Asociación Nacional de Productores de Ganado Porcino v Administración del Estado.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:440
Date14 June 2018
Celex Number62017CJ0169
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-169/17
62017CJ0169

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

14 juin 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Articles 34 et 35 TFUE – Libre circulation des marchandises – Restrictions quantitatives – Mesures d’effet équivalent – Protection des porcs – Produits préparés ou commercialisés en Espagne – Normes de qualité pour la viande, le jambon, l’épaule et le filet de porc ibérique – Conditions pour l’utilisation de la dénomination “de cebo” – Amélioration de la qualité des produits – Directive 2008/120/CE – Champ d’application »

Dans l’affaire C‑169/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), par décision du 27 février 2017, parvenue à la Cour le 3 avril 2017, dans la procédure

Asociación Nacional de Productores de Ganado Porcino

contre

Administración del Estado,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, MM. C. G. Fernlund, J.‑C. Bonichot, S. Rodin (rapporteur) et E. Regan, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : Mme L. Carrasco Marco, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 mars 2018,

considérant les observations présentées :

pour l’Asociación Nacional de Productores de Ganado Porcino, par Mes J. M. Rodríguez Cárcamo, abogado, et N. Olmos Castro, abogada,

pour le gouvernement espagnol, par M. M. A. Sampol Pucurull, en qualité d’agent,

pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes M. Patakia et I. Galindo Martín, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 34 et 35 TFUE ainsi que de l’article 3, paragraphe 1, sous a), et de l’article 12 de la directive 2008/120/CE du Conseil, du 18 décembre 2008, établissant les normes minimales relatives à la protection des porcs (JO 2009, L 47, p. 5).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Asociación Nacional de Productores de Ganado Porcino (ci-après l’« association ») à l’Administración del Estado (administration de l’État, Espagne) au sujet d’un décret royal, adopté par le gouvernement espagnol, portant approbation des normes de qualité pour la viande, le jambon, l’épaule et le filet de porc ibérique.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 7 et 8 de la directive 2008/120 énoncent :

« (7)

Il est donc nécessaire d’établir des normes minimales communes pour la protection des porcs d’élevage et d’engraissement pour garantir le développement rationnel de la production.

(8)

Les porcs doivent disposer d’un environnement correspondant à leur besoin d’exercice et à leur nature d’animal fouisseur. Leur bien-être semble être compromis en raison de l’espace très restreint dont ils disposent. »

4

L’article 1er de cette directive se lit comme suit :

« La présente directive établit les normes minimales relatives à la protection des porcs confinés à des fins d’élevage et d’engraissement. »

5

L’article 3, paragraphe 1, de ladite directive prévoit :

« Les États membres veillent à ce que toutes les exploitations respectent les exigences suivantes :

a)

chaque porc sevré ou porc de production élevé en groupe – à l’exception des cochettes après la saillie et des truies – dispose obligatoirement d’une superficie d’espace libre au moins égale à :

Poids de l’animal vivant (en kilogrammes)

m2

Jusqu’à 10

0,15

Plus de 10 et jusqu’à 20

0,20

Plus de 20 et jusqu’à 30

0,30

Plus de 30 et jusqu’à 50

0,40

Plus de 50 et jusqu’à 85

0,55

Plus de 85 et jusqu’à 110

0,65

Plus de 110

1,00

[...] »

6

L’article 12 de cette même directive dispose :

« En ce qui concerne la protection des porcs, les États membres peuvent, dans le respect des règles générales du traité, maintenir ou appliquer sur leur territoire des dispositions plus strictes que celles prévues par la présente directive. Ils informent la Commission de toute mesure dans ce sens. »

Le droit espagnol

7

L’article 1er du Real Decreto 4/2014 por el que se aprueba la norma de calidad para la carne, el jamón, la paleta y la caña de lomo ibérico (décret royal 4/2014, portant approbation des normes de qualité pour la viande, le jambon, l’épaule et le filet de porc ibérique), du 10 janvier 2014 (BOE no 10, du 11 janvier 2014, p. 1569), est ainsi libellé :

« Ce décret royal a pour objet de définir les normes de qualité que les produits provenant de la découpe de carcasses de porcs ibériques, préparés ou commercialisés non transformés, tels que le jambon, l’épaule, le filet de porc ibérique, produits ou commercialisés en Espagne, doivent respecter pour ouvrir droit aux dénominations de vente établies dans les présentes dispositions, sans préjudice de la réglementation générale applicable.

