bpost SA v Institut belge des services postaux et des télécommunications (IBPT).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2302
Docket NumberC-340/13
Celex Number62013CC0340
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date16 October 2014
62013CC0340

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 16 octobre 2014 ( 1 )

Affaire C‑340/13

bpost SA

contre

Institut belge des services postaux et des télécommunications (IBPT)

[demande de décision préjudicielle formée par la cour d’appel de Bruxelles (Belgique)]

«Services postaux — Directive 97/67/CE — Relations entre le prestataire du service universel et les intermédiaires regroupant des envois postaux — Tarifs spéciaux — Interdiction de discrimination — Rabais quantitatifs»

1.

Bpost SA (ci-après «bpost») est un prestataire du service postal universel (ci-après un «PSU») ( 2 ) en Belgique. Outre les tarifs standard applicables au service de la poste aux lettres, bpost applique deux types de réductions de prix. Les «rabais opérationnels» sont octroyés lorsqu’un client prépare les envois avant de les remettre à bpost (par exemple, en les triant en fonction du format, de l’emballage et du poids ou en confiant des envois prétriés aux centres de tri de bpost). Les «rabais quantitatifs» sont calculés exclusivement en fonction des recettes que perçoit bpost grâce à un client au cours d’une période de référence. Avant l’année 2010, les intermédiaires (entreprises regroupant le courrier émanant de plusieurs expéditeurs) pouvaient agréger le volume des envois qu’ils traitaient afin d’obtenir des rabais quantitatifs plus importants. Cette possibilité a pris fin en 2010, lorsque bpost a décidé de calculer les rabais quantitatifs en fonction des volumes de courrier que chaque expéditeur décide de poster.

2.

Au mois de juillet 2011, l’autorité nationale de régulation des services postaux en Belgique (Institut belge des services postaux et des télécommunications, ci‑après l’«IBPT») a conclu à l’incompatibilité de la nouvelle méthode de calcul de bpost avec les dispositions de la loi belge transposant le principe de non‑discrimination inscrit à l’article 12, cinquième tiret, de la directive 97/67/CE ( 3 ). Cette décision reposait en substance sur la constatation selon laquelle il existait une différence de traitement entre les intermédiaires et les expéditeurs individuels d’envois en nombre dès lors que, pour un volume déterminé de courrier confié à bpost, un expéditeur individuel d’envois en nombre avait droit à un rabais quantitatif plus important qu’un intermédiaire. Bpost a interjeté appel de cette décision devant la cour d’appel de Bruxelles (Belgique) qui s’interroge, d’une part, sur le champ d’application de l’article 12, cinquième tiret, de la directive sur les services postaux et, d’autre part, sur le point de savoir si les intermédiaires et les expéditeurs individuels d’envois en nombre se trouvent dans une situation comparable s’agissant des rabais quantitatifs. C’est dans ce contexte que la Cour est invitée à préciser la portée de son raisonnement dans l’affaire Deutsche Post e.a. ( 4 ), dans le cadre de laquelle elle a considéré que si un PSU accorde des rabais opérationnels à des expéditeurs individuels, les intermédiaires devraient également en bénéficier aux mêmes conditions.

Droit applicable

3.

La directive de 1997 a engagé le processus de la libéralisation graduelle du marché des services postaux. Cette directive a établi des règles communes concernant notamment la prestation d’un service postal universel au sein de la Communauté européenne et les principes tarifaires pour la prestation du service universel ( 5 ).

4.

Conformément à la directive sur les services postaux, un «réseau postal» est l’ensemble de l’organisation et des moyens de toute nature mis en œuvre par le ou les PSU, en vue notamment de la levée des envois postaux couverts par une obligation de service universel aux points d’accès sur l’ensemble du territoire, l’acheminement et le traitement de ces envois du point d’accès du réseau postal jusqu’au centre de distribution, et la distribution des envois aux destinataires ( 6 ). Le terme «PSU» fait référence au prestataire de services postaux public ou privé qui assure la totalité ou une partie du service postal universel dans un État membre et dont l’identité a été communiquée à la Commission européenne ( 7 ). L’«expéditeur» est toute personne physique ou morale qui est à l’origine des envois postaux ( 8 ).

5.

Le considérant 26 de la directive sur les services postaux indique que les tarifs appliqués au service postal universel doivent être objectifs, transparents, non discriminatoires et orientés sur les coûts, afin d’assurer une saine gestion du service universel et d’éviter des distorsions de concurrence. Ces principes sont reflétés à l’article 12 de la directive sur les services postaux. Dans la directive de 1997, cette disposition s’énonçait comme suit:

«Les États membres prennent des mesures pour que les tarifs de chacun des services faisant partie de la prestation du service universel soient conformes aux principes suivants:

les prix doivent être abordables et doivent être tels que tous les utilisateurs aient accès aux services offerts,

les prix doivent être orientés sur les coûts; les États membres peuvent décider qu’un tarif unique est appliqué sur l’ensemble de leur territoire national,

l’application d’un tarif unique n’exclut pas le droit pour le ou les prestataires du service universel de conclure des accords tarifaires individuels avec les clients,

les tarifs doivent être transparents et non discriminatoires.»

6.

Dans sa proposition qui a conduit à l’adoption de la directive de 2002, la Commission a indiqué que les modifications proposées de la directive de 1997 avaient pour objet de «définir clairement les étapes de la poursuite de l’ouverture du secteur postal de la Communauté selon un processus planifié qui laissera tout le temps nécessaire au marché dans son ensemble, et aux prestataires du service universel en particulier, pour mener à bien la modernisation structurelle nécessaire et s’adapter à une concurrence accrue dans un contexte réglementaire stable et prévisible» ( 9 ).

7.

La Commission a observé dans ce contexte que, alors que des tarifs spéciaux étaient proposés par le PSU «à de nombreuses entreprises ou expéditeurs d’envois en nombre ainsi qu’aux intermédiaires sur la base des coûts évités», des plaintes avaient été déposées à ce sujet contre certains opérateurs historiques et que, par conséquent, il était nécessaire d’établir clairement «que les principes de transparence et de non‑discrimination doivent toujours être respectés dans la mise en œuvre de ces tarifs spéciaux et de l’ensemble des conditions qui s’y rapportent» ( 10 ). La Commission a donc proposé d’insérer dans l’article 9 de la directive de 1997 (qui fait partie du chapitre 4 relatif aux «Conditions régissant la prestation des services non réservés et l’accès au réseau») un nouveau tiret soulignant l’application du principe de non-discrimination dans le contexte des tarifs spéciaux.

8.

Le tiret proposé a été adopté tel quel, bien qu’il ait finalement été inséré non pas dans l’article 9 mais dans l’article 12 (qui fait partie du chapitre 5 intitulé «Principes tarifaires et transparence des comptes»). Le considérant 29 de la directive de 2002 adopte la formulation de la proposition de la Commission de 2000 lorsqu’il énonce que «[l]es [PSU] proposent habituellement des services, par exemple aux entreprises, aux intermédiaires qui groupent les envois de plusieurs clients, ainsi qu’aux expéditeurs d’envois en nombre, qui permettent à ces clients d’entrer dans la chaîne postale en des points différents et à des conditions différentes de ce qui est le cas pour le service de la poste aux lettres traditionnel» et que «[c]e faisant, il convient qu’[ils] respectent les principes de transparence et de non-discrimination, à la fois dans les relations entre les tiers et dans les relations entre les tiers et les [PSU] fournissant des services équivalents […]».

9.

Ainsi, dans la version résultant de la modification apportée par la directive de 2002, le cinquième tiret ajouté dans l’article 12 de la directive sur les services postaux disposait:

«Lorsqu’ils appliquent des tarifs spéciaux, par exemple pour les services aux entreprises, aux expéditeurs d’envois en nombre ou aux intermédiaires chargés de grouper les envois de plusieurs clients, les prestataires du service universel sont tenus de respecter les principes de transparence et de non-discrimination en ce qui concerne tant les tarifs proprement dits que les conditions qui s’y rapportent. Lesdits tarifs tiennent compte des coûts évités par rapport aux services traditionnels comprenant la totalité des prestations proposées concernant la levée, le transport, le tri et la distribution des correspondances individuelles et s’appliquent, tout comme les conditions y afférentes, de la même manière tant dans les relations entre les tiers que dans les relations entre les tiers et les prestataires du service universel fournissant des services équivalents. Tous ces tarifs sont à la disposition des particuliers utilisant les services postaux dans des conditions similaires.»

10.

La directive de 2008 avait pour objet d’achever le processus de libéralisation engagé par la directive de 1997 et de confirmer la date définitive de l’achèvement du marché intérieur des services postaux ( 11 ).

11.

Dans sa proposition qui a débouché sur l’adoption de la directive de 2008, la Commission a notamment souligné qu’il était vital d’augmenter la souplesse tarifaire des PSU pour leur permettre de faire face à la concurrence accrue – particulièrement dans les segments du marché les plus rentables comme le courrier commercial – à laquelle ils seraient exposés du fait de la libéralisation complète des marchés...

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