The Queen contra Ministry of Agriculture, Fisheries and Food, ex parte H. & R. Ecroyd Holdings Ltd y John Rupert Ecroyd.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1996:2
Date11 January 1996
Celex Number61994CC0127
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-127/94
EUR-Lex - 61994C0127 - FR 61994C0127

Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 11 janvier 1996. - The Queen contre Ministry of Agriculture, Fisheries and Food, ex parte H. & R. Ecroyd Holdings Ltd et John Rupert Ecroyd. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice, Queen's Bench Division - Royaume-Uni. - Régime des quotas de production de lait - Octroi des quantités de référence spécifiques - Pouvoirs et/ou obligations des Etats membres. - Affaire C-127/94.

Recueil de jurisprudence 1996 page I-02731


Conclusions de l'avocat général

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1 Par les questions qu'elle vous adresse, la High Court of Justice, Queen's Bench Division, vous invite une nouvelle fois à vous pencher sur la réglementation des quotas laitiers.

2 La présente affaire préjudicielle avait pour origine six recours distincts introduits devant cette juridiction et attaquant autant de décisions par lesquelles le ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation (ci-après le «ministère» ou le «ministère défendeur») avait refusé aux demandeurs l'allocation d'un quota laitier. Cependant, à la suite d'une ordonnance du juge de renvoi retirant les questions relatives à quatre de ces litiges, le président de votre Cour a, par ordonnance du 14 décembre 1994, ordonné la radiation de l'affaire en tant qu'elle concernait les parties à ces litiges. En l'état actuel de la procédure, ne nous sont donc soumises que les questions introduites dans le cadre des deux litiges au principal encore pendants, engagés respectivement par H. & R. Ecroyd Holdings Ltd (ci-après «Ecroyd Ltd») et John Ecroyd.

3 Avant de faire état du cadre factuel de chacune de ces deux affaires, nous ne pouvons faire l'économie d'un rappel aussi bref que possible du cadre réglementaire communautaire.

Cadre juridique

4 L'organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers a été mise en place en 1968, par le règlement (CEE) n_ 804/68 (1). La situation de ce marché étant, dès l'origine, caractérisée par une tendance au déséquilibre entre l'offre et la demande entraînant des excédents structurels, la réglementation communautaire a toujours été adoptée dans le souci de freiner l'accroissement de la production.

5 C'est ainsi que le règlement (CEE) n_ 1078/77 (2) a prévu un certain nombre de mesures visant à la réduction de l'offre. Fut notamment mis en place un système d'octroi de primes aux agriculteurs qui renoncent, par écrit, à commercialiser du lait et des produits laitiers provenant de leur exploitation pour une période de cinq ans (dites «primes de non-commercialisation»).

6 L'article 4, paragraphe 1, de ce règlement prévoyait le montant et le mode de paiement de ces primes de la manière suivante:

«La prime de non-commercialisation est calculée en fonction de la quantité de lait ou de son équivalent en produits laitiers livrés par le producteur pendant l'année calendaire 1976.

[...]

Un montant égal à 50 % de la prime est payé au cours des trois premiers mois de la période de non-commercialisation.

Le solde est versé en deux versements égaux représentant chacun 25 % de la prime au cours de la troisième et de la cinquième année, à condition que le bénéficiaire démontre aux autorités compétentes que les engagements visés à l'article 2 ont été respectés.»

7 L'article 6 de ce même règlement envisageait le régime des transferts. Tout successeur à une exploitation agricole pouvait se voir octroyer le solde de la prime attribuée à son prédécesseur, à condition qu'il s'engageât par écrit à poursuivre l'exécution des obligations souscrites par ce dernier.

8 En 1984, il a été constaté que, en dépit des mesures mises en place en 1977, l'augmentation de la production laitière se poursuivait inexorablement. Des mesures plus rigoureuses étant devenues nécessaires, l'organisation commune des marchés du lait et des produits laitiers a donc été profondément modifiée par l'instauration du régime des prélèvements supplémentaires, dit encore «régime des quotas laitiers».

9 L'article 5 quater du règlement n_ 804/68, qui a été ajouté par l'article 1er du règlement (CEE) n_ 856/84 (3), a institué un système de prélèvements supplémentaires dus par tout producteur, ou tout acheteur de lait, sur les quantités dépassant une quantité de référence individuelle annuelle, cette quantité annuelle de référence étant appelée «quota laitier». Instauré au départ pour une période de cinq ans, ce régime a été prorogé, en 1988 (4), jusqu'au 31 mars 1992. En 1992, le Conseil a, dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune, maintenu le régime des quotas laitiers pour une période de huit ans.

10 En vertu du paragraphe 3 de ce même article 5 quater, la somme des quantités de référence attribuées aux personnes soumises au prélèvement dans un certain État membre ne peut pas dépasser une quantité globale garantie, différente pour chaque État membre, et égale à la somme des quantités de lait livrées à des entreprises traitant ou transformant du lait ou d'autres produits laitiers dans chaque État membre pendant l'année civile 1981, augmentée de 1 %.