Sont admis, dans les mêmes conditions, les produits préparés au Portugal, sur la base des accords signés entre les autorités espagnoles et portugaises sur la production, la préparation, la commercialisation et le contrôle des produits ibériques.

Par ailleurs, les produits bénéficiant d’un label de qualité reconnu au niveau de l’Union européenne (appellation d’origine protégée ou indication géographique protégée) qui entendent utiliser les dénominations de vente contenues dans les présentes dispositions ou l’un quelconque des termes qui y figurent devront remplir les conditions qui y sont établies. »

8

L’article 3, paragraphe 1, du décret 4/2014 énonce :

« La dénomination de vente des produits concernés par ce décret se compose obligatoirement de trois éléments, qui doivent figurer dans l’ordre indiqué ci-après :

a)

Désignation par type de produit :

i)

Produits préparés : [...]

ii)

Produits issus de la découpe de la carcasse commercialisés non transformés : [...]

b)

Désignation par l’alimentation et le mode d’élevage :

i)

“De bellota” : pour les produits issus d’animaux abattus immédiatement après un engraissement obtenu exclusivement à partir de ressources naturelles de pâturages forestiers.

ii)

Pour les produits provenant d’animaux dont l’alimentation et le mode d’élevage, jusqu’à leur poids d’abattage, diffèrent de ceux du point précédent, les désignations suivantes sont utilisées :

1. “de cebo de campo” : il s’agit d’animaux qui, bien qu’ils aient pu utiliser les ressources des pâturages forestiers ou de pâturages, ont aussi été nourris avec des aliments pour animaux constitués essentiellement de céréales et de légumineuses, et qui ont été élevés dans des exploitations extensives ou intensives en plein air, étant entendu qu’une partie de la superficie peut être couverte. […]

2. “de cebo” : dans le cas d’animaux nourris avec des aliments pour animaux constitués essentiellement de céréales et de légumineuses, et dont l’élevage a été réalisé dans des systèmes d’exploitation intensifs, conformément à l’article 8.

c)

Désignation par race [...]

[...] »

9

L’article 8, paragraphes 1 et 2, de ce décret, intitulé « Conditions d’élevage pour les animaux dont proviennent les produits portant la dénomination “de cebo” », dispose :

« 1. Sans préjudice des conditions d’élevage établies dans le [Real Decreto no 1135/2002, relativo a las normas mínimas para la protección de cerdos (décret royal no 1135/2002 relatif aux normes minimales pour la protection des porcs), du 31 octobre 2002 (BOE no 278, du 20 novembre 2002)], les animaux de production qui, vivants, ont un poids de plus de 110 kilogrammes et dont sont issus les produits portant la dénomination “de cebo” doivent chacun disposer d’une superficie totale minimale d’espace libre de 2 m2 lors de la phase d’engraissement.

2. L’âge minimal à l’abattage est de dix mois. »

10

La troisième disposition additionnelle dudit décret prévoit :

« Les exigences posées par la norme de qualité adoptée ne seront pas applicables aux produits légalement fabriqués ou commercialisés selon d’autres spécifications dans d’autres États membres de l’Union européenne, ni aux produits originaires des pays de l’Association européenne de libre-échange (AELE), pas plus qu’aux parties contractantes de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) ou aux États parties à un accord d’association douanière avec l’Union européenne. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

11

Le décret royal 4/2014 a fait l’objet d’un recours contentieux administratif ordinaire introduit par l’association devant la juridiction de renvoi, le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne).

12

Au soutien de ce recours, l’association fait valoir que le décret en cause provoque une distorsion de la concurrence au niveau de l’Union en imposant une augmentation des coûts de production du porc ibérique en Espagne. Ainsi, l’association considère que cette réglementation constitue une restriction quantitative aux exportations contraire à l’article 35 TFUE, étant donné que les producteurs concurrents, établis dans d’autres États membres, ne doivent pas supporter de coûts engendrés par une mesure telle que celle imposée par le gouvernement espagnol.

13

En outre, l’association fait valoir devant la juridiction de renvoi que le décret royal 4/2014 viole l’article 3...

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