Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening v Stockholms kommun genom dess marknämnd.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:421
Date02 July 2009
Celex Number62008CC0263
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-263/08

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme E. Sharpston

présentées le 2 juillet 2009 (1)

Affaire C‑263/08

Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening

contre

Stockholms kommun genom dess marknämnd

[demande de décision préjudicielle formée par le Högsta domstolen (Suède)]





«Directive 85/337/CEE – Évaluation des incidences sur l’environnement –Convention d’Aarhus – Directive 2003/35/CE – Accès à la justice –Qualité pour agir d’organisations non gouvernementales pour la protection de l’environnement – Définition du ‘public concerné’ – Législation nationale limitant l’accès à la justice aux organisations comptant au moins 2000 membres»

1. Dans la présente demande de décision préjudicielle, le Högsta domstolen (Cour suprême) (Suède) souhaite savoir si la directive 85/337/CEE (2), telle que modifiée en 2003 en vue de l’aligner sur la convention d’Aarhus, permet qu’une réglementation nationale garantisse l’accès à la justice aux seules organisations non gouvernementales de protection de l’environnement comptant au minimum 2000 membres.

2. Préalablement à ce qui précède, il convient également d’élucider si des travaux d’enfouissement de lignes électriques, ainsi que l’extraction d’eaux souterraines requise afin de permettre la construction du tunnel contenant le câblage, constituent un «projet» au sens de ceux énumérés à l’annexe II de ladite directive.

I – Le cadre juridique

A – La convention d’Aarhus

3. La Communauté européenne, les États membres et dix-neuf autres États ont conclu en 1998 la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, plus connue sous le nom de «convention d’Aarhus». Cet instrument a été adopté dans le cadre de la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe, à l’occasion de l’assemblée qui s’est tenue dans la ville danoise susvisée, le 25 juin 1998. Son entrée en vigueur définitive est intervenue le 30 octobre 2001.

4. Les objectifs poursuivis par ce texte sont rappelés aux septième, huitième, treizième, et dix-huitième alinéas de son exposé des motifs, à savoir:

«Reconnaissant également que chacun a le droit de vivre dans un environnement propre à assurer sa santé et son bien-être et le devoir, tant individuellement qu’en association avec d’autres, de protéger et d’améliorer l’environnement dans l’intérêt des générations présentes et futures,

Considérant qu’afin d’être en mesure de faire valoir ce droit et de s’acquitter de ce devoir, les citoyens doivent avoir accès à l’information, être habilités à participer au processus décisionnel et avoir accès à la justice en matière d’environnement, étant entendu qu’ils peuvent avoir besoin d’une assistance pour exercer leurs droits,

[…]

Reconnaissant en outre le rôle important que les citoyens, les organisations non gouvernementales et le secteur privé peuvent jouer dans le domaine de la protection de l’environnement,

[…]

Souhaitant que le public, y compris les organisations, aient accès à des mécanismes judiciaires efficaces afin que leurs intérêts légitimes soient protégés et la loi respectée».

5. L’article 2, paragraphes 4 et 5, de ladite convention définit la notion de «public» et de «public concerné» en ces termes:

«Aux fins de la présente Convention,

[…]

4. Le terme ‘public’ désigne une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la coutume du pays, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes.

5. L’expression ‘public concerné’ désigne le public qui est touché ou qui risque d’être touché par les décisions prises en matière d’environnement ou qui a un intérêt à faire valoir à l’égard du processus décisionnel; aux fins de la présente définition, les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt.»

6. L’article 9 de la convention d’Aarhus renferme, aux paragraphes 2, 4, et 5, les dispositions relatives à l’accès à la justice, aussi bien des particuliers que des organisations non gouvernementales, ainsi que les critères applicables aux procédures judiciaires:

«2. Chaque Partie veille, dans le cadre de sa législation nationale, à ce que les membres du public concerné:

a) ayant un intérêt suffisant pour agir ou, sinon,

b) faisant valoir une atteinte à un droit, lorsque le code de procédure administrative d’une Partie pose une telle condition, puissent former un recours devant une instance judiciaire et/ou un autre organe indépendant et impartial établi par loi pour contester la légalité, quant au fond et à la procédure, de toute décision, tout acte ou toute omission tombant sous le coup des dispositions de l’article 6 et, si le droit interne le prévoit et sans préjudice du paragraphe 3 ci-après, des autres dispositions pertinentes de la présente Convention.

