K v Bundesasylamt.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:389
Docket NumberC-245/11
Celex Number62011CC0245
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date27 June 2012
62011CC0245

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME VERICA TRSTENJAK

présentées le 27 juin 2012 ( 1 )

Affaire C‑245/11

K

[demande de décision préjudicielle formée par l’Asylgerichtshof (Autriche)]

«Règlement (CE) no 343/2003 — Détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans un État membre par un ressortissant d’un pays tiers — Article 3, paragraphe 2 — Clause de souveraineté — Article 15 — Clause humanitaire — Application du règlement no 343/2003 conforme aux droits fondamentaux — Article 4 de la charte des droits fondamentaux — Interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants — Article 7 de la charte des droits fondamentaux — Respect de la vie privée et familiale»

I – Introduction

1.

La présente demande de décision préjudicielle présentée par l’Asylgerichtshof (Autriche) concerne l’interprétation du règlement (CE) no 343/2003 du Conseil, du 18 février 2003, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers ( 2 ). Par sa première question, la juridiction de renvoi entend savoir pour l’essentiel si, en application de la «clause humanitaire» prévue à l’article 15 du règlement no 343/2003, un État membre peut être tenu d’examiner une demande d’asile en lieu et place de l’État membre responsable en vertu de la règle de principe sans que ce dernier formule une demande en ce sens lorsque des membres de la famille vulnérables vivant dans ce premier État membre dépendent du soutien du demandeur d’asile. Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande si, conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement no 343/2003, un État membre auquel l’examen d’une demande d’asile n’incombe pas normalement est tenu de se substituer à l’État membre responsable lorsque la compétence de cet État membre telle qu’elle résulte normalement dudit règlement aboutirait à une violation de l’article 3 ou de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après la «CEDH»), ou des articles 4 ou 7 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «charte des droits fondamentaux»). La juridiction de renvoi demande en outre de quelle manière il convient de tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme dans ce contexte.

II – Le cadre juridique

A – La charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

2.

L’article 4 de la charte des droits fondamentaux dispose sous le titre «Interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants»:

«Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.»

3.

L’article 7 de la charte des droits fondamentaux, intitulé «Respect de la vie privée et familiale», est rédigé dans les termes suivants:

«Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications.»

B – Le règlement no 343/2003

4.

L’article 2, sous i), du règlement no 343/2003 est rédigé comme suit:

«Aux fins du présent règlement, on entend par:

i)

‘membres de la famille’, dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d’origine, les membres suivants de la famille du demandeur présents sur le territoire des États membres:

i)

le conjoint du demandeur d’asile, ou son ou sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable, lorsque la législation ou la pratique de l’État membre concerné réserve aux couples non mariés un traitement comparable à celui réservé aux couples mariés, en vertu de sa législation sur les étrangers;

ii)

les enfants mineurs des couples au sens du point i) ou du demandeur, à condition qu’ils soient non mariés et à sa charge, sans discrimination selon qu’ils sont nés du mariage, hors mariage ou qu’ils ont été adoptés, conformément au droit national;

iii)

le père, la mère ou le tuteur lorsque le demandeur ou le réfugié est mineur et non marié».

5.

L’article 3 du règlement no 343/2003 dispose que:

«1. Les États membres examinent toute demande d’asile présentée par un ressortissant d’un pays tiers à l’un quelconque d’entre eux, que ce soit à la frontière ou sur le territoire de l’État membre concerné. La demande d’asile est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable.

2. Par dérogation au paragraphe 1, chaque État membre peut examiner une demande d’asile qui lui est présentée par un ressortissant d’un pays tiers, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. Dans ce cas, cet État devient l’État membre responsable au sens du présent règlement et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. Le cas échéant, il en informe l’État membre antérieurement responsable, celui qui conduit une procédure de détermination de l’État membre responsable ou celui qui a été requis aux fins de prise en charge ou de reprise en charge.

[…]»

6.

