France Télécom SA v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2007:81
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-340/04
Date08 March 2007
Celex Number62004TJ0340
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado

Affaire T-340/04

France Télécom SA

contre

Commission des Communautés européennes

« Concurrence — Décision ordonnant une inspection — Coopération loyale avec les juridictions nationales — Coopération loyale avec les autorités nationales de concurrence — Article 20, paragraphe 4, du règlement (CE) nº 1/2003 — Motivation — Proportionnalité — Moyen nouveau — Irrecevabilité »

Sommaire de l'arrêt

1. Concurrence — Procédure administrative — Pouvoir d'inspection de la Commission — Décision ordonnant une inspection — Obligation de motivation — Portée

(Règlement du Conseil nº 1/2003, art. 20, § 4)

2. Concurrence — Procédure administrative — Décision ordonnant une inspection — Demande d'assistance adressée aux autorités nationales

(Règlement du Conseil nº 1/2003, art. 20, § 7 et 8)

3. Concurrence — Procédure administrative — Pouvoir d'inspection de la Commission — Obligation de coopération loyale avec les autorités nationales — Décision ordonnant une inspection — Contrôle juridictionnel — Portée

(Art. 10 CE, 81 CE et 82 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 20, § 4, 7 et 8)

4. Concurrence — Répartition des compétences entre la Commission et les autorités nationales de concurrence — Droit de la Commission de décider de procéder à une inspection dans une affaire en cours d'examen devant une autorité nationale de concurrence — Obligation de coopération loyale avec les autorités nationales — Portée

(Règlement du Conseil nº 1/2003, art. 11, § 1 et 6, et 13, § 1)

5. Concurrence — Procédure administrative — Pouvoir d'inspection de la Commission — Recours à une décision d'inspection — Pouvoir d'appréciation de la Commission — Limites

(Règlement du Conseil nº 1/2003, art. 20)

6. Procédure — Production de moyens nouveaux en cours d'instance — Conditions

(Règlement de procédure du Tribunal, art. 44, § 1, c), et 48, § 2)

1. La décision par laquelle la Commission, dans l'exercice des pouvoirs que lui confère le règlement nº 1/2003 pour assurer le respect des règles communautaires de concurrence par les entreprises, et sur le fondement de l'article 20 de ce règlement, ordonne une inspection doit, en vertu du paragraphe 4 dudit article et de la jurisprudence, être assortie d'une motivation contenant un certain nombre d'éléments essentiels, de manière à faire apparaître le caractère justifié de l'intervention envisagée à l'intérieur des entreprises concernées et à mettre celles-ci en mesure de saisir la portée de leur devoir de collaboration tout en préservant leurs droits de la défense. C'est ainsi qu'elle doit indiquer l'objet et le but de l'inspection, en faisant apparaître les caractéristiques essentielles de l'infraction supposée, en désignant le marché présumé en cause, la nature des infractions suspectées, des explications quant à la manière dont l'entreprise visée par l'inspection est présumée être impliquée dans l'infraction, ce qui est recherché et les éléments sur lesquels doit porter l'inspection, les pouvoirs conférés aux enquêteurs communautaires, la date à laquelle commence l'inspection, les sanctions prévues aux articles 23 et 24 du règlement nº 1/2003 et la possibilité de former un recours contre elle devant le Tribunal. La Commission doit également faire apparaître de manière circonstanciée qu'elle dispose d'éléments et d'indices matériels sérieux l'amenant à suspecter l'infraction dont l'entreprise visée par l'inspection est soupçonnée.

L'appréciation du caractère suffisant de la motivation d'une telle décision doit s'apprécier à la lumière du contexte dans lequel elle est intervenue.

(cf. points 49-53, 58)

2. Aux termes de l'article 20, paragraphe 8, du règlement nº 1/2003, relatif à la mise en oeuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE], il appartient à l'autorité judiciaire nationale saisie dans le cadre de l'article 20, paragraphe 7, du même règlement de contrôler que la décision de la Commission ordonnant une inspection est authentique et que les mesures coercitives envisagées afin d'exécuter l'inspection ne sont ni arbitraires ni excessives par rapport à l'objet de cette inspection, et la Commission est, à cette fin, tenue de lui fournir certaines informations.

Il résulte cependant de l'article 20, paragraphe 8, du règlement nº 1/2003 et de la jurisprudence que ces éléments peuvent figurer ailleurs que dans la seule décision ordonnant l'inspection ou peuvent être transmis à ladite autorité par la Commission par un autre biais que cette décision.

(cf. point 110)

3. S'agissant des inspections auxquelles peut procéder la Commission pour assurer le respect des règles communautaires de concurrence par les entreprises, le règlement nº 1/2003, dans son article 20, établit une distinction claire entre, d'une part, les décisions adoptées par la Commission sur le fondement du paragraphe 4 dudit article et, d'autre part, la demande d'assistance présentée à l'autorité judiciaire nationale en vertu de son paragraphe 7.

