Commission of the European Communities v Portuguese Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2001:369
Date03 July 2001
Docket NumberC-503/99
Celex Number61998CC0367
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
CourtCourt of Justice (European Union)
EUR-Lex - 61998C0367 - FR 61998C0367

Conclusions jointes de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 3 juillet 2001. - Commission des Communautés européennes contre République portugaise. - Manquement d'État - Articles 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) et 73 B du traité CE (devenu article 56 CE) - Régime d'autorisation administrative relatif à des entreprises privatisées. - Affaire C-367/98. - Commission des Communautés européennes contre République française. - Manquement d'État - Articles 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) et 73 B du traité CE (devenu article 56 CE) - Droits attachés à l'action spécifique de la République française dans la Société nationale Elf-Aquitaine. - Affaire C-483/99. - Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique. - Manquement d'État - Articles 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) et 73 B du traité CE (devenu article 56 CE) - Droits attachés à l'action spécifique du royaume de Belgique dans la Société nationale de transport par canalisations SA et dans la Société de distribution du gaz SA. - Affaire C-503/99.

Recueil de jurisprudence 2002 page I-04731


Conclusions de l'avocat général

Introduction

1 Les trois recours en manquement engagés par la Commission sont fondés sur un même substrat juridique: la compatibilité avec le droit communautaire de régimes nationaux réservant au pouvoir exécutif certaines prérogatives d'intervention dans la structure de l'actionnariat et la gestion d'entreprises privatisées relevant du domaine de l'économie stratégique. Ces pouvoirs spéciaux, qui prennent des formes diverses (formalités d'autorisation administrative, actions privilégiées, nomination des membres des organes sociaux) et présentent des contenus distincts (pouvoir d'opposition à l'entrée dans le capital, droits d'intervention dans la gestion des actifs), sont communément appelés «actions spécifiques» («golden shares»).

En dépit des différences qui existent entre les réglementations nationales litigieuses, la question de leur harmonie avec le droit communautaire se pose toujours dans des termes similaires. C'est la raison pour laquelle je vais traiter les trois recours conjointement dans un souci de clarté et d'économie de procédure.

Enfin, on observera que deux autres recours en manquement ont été engagés pour les mêmes motifs contre le royaume d'Espagne (1) et contre le Royaume-Uni (2). Ces recours, qui sont toujours pendants, n'ont pas été joints aux présentes affaires parce qu'ils se trouvent à un stade trop peu avancé de la procédure, mais il ne fait aucun doute que la décision qui sera rendue dans les présentes affaires conditionnera de manière décisive celle qui devra être prise en temps voulu.

Réglementation nationale applicable

Affaire C-367/98, Commission/Portugal

2 La Commission fait grief à la République portugaise d'avoir adopté une législation qui, d'une part, restreint l'accès des étrangers, y compris les citoyens de l'Union, au capital d'entreprises en voie de reprivatisation et qui, d'autre part, soumet toute transaction postérieure relative à ce capital à une autorisation ministérielle. Selon elle, ces deux aspects de la réglementation portugaise sont autant de violations des principes qui sous-tendent la liberté d'établissement et la libre circulation des capitaux.

3 L'article 13, paragraphe 3, de la loi n_ 11/90, du 5 avril 1990, loi-cadre sur les privatisations, (3) permet de prendre des décrets de privatisation limitant le nombre d'actions que peuvent acquérir ou souscrire les sociétés étrangères ou les sociétés dont le capital est majoritairement étranger et fixant un maximum à la participation étrangère dans le capital social et dans les organes de contrôle de la société privatisée à peine de vente forcée des actions acquises au-delà de la quotité autorisée, la perte du droit de vote qu'elles confèrent ou la nullité des acquisitions ou souscriptions.

4 Cette disposition a permis aux décrets-lois de privatisation de certaines entreprises, essentiellement des banques et des compagnies d'assurances, de limiter la participation du capital étranger à une proportion variant, selon les cas, entre 5 (4) et 40 (5) pour cent.

5 Le décret-loi n_ 65/94, du 28 février 1994, (6) dispose que, sous réserve d'une disposition prévoyant une limite supérieure, la participation des sociétés étrangères au capital d'entreprises dont le processus de privatisation est clôturé est limitée à 25 %.

6 L'article 1er du décret-loi n_ 380/93, du 15 novembre 1993, (7) dispose ce qui suit:

«1. L'acquisition, entre vifs, à titre gratuit ou onéreux, par une seule personne physique ou morale, d'actions représentant plus de 10 % du capital avec droit de vote, de même que l'acquisition d'actions qui, ajoutées à celles déjà détenues, dépasse ce seuil, dans des sociétés qui viendraient à faire l'objet d'une reprivatisation est soumise à l'autorisation préalable du ministre des finances.

