Mitteldeutsche Hartstein-Industrie AG v Finanzamt Y.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:712
Docket NumberC-528/19
Date16 September 2020
Celex Number62019CJ0528
CourtCourt of Justice (European Union)
62019CJ0528

ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

16 septembre 2020 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Sixième directive 77/388/CEE – Article 17, paragraphe 2, sous a) – Déduction de la taxe payée en amont – Naissance et étendue du droit à déduction – Extension d’une route appartenant à une commune – Comptabilisation des coûts générés par les travaux comme faisant partie des frais généraux de l’assujetti – Détermination de l’existence d’un lien direct et immédiat avec l’activité économique de l’assujetti – Livraison à titre gratuit – Livraison assimilée à une livraison effectuée à titre onéreux – Article 5, paragraphe 6 »

Dans l’affaire C‑528/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne), par décision du 13 mars 2019, parvenue à la Cour le 10 juillet 2019, dans la procédure

Mitteldeutsche Hartstein-Industrie AG

contre

Finanzamt Y,

LA COUR (huitième chambre),

composée de Mme L. S. Rossi, présidente de chambre, MM. J. Malenovský et N. Wahl (rapporteur), juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Mitteldeutsche Hartstein-Industrie AG, par M. O.-G. Lippross, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement allemand, par M. J. Möller et Mme S. Eisenberg, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme L. Lozano Palacios et M. L. Mantl, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 5, paragraphe 6, et de l’article 17, paragraphe 2, sous a), de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (JO 1977, L 145, p. 1, ci-après la « sixième directive »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mitteldeutsche Hartstein-Industrie AG au Finanzamt Y (administration fiscale Y, Allemagne) au sujet d’un refus de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) acquittée en amont pour la réalisation de travaux d’extension d’une route appartenant à une commune.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la sixième directive, sont soumises à TVA « les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel ».

4

L’article 5, paragraphe 6, de cette directive énonce :

« Est assimilé à une livraison effectuée à titre onéreux le prélèvement par un assujetti d’un bien de son entreprise pour ses besoins privés ou ceux de son personnel ou qu’il transmet à titre gratuit ou, plus généralement, qu’il affecte à des fins étrangères à son entreprise, lorsque ce bien ou les éléments le composant ont ouvert droit à une déduction complète ou partielle de la [TVA]. Toutefois, ne sont pas visés les prélèvements effectués pour les besoins de l’entreprise pour donner des cadeaux de faible valeur et des échantillons. »

5

L’article 6, paragraphe 2, de ladite directive prévoit :

« Sont assimilées à des prestations de services effectuées à titre onéreux :

a)

l’utilisation d’un bien affecté à l’entreprise pour les besoins privés de l’assujetti ou pour ceux de son personnel ou, plus généralement, à des fins étrangères à son entreprise, lorsque ce bien a ouvert droit à une déduction complète ou partielle de la [TVA] ;

b)

les prestations de services à titre gratuit effectuées par l’assujetti pour ses besoins privés ou pour ceux de son personnel ou, plus généralement, à des fins étrangères à son entreprise.

Les États membres ont la faculté de déroger aux dispositions de ce paragraphe à condition que cette dérogation ne conduise pas à des distorsions de concurrence. »

6

L’article 17, paragraphe 2, sous a), de la sixième directive dispose :

« Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable :

a)

la [TVA] due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti. »

Le droit allemand

7

L’article 1er de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires, ci-après l’« UStG »), intitulé « Opérations imposables », prévoit :

« (1) Sont soumises à la [TVA] les opérations suivantes :

1.

les livraisons et autres prestations effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un entrepreneur dans le cadre de son entreprise.

[...] »

8

Aux termes de l’article 3 de l’UStG :

« (1) Les livraisons d’un entrepreneur sont les prestations par lesquelles celui-ci ou un tiers mandaté par lui permet à un acheteur ou à un tiers en son nom de disposer d’un bien en son nom propre (remise du pouvoir de disposition).

[...]

