Memoria Srl and Antonia Dall'Antonia v Comune di Padova.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:906
Docket NumberC-342/17
Celex Number62017CJ0342
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date14 November 2018
62017CJ0342

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

14 novembre 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Restrictions à la liberté d’établissement – Compétence de la Cour – Recevabilité de la demande de décision préjudicielle – Situation purement interne – Réglementation nationale interdisant toute activité lucrative portant sur la conservation des urnes cinéraires – Test de proportionnalité – Cohérence de la réglementation nationale »

Dans l’affaire C‑342/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunale amministrativo regionale per il Veneto (tribunal administratif régional pour la Vénétie, Italie), par décision du 11 mai 2017, parvenue à la Cour le 8 juin 2017, dans la procédure

Memoria Srl,

Antonia Dall’Antonia

contre

Comune di Padova,

en présence de :

Alessandra Calore,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Vilaras, président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la troisième chambre, MM. J. Malenovský (rapporteur), L. Bay Larsen, M. Safjan et D. Šváby, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 avril 2018,

considérant les observations présentées :

pour Memoria Srl et Mme Dall’Antonia, par Mes G. Martini, A. Sitzia et P. Piva, avvocati,

pour le Comune di Padova, par Mes M. Lotto, V. Mizzoni, A. Sartori et P. Bernardi, avvocati,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. E. De Bonis, avvocato dello Stato,

pour la Commission européenne, par Mme H. Tserepa-Lacombe et M. L. Malferrari, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 21 juin 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 49 et 56 TFUE.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Memoria Srl et Mme Antonia Dall’Antonia au Comune di Padova (commune de Padoue, Italie) au sujet d’une réglementation, adoptée par cette dernière, ayant pour effet d’interdire aux dépositaires d’une urne cinéraire d’en confier la garde, contre paiement, à une entreprise privée.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Le considérant 8 de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur (JO 2006, L 376, p. 36), prévoit :

« (8)

Les dispositions de la présente directive concernant la liberté d’établissement et la libre circulation des services ne devraient s’appliquer que dans la mesure où les activités en cause sont ouvertes à la concurrence, de manière à ce qu’elles n’obligent pas les États membres à libéraliser les services d’intérêt économique général ou à privatiser des entités publiques proposant de tels services, ni à abolir les monopoles existants pour d’autres activités ou certains services de distribution. »

4

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 3, premier alinéa, de la directive 2006/123 :

« La présente directive ne traite pas de l’abolition des monopoles fournissant des services, ni des aides accordées par les États membres qui relèvent des règles communautaires en matière de concurrence. »

Le droit italien

La loi no 234, du 24 décembre 2012

5

L’article 53 de la legge n. 234 – Norme generali sulla partecipazione dell’Italia alla formazione e all’attuazione della normativa e delle politiche dell’Unione europea (loi no 234 portant règles générales sur la participation de la République italienne à la formation et à la mise en œuvre de la réglementation et des politiques de l’Union européenne), du 24 décembre 2012 (GURI no 3, du 4 janvier 2013), énonce :

« Ne sont pas applicables à l’égard des ressortissants italiens les règles de l’ordre juridique italien produisant des effets discriminatoires par rapport à la condition et au traitement garantis dans l’ordre juridique italien aux ressortissants de l’Union. »

La loi no 130, du 30 mars 2001

6

L’article 3 de la legge n. 130 – Disposizioni in materia di cremazione e dispersione delle ceneri (loi no 130 relative à la crémation et à la dispersion des cendres), du 30 mars 2001 (GURI no 91, du 19 avril 2001), dispose :

« 1. Dans les six mois suivants l’entrée en vigueur de la présente loi, le [decreto del Presidente della Repubblica n. 285 approvazione del regolamento di polizia mortuaria (décret du président de la République no 285 portant approbation du règlement de police mortuaire), du 10 septembre 1990 (GURI no 239, du 12 octobre 1990),] pourra être modifié par un règlement adopté en application de l’article 17, paragraphe 1, de la loi no 400, du 23 août 1988 modifiée, sur proposition du ministre de la Santé, les ministres de l’Intérieur et de la Justice entendus, après avis des commissions parlementaires compétentes, sur la base des principes suivants :

[...]

b)

l’autorisation de procéder à la crémation est accordée suivant la volonté, en ce sens exprimée par le défunt de son vivant ou par un membre de sa famille, selon l’une des modalités suivantes :

[...]

c)

la dispersion des cendres n’est autorisée, suivant la volonté du défunt, que dans un secteur du cimetière réservé à cet effet, en pleine nature ou dans un domaine privé ; la dispersion dans un domaine privé doit se faire à l’air libre avec l’autorisation du propriétaire et ne peut donner lieu à rémunération ; en tout état de cause, la dispersion des cendres est interdite dans des zones habitées [...] ; la dispersion en mer dans les eaux de lacs et de cours d’eau est autorisée dans les zones sans embarcations et sans constructions ;

d)

la dispersion des cendres est effectuée par le conjoint ou par tout autre membre de la famille habilité, par l’exécuteur testamentaire ou par le représentant légal de l’association visée sous b), point 2, ci‑dessus, à laquelle le défunt adhérait ou, à défaut, par une personne habilitée à cet effet par la commune ;

[...]

f)

le transport de l’urne contenant les cendres n’est pas soumis aux mesures sanitaires de précaution prévues pour le transport de cadavres, sauf indication contraire des autorités sanitaires ;

[...]

i)

une salle attenante au crématorium doit être aménagée pour permettre l’accomplissement des rites funéraires et de rendre un dernier hommage au défunt dans la dignité.

[...] »

7

En vertu de l’article 5, paragraphe 2, de cette loi :

« Par décret du ministère de l’Intérieur, en consultation avec le ministre de la Santé, et après avoir entendu l’Associazione nationale dei comuni italiani (ANCI) (Association nationale des municipalités italiennes), la Confederazione nazionale dei servizi (Confservizi) (Confédération nationale des services) ainsi que les associations les plus représentatives ayant, parmi leur objet social, les questions de crémation, sont établis dans les six mois à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi, les tarifs applicables pour la crémation des cadavres, ainsi que pour la conservation et la dispersion des cendres dans les lieux appropriés des cimetières. »

Le décret du président de la République no 285, du 10 septembre 1990

8

En vertu de l’article 92, paragraphe 4, du décret du président de la République no 285, du 10 septembre 1990 :

« Nul ne peut concéder des parcelles pour des sépultures privées à des personnes physiques ou morales qui entendent en tirer profit ou se livrer à la spéculation. »

La loi régionale no 18, du 4 mars 2010

9

La legge regionale n. 18 – Norme in materia funeraria, della Regione del Veneto (loi régionale no 18 en matière funéraire, de la région de Vénétie), du 4 mars 2010, a confié aux communes le soin de fixer les prescriptions relatives à la garde et aux caractéristiques des urnes cinéraires.

Le règlement relatif aux services funéraires de la commune de Padoue

10

L’article 52 du règlement relatif aux services funéraires de la commune de Padoue, tel que modifié par la décision de la commune de Padoue no 84, du 30 novembre 2015, prévoit :

« 1. La garde de l’urne cinéraire aux fins de la conservation dans une habitation est confiée dans le respect des dispositions écrites prises par le défunt de son vivant. En l’absence de telles dispositions, la garde peut être demandée par le conjoint ou, à défaut, par le parent le plus proche, déterminé conformément aux articles 74, 75, 76 et 77 du code civil et, s’il y a plusieurs parents au même degré, par la majorité absolue de ceux-ci.

2. En cas de liens affectifs ou de reconnaissance avérés, la garde de l’urne peut également être confiée à d’autres personnes que celles visées à la deuxième phrase du paragraphe précédent, sous réserve de l’accord préalable écrit des ayants droit.

3. Le dépositaire de l’urne ne peut en aucun cas en confier la garde à un tiers. Cette interdiction vaut même en cas de volonté expresse manifestée par le défunt de son vivant.

4. L’urne doit être gardée exclusivement dans l’habitation de celui qui en est le dépositaire, dans un lieu protégé contre d’éventuelles profanations ou soustractions. Aucune ouverture ni aucun trou ne peuvent être faits sur l’urne, pour quelque motif que ce soit.

5. Les services funéraires peuvent exiger à tout moment la présentation de l’urne cinéraire par le dépositaire, afin d’en vérifier l’intégrité et l’état de conservation.

[...]

9. Le placement dans un cimetière d’une urne placée en dépôt peut être demandé à tout moment.

10. Outre les exigences énoncées au paragraphe 4, la garde de l’urne cinéraire...

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