L’article 15 du règlement no 243/2003 est rédigé comme suit:

«1. Tout État membre peut, même s’il n’est pas responsable en application des critères définis par le présent règlement, rapprocher des membres d’une même famille, ainsi que d’autres parents à charge pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels. Dans ce cas, cet État membre examine, à la demande d’un autre État membre, la demande d’asile de la personne concernée. Les personnes concernées doivent y consentir.

2. Lorsque la personne concernée est dépendante de l’assistance de l’autre du fait d’une grossesse ou d’un enfant nouveau-né, d’une maladie grave, d’un handicap grave ou de la vieillesse, les États membres laissent normalement ensemble ou rapprochent le demandeur d’asile et un autre membre de sa famille présent sur le territoire de l’un des États membres, à condition que les liens familiaux aient existé dans le pays d’origine.

[…]

4. Si l’État membre sollicité accède à cette requête, la responsabilité de l’examen de la demande lui est transférée.

[…]»

III – Les faits de l’affaire au principal, la procédure devant la juridiction nationale et les questions préjudicielles

7.

La requérante au principal (ci-après la «requérante») était entrée illégalement en Pologne et y avait déposé une première demande d’asile. Elle a quitté cet État membre sans attendre la fin de la procédure et est entrée illégalement en Autriche où elle a déposé une deuxième demande d’asile.

8.

L’un des fils vit en Autriche avec son épouse et leurs enfants mineurs.

9.

L’épouse a subi, il y a plusieurs années, un évènement particulièrement traumatisant dans un pays tiers et s’était confiée à ce sujet à la requérante.

10.

La requérante est la seule personne qui ait connaissance de cet évènement traumatisant et elle est désormais la conseillère et l’amie la plus intime de sa belle-fille

11.

Si l’évènement traumatisant qu’elle a subi venait à être découvert, la belle-fille courrait le risque de subir des sévices importants, voire même d’être tuée par son mari au motif allégué de rétablir l’honneur de la famille.

12.

La belle-fille se trouve durablement en traitement psychiatrique, psychothérapeutique et médical. Elle est traitée avec des médicaments forts et elle est exposée à des risques multiples et importants pour sa santé.

13.

Compte tenu des pathologies dont elle souffre, la belle-fille n’est pas en mesure de tenir son ménage ni de s’occuper de ses enfants de sorte qu’ils risquent d’être placés par l’autorité chargée de la protection de la jeunesse. Cette mesure a été suspendue provisoirement depuis l’arrivée de la requérante.

14.

Depuis qu’elle est entrée en Autriche, la requérante a d’abord cohabité un certain temps avec la famille de son fils. Elle n’habite plus actuellement sous le même toit que sa belle-fille et ses petits-enfants.

15.

Le Bundesasylamt a rejeté la demande d’asile que la requérante avait introduite en Autriche comme irrecevable en soulignant que c’était la République de Pologne qui était l’État membre responsable. À la demande de la République d’Autriche, la Pologne a accepté de prendre en charge la requérante. Le recours présenté par la requérante contre la décision rejetant sa demande d’asile fait l’objet de la procédure devant la juridiction de renvoi.

16.

La juridiction de renvoi ayant des doutes quant à l’application des articles 15 et 3 du règlement no 343/2003 à un cas tel que le litige au principal a suspendu la procédure et soumis à la Cour les questions suivantes à titre préjudiciel.

«1)

L’article 15 du règlement no 343/2003 doit-il être interprété de telle manière qu’un État membre qui, de prime abord, par application des articles 6 à 14 de ce règlement n’est pas responsable de l’examen de la demande introduite par un demandeur d’asile le devient obligatoirement dès lors que la belle-fille de cette personne qui est gravement malade et en danger en raison de circonstances culturelles ou que ses petits-enfants mineurs nécessitant des soins en raison de la maladie de leur mère résident dans cet État membre et que cette personne est prête à apporter son soutien à sa belle-fille ou à ses petits-enfants et est en mesure de le faire? Cette interprétation s’applique-t-elle également lorsqu’il n’y a pas de demande en ce sens émanant de l’État membre responsable, conformément à l’article 15, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 343/2003?

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