Grupa Azoty S.A. and Others v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2023:570
Date13 July 2023
Docket NumberC-73/22,C-77/22
Celex Number62022CJ0073
CourtCourt of Justice (European Union)
62022CJ0073

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

13 juillet 2023 ( *1 )

« Pourvoi – Aides d’État – Lignes directrices concernant certaines aides d’État dans le contexte du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre – Secteurs économiques éligibles – Exclusion du secteur de la fabrication de produits azotés et d’engrais – Recours en annulation – Recevabilité – Droit de recours des personnes physiques ou morales – Article 263, quatrième alinéa, TFUE – Condition selon laquelle le requérant doit être directement concerné »

Dans les affaires jointes C‑73/22 P et C‑77/22 P,

ayant pour objet deux pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits respectivement le 3 et le 4 février 2022,

Grupa Azoty S.A., établie à Tarnów (Pologne),

Azomureș SA, établie à Târgu Mureş (Roumanie),

Lipasmata Kavalas LTD Ypokatastima Allodapis, établie à Palaio Fáliro (Grèce),

représentées par Mes D. Haverbeke, L. Ruessmann et P. Sellar, avocats,

parties requérantes dans l’affaire C‑73/22 P,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée initialement par MM. A. Bouchagiar, G. Braga da Cruz et J. Ringborg, puis par MM. A. Bouchagiar et J. Ringborg, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

et

Advansa Manufacturing GmbH, établie à Hamm (Allemagne),

Beaulieu International Group NV, établie à Waregem (Belgique),

Brilen SA, établie à Zaragoza (Espagne),

Cordenka GmbH & Co. KG, établie à Erlenbach am Main (Allemagne),

Dolan GmbH, établie à Kelheim (Allemagne),

Enka International GmbH & Co. KG, établie à Wuppertal (Allemagne),

Glanzstoff Longlaville SAS, établie à Longlaville (France),

Infinited Fiber Company Oy, établie à Espoo (Finlande),

Kelheim Fibres GmbH, établie à Kelheim,

Nurel SA, établie à Zaragoza,

PHP Fibers GmbH, établie à Erlenbach am Main,

Teijin Aramid BV, établie à Arnhem (Pays-Bas),

Thrace Nonwovens & Geosynthetics monoprosopi AVEE mi yfanton yfasmaton kai geosynthetikon proïonton S.A., établie à Magikó (Grèce),

Trevira GmbH, établie à Bobingen (Allemagne),

représentées par Mes D. Haverbeke, L. Ruessmann et P. Sellar, avocats,

parties requérantes dans l’affaire C‑77/22 P,

les autres parties à la procédure étant :

Dralon GmbH, établie à Dormagen (Allemagne),

partie demanderesse en première instance,

Commission européenne, représentée initialement par MM. A. Bouchagiar, G. Braga da Cruz et J. Ringborg, puis par MM. A. Bouchagiar et J. Ringborg, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. C. Lycourgos (rapporteur), président de chambre, Mme L. S. Rossi, MM. J.-C. Bonichot, S. Rodin et Mme O. Spineanu-Matei, juges,

avocat général : M. P. Pikamäe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 2 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1

Par leurs pourvois, Grupa Azoty S.A., Azomureș SA et Lipasmata Kavalas LTD Ypokatastima Allodapis (C‑73/22 P), ainsi que Advansa Manufacturing GmbH, Beaulieu International Group NV, Brilen SA, Cordenka GmbH & Co. KG, Dolan GmbH, Enka International GmbH & Co. KG, Glanzstoff Longlaville SAS, Infinited Fiber Company Oy, Kelheim Fibres GmbH, Nurel SA, PHP Fibers GmbH, Teijin Aramid BV, Thrace Nonwovens & Geosynthetics monoprosopi AVEE mi yfanton yfasmaton kai geosynthetikon proïonton S.A. et Trevira GmbH, (C‑77/22 P) demandent l’annulation, pour les premières, de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 29 novembre 2021, Grupa Azoty e.a./Commission (T‑726/20), et, pour les secondes, de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 29 novembre 2021, Advansa Manufacturing e.a./Commission (T‑741/20) (ci-après, prises ensemble, les « ordonnances attaquées »), par lesquelles le Tribunal a rejeté comme étant irrecevables leurs recours respectifs tendant à l’annulation partielle de la communication de la Commission intitulée « Lignes directrices concernant certaines aides d’État dans le contexte du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre après 2021 » publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 25 septembre 2020 (JO 2020, C 317, p. 5, ci-après les « lignes directrices litigieuses »).

Le cadre juridique

La directive 2003/87

2

La directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 2003, établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil (JO 2003, L 275, p. 32), telle que modifiée par la directive (UE) 2018/410 du Parlement européen et du Conseil, du 14 mars 2018 (JO 2018, L 76, p. 3) (ci-après la « directive 2003/87), a établi un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union (ci-après le « SEQE »).

