European Commission v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:604
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-389/15
Date26 July 2017
Celex Number62015CC0389
Procedure TypeRecours en annulation - fondé
62015CC0389

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 26 juillet 2017 ( 1 )

Affaire C‑389/15

Commission européenne

contre

Conseil de l’Union européenne

« Recours en annulation – Décision du Conseil autorisant l’ouverture de négociations relatives à un arrangement de Lisbonne révisé concernant les appellations d’origine et les indications géographiques – Compétence exclusive de l’Union – Article 3, paragraphe 1, TFUEArticle 207 TFUE – Politique commerciale commune – Aspects commerciaux de la propriété intellectuelle »

1.

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour d’annuler la décision du Conseil de l’Union européenne, du 7 mai 2015, autorisant l’ouverture de négociations relatives à un arrangement de Lisbonne révisé concernant les appellations d’origine et les indications géographiques, pour ce qui est des questions qui relèvent de la compétence de l’Union européenne ( 2 ).

2.

À la suite des avis 3/15 ( 3 ) et 2/15 ( 4 ), la Cour est, avec la présente affaire, une nouvelle fois invitée à préciser l’étendue de la politique commerciale commune, qui constitue, comme le prévoit l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE, un domaine de compétence exclusive de l’Union. Plus précisément, la Cour devra décider si la mise en place d’un système d’enregistrement international et de protection réciproque des appellations d’origine et des indications géographiques, tel que celui auquel se rapporte la décision attaquée, relève ou non des « aspects commerciaux de la propriété intellectuelle », au sens de l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

I. Le cadre juridique

A. Le droit international

3.

L’arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d’origine et leur enregistrement international, signé à Lisbonne le 31 octobre 1958 (ci-après l’« arrangement de Lisbonne »), est un traité administré par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), auquel peut adhérer tout État partie à la convention pour la protection de la propriété industrielle, signée à Paris le 20 mars 1883 (ci-après la « convention de Paris »). Il est entré en vigueur le 25 septembre 1966 avant d’être révisé en 1967, puis modifié en 1979.

4.

28 États sont actuellement parties à l’arrangement de Lisbonne. Parmi eux figurent sept États membres de l’Union, à savoir la République de Bulgarie, la République tchèque, la République française, la République italienne, la Hongrie, la République portugaise et la République slovaque. Trois autres États membres, à savoir la République hellénique, le Royaume d’Espagne et la Roumanie, ont signé cet arrangement mais ne l’ont pas ratifié à ce jour. L’Union n’est en revanche pas partie audit arrangement, auquel ne peuvent adhérer que des États.

5.

Aux termes de l’article 1er de l’arrangement de Lisbonne, ses États parties sont constitués à l’état d’Union particulière dans le cadre de l’Union pour la protection de la propriété industrielle instituée par la convention de Paris et s’engagent à protéger, sur leur territoire et selon les termes de cet arrangement, les appellations d’origine des produits des autres pays de l’Union particulière, à partir du moment où celles-ci ont été enregistrées au bureau international de la propriété intellectuelle de l’OMPI.

6.

En vertu de l’article 2, paragraphe 1, de l’arrangement de Lisbonne, on entend par « appellation d’origine », au sens de cet arrangement, la dénomination géographique d’un pays, d’une région ou d’une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus exclusivement ou essentiellement au milieu géographique, comprenant les facteurs naturels et humains.

7.

Les articles 3 à 7 dudit arrangement organisent les conditions de protection des appellations d’origine qui en relèvent ainsi que les modalités de leur enregistrement par le bureau international de la propriété intellectuelle de l’OMPI.

8.

Son article 8 énonce que les poursuites nécessaires pour assurer la protection de ces appellations d’origine pourront être exercées, dans chacun des pays de l’Union particulière, suivant sa législation nationale.

9.

L’article 13, paragraphe 2, de l’arrangement de Lisbonne prévoit que celui-ci peut être révisé par des conférences réunissant les délégués des États de l’Union particulière visée à son article 1er.

B. Le droit de l’Union

10.

L’Union a progressivement adopté, à partir de l’année 1970, différents actes organisant les conditions de protection des appellations d’origine et des indications géographiques concernant certains types de produits, à savoir les vins, les spiritueux, les vins aromatisés ainsi que les autres produits agricoles et denrées alimentaires.

11.

