combit Software GmbH v Commit Business Solutions Ltd.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:351
Date25 May 2016
Celex Number62015CC0223
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-223/15
62015CC0223

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 25 mai 2016 ( 1 )

Affaire C‑223/15

combit Software GmbH

contre

Commit Business Solutions Ltd

[demande de décision préjudicielle formée par l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne)]

«Propriété intellectuelle — Marque de l’Union européenne — Règlement (CE) no 207/2009 — Article 1er, paragraphe 2 — Caractère unitaire de la marque de l’Union européenne — Article 102, paragraphe 1 — Interdiction d’actes de contrefaçon prononcée par un tribunal des marques de l’Union européenne — Portée territoriale — Limitation de la portée territoriale de l’interdiction en raison de l’absence de risque de confusion dans un État membre autre que celui du tribunal saisi — Charge de la preuve»

Introduction

1.

La présente demande préjudicielle offre à la Cour l’occasion de développer sa jurisprudence résultant de l’arrêt DHL Express France ( 2 ) et de préciser les conditions dans lesquelles une interdiction, prononcée au titre de l’article 9, paragraphe 1, sous b), et de l’article 102, paragraphe 1, du règlement (CE) no 207/2009 sur la marque de l’Union européenne ( 3 ), peut être assortie d’une limitation territoriale.

2.

Cette problématique a été soulevée par une juridiction allemande, statuant en tant que tribunal des marques de l’Union européenne, dans le cadre d’une action en contrefaçon introduite par un titulaire de la marque verbale de l’Union européenne « combit », visant à interdire l’usage d’un signe « Commit » pour des produits et des services relevant du domaine de l’informatique.

Le cadre juridique

3.

Les considérants 3 et 16 du règlement no 207/2009 sont libellés comme suit :

« (3)

Pour poursuivre les objectifs [...] de [l’Union], il apparaît nécessaire de prévoir un régime [de l’Union] des marques conférant aux entreprises le droit d’acquérir, selon une procédure unique, des marques [de l’Union européenne] qui jouissent d’une protection uniforme et produisent leurs effets sur tout le territoire de l’Union. Le principe du caractère unitaire de la marque [de l’Union européenne] ainsi exprimé devrait s’appliquer sauf disposition contraire du présent règlement.

[...]

(16)

Il est indispensable que les décisions sur la validité et la contrefaçon des marques [de l’Union européenne] produisent effet et s’étendent à l’ensemble de [l’Union], seul moyen d’éviter des décisions contradictoires [...] et des atteintes au caractère unitaire des marques [de l’Union européenne]. [...] »

4.

L’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 dispose :

« La marque [de l’Union européenne] a un caractère unitaire. Elle produit les mêmes effets dans l’ensemble de [l’Union] : elle ne peut être enregistrée, transférée, faire l’objet d’une renonciation, d’une décision de déchéance des droits du titulaire ou de nullité, et son usage ne peut être interdit, que pour l’ensemble de [l’Union]. Ce principe s’applique sauf disposition contraire du présent règlement. »

5.

L’article 9, paragraphe 1, de ce règlement ( 4 ) dispose :

« La marque [de l’Union européenne] confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires :

[...]

b)

d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque [de l’Union européenne] et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque [de l’Union européenne] et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque ;

[...] »

6.

Aux termes de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement :

« Lorsqu’un tribunal des marques [de l’Union européenne] constate que le défendeur a contrefait ou menacé de contrefaire une marque [de l’Union européenne], il rend, sauf s’il y a des raisons particulières de ne pas agir de la sorte, une ordonnance lui interdisant de poursuivre les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon. Il prend également, conformément à la loi nationale, les mesures propres à garantir le respect de cette interdiction. »

Les faits du litige au principal

7.

combit Software GmbH, société de droit allemand, est titulaire des marques verbales, allemande et de l’Union européenne, protégeant le signe « combit », pour des produits et des services dans le domaine de l’informatique.

8.