Ce qui constitue un intérêt suffisant et une atteinte à un droit est déterminé selon les dispositions du droit interne et conformément à l’objectif consistant à accorder au public concerné un large accès à la justice dans le cadre de la présente Convention. À cet effet, l’intérêt qu’a toute organisation non gouvernementale répondant aux conditions visées au paragraphe 5 de l’article 2 est réputé suffisant au sens de l’alinéa a) ci-dessus. Ces organisations sont également réputées avoir des droits auxquels il pourrait être porté atteinte au sens de l’alinéa b) ci-dessus.

Les dispositions du présent paragraphe 2 n’excluent pas la possibilité de former un recours préliminaire devant une autorité administrative et ne dispensent pas de l’obligation d’épuiser les voies de recours administratif avant d’engager une procédure judiciaire lorsqu’une telle obligation est prévue en droit interne.

[…]

4. En outre, et sans préjudice du paragraphe 1, les procédures visées aux paragraphes 1, 2 et 3 ci-dessus doivent offrir des recours suffisants et effectifs, y compris un redressement par injonction s’il y a lieu, et doivent être objectives, équitables et rapides sans que leur coût soit prohibitif. Les décisions prises au titre du présent article sont prononcées ou consignées par écrit. Les décisions des tribunaux et, autant que possible, celles d’autres organes doivent être accessibles au public.

5. Pour rendre les dispositions du présent article encore plus efficaces, chaque Partie veille à ce que le public soit informé de la possibilité qui lui est donnée d’engager des procédures de recours administratif ou judiciaire, et envisage la mise en place de mécanismes appropriés d’assistance visant à éliminer ou à réduire les obstacles financiers ou autres qui entravent l’accès à la justice.» (3)

B – La directive 85/337 après à la réforme opérée par la directive 2003/35

7. La convention d’Aarhus a été adaptée au droit communautaire par le biais de plusieurs instruments, dont la directive 2003/35. Ce texte procède à la modification de plusieurs directives en vigueur, parmi lesquelles la directive 85/337 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement revêt une importance particulière aux fins de la présente affaire.

8. La directive 2003/35 définit, en ses troisième et quatrième considérants, ses objectifs, en soulignant plus particulièrement le rôle des organisations non gouvernementales de protection de l’environnement:

«(3) La participation effective du public à la prise de décisions permet à ce dernier de formuler des avis et des préoccupations pouvant être utiles pour les décisions en question et au décideur de tenir compte de ces avis et préoccupations, ce qui favorise le respect de l’obligation de rendre des comptes et la transparence du processus décisionnel et contribue à sensibiliser le public aux problèmes de l’environnement et à obtenir qu’il apporte son soutien aux décisions prises.

(4) La participation, y compris celle des associations, organisations et groupes, et notamment des organisations non gouvernementales œuvrant en faveur de la protection de l’environnement, devrait dès lors être encouragée, y compris, entre autres, par la promotion de la formation du public en matière d’environnement.»

9. La réforme de 2003 a introduit dans la directive 85/337, parmi d’autres insertions, les modifications suivantes aux articles 1er et 6, ainsi qu’un nouvel article 10 bis. L’article 1er introduit la définition des notions de «public» et de «public concerné»; l’article 6 configure les modalités de participation et d’information dans les procédures d’évaluation; et l’article 10 bis traduit le droit d’accès à la justice dans la sphère de la directive 85/337. Aux termes de la version modifiée, on entend par:

‘public’: une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la pratique nationales, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes;

‘public concerné’: le public qui est touché ou qui risque d’être touché par les procédures décisionnelles en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, ou qui a un intérêt à faire valoir dans ce cadre; aux fins de la présente définition, les organisations non gouvernementales qui oeuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt.»

[…]

Article 6

2. À un stade précoce des procédures décisionnelles en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, et au plus tard dès que ces informations peuvent raisonnablement être fournies, les informations suivantes sont communiquées au public par des avis au public ou d’autres moyens appropriés tels que les moyens de communication électroniques lorsqu’ils sont disponibles:

a) la demande d’autorisation;

b) le fait que le projet fait l’objet d’une procédure d’évaluation des incidences sur l’environnement et...

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