3

L’article 10 bis, paragraphe 6, de la directive 2003/87 énonce :

« Les États membres devraient adopter des mesures financières [...] en faveur des secteurs ou sous-secteurs qui sont exposés à un risque réel de fuite de carbone en raison des coûts indirects significatifs qu’ils supportent effectivement du fait de la répercussion des coûts des émissions de gaz à effet de serre sur les prix de l’électricité, pour autant que ces mesures financières soient conformes aux règles relatives aux aides d’État et, en particulier, ne causent pas de distorsions de concurrence injustifiées sur le marché intérieur. [...] »

4

L’article 10 ter, paragraphe 1, de cette directive dispose :

« Sont considérés comme étant exposés à un risque de fuite de carbone les secteurs et sous-secteurs pour lesquels le résultat de la multiplication de l’intensité de leurs échanges avec des pays tiers, définie comme le rapport entre la valeur totale des exportations vers les pays tiers plus la valeur des importations en provenance des pays tiers et la taille totale du marché pour l’Espace économique européen (chiffre d’affaires annuel plus total des importations en provenance des pays tiers), par l’intensité de leurs émissions mesurées en kg de CO2 et divisées par leur valeur ajoutée brute (en euros), est supérieur à 0,2. [...] »

5

L’article 10 ter, paragraphes 2 et 3, de ladite directive prévoit les conditions dans lesquelles des secteurs et sous-secteurs qui ne dépassent pas ce seuil peuvent également être considérés comme étant exposés à un risque de fuite de carbone et inclus dans le groupe visé au paragraphe 1 de cette disposition.

Les lignes directrices litigieuses

6

Au point 7 des lignes directrices litigieuses, la Commission européenne indique que, dans celles-ci, elle « énonce les conditions auxquelles les mesures d’aide relevant du SEQE de l’[Union] peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, point c), [TFUE] ».

7

Le point 9 de ces lignes directrices est libellé comme suit :

« Les principes énoncés dans les présentes lignes directrices s’appliquent uniquement aux mesures d’aide spécifiques prévues à l’article 10 bis, paragraphe 6, et à l’article 10 ter de la directive [2003/87]. »

8

Aux termes des points 19 à 21 desdites lignes directrices :

« 19. Une aide octroyée pour les coûts des émissions indirectes sera considérée comme compatible avec le marché intérieur au sens de l’article 107, paragraphe 3, point c), [TFUE] pour autant que les conditions ci-dessous soient remplies.

20. Ce type d’aide a pour objectif de prévenir un risque important de fuite de carbone imputable en particulier aux coûts des [quotas de l’Union européenne] répercutés sur les prix de l’électricité que doit supporter le bénéficiaire de l’aide lorsque ses concurrents des pays tiers ne sont pas confrontés aux mêmes coûts dans leur prix de l’électricité et que le bénéficiaire n’a pas la possibilité de répercuter ces coûts sur les prix de ses produits sans subir d’importantes pertes de parts de marché. Parer au risque de fuite de carbone en aidant les bénéficiaires à réduire leur exposition à ce risque sert un objectif environnemental, étant donné que l’aide vise à éviter toute augmentation des émissions mondiales de gaz à effet de serre due à des délocalisations de productions en dehors de l’Union, en l’absence d’accord international contraignant concernant la réduction de ces émissions.

21. Pour limiter le risque de distorsion de la concurrence au sein du marché intérieur, l’aide doit être limitée aux secteurs qui sont exposés à un risque réel de fuite de carbone en raison des coûts indirects significatifs qu’ils supportent effectivement du fait de la répercussion des coûts des émissions de gaz à effet de serre sur les prix de l’électricité. Aux fins des présentes lignes directrices, on considère qu’il existe un risque réel de fuite de carbone uniquement lorsque le bénéficiaire exerce ses activités dans un des secteurs énumérés à l’annexe I. »

9

Cette annexe I se compose d’une liste de quatorze secteurs considérés comme exposés à un risque réel de fuite de carbone en raison des coûts des émissions indirectes.

10

Le point 64 des lignes directrices litigieuses prévoit que, à partir du 1er janvier 2021, celles-ci remplacent les lignes directrices concernant certaines aides d’État dans le contexte du système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre après 2012 publiées le 5 juin 2012 (JO 2012, C 158, p. 4). Aux points 65 et 66 des lignes directrices litigieuses, la Commission prévoit qu’elle appliquera les principes énoncés dans celles-ci du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2030 à toutes les mesures d’aide notifiées sur lesquelles elle est appelée à statuer à partir du 1er janvier 2021, même si les projets ont été notifiés avant leur publication.

Les antécédents...

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