Frucona Košice a.s. v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2010:498
CourtGeneral Court (European Union)
Date07 December 2010
Docket NumberT-11/07
Celex Number62007TJ0011
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado

Affaire T-11/07

Frucona Košice a.s.

contre

Commission européenne

« Aides d’État — Remise partielle d’une dette fiscale dans le cadre d’un concordat — Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché commun et ordonnant sa récupération — Critère du créancier privé en économie de marché »

Sommaire de l'arrêt

1. Aides accordées par les États — Décision de la Commission — Contrôle juridictionnel — Limites

(Art. 88 CE et 230 CE)

2. Procédure — Requête introductive d'instance — Exigences de forme

(Statut de la Cour de justice, art. 21 et 53, al. 1; règlement de procédure du Tribunal, art. 44, § 1, c))

3. Aides accordées par les États — Dispositions du traité — Champ d'application ratione temporis — Adhésion d'un nouvel État membre à l'Union européenne

(Art. 87 CE et 88 CE; acte d'adhésion de 2003, annexe IV, section 3)

4. Aides accordées par les États — Examen par la Commission — Critère du créancier privé — Appréciation économique complexe — Contrôle juridictionnel — Limites

(Art. 87, § 1, CE et 88, § 2, CE)

5. Aides accordées par les États — Notion — Remises de dettes octroyées par des organismes publics à une entreprise en difficulté

(Art. 87, § 1, CE)

6. Aides accordées par les États — Examen par la Commission — Procédure administrative — Obligation de la Commission de mettre les intéressés en demeure de présenter leurs observations — Statut du bénéficiaire de l'aide

(Art. 88, § 2, CE)

7. Aides accordées par les États — Interdiction — Dérogations — Pouvoir d'appréciation de la Commission — Possibilité d'adopter des lignes directrices

(Art. 87, § 3, c), CE; communication de la Commission 1999/C 288/02)

1. Dans le cadre d’un recours en annulation, la légalité de l’acte concerné doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date à laquelle cet acte a été adopté. S’agissant d’une décision en matière d’aides d’État, sa légalité doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée. Ainsi, un requérant ne saurait se prévaloir devant le juge d’éléments de fait qui n’ont pas été avancés au cours de la procédure précontentieuse prévue à l’article 88 CE. De même, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’éventuels éléments de fait ou de droit qui auraient pu lui être présentés pendant la procédure administrative, mais qui ne l’ont pas été, la Commission n’étant pas dans l’obligation d’examiner d’office et par supputation quels sont les éléments qui auraient pu lui être soumis.

(cf. points 48-51)

2. En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même.

(cf. point 59)

3. Pour déterminer si la Commission est compétente pour examiner une mesure d'aide dont une partie des faits pertinents sont antérieurs à l'adhésion de l'État membre concerné à l'Union européenne, il y a lieu de retenir comme critère pertinent celui de l’acte juridiquement contraignant par lequel l’autorité nationale compétente s’engage à accorder l’aide.

En ce qui concerne la remise partielle, par une autorité d’un État membre, de la dette fiscale d'une entreprise en difficulté dans le cadre d'un concordat, il convient de distinguer entre la décision de s’abstenir d’engager une procédure de liquidation judiciaire ou une procédure d’exécution fiscale et la décision d’approbation d’une proposition de concordat. C'est uniquement cette dernière qui implique la renonciation par l'autorité fiscale à ses créances sur l'entreprise. En effet, alors que la décision d’un créancier de ne pas engager une procédure de liquidation judiciaire ou une procédure d’exécution fiscale ne fait que reporter dans le temps un recouvrement forcé éventuel de la créance, la décision de ce créancier d’approuver une proposition de concordat implique, sous réserve d’homologation dudit concordat par la juridiction compétente, que ledit créancier renonce définitivement à tout ou partie de cette créance. Par conséquent, afin de savoir si la Commission est compétente pour examiner la mesure d'aide en cause, il convient uniquement de déterminer à quel moment la décision de l’autorité fiscale d’approuver la proposition de concordat a été adoptée.

