Kingdom of Belgium v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
Date20 September 2023
CourtGeneral Court (European Union)
62016TJ0131(01)

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)

20 septembre 2023 ( *1 )

« Aides d’État – Régime d’aides mis à exécution par la Belgique – Décision déclarant le régime d’aides incompatible avec le marché intérieur et illégal et ordonnant la récupération de l’aide versée – Décision fiscale anticipée (tax ruling) – Bénéfices imposables – Exonération des bénéfices excédentaires – Avantage – Caractère sélectif – Atteinte à la concurrence – Récupération »

Dans l’affaire T‑131/16 RENV,

Royaume de Belgique, représenté par Mmes C. Pochet et M. Jacobs, en qualité d’agents, assistées de Mes M. Segura et M. Clayton, avocates,

partie requérante,

soutenu par

Irlande, représentée par Mme M. Browne, MM. A. Joyce, D. O’Reilly et Mme J. Quaney, en qualité d’agents, assistés de MM. P. Gallagher, M. Collins, Mme C. Donnelly, SC, MM. B. Doherty et D. Fennelly, Barristers-at-Law,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Stromsky, P.-J. Loewenthal et Mme F. Tomat, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, M. S. Frimodt Nielsen, Mme V. Tomljenović (rapporteure), MM. R. Norkus et W. Valasidis, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’arrêt du 16 septembre 2021, Commission/Belgique et Magnetrol International (C‑337/19 P, EU:C:2021:741),

à la suite de l’audience du 8 février 2023,

rend le présent

Arrêt

1

Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le Royaume de Belgique demande l’annulation de la décision (UE) 2016/1699 de la Commission, du 11 janvier 2016, relative au régime d’aides d’État concernant l’exonération des bénéfices excédentaires SA.37667 (2015/C) (ex 2015/NN) mis en œuvre par la Belgique (JO 2016, L 260, p. 61, ci-après la « décision attaquée »).

I. Antécédents du litige

2

Les faits à l’origine du litige ainsi que le cadre juridique qui y est afférent ont été exposés par le Tribunal aux points 1 à 28 de l’arrêt du 14 février 2019, Belgique et Magnetrol International/Commission (T‑131/16 et T‑263/16, EU:T:2019:91), ainsi que par la Cour aux points 1 à 24 de l’arrêt du 16 septembre 2021, Commission/Belgique et Magnetrol International (C‑337/19 P, EU:C:2021:741). Pour les besoins de la présente procédure, ils peuvent être résumés de la manière suivante.

3

Moyennant une décision anticipée adoptée par le « service des décisions anticipées » du service public fédéral des finances belge, sur le fondement de l’article 185, paragraphe 2, sous b), du code des impôts sur les revenus 1992 (ci-après le « CIR 92 »), lu conjointement avec l’article 20 de la loi du 24 décembre 2002 modifiant le régime des sociétés en matière d’impôts sur les revenus et instituant un système de décision anticipée en matière fiscale (Moniteur belge du 31 décembre 2002, p. 58817, ci-après la « loi du 24 décembre 2002 »), les sociétés résidentes belges faisant partie d’un groupe multinational et les établissements stables belges de sociétés résidentes étrangères faisant partie d’un groupe multinational pouvaient réduire leur base imposable en Belgique en déduisant les bénéfices, considérés comme « excédentaires », des bénéfices qu’ils avaient enregistrés. Par ce système, une partie des bénéfices réalisés par les entités belges bénéficiant d’une décision anticipée n’était pas imposée en Belgique. Selon les autorités fiscales belges, ces bénéfices excédentaires découlaient des synergies, des économies d’échelle ou d’autres avantages résultant du fait de l’appartenance à un groupe multinational et, partant, n’étaient pas imputables aux entités belges en question.

4

À la suite d’une procédure administrative qui a commencé le 19 décembre 2013, par une lettre par laquelle la Commission européenne a demandé au Royaume de Belgique de lui fournir des renseignements concernant le système des décisions fiscales anticipées, relatives aux bénéfices excédentaires, qui se fondaient sur l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92, la Commission a adopté la décision attaquée le 11 janvier 2016.

5

Par la décision attaquée, la Commission a constaté que le régime d’exonération des bénéfices excédentaires, qui se fondait sur l’article 185, paragraphe 2, sous b), du CIR 92, en vertu duquel le Royaume de Belgique avait émis des décisions anticipées en faveur d’entités belges de groupes multinationaux d’entreprises, accordant auxdites entités une exonération pour une partie des bénéfices qu’elles réalisaient, constituait un régime d’aides d’État, accordant un avantage sélectif à ses bénéficiaires, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, qui était incompatible avec le marché intérieur.

