Opinion of Advocate General Wahl delivered on 28 June 2018.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:518
Docket NumberC-147/17
Celex Number62017CC0147
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date28 June 2018
62017CC0147

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NILS WAHL

présentées le 28 juin 2018 ( 1 )

Affaire C-147/17

Sindicatul Familia Constanţae,

Ustinia Cvas,

Silvica Jianu,

Dumitra Bocu,

Cader Aziz,

Georgeta Crângaşu,

Sema Cutlacai

contre

Direcţia Generală de Asistenţă Socială şi Protecţia Copilului Constanţa

[demande de décision préjudicielle formée par la Curtea de Apel Constanţa (cour d’appel de Constanţa, Roumanie)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 2003/88/CE – Temps de travail – Champ d’application – Notion de “travailleur” – Assistants familiaux – Exclusion »

1.

Le placement familial peut prendre différentes formes. En général temporaire, il peut aller d’un répit de courte durée ou d’une prise en charge d’urgence d’enfants à un placement de longue durée à temps plein dès le plus jeune âge et jusqu’à ce que l’enfant concerné atteigne l’âge adulte. Selon les circonstances, le placement familial peut avoir lieu au domicile de l’assistant familial ou dans un cadre plus institutionnel, notamment dans un foyer ou un établissement.

2.

La présente affaire concerne des assistants familiaux qui accueillent des enfants à plein temps à leur domicile. La prestation de soins constitue leur activité principale et ils perçoivent à cet égard une indemnité versée par l’autorité compétente avec laquelle ils ont signé un contrat de travail. Compte tenu des besoins des enfants, les assistants familiaux ne sont pas autorisés, en principe, à partir en vacances sans les enfants. Ils ne perçoivent pas non plus d’indemnisation supplémentaire pour le fait de devoir veiller en permanence aux besoins des enfants sans avoir le droit à des périodes de repos prédéterminées ou à des vacances sans les enfants qui leur sont confiés.

3.

La question au cœur de la présente affaire est de savoir si ces assistants familiaux relèvent du champ d’application de la directive 2003/88/CE ( 2 ) qui fixe des règles relatives au temps de travail. Si tel est le cas, d’autres questions concernant l’application de dispositions spécifiques de cette directive se posent, compte tenu du fait, notamment, qu’il est impossible de déterminer avec exactitude le temps consacré par les assistants familiaux aux enfants qui leur ont été confiés, et ce parce que, à l’instar des parents, les assistants familiaux doivent veiller à ce que les enfants concernés puissent grandir sous une surveillance parentale continue et avec des soins adaptés à leur âge.

4.

J’expliquerai ci-après les raisons pour lesquelles les assistants familiaux en cause ne relèvent pas du champ d’application de la directive 2003/88.

I. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. La directive 89/391/CEE

5.

La directive 89/391/CEE ( 3 ) concerne la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail.

6.

L’article 2 de la directive 89/391 définit le champ d’application de celle‑ci de la manière suivante :

« 1. La [directive 89/391] s’applique à tous les secteurs d’activités, privés ou publics (activités industrielles, agricoles, commerciales, administratives, de service, éducatives, culturelles, de loisirs, etc.).

2. La [directive 89/391] n’est pas applicable lorsque des particularités inhérentes à certaines activités spécifiques dans la fonction publique, par exemple dans les forces armées ou la police, ou à certaines activités spécifiques dans les services de protection civile s’y opposent de manière contraignante.

Dans ce cas, il y a lieu de veiller à ce que la sécurité et la santé des travailleurs soient assurées, dans toute la mesure du possible, compte tenu des objectifs de la présente directive. »

2. La directive 2003/88

7.

La directive 2003/88 fixe des règles relatives à l’aménagement du temps de travail. Ces règles portent, notamment, sur les périodes minimales de repos et de pause (articles 3 à 5), la durée maximale hebdomadaire de travail (article 6) et les congés payés annuels (article 7).

8.

Il ressort des considérants 3 et 4 de la directive 2003/88 que celle-ci vise à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail.

9.

L’article 1er de la directive 2003/88 définit l’objet et le champ d’application de cette directive de la manière suivante :

« 1. La [directive] fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d’aménagement du temps de travail.

2. La [directive] s’applique :

a)

aux périodes minimales de repos journalier, de repos hebdomadaire et de congé annuel ainsi qu’au temps de pause et à la durée maximale hebdomadaire de travail, et

b)

à certains aspects du travail de nuit, du travail posté et du rythme de travail.

3. La [directive] s’applique à tous les secteurs d’activités, privés ou publics, au sens de l’article 2 de la directive [89/391], sans préjudice des articles 14, 17, 18 et 19 de la [directive].