(1b) Sont assimilés à une livraison effectuée à titre onéreux :

1. le prélèvement par un entrepreneur d’un bien de son entreprise à des fins étrangères à son entreprise ;

2. la transmission à titre gratuit d’un bien par un entrepreneur à son personnel pour ses besoins privés, sauf s’il s’agit de petits cadeaux ;

3. toute autre transmission à titre gratuit d’un bien à l’exception des cadeaux de faible valeur et des échantillons pour les besoins de l’entreprise.

Le bien ou les éléments le composant doivent avoir ouvert droit à une déduction complète ou partielle. »

9

L’article 15 de l’UStG, intitulé « Déductions », dispose :

« (1) L’entrepreneur peut déduire les montants suivants :

1. la taxe légalement due au titre des livraisons et autres prestations effectuées par un autre entrepreneur pour les besoins de son entreprise.

[...]

(2) Est exclue du droit à déduction la taxe afférente aux livraisons, à l’importation et à l’acquisition intracommunautaire de biens ou à toutes autres prestations que l’entrepreneur utilise aux fins d’opérations suivantes :

1. les opérations exonérées ;

[...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

10

Mitteldeutsche Hartstein-Industrie, requérante au principal, est une société holding de gestion. Elle forme une entité fiscale avec ses filiales A GmbH et B GmbH.

11

À la suite de la décision de l’administration départementale d’autoriser la réouverture et l’exploitation d’une carrière de pierre à chaux (ci-après la « carrière de pierre à chaux »), A GmbH a été autorisée, par décision du 16 février 2001, à exploiter cette carrière moyennant l’aménagement de l’accès à celle-ci par une route ouverte au public et appartenant à la commune sur le territoire de laquelle est située ladite carrière (ci-après la « route communale en cause »). Cette décision a été modifiée pendant l’année 2005, afin qu’il y soit précisé que le permis d’exploitation de la même carrière serait caduc si l’extension de cette route n’était pas achevée le 31 décembre 2006.

12

Dans la mesure où l’évacuation de la pierre à chaux requérait ladite extension, une convention relative à cette dernière a été conclue entre la commune concernée et le prédécesseur en droit de A GmbH, par laquelle cette commune s’est engagée, d’une part, à concevoir et à réaliser l’extension de la route communale en cause et, d’autre part, en cas de maintien de l’ouverture de cette dernière au public, à la mettre sans restriction à la disposition du prédécesseur en droit de A GmbH. En contrepartie, il était prévu que ce dernier supporterait tous les frais liés à l’extension de ladite route. Au cours de l’année 2006, A GmbH a chargé B GmbH de réaliser, en qualité de maître d’œuvre, cette extension conformément à la convention passée avec ladite commune. À la suite de l’achèvement des travaux, la section de route a été empruntée par les poids lourds de A GmbH, à partir du mois de décembre 2006, ainsi que par d’autres véhicules.

13

Dans le cadre des déclarations de TVA au titre de l’année 2006, les dépenses exposées par A GmbH pour les travaux d’extension de la route communale en cause n’ont pas été prises en compte par la requérante au principal, mais cette dernière a déduit, au titre de la taxe payée en amont, les montants de TVA ayant grevé les prestations reçues, en amont, de B GmbH.

14

À la suite d’un contrôle, l’administration fiscale Y a estimé que, en construisant l’extension de la route communale en cause, la requérante au principal avait fourni à la commune concernée un ouvrage à titre gratuit, soumis à la TVA au titre de l’article 3, paragraphe 1b, première phrase, point 3, de l’UStG, et elle a émis, le 1er mars 2012, un avis d’imposition rectificatif au titre de l’année 2006, rehaussant la base d’imposition de la TVA au taux de 16 %.

15

Alors que la réclamation introduite par la requérante au principal avait fait l’objet d’une décision de rejet, le Hessisches Finanzgericht (tribunal des finances de Hesse, Allemagne) a partiellement fait droit au recours introduit par celle-ci contre cette décision. Il a estimé que les conditions fixées à l’article 3, paragraphe 1b, deuxième phrase, de l’UStG n’étaient pas réunies pour que les travaux réalisés sur la route communale en cause soient imposés. Il a, en revanche, considéré que la TVA afférente aux opérations en amont et directement...

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