Francisco Javier Rosado Santana v Consejería de Justicia y Administración Pública de la Junta de Andalucía.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:301
Date12 May 2011
Celex Number62010CC0177
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-177/10

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme ELEANOR Sharpston

présentées le 12 mai 2011 (1)

Affaire C‑177/10

Francisco Javier Rosado Santana

contre

Consejería de Justicia y Administración Pública de la Junta de Andalucía

[demande de décision préjudicielle formée par le Juzgado de lo Contencioso-Administrativo n° 12 de Sevilla (Espagne)]

«Politique sociale – Travail à durée déterminée – Fonction publique – Principe de non-discrimination – Agents temporaires»





1. Par la présente demande de décision préjudicielle, la Cour est de nouveau invitée à interpréter l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999 entre la Confédération européenne des syndicats (CES), l’Union des confédérations de l’industrie et des employeurs d’Europe (UNICE) et le Centre européen des entreprises à participation publique (CEEP), figurant en annexe à la directive 1999/70/CE (2) (ci-après l’«accord-cadre»).

2. La question spécifique que pose la présente affaire concerne la compatibilité avec la clause 4 de l’accord-cadre d’une disposition des règles régissant un exercice de promotion des fonctionnaires. La disposition en cause imposait aux candidats d’avoir travaillé un certain temps en qualité de fonctionnaire de carrière (au sens de fonctionnaire titulaire ou permanent) avant d’acquérir le droit d’être promus selon cette procédure. Les fonctionnaires dont l’expérience antérieure avait été acquise sous un contrat à durée déterminée étaient de ce fait dépourvus de ce droit.

I – Le cadre juridique

A – La législation de l’Union

3. Le deuxième considérant du préambule de l’accord-cadre dispose:

«Les parties au présent accord [CES, UNICE et CEEP] reconnaissent que les contrats à durée indéterminée sont et resteront la forme générale de relations de travail entre employeurs et travailleurs. Elles reconnaissent également que les contrats de travail à durée déterminée répondent, dans certaines circonstances, à la fois aux besoins des employeurs et à ceux des travailleurs.»

4. La clause 1 de l’accord-cadre dispose:

«Le présent accord-cadre a pour objet:

a) d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée en assurant le respect du principe de non-discrimination;

[…]»

5. La clause 3 de l’accord-cadre prévoit:

«Aux termes du présent accord, on entend par:

1. ‘travailleur à durée déterminée’, une personne ayant un contrat ou une relation de travail à durée déterminée conclu directement entre l’employeur et le travailleur où la fin du contrat ou de la relation de travail est déterminée par des conditions objectives telles que l’atteinte d’une date précise, l’achèvement d’une tâche déterminée ou la survenance d’un événement déterminé.

2. ‘travailleur à durée indéterminée comparable’, un travailleur ayant un contrat ou une relation de travail à durée indéterminée dans le même établissement, et ayant un travail/emploi identique ou similaire, en tenant compte des qualifications/compétences. […]»

6. La clause 4 de l’accord-cadre, intitulée «Principe de non‑discrimination», dispose:

«1. Pour ce qui concerne les conditions d’emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d’une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu’ils travaillent à durée déterminée, à moins qu’un traitement différent soit justifié par des raisons objectives.

[…]

4. Les critères de périodes d’ancienneté relatifs à des conditions particulières d’emploi sont les mêmes pour les travailleurs à durée déterminée que pour les travailleurs à durée indéterminée, sauf lorsque des critères de périodes d’ancienneté différents sont justifiés par des raisons objectives.»

7. La clause 8, paragraphe 5, de l’accord-cadre prévoit:

«La prévention et le règlement des litiges et plaintes résultant de l’application du présent accord sont traités conformément à la législation, aux conventions collectives et aux pratiques nationales.»

B – Le droit national

8. La décision de renvoi indique que, outre la directive et l’accord-cadre, M. Rosado Santana invoque, d’une part, l’article 14 de la Constitution espagnole, qui consacre le principe de l’égalité de traitement, et, d’autre part, l’article 1er de la loi 70/1978, du 26 décembre 1978, sur la reconnaissance des services antérieurs dans l’administration publique, qui dispose:

«1. Les fonctionnaires titulaires de l’administration de l’État, de l’administration locale, institutionnelle, de la justice, des tribunaux du travail et de la Sécurité sociale bénéficient de la reconnaissance de la totalité des périodes de service qu’ils ont accomplies indistinctement pour ces administrations avant la constitution des catégories, échelons ou postes concernés, ou avant qu’il y aient accédé, ainsi que de la période de stage pour les fonctionnaires ayant subi avec succès les épreuves d’entrée dans l’administration publique.