Alors que les juridictions communautaires sont seules compétentes pour contrôler la légalité d'une décision adoptée par la Commission au titre de l'article 20, paragraphe 4, du règlement, c'est en revanche au seul juge national dont l'autorisation de recourir à des mesures coercitives est sollicitée en vertu de l'article 20, paragraphe 7, du règlement, éventuellement assisté par la Cour de justice dans le cadre d'un renvoi préjudiciel, et sous réserve des éventuelles voies de recours nationales, qu'il appartient de déterminer si les informations transmises par la Commission dans le cadre de cette demande lui permettent d'exercer le contrôle qui lui est dévolu par l'article 20, paragraphe 8, du règlement et le mettent donc en mesure de se prononcer utilement sur la demande qui lui a été présentée.

L'autorité judiciaire nationale, saisie dans le cadre de l'article 20, paragraphe 7, du règlement, a, en vertu du paragraphe 8 de cet article et de la jurisprudence, la faculté de demander des précisions à la Commission, notamment sur les motifs qui l'incitent à suspecter une violation des articles 81 CE et 82 CE, sur la gravité de la violation suspectée et sur la nature de l'implication de l'entreprise concernée. Un contrôle du Tribunal qui, par hypothèse, pourrait aboutir à la constatation d'une insuffisance des informations qui auraient été transmises par la Commission à cette autorité impliquerait une réévaluation par le Tribunal de l'appréciation, déjà effectuée par cette autorité, du caractère suffisant de ces informations. Or, ce contrôle ne peut être admis, l'appréciation effectuée par l'autorité judiciaire nationale étant soumise aux seuls contrôles résultant des voies de recours internes qui seraient ouvertes à l'encontre des décisions de cette autorité.

Doivent de ce fait être rejetés comme inopérants les arguments que l'entreprise concernée prétend tirer, à l'appui d'un recours dirigé contre la décision de la Commission ordonnant l'inspection, de ce que, en violation de l'obligation de coopération loyale avec les autorités nationales que fait peser sur la Commission l'article 10 CE, cette décision n'aurait pas contenu suffisamment d'informations pour permettre au juge national, saisi d'une demande d'autorisation de recourir à des mesures coercitives, de statuer en toute connaissance de cause.

(cf. points 119, 122-125)

4. Si l'article 11, paragraphe 1, du règlement nº 1/2003 énonce une règle générale selon laquelle la Commission et les autorités nationales sont tenues de collaborer étroitement, il n'impose pas à la Commission de s'abstenir d'effectuer une inspection relative à une affaire dont une autorité nationale de concurrence serait saisie en parallèle.

Il ne saurait non plus être déduit de cette disposition que, dès lors qu'une autorité nationale de concurrence a commencé à enquêter sur des faits particuliers, la Commission est immédiatement empêchée de se saisir de l'affaire ou de s'y intéresser de manière préliminaire. Au contraire, il découle de l'exigence de collaboration énoncée par cette disposition que ces deux autorités peuvent, au moins à des stades préliminaires tels que des enquêtes, travailler de manière parallèle. Ainsi, il résulte de l'article 11, paragraphe 6, du règlement nº 1/2003 que le principe de collaboration implique que la Commission et les autorités nationales de concurrence puissent, au moins aux stades préliminaires des affaires dont elles sont saisies, travailler de manière parallèle. Cette disposition prévoit en effet, sous réserve d'une simple consultation de l'autorité nationale concernée, que la Commission garde la possibilité d'ouvrir une procédure en vue de l'adoption d'une décision même si une autorité nationale traite déjà de l'affaire. Partant, la Commission doit a fortiori pouvoir procéder à une inspection. En effet, une décision ordonnant une inspection ne constitue qu'un acte préparatoire au traitement au fond d'une affaire, qui n'emporte pas ouverture formelle de la procédure au sens de l'article 11, paragraphe 6, précité, une telle décision d'inspection ne manifestant pas en elle-même la volonté de la Commission d'adopter une décision sur le fond de l'affaire.

De même, l'article 13, paragraphe 1, du règlement nº 1/2003 n'entraîne qu'une simple faculté pour l'autorité concernée de suspendre la procédure ou de rejeter une plainte au motif qu'une autre autorité de concurrence traite la même affaire. La non-utilisation de cette faculté ne peut donc constituer un manquement au devoir de la Commission de coopérer loyalement avec les autorités de concurrence des États membres.

(cf. points 128-130)

5. Le respect du principe de proportionnalité suppose que, lorsque la Commission décide, sur le fondement de l'article 20 du règlement nº 1/2003, relatif à la mise en oeuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE], de procéder à une inspection, les mesures envisagées n'engendrent pas des inconvénients démesurés et intolérables par rapport aux buts...

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2 practice notes
1 cases
  • Chronopost SA and La Poste v Union française de l’express (UFEX) and Others.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 6 Diciembre 2007
    ...97 and the case-law cited there. The latter judgment is currently under appeal (Case C-139/07 P) but not on this point. 21 – See Case T-340/04 France Télécom v Commission [2007] ECR II-0000, paragraph 164 and the case-law cited there. 22 – Cited in footnote 18. See also point 33 of the Opin......

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