(cf. points 68-72)

4. Dans la mesure où l’application, par la Commission, du critère du créancier privé en économie de marché implique des appréciations économiques complexes, à l’instar de l’application du critère de l’investisseur privé en économie de marché, elle fait l’objet d’un contrôle restreint à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits retenus, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir. Toutefois, si la Commission dispose d'une marge d’appréciation en matière économique, cela n’implique pas que le juge de l’Union doit s’abstenir de contrôler l’interprétation, par la Commission, de données de nature économique. En effet, le juge de l’Union doit non seulement vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées. Dans le cadre de ce contrôle, il ne lui appartient cependant pas de substituer son appréciation économique à celle de la Commission.

(cf. points 108-110)

5. Un organisme public ayant octroyé une remise de dette doit être comparé à un créancier privé cherchant à obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par un débiteur connaissant des difficultés financières. La qualité de créancier doit, en effet, être distinguée de celle d’un investisseur privé en économie de marché qui poursuit une politique structurelle, globale ou sectorielle, et guidée par des perspectives de rentabilité à long terme des capitaux investis.

Lorsqu’une entreprise confrontée à une détérioration importante de sa situation financière propose un accord, ou une série d’accords, d’aménagement de sa dette à ses créanciers en vue de redresser sa situation et d’éviter sa mise en liquidation, chaque créancier est amené à devoir faire un choix au regard du montant qui lui est offert dans le cadre de l’accord proposé, d’une part, et du montant qu’il estime pouvoir récupérer à l’issue de la liquidation éventuelle de l’entreprise, d’autre part. Son choix est influencé par une série de facteurs, tels que sa qualité de créancier hypothécaire, privilégié ou ordinaire, la nature et l’étendue des sûretés éventuelles qu’il détient, son appréciation des chances de redressement de l’entreprise ainsi que le bénéfice qui lui reviendrait en cas de liquidation.

(cf. points 114-115)

6. Dans la procédure de contrôle des aides d’État, le rôle des intéressés autres que l’État membre concerné se limite à communiquer à la Commission toutes informations destinées à éclairer cette dernière dans son action future. Partant, ils ne sauraient prétendre eux-mêmes à un débat contradictoire avec la Commission, tel que celui ouvert au profit dudit État membre.

En outre, aucune disposition de la procédure de contrôle des aides d’État ne réserve, parmi les intéressés, un rôle particulier au bénéficiaire de l’aide. À cet égard, il y a lieu de préciser que la procédure de contrôle des aides d’État n’est pas une procédure ouverte « à l’encontre » du bénéficiaire ou des bénéficiaires des aides qui impliquerait que celui-ci ou ces derniers puissent se prévaloir de droits aussi étendus que les droits de la défense en tant que tels.

Par ailleurs, la légalité de la décision attaquée doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée et il appartient à l’État membre concerné et, le cas échéant, au bénéficiaire des aides d’apporter les éléments de nature à démontrer que ces aides sont compatibles avec le marché commun et, éventuellement, de faire part de circonstances spécifiques relatives au remboursement d’aides déjà versées dans l’occurrence où la Commission viendrait à exiger celui-ci.

(cf. points 178-180)

7. Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun « les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun ». À cet effet, l’article 87, paragraphe 3, CE accorde à la Commission un large pouvoir d’appréciation en vue d’admettre des aides par dérogation à l’interdiction générale du paragraphe 1 dudit article, dans la mesure où l’appréciation, dans ce cas, de la compatibilité ou de l’incompatibilité d’une aide d’État avec le marché commun soulève des problèmes impliquant la prise en considération et l’appréciation de faits et circonstances économiques complexes et susceptibles de se modifier rapidement. Le juge de l’Union ne pouvant substituer son appréciation des faits, notamment sur le plan économique, à celle de l’auteur de la décision, le contrôle du Tribunal doit, à cet égard, se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement...

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