AM and PM v mBank S.A.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2023:692
Date21 September 2023
Docket NumberC-139/22
Celex Number62022CJ0139
CourtCourt of Justice (European Union)
62022CJ0139

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

21 septembre 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Prêt hypothécaire indexé sur une devise étrangère – Critères d’appréciation du caractère abusif d’une clause de conversion – Registre national des clauses de conditions générales jugées illicites – Obligation d’information »

Dans l’affaire C‑139/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sąd Rejonowy dla Warszawy – Śródmieścia w Warszawie (tribunal d’arrondissement de Varsovie – Centre-ville, Pologne), par décision du 18 janvier 2022, parvenue à la Cour le 25 février 2022, dans la procédure

AM,

PM

contre

mBank S.A.,

en présence de :

Rzecznik Finansowy,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de Mme L. S. Rossi, présidente de chambre, M. S. Rodin (rapporteur) et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,

avocat général : M. A. M. Collins,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour AM et PM, par Mes W. Bochenek et T. Zaremba, radcowie prawni,

pour mBank S.A., par Me A. Cudna-Wagner, radca prawny, et Me B. Miąskiewicz, adwokat,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna et Mme S. Żyrek, en qualité d’agents,

pour le gouvernement portugais, par Mmes P. Barros da Costa, A. Cunha, B. Lavrador, L. Medeiros et A. Pimenta, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme I. Galindo Martín, M. S. L. Kalėda, Mme U. Małecka et M. N. Ruiz García, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant AM et PM, deux consommateurs, d’une part, à mBank S.A., d’autre part, au sujet de l’utilisation, par cette dernière, de clauses de conditions générales inscrites au registre national des clauses de conditions générales jugées illicites (ci-après le « registre national des clauses illicites »).

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Le vingt-quatrième considérant de la directive 93/13 énonce :

« [...] les autorités judiciaires et organes administratifs des États membres doivent disposer de moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’application de clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ».

4

L’article 2, sous b), de cette directive prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

b)

“consommateur” : toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle ».

5

L’article 3 de ladite directive dispose :

« 1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

2. Une clause est toujours considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle lorsqu’elle a été rédigée préalablement et que le consommateur n’a, de ce fait, pas pu avoir d’influence sur son contenu, notamment dans le cadre d’un contrat d’adhésion.

Le fait que certains éléments d’une clause ou qu’une clause isolée aient fait l’objet d’une négociation individuelle n’exclut pas l’application du présent article au reste d’un contrat si l’appréciation globale permet de conclure qu’il s’agit malgré tout d’un contrat d’adhésion.

Si le professionnel prétend qu’une clause standardisée a fait l’objet d’une négociation individuelle, la charge de la preuve lui incombe.

3. L’annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives. »

6

Aux termes de l’article 4 de la même directive :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

7

L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 est libellé comme suit :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

8

L’article 7, paragraphes 1 et 2, de cette directive prévoit :

« 1. Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.

2. Les moyens visés au paragraphe 1 comprennent des dispositions permettant à des personnes ou à des organisations ayant, selon la législation nationale, un intérêt légitime à protéger les consommateurs de saisir, selon le droit national, les tribunaux ou les organes administratifs compétents afin qu’ils déterminent si des clauses contractuelles, rédigées en vue d’une utilisation généralisée, ont un caractère abusif et appliquent des moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’utilisation de telles clauses. »

9

L’article 8 de ladite directive dispose :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

Le droit polonais

10

Selon l’article 76 de la Konstytucja Rzeczypospolitej Polskiej (Constitution de la République de Pologne) :

« Les pouvoirs publics protègent les consommateurs, les utilisateurs et les locataires contre les activités qui menacent leur santé, leur vie privée et leur sécurité ainsi que contre les pratiques commerciales déloyales. L’étendue de cette protection est définie par la loi. »

11

L’article 221 de l’ustawa – Kodeks cywilny (loi portant code civil), du 23 avril 1964 (Dz. U. de 1964, no 16, position 93), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « code civil »), prévoit :

« Il convient d’entendre par consommateur toute personne physique qui, pour la conclusion et l’exécution d’un contrat de consommation, n’agit pas dans le cadre de son activité commerciale ou d’une autre activité économique. »

12

L’article 58, paragraphe 1,du code civil dispose :

« Un acte juridique contraire à la loi ou visant à contourner la loi est nul et non avenu, à moins qu’une disposition pertinente n’en dispose autrement, notamment que les dispositions invalides de l’acte juridique concerné soient remplacées par les dispositions pertinentes de la loi. »

13

Aux termes de l’article 3851, paragraphes 1 et 3, de ce code :

« 1. Les clauses d’un contrat conclu avec un consommateur qui n’ont pas fait l’objet d’une négociation individuelle ne lient pas ce consommateur lorsqu’elles définissent les droits et obligations de celui‑ci d’une façon contraire aux bonnes mœurs, en portant manifestement atteinte à ses intérêts (clauses illicites). La présente disposition n’affecte pas les clauses qui définissent les obligations principales des parties, dont le prix ou la rémunération, si elles sont formulées de manière non équivoque.

[...]

3. Les clauses d’un contrat conclu avec un consommateur qui n’ont pas fait l’objet d’une négociation individuelle sont des clauses contractuelles sur le contenu desquelles ce consommateur n’a pu avoir d’influence concrète. Il s’agit en particulier des clauses contractuelles reprises d’un modèle de contrat proposé audit consommateur par le contractant. »

14

L’article 3852 du code civil est libellé comme suit :

« La compatibilité des clauses d’un contrat avec les bonnes mœurs est appréciée au regard de la situation ayant cours à la date de la conclusion de ce contrat, en tenant compte du contenu dudit contrat, des circonstances ayant entouré la conclusion de celui-ci ainsi que des contrats liés au même contrat, dans lequel figurent les dispositions qui font l’objet de l’appréciation. »

15

L’article 47936 de l’ustawa – Kodeks postępowania cywilnego (loi portant code de procédure civile), du 17 novembre 1964 (Dz. U. de 1964, no 43, position 296), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « code de procédure civile »), prévoyait :

« Le Sąd Okręgowy w Warszawie –Sąd Ochrony Konkurencji i Konsumentów (tribunal régional de Varsovie – tribunal de la protection de la concurrence et du consommateur, Pologne), est compétent pour déclarer le caractère illicite de clauses d’un contrat...

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