Belgische Staat v Eugène van Calster and Felix Cleeren (C-261/01) and Openbaar Slachthuis NV (C-262/01)

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:227
Date10 April 2003
Celex Number62001CC0261
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-261/01,C-262/01
EUR-Lex - 62001C0261 - FR 62001C0261

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 10 avril 2003. - Belgische Staat contre Eugène van Calster et Felix Cleeren (C-261/01) et Openbaar Slachthuis NV (C-262/01) - Demande de décision préjudicielle: Hof van Beroep te Antwerpen - Belgique. - Aides financées par des taxes parafiscales - Cotisation obligatoire alimentant un fonds pour la santé et la production des animaux - Cotisation avec effet rétroactif dans le temps - Validité d'une décision de la Commission en matière d'aides d'État - Compétence de la Commission. - Affaires jointes C-261/01 et C-262/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-12249


Conclusions de l'avocat général

Introduction

1. Dans cette affaire, le Hof te Beroep te Antwerpen (Cour d'appel d'Anvers) (Belgique) pose d'importantes questions relatives à l'interprétation de l'article 88, paragraphe 3, CE.

2. Les principales questions soulevées portent sur la compatibilité avec l'article 88, paragraphe 3, CE de taxes parafiscales perçues pour financer un régime d'aides qui n'a été ni notifié ni autorisé par la Commission des Communautés européennes, notamment quand des mesures nationales postérieures, notifiées à la Commission, entendent donner un effet rétroactif à l'imposition de ces taxes. La juridiction de renvoi demande également si, dans son appréciation, la Commission a compétence pour autoriser de telles mesures nationales.

3. D'autres questions visent à faire préciser votre arrêt du 9 mars 1994, TWD Textilwerke Meggendorf , afin de pouvoir déterminer les circonstances dans lesquelles une décision de la Commission peut être contestée devant une juridiction nationale, et donc faire l'objet d'un renvoi devant votre Cour en application de l'article 234 CE, quand elle n'a pas fait l'objet d'un contrôle juridictionnel directement devant les juridictions communautaires en application de l'article 230 CE.

Cadre juridique et exposé des faits

4. La loi belge du 24 mars 1987 relative à la santé des animaux (ci-après la «loi de 1987») instituait un régime de financement des indemnités, des subventions et d'autres prestations en ce qui concerne la lutte contre les maladies des animaux et l'amélioration de l'hygiène, de la santé et de la qualité des animaux et des produits animaux (ci-après le «régime de 1987»). Pour financer ces mesures, l'article 32, paragraphe 2, de la loi de 1987 a institué un fonds de la santé et de la production des animaux, alimenté notamment par des cotisations obligatoires mises à charge des personnes physiques ou morales qui produisent, transforment, transportent, traitent, vendent ou commercialisent des animaux. Le montant des cotisations obligatoires ainsi que les modalités de perception sont à déterminer par arrêté royal. L'arrêté royal du 11 décembre 1987, entré en vigueur le 1er janvier 1988, fixe le montant des cotisations tant pour les animaux nationaux que pour les animaux importés et exportés.

5. Ni le régime de 1987 ni la plupart des modifications postérieures qui y ont été apportées n'ont été notifiés à la Commission .

6. À la suite d'un examen d'ensemble de toutes les «charges affectées» perçues dans les États membres dans les secteurs de l'agriculture et de la pêche, ainsi que de l'affectation de ces charges, en particulier sous forme d'aides, la Commission a ouvert une procédure d'examen du régime de 1987, en application de l'article 88, paragraphe 2, CE. Dans sa décision du 7 mai 1991 (ci-après la «décision de 1991»), elle a conclu que le régime de 1987 est incompatible avec le marché commun au sens de l'article 87 CE et que, par conséquent, il doit être supprimé, dans la mesure où la contribution obligatoire frappe également au stade de l'abattage les produits importés en provenance des autres États membres .

7. Dans l'exposé des motifs de la décision de 1991, la Commission a fait remarquer incidemment que les autorités belges avaient manqué à l'obligation qui leur incombe en vertu de l'article 88, paragraphe 3, CE en ne notifiant pas ces aides sous forme de projet . Elle a également relevé que, bien que les aides prévues soient compatibles avec le marché commun tant dans leur forme que dans leurs objectifs, elles ne pouvaient être autorisées, car «leur financement par des taxes parafiscales grevant également les produits communautaires importés a un effet protecteur allant au-delà de l'aide proprement dite» . Enfin, la Commission constate que «ces cotisations obligatoires perçues sur les animaux importés au stade de l'abattage sont à considérer comme des taxes internes discriminatoires au sens de l'article [90 CE], car bénéficiant exclusivement aux producteurs nationaux» .