La réglementation de l’Union à cet égard est aujourd’hui constituée par le règlement (CE) no 110/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 15 janvier 2008, concernant la définition, la désignation, la présentation, l’étiquetage et la protection des indications géographiques des boissons spiritueuses et abrogeant le règlement (CEE) no 1576/89 du Conseil ( 5 ), le règlement (UE) no 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 21 novembre 2012, relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires ( 6 ), le règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) no 922/72, (CEE) no 234/79, (CE) no 1037/2001 et (CE) no 1234/2007 du Conseil ( 7 ), ainsi que le règlement (UE) no 251/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, concernant la définition, la description, la présentation, l’étiquetage et la protection des indications géographiques des produits vinicoles aromatisés et abrogeant le règlement (CE) no 1601/91 du Conseil ( 8 ).

II. Les antécédents du litige et la décision attaquée

A. La révision de l’arrangement de Lisbonne

12.

Au mois de septembre 2008, l’assemblée de l’Union particulière instituée par l’arrangement de Lisbonne a créé un groupe de travail chargé de préparer une révision destinée à améliorer et à rendre plus attractif cet arrangement, tout en en préservant les objectifs et les principes.

13.

Au mois d’octobre 2014, ce groupe de travail s’est accordé sur un projet d’acte à cet effet (ci-après le « projet d’arrangement révisé »). Les modifications envisagées par ce dernier, dans sa version diffusée par le directeur général de l’OMPI le 14 novembre 2014, portaient, en particulier, sur le champ d’application de la protection prévue, qu’il était proposé d’étendre aux indications géographiques (articles 2 et 9), sur le contenu et les limites de cette protection (articles 10 à 20) ainsi que sur la possibilité donnée à des organisations intergouvernementales d’adhérer audit arrangement et de participer aux votes de son assemblée (articles 22 et 28).

14.

Une conférence diplomatique a été convoquée à Genève du 11 au 21 mai 2015 en vue de l’examen et de l’adoption dudit projet. Ont été invitées à y participer, conformément au projet de règlement de procédure approuvé par son comité préparatoire, non seulement les délégations des 28 États parties à l’arrangement de Lisbonne, mais également deux délégations dites « spéciales », dont celle de l’Union, ainsi qu’un certain nombre de délégations dites « observatrices », représentant les États membres de l’OMPI mais non parties à cet arrangement.

15.

Le 20 mai 2015, cette conférence diplomatique a adopté l’acte de Genève de l’arrangement de Lisbonne sur les appellations d’origine et les indications géographiques, lequel a été ouvert à la signature le 21 mai 2015.

B. La recommandation de la Commission et la décision attaquée

16.

Dans la perspective de ladite conférence diplomatique, la Commission a adopté, le 30 mars 2015, une recommandation de décision du Conseil autorisant l’ouverture de négociations concernant un arrangement de Lisbonne révisé sur les appellations d’origine et leur enregistrement international (ci-après la « recommandation de la Commission »).

17.

Dans cette recommandation, la Commission a, en premier lieu, invité le Conseil à fonder sa décision sur l’article 207 TFUE et sur l’article 218, paragraphes 3 et 4, TFUE, compte tenu de la compétence exclusive attribuée à l’Union par l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE dans le domaine de la politique commerciale commune, d’une part, et de l’objectif ainsi que du contenu de l’arrangement de Lisbonne, d’autre part.

18.

En second lieu, la Commission a suggéré au Conseil de lui confier la conduite des négociations à mener pour le compte de l’Union, dans le cadre des directives de négociation déterminées par celui-ci et en consultation avec un comité spécial désigné par lui.

19.

Le 7 mai 2015, le Conseil a adopté la décision attaquée, qui s’écarte de la recommandation de la Commission en se fondant sur l’article 114 TFUE et sur l’article 218, paragraphes 3 et 4, TFUE. Son considérant 3 motive le choix d’une telle base juridique dans les termes suivants :

« (3)

L[e projet d]’arrangement révisé établit un système de protection des appellations d’origine et des indications géographiques pour les parties contractantes au moyen d’un enregistrement unique. Cette question fait l’objet d’une harmonisation dans le cadre de la législation interne de l’[Union] en ce qui concerne les appellations et indications agricoles et relève donc de la compétence partagée de l’Union (en ce qui concerne les appellations et indications agricoles) et de ses États membres...

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