Vert Marine SAS v Premier ministre and Ministre de l'Économie et des Finances.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:468
Docket NumberC-472/19
Date11 June 2020
Celex Number62019CJ0472
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

11 juin 2020 (*)

« Renvoi préjudiciel – Procédure de passation de contrats de concession – Directive 2014/23/UE – Article 38, paragraphe 9 – Régime des mesures correctrices destinées à prouver le rétablissement de la fiabilité d’un opérateur économique concerné par un motif d’exclusion – Réglementation nationale interdisant aux opérateurs économiques faisant l’objet d’un motif d’exclusion obligatoire de participer à une procédure de passation de contrats de concession pendant cinq ans – Exclusion de toute possibilité, pour de tels opérateurs, d’apporter la preuve des mesures correctrices prises »

Dans l’affaire C‑472/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (France), par décision du 14 juin 2019, parvenue à la Cour le 20 juin 2019, dans la procédure

Vert Marine SAS

contre

Premier ministre,

Ministre de l’Économie et des Finances,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de MM. S. Rodin, président de chambre, D. Šváby (rapporteur) et N. Piçarra, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : Mme V. Giacobbo-Peyronnel, administratrice,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour Vert Marine SAS, par Me F. Dereux, avocat,

– pour le gouvernement français, par M. P. Dodeller ainsi que par Mmes A.-L. Desjonquères et C. Mosser, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement hellénique, par Mmes A. Dimitrakopoulou, D. Tsagkaraki et L. Kotroni, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par MM. J.-F. Brakeland et P. Ondrůšek ainsi que par Mme L. Haasbeek, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 38, paragraphes 9 et 10, de la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur l’attribution de contrats de concession (JO 2014, L 94, p. 1).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Vert Marine SAS au Premier ministre et au ministre de l’Économie et des Finances (France) au sujet d’une demande d’abrogation de certaines dispositions du décret nº 2016-86, du 1er février 2016, relatif aux contrats de concession (JORF du 2 février 2016, texte n° 20), présentée par cette société.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 Le considérant 71 de la directive 2014/23 énonce :

« Il convient cependant de laisser aux opérateurs économiques la possibilité de prendre des mesures de mise en conformité visant à remédier aux conséquences de toute infraction pénale ou faute et à empêcher effectivement que celles-ci ne se reproduisent. Il pourrait notamment s’agir de mesures concernant leur organisation et leur personnel, comme la rupture de toute relation avec des personnes ou des organisations impliquées dans ces agissements, des mesures appropriées de réorganisation du personnel, la mise en œuvre de systèmes de déclaration et de contrôle, la création d’une structure d’audit interne pour assurer le suivi de la conformité et l’adoption de règles internes de responsabilité et de réparation. Lorsque ces mesures offrent des garanties suffisantes, l’opérateur économique concerné ne devrait plus être exclu pour ces seuls motifs. Les opérateurs économiques devraient avoir la possibilité de demander que soient examinées les mesures de mise en conformité prises en vue d’une éventuelle admission à la procédure d’attribution d’une concession. Cependant, il convient de laisser aux États membres le pouvoir de déterminer les conditions procédurales et matérielles exactes applicables dans ces cas de figure. Ils devraient, en particulier, être libres de décider de laisser à chaque pouvoir adjudicateur ou entité adjudicatrice la possibilité d’effectuer les évaluations pertinentes ou de confier cette tâche à d’autres pouvoirs à un niveau central ou décentralisé. »

