Terre wallonne ASBL (C-105/09) and Inter-Environnement Wallonie ASBL (C-110/09) v Région wallonne.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:120
Docket NumberC-105/09,C-110/09
Celex Number62009CC0105
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date04 March 2010

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme Juliane Kokott

présentées le 4 mars 2010 (1)

Affaires jointes C‑105/09 et C‑110/09

Terre wallonne ASBL (C‑105/09),

Inter-Environnement Wallonie ASBL (C‑110/09)

contre

Région wallonne

[demandes de décision préjudicielle introduites par le Conseil d’État (Belgique)]

«Directive 2001/42/CE – Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement – Directive 91/676/CEE – Protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles – Programmes d’action portant sur les zones vulnérables désignées»





I – Introduction

1. Les demandes préjudicielles du Conseil d’État (Belgique) concernent le champ d’application de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2001, relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (2) (ci-après la «directive ESE», l’abréviation ESE désignant l’évaluation stratégique environnementale). Le point qu’il y a lieu d’examiner est celui de savoir si les programmes d’action prévus à l’article 5 de la directive 91/676/CEE du Conseil, du 12 décembre 1991, concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles (3), doivent être soumis à une évaluation de leurs incidences sur l’environnement.

2. La directive ESE, de conserve avec la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (4), doit garantir que les pouvoirs compétents tiennent compte de toutes les incidences notables que les projets peuvent avoir sur l’environnement lorsqu’ils adoptent des décisions qui ont eu une influence sur la réalisation de ceux-ci. La directive EIE a institué des évaluations de ces incidences qui doivent être effectuées dans le cadre de l’autorisation des projets. L’évaluation des incidences sur l’environnement prévue par la directive ESE, en revanche, est réalisée dans le cadre des procédures de décision qui précèdent les procédures d’autorisation proprement dites des projets individuels, mais qui peuvent avoir une influence sur celles-ci.

3. L’engraissement des surfaces agricoles est soumis aux règles énoncées par la directive nitrates et par les programmes d’action qui doivent être adoptés pour sa mise en œuvre. Les agriculteurs engraissent leurs champs non seulement pour améliorer la croissance de leurs cultures, mais également pour se débarrasser des effluents d’origine animale. Lorsqu’une entreprise produit plus d’effluents que les cultures ne peuvent en absorber, cela entraîne un excédent d’amendement qui pollue régulièrement les eaux.

4. C’est la raison pour laquelle se pose à présent la question de savoir si, dans le cadre de programmes d’action prévus par la directive nitrates, sont adoptées des décisions qui ont sur l’autorisation ultérieure de projets une influence telle que les programmes d’action doivent être soumis à une évaluation des incidences sur l’environnement. Dans ce contexte, la Cour devra d’abord aborder des questions fondamentales de la directive ESE concernant essentiellement la signification des notions de plan et de programme et elle devra aussi préciser dans quelles circonstances ces plans et programmes définissent un cadre pour l’autorisation de projets.

II – Cadre juridique

A – La directive ESE

5. Les objectifs de la directive ESE sont énoncés à son article 1er:

«La présente directive a pour objet d’assurer un niveau élevé de protection de l’environnement, et de contribuer à l’intégration de considérations environnementales dans l’élaboration et l’adoption de plans et de programmes en vue de promouvoir un développement durable en prévoyant que, conformément à la présente directive, certains plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soient soumis à une évaluation environnementale.»

6. Les plans et programmes sont définis à l’article 2, sous a), de la directive ESE:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

a) ‘plans et programmes’: les plans et programmes, y compris ceux qui sont cofinancés par la Communauté européenne, ainsi que leurs modifications:

- élaborés et/ou adoptés par une autorité au niveau national, régional ou local ou élaborés par une autorité en vue de leur adoption par le parlement ou par le gouvernement, par le biais d’une procédure législative, et

- exigés par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives».

