Groupe Steria SCA v Ministère des Finances et des Comptes publics.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:524
Date02 September 2015
Celex Number62014CJ0386
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-386/14
62014CJ0386

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

2 septembre 2015 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Législation fiscale — Liberté d’établissement — Directive 90/435/CEE — Article 4, paragraphe 2 — Distributions de dividendes à caractère transfrontalier — Impôt sur les sociétés — Imposition des groupes (‘intégration fiscale’ française) — Exonération des dividendes versés par les filiales appartenant au groupe fiscal intégré — Condition de résidence — Dividendes versés par des sociétés filiales non-résidentes — Frais et charges non déductibles se rapportant à la participation»

Dans l’affaire C‑386/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE introduite par la cour administrative d’appel de Versailles (France), par décision du 29 juillet 2014, parvenue à la Cour le 13 août 2014, dans la procédure

Groupe Steria SCA

contre

Ministère des Finances et des Comptes publics,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, M. K. Lenaerts (rapporteur), vice-président de la Cour, MM. J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev et C. Lycourgos, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 mai 2015,

considérant les observations présentées:

pour Groupe Steria SCA, par Me R. Schneider, avocat,

pour le gouvernement français, par MM. J.‑S. Pilczer et D. Colas, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze, J. Möller et Mme K. Petersen, en qualité d’agents,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. de Ree et M. Bulterman, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme J. Kraehling, en qualité d’agent, assistée de Mme S. Ford, barrister,

pour la Commission européenne, par MM. J.‑F. Brakeland et W. Roels, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 11 juin 2015,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 49 TFUE.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Groupe Steria SCA au ministère des Finances et des Comptes publics au sujet du refus de ce dernier de restituer à cette société une fraction de l’impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles à cet impôt acquittée au titre des exercices fiscaux clos des années 2005 à 2008 et correspondant à l’imposition de la quote-part de frais et charges réintégrée dans ses résultats à raison des dividendes perçus de ses filiales établies dans des États membres autres que la France.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

La directive 90/435/CEE du Conseil, du 23 juillet 1990, concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents (JO L 225, p. 6), telle que modifiée par la directive 2003/123/CE du Conseil, du 22 décembre 2003 (JO L 7, p. 41), qui était en vigueur pendant la période sur laquelle porte le litige au principal, disposait, à son article 4:

«1. Lorsqu’une société mère ou son établissement stable perçoit, au titre de l’association entre la société mère et sa filiale, des bénéfices distribués autrement qu’à l’occasion de la liquidation de cette dernière, l’État de la société mère et l’État de son établissement stable:

soit s’abstiennent d’imposer ces bénéfices,

soit les imposent tout en autorisant la société mère et l’établissement stable à déduire du montant de leur impôt la fraction de l’impôt sur les sociétés afférente à ces bénéfices et acquittée par la filiale et toute sous-filiale, [...] dans la limite du montant dû de l’impôt correspondant.

[...]

2. Toutefois, tout État membre garde la faculté de prévoir que des charges se rapportant à la participation et des moins-values résultant de la distribution des bénéfices de la société filiale ne sont pas déductibles du bénéfice imposable de la société mère. Si, dans ce cas, les frais de gestion se rapportant à la participation sont fixés forfaitairement, le montant forfaitaire ne peut excéder 5 % des bénéfices distribués par la société filiale.»

4

L’article 9 de la directive 2011/96/UE du Conseil, du 30 novembre 2011, concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents (JO L 345, p. 8), a abrogé la directive 90/435.

Le droit français

5

En vertu de l’article 145, paragraphe 1, du code général des impôts (ci-après le «CGI»), le régime fiscal des sociétés mères est applicable, notamment, aux sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations représentant 5 % au moins du capital de la société émettrice.

6

En ce qui concerne les produits des participations, l’article 216 du CGI dispose:

«I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l’application du régime des sociétés mères et visées à l’article 145, touchés au cours d’un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d’une quote-part de frais et charges.

La quote-part de frais et charges visée au premier alinéa est fixée uniformément à 5 % du produit total des participations, crédit d’impôt compris. Cette quote-part ne peut toutefois excéder, pour chaque période d’imposition, le montant total des frais et charges de toute nature exposés par la société participant au cours de la même période.»

7

S’agissant du régime de l’intégration fiscale, l’article 223 A du CGI dispose:

«Une société peut se constituer seule redevable de l’impôt sur les sociétés dû sur l’ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l’exercice, directement ou indirectement par l’intermédiaire de sociétés du groupe [...]

[...]

Seules peuvent être membres du groupe les sociétés qui ont donné leur accord et dont les résultats sont soumis à l’impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun [...]»

8

L’article 223 B du CGI prévoit:

«Le résultat d’ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun [...]

En ce qui concerne la détermination des résultats des exercices ouverts avant le 1er janvier 1993, ou clos à compter du 31 décembre 1998, le résultat d’ensemble est diminué de la quote-part de frais et charges comprise dans ses résultats par une société du groupe à raison de sa participation dans une autre société du groupe [...]

[...]»

Le litige au principal et la question préjudicielle

9

La requérante au principal est la société mère d’un groupe fiscal intégré, au sens de l’article 223 A du CGI. Steria, qui est une société membre de ce groupe, détient elle-même des participations supérieures à 95 % dans des filiales établies tant en France que dans d’autres États membres. En application de l’article 216 du CGI, les dividendes perçus par Steria de ses filiales établies dans d’autres États membres ont été déduits de son bénéfice net total, à l’exception d’une quote-part de frais et charges, forfaitairement fixée à 5 % du montant net des dividendes perçus (ci-après la «quote‑part de frais et charges») et représentant les frais et charges supportés par la société mère, se rapportant à sa participation dans la filiale ayant distribué ces dividendes.

10

Après avoir spontanément acquitté, sur cette base, l’impôt sur les sociétés et les contributions additionnelles à cet impôt, la requérante au principal a demandé, au titre des années 2005 à 2008, la restitution de la fraction de ces impositions correspondant à la quote‑part de frais et charges. Elle a fondé sa demande sur l’incompatibilité de la réglementation nationale en cause avec l’article 43 CE (devenu article 49 TFUE). Elle a soulevé à cet effet l’inégalité de traitement entre les dividendes perçus par une société mère d’un groupe fiscal intégré, selon que les dividendes proviennent de sociétés elles‑mêmes membres de ce groupe intégré, ce qui implique que ces dernières soient établies en France, ou proviennent de filiales établies dans d’autres États membres. En effet, dans la première situation seulement, les dividendes sont exonérés totalement de l’impôt sur les sociétés en raison de la neutralisation, en application de l’article 223 B du CGI, de la réintégration, dans le bénéfice de la société mère, de la quote-part de frais et charges.

11

L’administration fiscale n’ayant pas fait droit à la demande de la requérante au principal, cette dernière a introduit un recours devant le tribunal administratif de Montreuil. À la suite du rejet de ce recours par un jugement du 4 octobre 2012, la requérante au principal a interjeté appel de ce dernier devant la cour...

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