8. Indépendamment de l'examen effectué par la Commission, un certain nombre d'importateurs d'animaux en provenance d'autres États membres ont assigné le Belgische Staat devant le Rechtbank van eerste aanleg te Turnhout (tribunal de première instance de Turnhout) (Belgique) et le Rechtbank van eerste aanleg te Brussel (tribunal de première instance de Bruxelles) (Belgique) en soutenant que certaines cotisations payées en application du régime de 1987 sur des animaux importés étaient incompatibles avec le droit communautaire. Les deux juridictions nationales ont sursis à statuer et saisi la Cour de plusieurs questions à titre préjudiciel. Dans vos arrêts du 16 décembre 1992, Lornoy e.a. et Demoor e.a. , vous avez conclu que le régime de 1987 était contraire soit à l'article 25 CE, soit à l'article 90 CE, selon que les avantages qui en découlent au profit des produits nationaux compensent en tout ou partie les charges grevant ces produits. Au regard des règles en matière d'aides d'État, vous avez conclu «[...] qu'une taxe parafiscale peut constituer, en fonction de l'affectation de son produit, une aide étatique, incompatible avec le marché commun, si les conditions d'application de [l'article 87 CE] sont réunies [...]».

9. Le royaume de Belgique a alors adopté la loi du 21 décembre 1994 qui prévoit des modalités de remboursement, sous certaines conditions, des cotisations perçues depuis le 1er janvier 1988 sur les animaux importés.

10. Le 14 juin 1995, la Commission a émis un avis motivé, en application de l'article 226 CE, où elle indique que l'imposition de contributions obligatoires sur des animaux exportés de Belgique vers d'autres États membres était contraire au droit communautaire. Elle a cependant clos la procédure d'examen après avoir reçu des observations du royaume de Belgique.

11. La loi du 23 mars 1998 (ci-après la «loi de 1998») instaure un nouveau régime (ci-après le «régime de 1998») qui remplace celui de 1987. Cette loi abroge l'ancien fonds et le système de cotisations pour établir un nouveau fonds budgétaire pour la santé et la qualité des animaux et des produits d'origine animale et un nouveau système de cotisations. Son article 4 dispose que le préfinancement et le financement des charges sous le régime de 1987 seront imputées au nouveau fonds. Ses articles 14, 15 et 16 fixent respectivement les cotisations obligatoires mises à la charge des abattoirs et des exportateurs de bovins et de porcs, des responsables des exploitations d'élevage de porcs et des exploitations laitières ainsi que des titulaires de licences de vente de produits laitiers. Certaines de ces cotisations sont applicables rétroactivement à partir du 1er janvier 1988. Ce nouveau système n'impose de cotisations que sur les seuls animaux nationaux. Il n'y a plus de cotisations dues sur les animaux importés et celles sur les animaux exportés ne sont dues que jusqu'au 1er janvier 1997.

12. L'article 17, paragraphe 2, de la loi de 1998 prévoit la compensation de plein droit des créances ayant trait aux cotisations payées au titre de l'ancien régime de 1987, abrogé, et les nouvelles cotisations à payer au titre du régime de 1998, celles-ci étant en partie payables rétroactivement. Il ressort du dossier que les montants des nouvelles cotisations étaient sensiblement équivalents à ceux de l'ancien régime de 1987.

13. L'article 23 de la loi de 1998 dispose qu'elle entre en vigueur le jour de sa publication au Belgische staatsblad, soit le 30 avril 1998. Toutefois, certaines de ses dispositions, dont les articles 14, 15 et 16, sont entrées en vigueur aux dates auxquelles les cotisations qu'ils instaurent sont devenues exigibles.

14. Il ressort clairement des travaux préparatoires de cette loi que l'objectif de la rétroactivité était d'éviter de devoir restituer les cotisations perçues sur la base du régime de 1987 au motif que cela aurait porté atteinte à l'équilibre financier du système.

15. Le projet de régime de 1998 a été notifié à la Commission par lettres des 7 décembre 1995 et 20 mai 1996. Par décision du 9 août 1996 (ci-après la «décision de 1996») , rendue à l'issue d'une procédure en application de l'article 88, paragraphe 3, CE, la Commission a déclaré qu'elle n'avait aucune objection à formuler à l'encontre des mesures en question au regard des articles 87 CE à 89 CE. Elle a notamment relevé que, sous le nouveau système, les abattoirs n'auraient plus à verser de cotisations obligatoires sur les animaux importés de ou exportés vers d'autres États membres ou des pays tiers. Relevant que les cotisations dues pour les élevages de porcs et pour le secteur laitier ne tenaient pas compte de l'origine des animaux ou qu'elles ne frappaient que les animaux nationaux, elle a conclu que les cotisations obligatoires prévues par le projet de loi ne pouvaient pas être considérées comme ayant «un effet protecteur allant au-delà de l'aide proprement dite».

16. L'Arbitragehof (Cour d'arbitrage) (Belgique), juridiction belge devant apprécier la constitutionnalité des lois, a été saisi de la loi de 1998. Saisi de la question de savoir si la loi de 1998 était contraire notamment aux articles 87 CE et 88 CE et au principe de non-rétroactivité, il a conclu que les cotisations rétroactives...

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