Novartis Farma SpA contra Agenzia Italiana del Farmaco (AIFA) y otros.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:619
Celex Number62017CC0029
Docket NumberC-29/17
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date25 July 2018
62017CC0029

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. HENRIK SAUGMANDSGAARD ØE

présentées le 25 juillet 2018 ( 1 )

Affaire C‑29/17

Novartis Farma SpA

contre

Agenzia Italiana del Farmaco (AIFA),

Roche Italia SpA,

Consiglio Superiore di Sanità

en présence de

Ministero della Salute,

Regione Veneto,

Società Oftalmologica Italiana (SOI)

Associazione Medici Oculisti Italiani (AMOI),

Regione Emilia‑Romagna

[demande de décision préjudicielle formée par le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie)]

« Renvoi préjudiciel – Médicaments – Directive 2001/83/CE – Champ d’application – Exclusion – Article 3, point 1 – Faculté de dérogation – Article 5, paragraphe 1 – Autorisation de mise sur le marché – Article 6, paragraphe 1 – Autorisation de fabrication – Article 40, paragraphes 1 et 2 – Règlement (CE) no 726/2004 – Autorisation de mise sur le marché délivrée à l’issue de la procédure centralisée – Article 3, paragraphe 1 – Prise en charge par le régime national d’assurance des soins de santé d’un médicament utilisé pour un traitement non couvert par son autorisation de mise sur le marché (hors AMM) »

I. Introduction

1.

Par sa demande de décision préjudicielle, le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie) interroge la Cour sur l’interprétation de l’article 3, point 1, de l’article 5, paragraphe 1, et de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/83/CE ( 2 ), des articles 3, 25 et 26 lus en combinaison avec l’annexe du règlement (CE) no 726/2004 ( 3 ), ainsi que de l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 89/105/CEE ( 4 ).

2.

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant la société Novartis Farma SpA à l’Agenzia Italiana del Farmaco (AIFA) (Agence italienne des médicaments) au sujet de la légalité des décisions par lesquelles cette dernière a inclus, dans la liste des médicaments pris en charge par le Servizio Sanitario Nazionale (SSN) (Service national de santé, Italie), un médicament utilisé pour des indications thérapeutiques qui ne figurent pas dans son autorisation de mise sur le marché (ci-après « AMM »).

3.

Ce médicament, l’Avastin, a été autorisé pour le traitement de certains types de cancers. Il est également utilisé pour le traitement d’une maladie répandue de la rétine, la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), bien que l’AMM de ce médicament ne mentionne pas cette indication thérapeutique. Cette utilisation, dite « hors AMM », suppose que l’Avastin soit extrait de son flacon d’origine et reconditionné sous un dosage, sous une présentation et pour une voie d’administration qui ne sont pas non plus couverts par son AMM.

4.

Dans le sillage des affaires ayant donné lieu aux arrêts Novartis Pharma ( 5 ) et F. Hoffmann‑La Roche e.a. ( 6 ), la présente affaire porte, pour la troisième fois, à l’attention de la Cour des questions qui tirent leur origine de cette utilisation hors AMM de l’Avastin. Les questions posées par la juridiction de renvoi ont, essentiellement, trait à la comptabilité de la prise en charge par le SSN de ce médicament utilisé hors AMM avec les exigences tirées de la réglementation pharmaceutique de l’Union européenne concernant la mise sur le marché des médicaments. Cette juridiction interroge, de surcroît, la Cour sur la répartition des compétences entre les autorités nationales et celles de l’Union en matière de pharmacovigilance pour les médicaments soumis à la procédure centralisée d’autorisation prévue par le règlement no 726/2004.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. La directive 2001/83

5.

Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2001/83, cette directive « s’applique aux médicaments à usage humain destinés à être mis sur le marché dans les États membres et préparés industriellement ou fabriqués selon une méthode dans laquelle intervient un processus industriel ».

6.

L’article 3 de cette directive est libellé comme suit :

« La présente directive ne s’applique pas :

1)

aux médicaments préparés en pharmacie selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé (dénommés communément formule magistrale) ;

[…] »

7.

L’article 5, paragraphe 1, de ladite directive dispose qu’« [u]n État membre peut, conformément à la législation en vigueur et en vue de répondre à des besoins spéciaux, exclure des dispositions de la présente directive les médicaments fournis pour répondre à une commande loyale et non sollicitée, élaborés conformément aux spécifications d’un professionnel de santé agréé et destinés à ses malades particuliers sous sa responsabilité personnelle directe ».

8.