2. Sont considérées comme des périodes de service effectif toutes les périodes indistinctement accomplies dans les secteurs de l’administration publique visés au paragraphe précédent, qu’elles aient été accomplies en qualité d’agent employé (à durée déterminée ou intérimaire) ou en régime de contrat administratif ou de travail, que ces contrats aient ou non été conclus par écrit.»

9. La décision de renvoi relève ensuite que la possibilité d’appliquer la loi 70/1978 est contestée dans la procédure au principal par la Junta de Andalucía (gouvernement autonome d’Andalousie) (Espagne) (ci-après la «Junta»), au motif que la jurisprudence nationale dispose que cette législation ne s’applique pas aux procédures de sélection de fonctionnaires basées sur le mérite.

10. Dans ses observations écrites, le gouvernement espagnol affirme également que la loi 70/1978 est inapplicable. Il vise, pour sa part, la vingt-deuxième disposition additionnelle de loi 30/1984, du 2 août 1984, portant réforme de la fonction publique espagnole. Cette disposition définit certains critères d’éligibilité à la promotion du groupe D au groupe C dans le cadre du système de carrière de la fonction publique espagnole. Ces critères comprennent une ancienneté de dix ans en qualité de fonctionnaire titulaire dans le groupe D. Selon la Junta, la disposition en cause trouve son expression spécifique, au sein de la législation de la communauté autonome d’Andalousie, dans le décret 2/2002, du 9 janvier 2002, dont l’article 32, paragraphe 2, a une teneur équivalente.

11. Le gouvernement espagnol mentionne également la loi 7/2007, du 12 avril 2007, portant adoption du statut de base des agents publics. L’article 10 de cette loi s’applique aux fonctionnaires temporaires et contient des dispositions concernant leur nomination, la nature de leurs fonctions et la fin de celles-ci (3).

12. La décision de renvoi évoque ensuite la jurisprudence de la Cour constitutionnelle espagnole. Il apparaît que celle-ci a déclaré que les différences de rémunération entre fonctionnaires temporaires et titulaires occupant les mêmes fonctions peuvent ne pas être contraires au principe d’égalité de traitement, tel que défini à l’article 14 de la Constitution espagnole. Des traitements juridiques différents sont ainsi susceptibles d’être constitutionnels.

13. Enfin, la décision de renvoi relève qu’une grande part des juridictions espagnoles (mais pas toutes) estime que, lorsqu’un avis public d’une procédure de recrutement fixe les règles régissant, notamment, l’éligibilité, celles-ci constituent la «loi» de cette procédure. Si un candidat ne conteste pas ces règles dans les délais impartis, il ne peut plus invoquer par la suite leur illégalité pour contester le résultat en ce qui le concerne.

14. Selon les observations écrites du gouvernement espagnol, il découle de cette jurisprudence qu’il existe deux, et seulement deux, possibilités ouvertes à un candidat souhaitant contester une procédure de sélection dans le cadre d’un recrutement dans la fonction publique. Si le candidat souhaite contester les conditions applicables à la procédure de sélection en cause, il doit introduire un recours visant ces conditions. Si, en revanche, il entend contester la manière selon laquelle cette procédure a été menée, son recours doit viser le déroulement de celle-ci. Il lui est cependant impossible de contester les conditions applicables à la procédure de sélection indirectement, sous la forme d’un recours ostensiblement dirigé contre son déroulement. En vertu de la loi 29/1998, du 13 juillet 1998, relative aux litiges en matière de contentieux administratif, dans des circonstances telles que celles au principal, un recours visant les conditions régissant la procédure de sélection devait être formé dans les deux mois suivant la date de publication de l’avis de concours. En l’espèce, un recours aurait donc dû être introduit avant le 17 mars 2008.

II – Les faits, la procédure et les questions préjudicielles

15. M. Rosado Santana, le requérant au principal, s’est engagé pour la première fois dans une relation de travail avec la Junta le 19 mai 1989, lorsqu’il a été engagé sous contrat à durée déterminée. Cette relation a pris fin le 27 mai 2005. Le 28 mai 2005, il est devenu fonctionnaire titulaire au titre d’un contrat à durée indéterminée.

16. La décision de renvoi indique que, par avis du 17 décembre 2007 de la Consejería de Justicia y Administración Pública (ministère de la Justice et de l’Administration publique) de la Junta, il a été annoncé l’organisation d’épreuves de sélection pour l’accès des fonctionnaires, par le système de promotion interne, à la catégorie générale des administrateurs de cette administration publique (ci-après l’«avis de concours»). La clause 2, paragraphe 1, sous b), de l’avis de concours indiquait que les candidats étaient tenus de «détenir ou être en mesure d’obtenir le titre de Bachiller Superior [baccalauréat] […] ou, à défaut, justifier d’une ancienneté de dix années comme fonctionnaire titulaire dans les catégories appartenant au groupe D, ou...

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