4 L’article 38, paragraphes 4, 9 et 10, de cette directive dispose :

« 4. Les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices au sens de l’article 7, paragraphe 1, point a), excluent un opérateur économique de la participation à une procédure d’attribution de concession lorsqu’ils ont établi que cet opérateur économique a fait l’objet d’une condamnation prononcée par un jugement définitif pour l’une des raisons suivantes :

a) participation à une organisation criminelle telle qu’elle est définie à l’article 2 de la décision-cadre 2008/841/JAI du Conseil[, du 24 octobre 2008, relative à la lutte contre la criminalité organisée (JO 2008, L 300, p. 42] ;

b) corruption telle qu’elle est définie à l’article 3 de la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l’Union européenne [(JO 1997, C 195, p. 1] et à l’article 2, paragraphe 1, de la décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil[, du 22 juillet 2003, relative à la lutte contre la corruption dans le secteur privé (JO 2003, L 192, p. 54)], ou telle qu’elle est définie dans le droit interne du pouvoir adjudicateur, de l’entité adjudicatrice ou de l’opérateur économique ;

c) fraude au sens de l’article 1er de la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes [(JO 1995, C 316, p. 48)] ;

d) infraction terroriste ou infraction liée aux activités terroristes telles qu’elles sont définies respectivement aux articles 1er et 3 de la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil[, du 13 juin 2002, relative à la lutte contre le terrorisme (JO 2002, L 164, p. 3)], ou incitation, complicité, tentative telles qu’elles sont visées à l’article 4 de ladite décision-cadre ;

e) blanchiment de capitaux ou financement du terrorisme tels qu’ils sont définis à l’article 1er de la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil[, du 26 octobre 2005, relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme (JO 2005, L 309, p. 15)].

f) travail des enfants et autres formes de traite des êtres humains définis à l’article 2 de la directive 2011/36/UE du Parlement européen et du Conseil[, du 5 avril 2011, concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes et remplaçant la décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil (JO 2011, L 101, p. 1)].

[...]

9. Tout opérateur économique qui se trouve dans l’une des situations visées aux paragraphes 4 et 7 peut fournir des preuves afin d’attester que les mesures qu’il a prises suffisent à démontrer sa fiabilité malgré l’existence du motif d’exclusion invoqué. Si ces preuves sont jugées suffisantes, l’opérateur économique concerné n’est pas exclu de la procédure.

À cette fin, l’opérateur économique prouve qu’il a versé ou entrepris de verser une indemnité en réparation de tout préjudice causé par l’infraction pénale ou la faute, clarifié totalement les faits et circonstances en collaborant activement avec les autorités chargées de l’enquête et pris des mesures concrètes de nature technique et organisationnelle et en matière de personnel propres à prévenir une nouvelle infraction pénale ou une nouvelle faute. Les mesures prises par les opérateurs économiques sont évaluées en tenant compte de la gravité de l’infraction pénale ou de la faute ainsi que de ses circonstances particulières. Lorsque les mesures sont jugées insuffisantes, la motivation de la décision en question est transmise à l’opérateur économique concerné.

Un opérateur économique qui a été exclu par un jugement définitif de la participation à des procédures de passation de marché ou d’attribution de concession n’est pas autorisé à faire usage de la possibilité prévue au présent paragraphe pendant la période d’exclusion fixée par ledit jugement dans les États membres où le jugement produit ses effets.

10. Par disposition législative, réglementaire ou administrative, et dans le respect du droit de l’Union, les États membres arrêtent les conditions d’application du présent article. Ils déterminent notamment la durée maximale de la période d’exclusion si aucune des mesures visées au paragraphe 9 n’a été prise par l’opérateur économique pour démontrer sa fiabilité. Lorsque la durée de la période d’exclusion n’a pas été fixée par jugement définitif, elle ne peut dépasser cinq ans à compter de la date de la condamnation par jugement définitif dans les cas visés au paragraphe 4 et trois ans à compter de la date de l’événement concerné dans les cas visés au paragraphe 7. »

5 L’article 51 de ladite directive est libellé comme suit :

« 1. Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 18 avril 2016. Ils en informent immédiatement la Commission.

Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.

2. Les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions essentielles de droit interne qu’ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive. »

Le droit français

6 L’article 39 de l’ordonnance nº 2016-65, du 29 janvier 2016, relative aux contrats de concession (JORF du 30 janvier 2016, texte n° 66), disposait :

« Sont exclues de la procédure de passation des contrats de concession :

1° Les personnes qui ont fait l’objet d’une...

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