Opinion of Advocate General Tanchev delivered on 7 February 2018.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:69
Date07 February 2018
Celex Number62016CC0681
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-681/16
62016CC0681

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 7 février 2018 ( 1 )

Affaire C‑681/16

Pfizer Ireland Pharmaceuticals, Operations Support Group

contre

Orifarm GmbH

[demande de décision préjudicielle formée par le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Adhésion de nouveaux États membres – Actes d’adhésion – Mécanisme spécifique – Droit des brevets – Médicament protégé par un certificat complémentaire de protection – Règlement (CE) no 469/2009 – Prorogation pédiatrique de la protection – Règlement (CE) no 1901/2006 – Produit protégé dans un ancien État membre et commercialisé dans un nouvel État membre en l’absence de protection demandée par le titulaire du brevet – Importations parallèles – Épuisement des droits de propriété intellectuelle »

1.

La présente demande de décision préjudicielle introduite par le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf, Allemagne) concerne les importations parallèles de médicaments en Allemagne en provenance de nouveaux États membres. Lorsqu’une protection par brevet équivalente n’était pas disponible dans ces États, les actes d’adhésion prévoient une exception à la libre circulation des marchandises. C’est le champ d’application de cette dérogation qui fait l’objet du présent litige.

2.

Dans l’affaire au principal, le titulaire d’un « certificat complémentaire de protection pour les médicaments » (ci-après un « CCP ») en Allemagne a introduit une action visant à ce que soit ordonné l’interdiction d’importations parallèles en provenance de la Bulgarie, de la République tchèque, de l’Estonie, de la Croatie, de la Lettonie, de la Lituanie, de la Hongrie, de la Pologne, de la Roumanie, de la Slovénie et de la Slovaquie (ci-après les « nouveaux États membres concernés ») et demande par conséquent des dommages et intérêts. La juridiction de renvoi a donc demandé l’interprétation des dispositions dérogatoires, désignées sous l’appellation « mécanisme spécifique », figurant dans les actes d’adhésion de ces États membres de 2003, de 2005 et de 2012.

I. Le cadre juridique

A. Les actes d’adhésion à l’Union européenne

3.

La première phrase du paragraphe 1 de l’annexe IV, point 2, de l’acte d’adhésion de 2003 ( 2 ) dispose :

« MÉCANISME SPÉCIFIQUE En ce qui concerne la République tchèque, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie, la Pologne, la Slovénie ou la Slovaquie, le titulaire, ou l’ayant-droit du titulaire, d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection délivré pour un médicament et enregistré dans un État membre à une date à laquelle cette protection ne pouvait pas être obtenue pour ce produit dans l’un des nouveaux États membres susmentionnés peut invoquer les droits conférés par ce brevet ou ce certificat complémentaire de protection pour empêcher l’importation et la commercialisation de ce produit dans l’État membre ou les États membres où le produit en question jouit de la protection d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection, même si ce produit a été commercialisé pour la première fois dans le nouvel État membre concerné par lui ou avec son accord. »

4.

La première phrase du paragraphe 1 de l’annexe V, point 1, de l’acte d’adhésion de 2005 ( 3 ) dispose :

« MÉCANISME SPÉCIFIQUE En ce qui concerne la Bulgarie ou la Roumanie, le titulaire, ou l’ayant-droit du titulaire, d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection délivré pour un médicament et déposé dans un État membre à une date à laquelle cette protection ne pouvait pas être obtenue pour ce produit dans l’un des nouveaux États membres susmentionnés, peut invoquer les droits conférés par ce brevet ou ce certificat complémentaire de protection pour empêcher l’importation et la commercialisation de ce produit dans l’État membre ou les États membres où le produit en question jouit de la protection d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection, même si ce produit a été commercialisé pour la première fois dans le nouvel État membre concerné par lui ou avec son accord. »

5.

La première phrase du paragraphe 1 de l’annexe IV, point 1, de l’acte d’adhésion de 2012 ( 4 ) dispose :

« MÉCANISME SPÉCIFIQUE En ce qui concerne la Croatie, le titulaire ou l’ayant-droit du titulaire d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection (CCP) délivré pour un médicament déposé dans un État membre à une date à laquelle une telle protection ne pouvait pas être obtenue en Croatie pour ce produit, peut invoquer les droits conférés par ce brevet ou ce CCP pour empêcher l’importation et la commercialisation de ce produit dans l’État membre ou les États membres où le produit en question jouit de la protection d’un brevet ou d’un CCP, même si ce produit a été commercialisé pour la première fois en Croatie par le titulaire ou avec son accord. »

B. Le règlement no 469/2009 relatif au CCP

6.

