Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio SpA (FIAMM) and Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio Technologies, Inc. (FIAMM Technologies) v Council of the European Union and Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
CourtGeneral Court (European Union)
Date14 December 2005

Affaire T-69/00

Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio SpA (FIAMM) et Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio Technologies, Inc. (FIAMM Technologies)

contre

Conseil de l’Union européenne et Commission des Communautés européennes

« Responsabilité non contractuelle de la Communauté — Incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) — Instauration par les États-Unis d’Amérique de mesures de rétorsion sous la forme d’une surtaxe douanière prélevée sur les importations en provenance de la Communauté en vertu d’une autorisation de l’OMC — Décision de l’organe de règlement des différends de l’OMC — Effets juridiques — Responsabilité de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes — Lien de causalité — Préjudice anormal et spécial »

Arrêt du Tribunal (grande chambre) du 14 décembre 2005

Sommaire de l’arrêt

1. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Violation suffisamment caractérisée d’une règle ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers — Institution ne disposant d’aucune marge d’appréciation — Suffisance d’une simple infraction au droit communautaire

(Art. 288, al. 2, CE)

2. Recours en indemnité — Organisation mondiale du commerce — Impossibilité d’invoquer les accords OMC pour contester la légalité d’un acte communautaire — Exceptions — Acte communautaire visant à en assurer l’exécution ou s’y référant expressément et précisément — Régime communautaire d’importation des bananes — Incompatibilité avec les règles de l’OMC constatée par l’organe de règlement des différends de l’OMC — Contrôle juridictionnel de la légalité de ce régime au regard des règles de l’OMC — Exclusion

(Art. 288, al. 2, CE ; règlements du Conseil nº 404/93 et nº 1637/98 ; règlement de la Commission nº 2362/98)

3. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Absence de comportement illicite des institutions communautaires — Préjudice réel, lien de causalité et préjudice anormal et spécial — Caractère cumulatif

(Art. 288, al. 2, CE)

4. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Maintien d’un régime communautaire d’importation des bananes incompatible avec les accords OMC — Préjudice résultant de l’instauration d’une mesure de rétorsion par l’administration américaine — Lien de causalité

(Art. 288, al. 2, CE)

5. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Absence de comportement illicite des institutions communautaires — Préjudice résultant de l’incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les accords OMC — Préjudice anormal — Absence — Responsabilité de la Communauté — Exclusion

(Art. 288, al. 2, CE)

1. L’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. Dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions.

S’agissant de la première de ces conditions, le comportement illégal reproché à une institution communautaire doit consister en une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers. Le critère décisif permettant de considérer que cette exigence est remplie est celui de la méconnaissance manifeste et grave, par l’institution communautaire concernée, des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation. Lorsque cette institution ne dispose que d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit communautaire peut suffire pour établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée.

(cf. points 85-89)

2. Les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ne figurent pas, en principe, compte tenu de leur nature et de leur économie, au nombre des normes au regard desquelles le juge communautaire contrôle la légalité de l’action des institutions communautaires.

Par conséquent, la violation éventuelle des règles de l’OMC par ces institutions n’est pas, en principe, susceptible d’engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté.

Ce n’est que dans l’hypothèse où la Communauté a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC ou dans l’occurrence où l’acte communautaire renvoie expressément à des dispositions précises des accords OMC qu’il appartiendrait au juge communautaire de contrôler la légalité du comportement des institutions communautaires au regard des règles de l’OMC.

Or, même en présence de la décision de l’organe de règlement des différends de l’OMC constatant l’incompatibilité avec les règles de l’OMC du régime d’importation des bananes dans la Communauté, tel qu’il a été instauré par le règlement nº 404/93, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la banane, et modifié par la suite par les règlements nº 1637/98 et nº 2362/98, aucune de ces deux exceptions ne trouve application de façon à permettre que le juge communautaire contrôle la légalité de la réglementation communautaire en question au regard des règles de l’OMC.