6

Ainsi, la Commission a soutenu, à titre principal, que le régime en cause octroyait un avantage sélectif aux bénéficiaires des décisions anticipées, dans la mesure où l’exonération de leurs bénéfices excédentaires appliquée par les autorités fiscales belges dérogeait au système commun de l’impôt sur les sociétés en Belgique. À titre subsidiaire, la Commission a considéré que l’exonération des bénéfices excédentaires pouvait procurer un avantage sélectif aux bénéficiaires des décisions anticipées, dans la mesure où une telle exonération s’écartait du principe de pleine concurrence.

7

Ayant constaté que le régime en cause avait été mis à exécution en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, la Commission a ordonné la récupération des aides ainsi octroyées auprès de leurs bénéficiaires, dont la liste définitive devait être ultérieurement établie par le Royaume de Belgique.

A. Sur l’arrêt initial

8

À la suite de l’adoption de la décision attaquée, le Royaume de Belgique et plusieurs entreprises, identifiées par ladite décision ou ayant bénéficié d’une décision anticipée en vertu du régime en cause, ont introduit des recours tendant à l’annulation de cette décision.

9

Par l’arrêt du 14 février 2019, Belgique et Magnetrol International/Commission (T‑131/16 et T‑263/16, ci-après l’ arrêt initial , EU:T:2019:91), en premier lieu, le Tribunal a écarté comme étant non fondés les moyens tirés, en substance, d’une méconnaissance par la Commission de ses compétences en matière d’aides d’État et d’une ingérence dans les compétences exclusives du Royaume de Belgique en matière de fiscalité directe.

10

En second lieu, le Tribunal a considéré que, en l’espèce, la Commission avait erronément constaté l’existence d’un régime d’aides, en violation de l’article 1er, sous d), du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), et, par conséquent, a annulé la décision attaquée sans qu’il ait estimé nécessaire d’examiner les autres moyens qui avaient été soulevés contre elle.

B. Sur l’arrêt sur pourvoi

11

À la suite du pourvoi introduit à l’encontre de l’arrêt initial, la Cour a rendu son arrêt du 16 septembre 2021, Commission/Belgique et Magnetrol International (C‑337/19 P, ci-après l’ arrêt sur pourvoi , EU:C:2021:741).

12

Dans l’arrêt sur pourvoi, la Cour a considéré que l’arrêt initial était entaché d’erreurs de droit en ce qu’il avait considéré que la Commission avait erronément conclu à l’existence d’un régime d’aides en l’espèce.

13

Sur la base de ces erreurs constatées par la Cour, l’arrêt initial a été annulé.

14

En vertu de l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour a décidé de statuer définitivement sur les moyens qu’elle a considérés comme étant en état d’être jugés, à savoir ceux concernant l’ingérence de la Commission dans les compétences exclusives du Royaume de Belgique en matière de fiscalité directe, d’une part, et ceux relatifs à l’existence d’un régime d’aides, d’autre part.

15

Ainsi, tout d’abord et à l’instar du Tribunal, la Cour a écarté les moyens relatifs à l’ingérence de la Commission dans les compétences exclusives du Royaume de Belgique en matière de fiscalité directe.

16

Ensuite, la Cour a conclu que le régime d’exonération des bénéfices excédentaires pouvait être considéré comme un régime d’aides, au sens de l’article 1er, sous d), du règlement 2015/1589, et que, par conséquent, les moyens relatifs à l’existence d’un régime d’aides devaient être écartés comme étant non fondés.

17

Enfin, s’agissant des autres moyens d’annulation invoqués par le Royaume de Belgique, la Cour a considéré que le litige n’était pas en état d’être jugé et a renvoyé l’affaire au Tribunal pour que celui-ci statue sur lesdits moyens.

II. Procédure et conclusions des parties

18

À la suite de l’arrêt sur pourvoi et conformément à l’article 216, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, le 20 octobre 2021, la présente affaire a été attribuée à la deuxième chambre élargie du Tribunal.

19

Conformément à l’article 217, paragraphe 1, du règlement de procédure, les parties ont déposé des mémoires d’observations écrites dans les délais impartis. En outre, au titre de l’article 217, paragraphe 3, du même règlement, des mémoires complémentaires d’observations écrites ont été déposés par les parties principales.

20

Le Royaume de Belgique conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

à titre subsidiaire, annuler les articles 1 et 2 de la décision attaquée ;

condamner la Commission aux dépens.

21

L’Irlande conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée comme le demande le Royaume...

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