7. L’article 3 de la directive ESE définit le champ d’application en désignant les plans et programmes qui doivent être soumis à une évaluation. Sont déterminants en particulier les paragraphes 1 à 5:

«1. Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes:

a) qui sont élaborés pour les secteurs de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l’énergie, de l’industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l’eau, des télécommunications, du tourisme, de l’aménagement du territoire urbain et rural ou de l’affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive [EIE] pourra être autorisée à l’avenir; ou

b) pour lesquels, étant donné les incidences qu’ils sont susceptibles d’avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu des articles 6 et 7 de la directive 92/43/CEE [du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7)].

3. Les plans et programmes visés au paragraphe 2 qui déterminent l’utilisation de petites zones au niveau local et des modifications mineures des plans et programmes visés au paragraphe 2 ne sont obligatoirement soumis à une évaluation environnementale que lorsque les États membres établissent qu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

4. Pour les plans et programmes, autres que ceux visés au paragraphe 2, qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets pourra être autorisée à l’avenir, les États membres déterminent s’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

5. Les États membres déterminent si les plans ou programmes visés aux paragraphes 3 et 4 sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, soit en procédant à un examen au cas par cas, soit en déterminant des types de plans et programmes ou en combinant ces deux approches. À cette fin, les États membres tiennent compte, en tout état de cause, des critères pertinents fixés à l’annexe II, afin de faire en sorte que les plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soient couverts par la présente directive.»

8. L’annexe II de la directive ESE énonce les critères permettant de déterminer l’ampleur probable des incidences visées à l’article 3, paragraphe 5, de cette directive. On retiendra ici le point 1, premier tiret:

«1. Les caractéristiques des plans et programmes, notamment:

– la mesure dans laquelle le plan ou programme concerné définit un cadre pour d’autres projets ou activités, en ce qui concerne la localisation, la nature, la taille et les conditions de fonctionnement ou par une allocation de ressources,

[…]»

9. Il convient d’indiquer à titre complémentaire que, depuis 2008, l’Union européenne est partie au protocole à la convention sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement dans un contexte transfrontière, relatif à l’évaluation stratégique environnementale (5) (ci-après le «protocole sur l’évaluation stratégique environnementale») (6). Ce protocole contient des règles analogues à celles qui figurent dans la directive ESE, qui en a assuré la transposition en droit communautaire (7).

B – La directive nitrates

10. L’article 3 de la directive nitrates impose aux États membres de désigner certaines zones comme étant des zones vulnérables afin de lutter contre la pollution des eaux par des nitrates d’origine agricole. Conformément à l’article 5 de cette directive, ils doivent adopter des programmes d’action pour ces zones vulnérables:

«1. Pour les besoins des objectifs visés à l’article 1er et dans un délai de deux ans à compter de la désignation initiale visée à l’article 3 paragraphe 2 ou d’un an après chaque nouvelle désignation visée à l’article 3 paragraphe 4, les États membres établissent des programmes d’action portant sur les zones vulnérables désignées.

2. […]

3. Les programmes d’action tiennent compte:

a) des données scientifiques et techniques disponibles concernant essentiellement les quantités respectives d’azote d’origine agricole ou provenant d’autres sources;

b) des conditions de l’environnement dans les régions concernées de l’État membre en question.

4. Les programmes d’action sont mis en œuvre dans un délai de quatre ans à compter de leur élaboration et ils contiennent les mesures obligatoires suivantes:

a) les mesures visées à l’annexe III;

b) les mesures que les États membres ont arrêtées dans le(s) code(s) de bonne pratique agricole élaboré(s) conformément à l’article 4, à l’exception de celles qui ont été remplacées par les mesures énoncées à l’annexe III.

5. En outre, les États membres prennent, dans le cadre des programmes d’action, toutes les mesures supplémentaires ou actions renforcées qu’ils estiment nécessaires, s’il s’avère, dès le début ou à la lumière de l’expérience acquise lors de la mise en œuvre des programmes d’action, que les mesures visées au paragraphe 4 ne suffiront pas pour atteindre les objectifs définis à l’article 1er. Dans le choix de ces mesures ou actions, les États membres tiennent compte de...

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