11 Les règles générales relatives à l'application du prélèvement supplémentaire ont été établies par le règlement (CEE) n_ 857/84 (5). Au Royaume-Uni, la quantité de référence a été fixée sur la base de l'année 1983.

12 Ce système ne prévoyait pas la possibilité d'octroyer un quota au profit des producteurs qui, du fait de leur participation au régime temporaire de non-commercialisation prévu par le règlement n_ 1078/77, n'avaient pas livré ou vendu de lait au cours de l'année de référence retenue pour l'attribution de quotas (ces producteurs sont communément appelés «producteurs Slom» (6)).

13 Dans ses deux arrêts rendus dans les affaires Mulder (7) et Von Deetzen (8), votre Cour a considéré qu'une telle réglementation, dans la mesure où, précisément, elle ne prévoyait pas l'attribution de quantités de référence aux producteurs Slom, violait la confiance légitime que ces producteurs pouvaient avoir dans le caractère limité des effets du régime auquel ils se soumettaient, et devait donc être invalidée.

14 Afin de se conformer à ces arrêts, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n_ 764/89 (9), qui insère un article 3 bis nouveau dans le règlement n_ 857/84. Cet article prévoit l'attribution provisoire d'une quantité de référence spécifique (communément appelée «quota Slom») à certaines catégories de producteurs qui avaient pris part à des régimes de non-commercialisation et qui remplissaient certaines conditions.

15 Cette attribution d'un quota Slom était prévue sous certaines conditions de délais. C'est ainsi que, en application du nouvel article 3 bis, la période de non-commercialisation devait expirer après le 31 décembre 1983, et la demande d'attribution devait être formulée par le producteur dans un délai de trois mois à compter du 29 mars 1989.

16 Le paragraphe 2 de l'article 3 bis fixait le montant de la quantité de référence spécifique à 60 % de la quantité de lait livrée par le producteur pendant la période de douze mois de calendrier précédant le mois du dépôt de la demande de la prime de non-commercialisation, à condition que le producteur n'eût pas perdu le droit à la prime (règle dite «des 60 %»). Cette disposition prévoyait aussi des règles relatives au montant du quota à accorder, tant au cédant qu'au cessionnaire, dans l'hypothèse d'une cession d'une partie d'exploitation au cours d'une période de non-commercialisation.

17 L'article 3 bis, paragraphe 3, déterminait les conditions dans lesquelles une quantité de référence spécifique provisoire pouvait devenir définitive: nécessité de parvenir à produire 80 % du quota octroyé dans les deux ans suivant le 29 mars 1989, à défaut de quoi le producteur perdait son droit à quota, qui retournait à la réserve communautaire (règle dite du «tout ou rien»).

18 Ne pouvaient toutefois pas bénéficier d'un quota Slom, aux termes de l'article 3 bis, paragraphe 1, deuxième tiret, les producteurs qui avaient par ailleurs déjà obtenu un quota dans les conditions fixées par d'autres dispositions du régime de prélèvement supplémentaire (règle dite «anticumul»).

19 Divers arrêts de votre Cour sont alors intervenus pour invalider ou interpréter certaines de ces dispositions.

20 Dans les affaires Spagl (10) et Pastaetter (11), vous avez ainsi invalidé les paragraphes 1 et 2 de l'article 3 bis, en estimant qu'ils violaient les espérances légitimes des producteurs ayant pris part au régime de non-commercialisation, dès lors que ces dispositions prévoyaient respectivement l'exclusion du bénéfice des quotas Slom aux producteurs dont la période de non-commercialisation expirait avant le 31 décembre 1983 et la règle des 60 %.

21 L'arrêt du 21 mars 1991, Rauh (12) (ci-après l'«arrêt Rauh»), de son côté, apportait une précision sur le régime des transferts. Vous y avez interprété l'article 3 bis en ce sens qu'il permet, dans les conditions qu'il fixe, l'attribution d'une quantité de référence spécifique à un producteur qui a repris une exploitation, par voie d'héritage, ou par voie analogue, après l'expiration d'un engagement de non-commercialisation pris, au titre du règlement n_ 1078/77, par l'auteur de la succession.

22 A la suite de ces arrêts, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n_ 1639/91 (13), modifiant à nouveau la réglementation. En substance, ce règlement:

- supprime la condition de délai qui prévoyait que seuls les producteurs dont l'engagement de non-commercialisation expirait après le 31 décembre 1983 avaient droit à une quantité de référence spécifique;

- supprime la règle des 60 %;

- supprime la règle du tout ou rien (le principe des 80 % est maintenu, mais, s'il n'est pas atteint, le quota ne retourne pas à la réserve communautaire; il est attribué au producteur, pour la part qui a été effectivement produite pendant ces deux ans);

- modifie le régime des transferts...

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