Compass Contract Services Limited v Commissioners for Her Majesty's Revenue & Customs.
Jurisdiction | European Union |
ECLI | ECLI:EU:C:2017:163 |
Date | 02 March 2017 |
Celex Number | 62016CC0038 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Procedure Type | Reference for a preliminary ruling |
Docket Number | C-38/16 |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA
présentées le 2 mars 2017 ( 1 )
Affaire C‑38/16
Compass Contract Services Limited
contre
Commissioners for Her Majesty’s Revenue & Customs
[demande de décision préjudicielle formée par le First-tier Tribunal (Tax Chamber) [tribunal de première instance (chambre de la fiscalité)], Royaume‑Uni]
«Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) — Taxe indûment versée — Modalités de remboursement — Réglementation nationale introduisant un délai de prescription — Différence avec le délai prévu pour le remboursement de la déduction refusée à tort — Principes d’égalité de traitement, de neutralité fiscale et d’effectivité»
1. |
Le droit de l’Union admet-il que les délais de prescription applicables aux demandes de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) indûment payée diffèrent, quant à leur entrée en vigueur, de ceux qui régissent les demandes de déduction de cette taxe ? Telle est, en substance, la question qu’une juridiction britannique a soulevée dans le litige qui oppose la société Compass Contract Services (UK) Limited (ci-après « Compass ») aux autorités fiscales de son pays. |
2. |
Dans son arrêt rendu le 11 juillet 2002, Marks & Spencer ( 2 ), la Cour a jugé que les principes d’effectivité et de protection de la confiance légitime s’opposaient à une législation nationale [telle que la Finance Act 1997 (loi de finances de 1997)] qui avait réduit rétroactivement, de six à trois ans, le délai pour demander le remboursement de la TVA perçue en violation de la directive 77/388/CEE ( 3 ). |
3. |
Compte tenu de cet arrêt, le législateur britannique a indiqué par la suite que cette réduction du délai ne s’appliquerait pas aux demandes de remboursement de TVA relatives à des exercices antérieurs à la date d’introduction dudit délai. Il a précisé que la même disposition serait adoptée ultérieurement concernant les demandes (tardives) de déduction de la TVA acquittée en amont. |
4. |
La pratique administrative et les interventions législatives successives ont toutefois fait naître une disparité de traitement au Royaume‑Uni s’agissant du point de départ du délai applicable à certaines demandes (celles relatives au remboursement de la TVA) et à d’autres (celles relatives à la déduction de la TVA). La juridiction a quo demande à la Cour si cette disparité est compatible avec les principes du droit de l’Union, en particulier avec le principe d’égalité de traitement. |
I – Le cadre juridique
A – Le droit de l’Union : la sixième directive
5. |
Sous le titre « Naissance et étendue du droit à déduction », l’article 17 énonce ce qui suit : « 1. Le droit à déduction prend naissance au moment où la taxe déductible devient exigible. 2. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable :
[…] » |
6. |
L’article 18 de la sixième directive, intitulé « Modalités d’exercice du droit à déduction », prévoit ce qui suit : « 1. Pour pouvoir exercer le droit à déduction, l’assujetti doit :
2. La déduction est opérée globalement par l’assujetti par imputation, sur le montant de la taxe due pour une période de déclaration, du montant de la taxe pour laquelle le droit à déduction a pris naissance et est exercé en vertu du paragraphe 1, au cours de la même période. […] 3. Les États membres fixent les conditions et modalités suivant lesquelles un assujetti peut être autorisé à procéder à une déduction à laquelle il n’a pas procédé conformément aux paragraphes 1 et 2. 4. Quand le montant des déductions autorisées dépasse celui de la taxe due pour une période de déclaration, les États membres peuvent soit faire reporter l’excédent sur la période suivante, soit procéder au remboursement selon les modalités qu’ils fixent. […] » |
B – Le droit britannique
7. |
L’évolution législative en la matière, jusqu’à la loi de finances de 1997, a été reprise dans l’arrêt M&S I ( 4 ) dans les termes suivants : |
8. |
L’article 11, A, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive n’a fait l’objet d’une transposition correcte au Royaume‑Uni qu’à compter du 1er août 1992, en vertu de la Finance (no 2) Act 1992 (deuxième loi de finances de 1992), qui a modifié l’article 10, paragraphe 3, de la Value Added Tax Act 1983 (loi de 1983 sur la TVA). |
9. |
Cette dernière disposition est désormais ainsi rédigée : « Si la contrepartie de la fourniture ou de la prestation n’est pas monétaire ou ne l’est pas entièrement, la valeur à prendre en considération est la valeur monétaire correspondante, majorée de la taxe due. » |
10. |
S’agissant de la législation relative au remboursement des sommes indûment versées au titre de la TVA, les dispositions pertinentes de l’article 24 de la Finance Act 1989 (loi de finances de 1989) étaient libellées comme suit (avec effet à compter du 1er janvier 1990) :
[…]
[…]
[…] » |
11. |
L’article 24 de la loi de finances de 1989 a été abrogé et remplacé par l’article 80 de la Value Added Tax Act 1994 (loi de 1994 sur la TVA) avec effet au 1er septembre 1994. Les dispositions pertinentes de l’article 80 sont libellées de manière quasi identique à celles de l’article 24. |
12. |
Le 18 juillet 1996, un membre du gouvernement britannique, Her Majesty’s Paymaster General (trésorier général), a annoncé au Parlement que, eu égard aux risques croissants que courait le Trésor du fait des demandes de remboursement de sommes perçues par erreur au titre des impôts, le gouvernement avait l’intention de modifier, dans le Finance Bill 1997 (projet de loi de finances de 1997), le délai de prescription pour les demandes de remboursement concernant la TVA et les autres impôts indirects en le réduisant à trois ans. Ce nouveau délai de prescription devait s’appliquer immédiatement aux demandes en cours à la date de cette annonce, afin d’éviter que la modification législative envisagée ne soit privée d’effet en raison du temps qui s’écoulerait avant la fin du processus parlementaire. |
13. |
Le 4 décembre 1996, la Chambre des communes a adopté le projet de budget du gouvernement, y compris la proposition annoncée le 18 juillet 1996, qui est devenue l’article 47 du projet de loi de finances de 1997. |
14. |
La loi de finances de 1997 a été définitivement adoptée le 19 mars 1997. Son article 47, paragraphe 1, modifiait l’article 80 de la loi de 1994 sur la TVA, en abrogeant le paragraphe 5 et en modifiant le paragraphe 4, qui dispose, depuis cette modification ce qui suit : « Les Commissioners ne sont pas tenus, à la suite d’une demande introduite au titre du présent article, de rembourser un montant qui leur a été versé plus de trois ans avant l’introduction de la demande. » |
15. |
L’article 47, paragraphe 2, de la loi de finances de 1997 prévoit ce qui suit : « [...] [L]e paragraphe 1 ci-dessus est entré en vigueur le 18 juillet 1996 et s’applique, aux fins des remboursements opérés à cette date et après cette date, à toutes les demandes introduites au titre de l’article 80 de la [loi de 1994 sur la TVA], y compris aux demandes introduites avant cette date et aux demandes relatives aux paiements opérés avant cette date. » |
16. |
Conformément à l’article 25, paragraphe 6, de la loi de 1994 sur la TVA, on ne peut procéder à la déduction de... |
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