Sans préjudice de l’article 2, paragraphe 8, la [directive] ne s’applique pas aux gens de mer, tels que définis dans la directive 1999/63/CE.

4. Les dispositions de la [directive 89/391] s’appliquent pleinement aux matières visées au paragraphe 2, sans préjudice des dispositions plus contraignantes et/ou spécifiques contenues dans la [directive]. »

10.

L’article 3 de la directive 2003/88 régit le repos journalier. Il est libellé comme suit :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de vingt-quatre heures, d’une période minimale de repos de onze heures consécutives. »

11.

L’article 4 de la directive 2003/88 porte sur les temps de pause. Il dispose :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie, au cas où le temps de travail journalier est supérieur à six heures, d’un temps de pause dont les modalités, et notamment la durée et les conditions d’octroi, sont fixées par des conventions collectives ou accords conclus entre partenaires sociaux ou, à défaut, par la législation nationale. »

12.

L’article 5 de la directive 2003/88 porte sur le repos hebdomadaire. Il est libellé comme suit :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de sept jours, d’une période minimale de repos sans interruption de vingt-quatre heures auxquelles s’ajoutent les onze heures de repos journalier prévues à l’article 3.

Si des conditions objectives, techniques ou d’organisation du travail le justifient, une période minimale de repos de vingt-quatre heures pourra être retenue. »

13.

L’article 6 de la directive 2003/88 fixe les règles relatives à la durée maximale hebdomadaire de travail. Cet article dispose :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que, en fonction des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs :

a)

la durée hebdomadaire du travail soit limitée au moyen de dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou de conventions collectives ou d’accords conclus entre partenaires sociaux ;

b)

la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours n’excède pas quarante-huit heures, y compris les heures supplémentaires. »

14.

L’article 7 de la directive 2003/88, intitulé « Congé annuel », dispose ce qui suit :

« 1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines, conformément aux conditions d’obtention et d’octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales.

2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité financière, sauf en cas de fin de relation de travail. »

15.

L’article 17 de la directive 2003/88 autorise les États membres à déroger à certaines dispositions de cette directive. Cet article est libellé comme suit :

« 1. Dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, les États membres peuvent déroger aux articles 3 à 6, 8 et 16 lorsque la durée du temps de travail, en raison des caractéristiques particulières de l’activité exercée, n’est pas mesurée et/ou prédéterminée ou peut être déterminée par les travailleurs eux-mêmes, et notamment lorsqu’il s’agit :

[…]

b)

de main-d’œuvre familiale, ou

[…]

2. Les dérogations prévues aux paragraphes 3, 4 et 5 peuvent être adoptées par voie législative, réglementaire et administrative ou par voie de conventions collectives ou d’accords conclus entre partenaires sociaux, à condition que des périodes équivalentes de repos compensateur soient accordées aux travailleurs concernés ou que, dans des cas exceptionnels dans lesquels l’octroi de telles périodes équivalentes de repos compensateur n’est pas possible pour des raisons objectives, une protection appropriée soit accordée aux travailleurs concernés.

3. Conformément au paragraphe 2 [de la présente disposition], il peut être dérogé aux articles 3, 4, 5, 8 et 16 :

[…]

b)

pour les activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d’assurer la protection des biens et des personnes, notamment lorsqu’il s’agit de gardiens ou de concierges ou d’entreprises de gardiennage ;

c)

pour les activités caractérisées par la nécessité d’assurer la continuité du service ou de la production […]

[…]

4. Conformément au paragraphe 2 du présent article, il peut être dérogé aux articles 3 et 5 :

[…]

b)

pour les activités caractérisées par des périodes de travail fractionnées dans la journée...

To continue reading

Request your trial
1 practice notes
  • Conclusions de l'avocat général M. H. Saugmandsgaard Øe, présentées le 28 janvier 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • January 28, 2021
    ...39 et jurisprudence citée), ainsi que conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Sindicatul Familia Constanţa e.a. (C‑147/17, EU:C:2018:518, point 14 Et ce également à l’égard de la population des autres États membres. Voir, sur ce point, la « clause de solidarité » figurant à l’ar......
1 cases
  • Conclusions de l'avocat général M. H. Saugmandsgaard Øe, présentées le 28 janvier 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • January 28, 2021
    ...39 et jurisprudence citée), ainsi que conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Sindicatul Familia Constanţa e.a. (C‑147/17, EU:C:2018:518, point 14 Et ce également à l’égard de la population des autres États membres. Voir, sur ce point, la « clause de solidarité » figurant à l’ar......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT