Arrêts nº T-57/16 of Tribunal General de la Unión Europea, July 18, 2017

Resolution DateJuly 18, 2017
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-57/16

Dans l’affaire T-57/16,

Chanel SAS, établie à Neuilly-sur-Seine (France), représentée par Me C. Sueiras Villalobos, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Zaera Cuadrado, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

les autres parties à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Li Jing Zhou, demeurant à Fuenlabrada (Espagne),

et

Golden Rose 999 Srl, établie à Rome (Italie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’EUIPO du 18 novembre 2015 (affaire R 2346/2014-3), relative à une procédure de nullité entre, d’une part, Chanel et, d’autre part, M. Li Jing Zhou et Golden Rose 999,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, L. Calvo-Sotelo Ibáñez-Martín et Mme I. Reine (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 février 2016,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 27 avril 2016,

à la suite de l’audience du 7 mars 2017,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1 Le 30 mars 2010, M. Li Jing Zhou a présenté une demande d’enregistrement d’un dessin communautaire à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

2 Le dessin dont l’enregistrement a été demandé est représenté comme suit :

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3 Le dessin représenté au point 2 ci-dessus, enregistré sous le numéro 1689027-0001 et destiné à être appliqué à une « ornementation », relevant de la classe 32 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié, a été publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires n° 97/2010, du 5 mai 2010.

4 Le 24 janvier 2014, l’EUIPO a été informé que Golden Rose 999 Srl était devenue cotitulaire du dessin représenté au point 2 ci-dessus.

5 Le 4 décembre 2013, la requérante, Chanel SAS, a, en vertu de l’article 52 du règlement n° 6/2002, présenté devant la division d’annulation de l’EUIPO une demande de nullité du dessin contesté. Le motif invoqué au soutien de la demande était celui visé à l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, lu en combinaison avec les articles 4 à 9 du même règlement.

6 Dans le mémoire exposant les motifs de la demande en nullité, la requérante a fait valoir que le dessin contesté ne présentait pas un caractère nouveau au sens de l’article 5 du règlement n° 6/2002. Selon elle, le dessin contesté présentait une forte similitude avec son propre monogramme et était presque identique à celui-ci, enregistré comme marque commerciale en France depuis 1989 et représenté comme suit :

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7 En outre, elle a invoqué l’absence de caractère individuel du dessin contesté en vertu de l’article 6 du règlement n° 6/2002.

8 Par décision du 15 juillet 2014, la division d’annulation de l’EUIPO a rejeté la demande en nullité, au motif que le dessin antérieur ne privait pas de nouveauté le dessin contesté, ni de caractère individuel.

9 La division d’annulation a considéré, en substance, quant au caractère nouveau du dessin contesté, que les différences entre les dessins en conflit n’étaient pas insignifiantes. En ce qui concerne le caractère individuel, la division d’annulation a conclu que le dessin contesté créait sur l’utilisateur averti une impression globale différente du dessin antérieur.

10 Le 10 septembre 2014, la requérante a formé un recours devant la chambre de recours de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

11 Par décision du 18 novembre 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. Elle a considéré, en substance, que le dessin contesté n’était manifestement pas identique au monogramme Chanel, que les différences entre les deux dessins ne sauraient être assimilées à des détails insignifiants et que, par conséquent, le dessin contesté était nouveau.

12 Elle a également considéré que le dessin antérieur ne privait pas le dessin contesté de son caractère individuel. La chambre de recours a d’abord examiné le concept d’« utilisateur averti » appliqué à l’espèce. Elle en a conclu que le produit auquel le dessin contesté était appliqué constituait un ornement et que ce produit était utilisé tant par les professionnels que par les utilisateurs finaux comme ornement d’autres produits.

13 La chambre de recours a ensuite observé que le créateur du dessin contesté jouissait d’une grande liberté pour la création de celui-ci. Cependant, la différence existant dans les parties centrales des deux monogrammes constituerait une caractéristique fondamentale, gardée en mémoire par l’utilisateur averti, tel que correctement défini par la division d’annulation. Par conséquent, l’impression d’ensemble produite par chacun des dessins en conflit sur l’utilisateur averti différerait.

Conclusions des parties

14 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

- annuler la décision attaquée ;

- déclarer la nullité du dessin contesté ;

- condamner l’EUIPO aux dépens, de même que toute partie principale ou intervenante à la procédure qui viendrait au soutien de la décision attaquée.

15 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

- rejeter le recours ;

- condamner la requérante aux dépens.

En droit

Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante

16 Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de déclarer la nullité du dessin contesté.

17 Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 61, paragraphe 3, du règlement n° 6/2002, le Tribunal est compétent aussi bien pour annuler que pour réformer la décision attaquée. Par ailleurs, aux termes de l’article 61, paragraphe 6, du même règlement, l’EUIPO est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du Tribunal. Il découle de cette dernière disposition qu’il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’EUIPO, auquel il incombe, en effet, de tirer les conséquences du dispositif et des motifs de l’arrêt du Tribunal [arrêt du 12 mai 2010, Beifa Group/OHMI - Schwan-Stabilo Schwanhäuf‌ler (Instrument d’écriture), T-148/08, EU:T:2010:190, point 40].

18 Il y a donc lieu de rejeter le deuxième chef de conclusions de la requérante comme irrecevable [voir, par analogie, arrêt du 11 février 2009, Bayern Innovativ/OHMI - Life Sciences Partners Perstock (LifeScience), T-413/07, non publié, EU:T:2009:34, point 17].

Sur le fond

19 À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002, lequel s’articule en deux branches, tirées, la première, d’une violation de l’article 6 dudit règlement et, la seconde, d’une violation de l’article 5 de ce même règlement. Il convient d’examiner la première branche de ce moyen unique.

20 Dans le cadre de la première branche du moyen unique, la requérante fait valoir, en substance, que l’analyse de la chambre de recours est manifestement incomplète et que ses conclusions sont entachées de plusieurs erreurs.

21 Selon la requérante, dans le cadre de l’analyse du caractère individuel du dessin contesté, la chambre de recours n’a fait aucune mention du produit auquel ce dessin est destiné à être appliqué. Il aurait également été omis de préciser qui est l’utilisateur averti en l’espèce. La requérante soutient que la chambre de recours aurait dû prendre en compte les preuves fournies, démontrant que les dessins en conflit étaient reproduits sur de véritables articles, ainsi que le fait qu’il n’y avait que des différences minimes entre ces dessins. La requérante fait en outre valoir que le dessin contesté peut être utilisé avec un changement d’orientation de 90 degrés par rapport à sa représentation dans la demande d’enregistrement.

22 Ainsi, malgré la conclusion que le créateur du dessin contesté jouissait d’une grande liberté pour sa création, la chambre de recours aurait néanmoins décidé que les dessins en conflit ne produisaient pas la même impression globale, ce qui constituerait une violation de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.

23 L’EUIPO conclut au rejet de la première branche. À cet égard, tout d’abord, il observe que la requérante ne conteste pas la définition de l’utilisateur averti ni le degré de liberté du créateur du dessin et définit le produit auquel est destiné à être appliqué le dessin contesté comme un ornement.

24 Ensuite, l’EUIPO conclut à l’irrecevabilité de certains éléments de preuve présentés pour la première fois devant le Tribunal ainsi qu’à l’irrecevabilité de l’argument selon lequel la chambre de recours aurait été tenue de prendre en compte les dessins en conflit tels qu’ils sont représentés sur des produits commercialisés. En tout état de cause, une telle prise en compte ne serait pas possible, puisque les conditions d’utilisation des dessins en conflit dépendraient entièrement de la volonté des parties.

25 Enfin, selon l’EUIPO, la chambre de recours a tenu compte de la grande liberté dont avait bénéficié le créateur du dessin contesté. Malgré cette constatation, elle aurait retenu les différences entre les parties centrales des dessins en conflit, sans que ces différences soient contestées par la requérante. Par conséquent, la chambre de recours aurait conclu, à juste titre, que les dessins en conflit ne produisaient pas la même impression globale chez l’utilisateur averti.

26 L’article 6 du règlement n° 6/2002 dispose :

1. Un dessin ou modèle est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public :

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