Sont dépourvues d’incidence à cet égard l’expiration du délai imparti par l’OMC à la Communauté pour mettre en conformité avec les règles de l’OMC la mesure déclarée incompatible et l’autorisation donnée par l’OMC au membre lésé d’adopter, à l’encontre de la Communauté, des mesures de compensation et de suspension de concessions commerciales.

(cf. points 110, 113-115, 125)

3. Dans l’hypothèse d’un dommage engendré par un comportement des institutions de la Communauté dont le caractère illégal n’est pas démontré, la responsabilité non contractuelle de la Communauté peut être engagée, dès lors que sont cumulativement remplies les conditions relatives à la réalité du préjudice, au lien de causalité entre celui-ci et le comportement des institutions communautaires, ainsi qu’au caractère anormal et spécial du préjudice en question.

(cf. point 160)

4. Les principes communs aux droits des États membres auxquels renvoie l’article 288, deuxième alinéa, CE ne sauraient être invoqués au soutien de l’existence d’une obligation incombant à la Communauté de réparer toute conséquence préjudiciable, même éloignée, de comportements de ses organes. En effet, la condition relative au lien de causalité exigée par cette disposition suppose l’existence d’un lien suffisamment direct de cause à effet entre le comportement des institutions communautaires et le dommage.

À cet égard, un tel lien direct existe entre, d’une part, le maintien en vigueur par le Conseil et la Commission d’un régime d’importation des bananes incompatible avec les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et, d’autre part, le préjudice subi par des opérateurs économiques du fait de l’instauration d’une surtaxe douanière américaine frappant leurs produits. La décision unilatérale des États-Unis d’Amérique d’instaurer cette surtaxe n’est pas de nature à rompre ledit lien de causalité. En effet, le comportement des institutions en question a nécessairement induit l’adoption de la mesure de rétorsion par l’administration américaine dans le respect du système de règlement des différends de l’OMC accepté par la Communauté, de sorte que ce comportement doit être regardé comme la cause déterminante du préjudice subi.

(cf. points 177-178, 183-185, 191)

5. S’agissant des dommages que peuvent subir les opérateurs économiques du fait des activités des institutions communautaires, un préjudice est, d’une part, anormal lorsqu’il dépasse les limites des risques économiques inhérents aux activités dans le secteur concerné et, d’autre part, spécial lorsqu’il affecte une catégorie particulière d’opérateurs économiques d’une façon disproportionnée par rapport aux autres opérateurs.

Or, il n’est pas établi que des opérateurs économiques dont l’activité consiste en la commercialisation d’accumulateurs sur le marché américain aient subi, du fait de l’incompatibilité avec les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) du régime communautaire d’importation des bananes qui a induit le retrait par l’administration américaine des concessions tarifaires à l’égard de la Communauté, un préjudice excédant les limites des risques inhérents à leur activité exportatrice. En effet, l’éventualité d’une suspension des concessions tarifaires, mesure prévue par les accords OMC, est l’une des vicissitudes inhérentes au système actuel du commerce international. Dès lors, cette vicissitude est obligatoirement supportée par tout opérateur qui décide de commercialiser sa production sur le marché de l’un des membres de l’OMC.

Il s’ensuit que, le préjudice subi par lesdits opérateurs ne pouvant être qualifié d’anormal, leur demande indemnitaire fondée sur le régime de la responsabilité non contractuelle de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes doit être rejetée.

(cf. points 202-203, 205, 211, 213)




ARRÊT DU TRIBUNAL (grande chambre)

14 décembre 2005 (*)

« Responsabilité non contractuelle de la Communauté – Incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) – Instauration par les États-Unis d’Amérique de mesures de rétorsion sous la forme d’une surtaxe douanière prélevée sur les importations en provenance de la Communauté en vertu d’une autorisation de l’OMC – Décision de l’organe de règlement des différends de l’OMC – Effets juridiques – Responsabilité de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes – Lien de causalité – Préjudice anormal et spécial »

Dans l’affaire T-69/00,

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