2. Sous réserve des dispositions qui pourront être prises pour chaque opération de privatisation, les dispositions du paragraphe 1 ne s'appliquent qu'aux opérations d'acquisition postérieures aux opérations de privatisation.»

Affaire C-483/99, Commission/France

7 L'article 2 du décret n_ 93-1298, du 13 décembre 1993, instituant une action spécifique de l'État dans la Société Nationale Elf-Aquitaine, (8) dispose que toute opération par laquelle une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, franchit le seuil de détention directe ou indirecte de titres du dixième, du cinquième ou du tiers du capital ou des droits de vote de la société doit être approuvée préalablement par le ministre chargé de l'économie (paragraphe 1).

8 De surcroît, les ministres de l'économie et de l'énergie nomment chacun un représentant de l'État qui siégera sans droit de vote au conseil d'administration de la société (paragraphe 2).

9 L'action spécifique instituée en faveur de l'État habilite celui-ci à s'opposer à toute décision de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs principaux de l'entreprise, cette opposition devant être exercée aux conditions fixées par le décret n_ 93-1296.

10 Le décret n_ 93-1296, du 13 décembre 1993, concernant, notamment, certains des droits attachés à l'action spécifique, (9) dispose que le décret habilitant le titulaire d'une action spécifique à s'opposer aux décisions de «cession d'actifs ou d'affectation de ceux-ci à titre de garantie qui sont de nature à porter atteinte aux intérêts nationaux» doit déterminer la liste des actifs concernés (article 1er).

11 Tout projet de cession de ces actifs ou d'affectation de ceux-ci à titre de garantie doit être déclaré au ministre chargé de l'économie, cette déclaration devant être accompagnée de tous les éléments nécessaires à l'instruction du dossier. L'opération sera réputée autorisée si le ministre ne s'y est pas opposé dans le délai d'un mois à compter de la date de la réception du dossier complet, ce délai pouvant être prorogé pour une durée de quinze jours (article 2).

Toute contravention à ces obligations entraînera la nullité de plein droit des opérations réalisées (article 3).

Affaire C-503/99, Commission/Belgique

12 Un arrêté royal du 10 juin 1994 (10) institue au profit de l'État une action spécifique de la Société nationale de Transport par Canalisations (SNTC), action assortie de certains pouvoirs spéciaux confiés au ministre de l'énergie (article 1er).

13 Le ministre peut s'opposer à toute transaction relative au capital de SNTC «port[a]nt atteinte aux intérêts nationaux dans le domaine de l'énergie» (article 2, paragraphe 1). Par transaction, il y a lieu d'entendre toute opération par laquelle une personne physique ou morale acquerrait directement ou indirectement 5 % ou plus du capital ou des droits de vote de la SNTC ou accroîtrait sa quotité du capital ou des droits de vote en sorte que celle-ci atteindrait ou dépasserait un seuil de 10 % (article 2, paragraphe 2). (11)

14 L'action spécifique permet au ministre de s'opposer à toute cession, affectation à titre de sûreté ou changement de la destination des canalisations de la SNTC constituant de grandes infrastructures de transport intérieur de produits énergétiques ou pouvant servir à cet effet. Toute opération présentant ces caractéristiques doit être notifiée préalablement au ministre, qui dispose d'un délai de 21 jours pour exercer son droit d'opposition (article 3).

15 De surcroît, l'action spécifique permet au ministre de nommer deux représentants du gouvernement fédéral au conseil d'administration de la SNTC, dans lequel ils siègent avec voix consultative. Ces représentants peuvent, dans un délai de quatre jours ouvrables, prendre recours auprès du ministre contre toute décision du conseil d'administration qu'ils estiment contraire aux lignes directrices de la politique énergétique du pays, en ce compris les objectifs du gouvernement relatifs à l'approvisionnement du pays en énergie. Ce recours est suspensif et réputé rejeté si le ministre n'annule pas la décision concernée dans un délai de huit jours ouvrables.

16 Un régime similaire a été institué pour la société Distrigaz par le décret royal du 16 juin 1994. (12)

La procédure

17 Les procédures précontentieuses qui ont été engagées dans les trois causes ne présentent, selon moi, aucun élément d'intérêt méritant une attention spéciale.

18 Le Royaume-Uni est intervenu à l'appui des conclusions de la France et de la Belgique et l'Espagne à l'appui des conclusions de la France.

19 Au cours de l'audience, j'ai invité les parties comparantes à se prononcer, en particulier, sur l'incidence du principe de neutralité sur les différentes affaires en relation avec le contrôle des entreprises.

Analyse des recours

Considérations préliminaires

20 Il convient, avant toute chose, d'identifier clairement les types de réglementation dont la...

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