Commit Business Solutions Ltd est une société de droit israélien qui vend des logiciels pourvus du signe verbal « Commit » dans de nombreux pays par l’intermédiaire de la boutique en ligne accessible sur son site Internet (www.commitcrm.com). Au moment des faits à l’origine du litige au principal, les offres de vente sur ce site pouvaient être consultées en langue allemande et, une fois achetés en ligne, les logiciels pouvaient être directement livrés en Allemagne.

9.

combit Software a assigné Commit Business Solutions devant le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf, Allemagne), en tant que tribunal des marques de l’Union européenne, en vue d’obtenir l’interdiction de l’usage dans l’Union du signe verbal « Commit » pour des logiciels, fondée sur un risque de confusion avec la marque de l’Union européenne combit. À titre subsidiaire, la requérante a invoqué sa marque allemande et demandé l’interdiction de l’usage du signe verbal en cause au principal en Allemagne.

10.

Le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf) a accueilli la demande subsidiaire de combit Software et a condamné Commit Business Solutions sur la base de la marque allemande, après avoir constaté l’existence d’un risque de confusion entre les signes « combit » et « Commit » pour le consommateur allemand des produits concernés. En revanche, le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf) a rejeté la demande principale fondée sur la marque de l’Union européenne en raison d’un défaut d’usage.

11.

combit Software a interjeté appel de cette décision devant l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf) au sujet du rejet de sa demande fondée sur la marque de l’Union européenne et afin d’obtenir une interdiction couvrant l’ensemble du territoire de l’Union.

12.

La juridiction de renvoi, statuant en tant que tribunal des marques de l’Union européenne de seconde instance, a constaté que, contrairement à ce qui avait été jugé en première instance, l’usage de la marque de l’Union européenne invoquée par la requérante était établi. Elle a considéré, en outre, que l’existence d’un risque de confusion entre les signes concernés en Allemagne constituait une chose jugée, mais que la situation était différente en ce qui concerne les pays anglophones. Selon la juridiction de renvoi, les consommateurs dans ces pays seraient en mesure de percevoir la marque combit comme l’abréviation des deux termes « com » et « bit », peu distinctifs dans le domaine de l’informatique, ainsi que de saisir immédiatement la signification du mot « commit », de sorte que la similitude phonétique entre les signes en conflit serait neutralisée par leur différence conceptuelle.

13.

La juridiction de renvoi s’interroge ainsi sur la mise en œuvre du principe du caractère unitaire de la marque de l’Union européenne dans une situation, telle que celle de l’affaire au principal, où l’existence d’un risque de confusion ne peut être constatée pour tous les États membres, notamment pour les pays anglophones. Elle observe, d’une part, que l’application rigoureuse de ce principe conduirait à permettre au titulaire de la marque de l’Union européenne d’interdire l’usage d’un signe en conflit également dans les États membres dans lesquels il n’existe aucun risque de confusion. D’autre part, elle remarque que si un tribunal des marques de l’Union européenne était tenu d’examiner le risque de confusion pour chacun des États membres pris individuellement, un tel examen ralentirait la procédure et engendrerait des frais importants pour les parties.

Les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

14.

C’est dans ce contexte que l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« Quelles conséquences cela a-t-il sur l’appréciation du risque de confusion entre une marque [de l’Union européenne] verbale et une dénomination dont il est allégué qu’elle contrefait ladite marque lorsque, du point de vue du consommateur moyen d’une partie des États membres, la similitude phonétique entre la marque et la dénomination est neutralisée par une différence conceptuelle, mais non du point de vue du consommateur moyen d’autres États membres :

a)

Est-ce le point de vue du consommateur moyen des premiers États membres qui est déterminant pour apprécier le risque de confusion ou le point de vue du consommateur moyen des autres États membres, ou encore le point de vue d’un consommateur moyen fictif de tous les États membres ?

b)

Convient-il de considérer que la contrefaçon de la marque [de l’Union européenne] est constituée, ou n’est pas constituée, sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne lorsque le risque de confusion n’existe que sur une partie de ce territoire ou convient-il de différencier alors entre les États membres ? »

15.

La décision de renvoi, datée du 12 mai 2015, est parvenue au greffe de la Cour le 18 mai 2015. Des observations écrites ont été déposées par les...

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