de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et de certains États membres s’est rendue en Équateur pour déterminer l’origine des matières premières utilisées dans la fabrication des produits issus de la transformation du thon provenant de ce pays et exportés vers l’Union avec des certificats d’origine « formule A » émis dans ce pays pour bénéficier du traitement tarifaire préférentiel.

6 Le rapport final de l’OLAF a établi que les autorités équatoriennes avaient délivré à tort des certificats d’origine « formule A » pour des produits à base de thon transformés en Équateur à partir de matières premières capturées par des navires de pêche salvadoriens et panaméens, les règles permettant de considérer que les marchandises étaient originaires d’Équateur n’ayant pas été respectées.

7 L’OLAF a observé, en ce qui concerne le poisson cru capturé par les navires salvadoriens, que les autorités de ce pays n’avaient pas démontré l’origine du poisson conformément aux articles 72 bis et 80 du règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil établissant un code des douanes communautaires (JO 1993, L 253, p. 1), et, en ce qui concerne le poisson cru capturé par les bateaux panaméens, que des certificats d’origine « formule A » avaient été délivrés par les autorités panaméennes, mais que la règle sur la valeur ajoutée prévue à l’article 70 du règlement n° 2454/93 n’avait pas été observée.

8 Dans la mesure où les importations litigieuses ne pouvaient pas bénéficier du traitement tarifaire préférentiel, les autorités espagnoles ont engagé, en 2012, une procédure de recouvrement a posteriori des droits à l’importation et ont appliqué aux opérations concernées le tarif douanier commun de 24 %, de sorte que le montant des droits de douane réclamés s’est élevé à 2 094 850,62 euros.

9 Par plusieurs lettres dont la dernière date du 7 février 2013, le redevable a sollicité des autorités espagnoles la remise des droits à l’importation en vertu de l’article 236, lu en combinaison avec l’article 220, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1, ci-après le « CDC ») ou, à titre subsidiaire, en vertu de l’article 239 du CDC.

10 Par lettre du 18 avril 2013, les autorités espagnoles ont demandé à la Commission de déterminer s’il était justifié de procéder à une remise des droits à l’importation en vertu de l’article 236, lu en combinaison avec l’article 220, paragraphe 2, sous b), du CDC et avec les articles 869 et 871 du règlement n° 2454/93 ou, à titre subsidiaire, en vertu de l’article 239 du CDC et de l’article 905 du règlement n° 2454/93.

11 Par lettres du 8 mai et du 17 septembre 2013, la Commission a demandé des informations complémentaires que les autorités espagnoles ont fournies par lettres du 28 mai et du 21 octobre 2013. Le redevable a pu prendre connaissance de chacune de ces deux demandes de renseignements et formuler des observations relatives à la réponse que les autorités espagnoles envisageaient d’envoyer.

12 Par lettre du 12 février 2014, la Commission a invité le redevable, conformément aux articles 873 et 906 bis du règlement n° 2454/93, à formuler ses remarques sur toute question de droit ou de fait susceptible selon lui de conduire au rejet de sa demande. Le redevable a répondu par lettre du 5 mars 2014, dans laquelle il estimait ne pas devoir supporter la responsabilité d’une erreur des autorités équatoriennes. Il a également souligné sa bonne foi ainsi que son désaccord avec les constatations de la Commission relatives à son manque de diligence pour les importations réalisées après le 21 mai 2010.

13 Le 8 mai 2014, conformément aux articles 873 et 907 du règlement n° 2454/93, un groupe d’experts composé de représentants des États membres s’est réuni afin d’examiner le dossier.

14 Par la décision C(2014) 3007 final, du 15 mai 2014, la Commission a considéré que, dans un cas particulier, la remise des droits à l’importation était justifiée pour un certain montant, mais qu’elle ne l’était pas pour un autre montant (REM 03/2013) (ci-après la « décision attaquée »).

15 Au titre de l’examen de la demande fondée sur l’article 236, lu en combinaison avec l’article 220, paragraphe 2, sous b), du CDC, la Commission a constaté, au considérant 26 de la décision attaquée, que, d’une part, les autorités douanières équatoriennes avaient procédé à une application erronée des règles relatives à la délivrance des certificats d’origine « formule A » et que, d’autre part, le fait que des déclarations inexactes aient été faites lors de la demande de certificats par la société exportatrice ne suffisait pas pour exclure l’existence d’une erreur imputable aux autorités équatoriennes. Par suite, la Commission a estimé devoir vérifier si l’erreur pouvait être raisonnablement décelable par le redevable, en prenant en considération les circonstances du cas d’espèce, la nature de l’erreur, l’expérience professionnelle et la diligence du redevable.

16 S’agissant de la nature de l’erreur, la Commission a estimé, au considérant 28 de la décision attaquée, que la répétition de l’erreur, résultant de la délivrance de certificats d’origine « formule A » par les autorités équatoriennes durant une longue période, plaidait en faveur de la bonne foi du redevable et qu’il n’était pas possible de déterminer si l’erreur ainsi commise aurait pu être décelée par celui-ci pour les importations réalisées avant le 21 mai 2010.

17 Au considérant 29 de la décision attaquée, la Commission a estimé que le redevable était professionnellement très expérimenté, étant actif dans le secteur de l’import-export de produits de la pêche en provenance d’Amérique latine, d’Afrique et de pays de l’Asie de l’Est.

18 S’agissant de la diligence du redevable, la Commission a distingué, aux considérants 30 à 36 de la décision attaquée, les importations réalisées par le redevable avant le 21 mai 2010, date à laquelle elle avait publié l’avis, de celles réalisées après cette date. En se référant au fait que l’avis...

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