L’article 3 du règlement (CE) no 469/2009 ( 5 ) dispose :

« Le certificat est délivré, si, dans l’État membre où est présentée la demande visée à l’article 7 et à la date de cette demande :

a)

le produit est protégé par un brevet de base en vigueur ;

b)

le produit, en tant que médicament, a obtenu une autorisation de mise sur le marché en cours de validité conformément à la directive 2001/83/CE ou à la directive 2001/82/CE suivant les cas ;

[…] »

7.

L’article 7, paragraphe 1, du règlement no 469/2009 dispose :

« La demande de certificat doit être déposée dans un délai de six mois à compter de la date à laquelle le produit, en tant que médicament, a obtenu l’autorisation de mise sur le marché mentionnée à l’article 3, point b). »

8.

L’article 13, paragraphes 1 à 3, dudit règlement prévoit :

« 1. Le certificat produit effet au terme légal du brevet de base pour une durée égale à la période écoulée entre la date du dépôt de la demande du brevet de base et la date de la première autorisation de mise sur le marché dans la Communauté, réduite d’une période de cinq ans.

2. Nonobstant le paragraphe 1, la durée du certificat ne peut être supérieure à cinq ans à compter de la date à laquelle il produit effet.

3. Les périodes prévues aux paragraphes 1 et 2 sont prorogées de six mois en cas d’application de l’article 36 du règlement (CE) no 1901/2006. Dans ce cas, la période prévue au paragraphe 1 du présent article ne peut faire l’objet que d’une seule prorogation. »

C. Le règlement no 1901/2006 relatif à la prorogation pédiatrique

9.

L’article 36, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE) no 1901/2006 ( 6 ) dispose :

« Lorsqu’une demande présentée conformément à l’article 7 ou 8 comprend les résultats de l’ensemble des études réalisées selon un plan d’investigation pédiatrique approuvé, le titulaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection a droit à une prorogation de six mois de la période visée à l’article 13, paragraphes 1 et 2, du règlement (CEE) no 1768/92. »

II. Les faits au principal et les questions préjudicielles

10.

Pfizer Ireland Pharmaceuticals, Operations Support Group, la requérante au principal, est une entreprise pharmaceutique du groupe Pfizer, établie en Irlande, et était la titulaire enregistrée d’un CCP ( 7 ) protégeant la protéine Etanercept ( 8 ). L’Etanercept est une substance active du médicament Enbrel® produit et commercialisé par la requérante en Allemagne et dans beaucoup d’autres pays, et est autorisé pour le traitement de l’arthrite des adultes et des enfants ( 9 ).

11.

Orifarm GmbH, la défenderesse au principal, est une entreprise du groupe danois Orifarm, exerçant l’activité dite d’« importatrice parallèle » en Allemagne de médicaments provenant de pays ayant un niveau de prix moins élevé.

12.

Un CCP octroie une protection supplémentaire pour un médicament qui était protégé par un brevet de base et proroge les droits au titre de ce brevet pour un laps de temps déterminé après son expiration ( 10 ). Le CCP de la requérante a été délivré sur le fondement d’un brevet de base européen ( 11 ), qui produisait des effets en République fédérale d’Allemagne (RFA).

13.

Ce brevet avait été déposé le 31 août 1990 par l’entreprise pharmaceutique Roche ( 12 ), qui avait développé le produit et qui a pu faire usage de priorités suisses du 12 septembre 1989, du 8 mars 1990 et du 20 avril 1990.

14.

Le 31 août 1990, aucun des onze nouveaux États membres concernés, qui allaient adhérer à l’Union européenne en 2004, 2007 et 2013, ne prévoyaient de règles équivalentes pour la protection de produits pharmaceutiques ou d’indications thérapeutiques déterminées.

15.

Le 1er février 2000, l’entreprise pharmaceutique Wyeth Pharma a obtenu une autorisation pour l’Enbrel®, qui permettait la commercialisation de ce produit. Cette autorisation a d’abord été délivrée en Suisse et était également valable pour l’Union européenne.

16.

Le 26 juin 2003, Wyeth Pharma a demandé un CCP qui a été délivré le 11 janvier 2006 ( 13 ). En 2009, la requérante a racheté Wyeth Pharma et tous ses actifs, y compris le CCP ( 14 ).

17.

À l’expiration du brevet de base le 1er septembre 2010, le CCP est entré en vigueur pour une durée qui s’est achevée le 1er février 2015.

18.

Compte tenu de l’autorisation accordée pour Enbrel® en vue d’un usage pédiatrique et pour récompenser la recherche effectuée au bénéfice de la population pédiatrique, l’office allemand des brevets et des marques a accordé à la requérante, le 15 octobre 2012, une « prorogation pédiatrique » du CCP ( 15 ) de six mois supplémentaires, l’autorisation n’expirant...

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