L’article 6, paragraphe 1, de la même directive prévoit :

« Aucun médicament ne peut être mis sur le marché d’un État membre sans qu’une [AMM] n’ait été délivrée par l’autorité compétente de cet État membre, conformément à la présente directive, ou qu’une autorisation n’ait été délivrée conformément aux dispositions du règlement [no 726/2004] […].

Lorsqu’un médicament a obtenu une première [AMM] conformément au premier alinéa, tout dosage, forme pharmaceutique, voie d’administration et présentation supplémentaires, ainsi que toute modification et extension, doivent également obtenir une autorisation conformément au premier alinéa ou être inclus dans l’[AMM] initiale. Toutes ces [AMM] sont considérées comme faisant partie d’une même autorisation globale [...] »

9.

L’article 8, paragraphe 3, de la directive 2001/83 précise les renseignements et les documents qui doivent accompagner la demande d’AMM. En particulier, la lettre j) de cette disposition désigne le résumé des caractéristiques du produit. Conformément à l’article 11 de cette directive, ce document indique notamment le dosage et la forme pharmaceutique, la composition qualitative et quantitative de tous les composants, les indications thérapeutiques, la posologie ainsi que le mode d’administration du médicament.

10.

L’article 40 de ladite directive est ainsi formulé :

« 1. Les États membres prennent toutes les dispositions utiles pour que la fabrication des médicaments sur leur territoire soit soumise à la possession d’une autorisation [...]

2. L’autorisation visée au paragraphe 1 est exigée tant pour la fabrication totale ou partielle que pour les opérations de division, de conditionnement ou de présentation.

Toutefois, cette autorisation n’est pas exigée pour les préparations, divisions, changements de conditionnement ou présentation, dans la mesure où ces opérations sont exécutées, uniquement en vue de la délivrance au détail, par des pharmaciens dans une officine ou par d’autres personnes légalement autorisées dans les États membres à effectuer lesdites opérations. »

2. La directive 89/105

11.

L’article 1er, paragraphe 3, de la directive 89/105 énonce qu’« [a]ucun élément de [cette] directive n’autorise la commercialisation d’une spécialité pharmaceutique pour laquelle l’autorisation prévue à l’article [6, paragraphe 1] de la directive [2001/83] n’a pas été délivrée ».

3. Le règlement no 726/2004

12.

Le règlement no 726/2004 établit une procédure centralisée pour l’autorisation des médicaments au niveau de l’Union.

13.

En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de ce règlement, « [a]ucun médicament figurant à l’annexe ne peut être mis sur le marché dans [l’Union] sans qu’une [AMM] n’ait été délivrée par [l’Union] conformément [audit] règlement ». Le point 1 de cette annexe inclut les médicaments issus de certains procédés biotechnologiques.

14.

Selon l’article 13, paragraphe 1, du même règlement, l’AMM octroyée au terme de la procédure centralisée est valable dans l’ensemble de l’Union et confère dans chaque État membre les mêmes droits et obligations qu’une AMM délivrée par cet État membre en application de l’article 6 de la directive 2001/83.

15.

L’article 16, paragraphe 2, du règlement no 726/2004 dispose que le titulaire d’une AMM délivrée à l’issue de la procédure centralisée communique immédiatement à l’Agence européenne des médicaments (EMA), à la Commission européenne et aux États membres toute information nouvelle susceptible d’entraîner la modification des renseignements ou des documents visés, notamment, à l’article 8, paragraphe 3, de la directive 2001/83. Les informations à fournir « comprennent les résultats tant positifs que négatifs des essais cliniques ou d’autres études pour toutes les indications et populations, qu’elles figurent ou non dans l’[AMM], ainsi que des données concernant toute utilisation du médicament d’une manière non conforme aux termes de l’[AMM] ».

16.

En outre, les articles 21 à 29 de ce règlement prévoient un système de pharmacovigilance pour les médicaments autorisés au niveau de l’Union.

17.

Ce système comprend, aux termes de l’article 24, paragraphe 1, dudit règlement, la mise en place et la gestion par l’EMA, en collaboration avec les États membres et la Commission, d’une base de données en vue de rassembler des informations portant notamment « sur les effets indésirables suspectés survenant chez l’homme en cas d’utilisation du médicament conformément aux termes de son [AMM], ainsi que lors de toute utilisation non conforme aux termes de l’[AMM] ».

18.

Conformément à l’article 25 du même règlement, « [l’EMA] élabore, en collaboration avec les États membres, des formulaires standards structurés mis en ligne pour la notification d’effets indésirables suspectés par les professionnels de la santé et par les patients [...] ».

19.

L’article 26 du règlement no 726/2004 prévoit l’instauration et la gestion par l’EMA, en collaboration avec les États membres et la Commission, d’un portail web...

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