Samuel Sidney Evans v The Secretary of State for the Environment, Transport and the Regions and The Motor Insurers' Bureau.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2002:615
Docket NumberC-63/01
Celex Number62001CC0063
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date24 October 2002
EUR-Lex - 62001C0063 - FR 62001C0063

Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 24 octobre 2002. - Samuel Sidney Evans contre The Secretary of State for the Environment, Transport and the Regions et The Motor Insurers' Bureau. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division - Royaume-Uni. - Rapprochement des législations - Directive 84/5/CEE - Assurance obligatoire de la responsabilité civile automobile - Dommages causés par des véhicules non identifiés ou insuffisamment assurés - Protection des victimes - Transposition incorrecte de la directive - Responsabilité de l'État membre. - Affaire C-63/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page 00000


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1 La présente demande de décision préjudicielle formée par la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Royaume-Uni), soulève des questions d'interprétation et d'application des directives relatives à l'assurance de la responsabilité civile automobile. Il s'agit en particulier de savoir si l'indemnisation d'un dommage causé par un véhicule non identifié, laquelle est versée par un organisme désigné à cette fin par l'État, doit aussi inclure le versement d'intérêts et de dépens. Il convient par ailleurs de préciser si la solution adoptée en Grande-Bretagne remplit les exigences de droit communautaire en matière de protection juridictionnelle effective, si l'organisme chargé de l'indemnisation peut être considéré comme dûment agréé au sens de la directive concernée, et si d'éventuelles lacunes dans la transposition de la directive constituent une violation des obligations qui lui incombent suffisamment grave pour fonder un droit à réparation contre l'État membre défaillant selon les principes du droit communautaire.

II - Cadre juridique

A - Les dispositions de droit communautaire

Directive 72/166/CEE du Conseil, du 24 avril 1972, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs, et au contrôle de l'obligation d'assurer cette responsabilité (1) (ci-après la «première directive»)

2 L'article 3, paragraphe 1, de cette directive stipule:

«Chaque État membre prend toutes les mesures utiles, sous réserve de l'application de l'article 4, pour que la responsabilité civile relative à la circulation des véhicules ayant leur stationnement habituel sur son territoire soit couverte par une assurance. Les dommages couverts ainsi que les modalités de cette assurance sont déterminés dans le cadre de ces mesures.»

Deuxième directive 84/5/CEE du Conseil, du 30 décembre 1983, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs (2) (ci-après la «deuxième directive»)

3 L'article 1er, paragraphes 1 et 4, de la deuxième directive dispose:

«1. L'assurance visée à l'article 3 paragraphe 1 de la directive 72/166/CEE couvre obligatoirement les dommages matériels et les dommages corporels.

2. [...] [(3)]

[...]

4. Chaque État membre crée ou agrée un organisme ayant pour mission de réparer, au moins dans les limites de l'obligation d'assurance, les dommages matériels ou corporels causés par un véhicule non identifié ou pour lequel il n'a pas été satisfait à l'obligation d'assurance visée au paragraphe 1. Cette disposition ne porte pas atteinte au droit des États membres de donner ou non à l'intervention de cet organisme un caractère subsidiaire, ainsi qu'à celui de réglementer les recours entre cet organisme et le ou les responsables du sinistre et d'autres assureurs ou organismes de sécurité sociale tenus d'indemniser la victime pour le même sinistre.

La victime peut en tout cas s'adresser directement à l'organisme qui, sur la base des informations fournies à sa demande par la victime, est tenu de lui donner une réponse motivée quant à son intervention.

Toutefois, les États membres peuvent exclure de l'intervention de cet organisme les personnes ayant de leur plein gré pris place dans le véhicule qui a causé le dommage, lorsque l'organisme peut prouver qu'elles savaient que le véhicule n'était pas assuré.

Les États membres peuvent limiter ou exclure l'intervention de cet organisme en cas de dommages matériels causés par un véhicule non identifié. Ils peuvent également autoriser, pour les dommages matériels causés par un véhicule non assuré, une franchise, opposable à la victime, ne dépassant pas 500 Écus.

Par ailleurs, chaque État membre applique à l'intervention de cet organisme ses dispositions législatives, réglementaires et administratives, sans préjudice de toute autre pratique plus favorable aux victimes.»

B - Les dispositions nationales

4 En raison des lacunes dans la couverture des dommages corporels causés par des conducteurs non assurés ou non identifiés, des compagnies d'assurances chargées d'assurer la responsabilité civile pour les véhicules automobiles ont, en accord avec le ministère des Transports, créé en Grande-Bretagne dès 1946 le Motor Insurers' Bureau (ci-après le «MIB»). Le MIB est un sujet de droit privé dont les associés sont des compagnies d'assurances de droit privé qui proposent des polices d'assurance automobile.

5 L'obligation d'indemniser les dommages causés par des conducteurs non assurés ou non identifiés résulte d'accords entre le MIB et le Secretary of State for the Environment, Transport and the Regions (4). Ces accords ont été plusieurs fois modifiés ou adaptés. On mentionnera ici, d'une part, le Motor Insurers' Bureau Agreement «Compensation of Victims of Uninsured Drivers» (5) (accord relatif à l'indemnisation des victimes de conducteurs non assurés), du 21 décembre 1988, ainsi que le Motor Insurers' Bureau Agreement «Compensation of Victims of Untraced Drivers» (accord relatif à l'indemnisation des victimes de conducteurs non identifiés), du 22 novembre 1972, dans la version modifiée de 1977, accord litigieux en l'espèce. Ce dernier est aussi dénommé ci-après «accord relatif aux conducteurs non identifiés» ou seulement «accord».

6 L'accord pertinent en l'espèce contient les dispositions suivantes:

- L'accord s'applique dans tous les cas où une demande est adressée au MIB en vue d'obtenir une indemnisation en raison du décès d'une personne ou d'un dommage corporel subi par une personne trouvant son origine dans l'utilisation d'un véhicule automoteur sur une route au Royaume-Uni lorsque, sous réserve de certaines conditions sans intérêt en l'espèce, le demandeur de l'indemnisation n'est pas en mesure de trouver une personne responsable du décès ou du dommage corporel (clause 1).

- Le MIB est tenu, lorsqu'il est saisi d'une demande dans un cas auquel s'applique l'accord, de payer une somme qui doit être déterminée dans les mêmes conditions que celles selon lesquelles une juridiction fixerait, en appliquant les dispositions en vigueur en la matière au Royaume-Uni, le montant des dommages-intérêts que le demandeur aurait été fondé à obtenir de la personne responsable non identifiée (clause 3).

- Le MIB est tenu d'examiner toute demande qui lui est adressée en vue de l'obtention d'une indemnisation au titre de l'accord et de décider s'il y a lieu de l'accorder (clause 7).

- Lorsqu'il y a lieu d'accorder une indemnisation, le MIB a l'obligation de notifier au demandeur le montant qu'il se propose de lui verser, en précisant la méthode selon laquelle a été calculée l'indemnisation. Si le demandeur décide d'accepter cette indemnisation, le MIB est tenu de lui en payer le montant (clauses 9 et 10).

- Le demandeur a un droit de recours intégral auprès d'un arbitre contre toute décision du MIB (clause 11).

- Le demandeur a le droit, avant d'introduire un recours, de présenter au MIB des observations relatives à la décision et de produire d'autres éléments de preuve concernant sa demande. Le MIB peut examiner ces nouveaux éléments et doit communiquer au demandeur le résultat de cet examen ainsi que toute modification apportée à la décision (clause 13).

- En statuant sur le recours, l'arbitre décide s'il y a lieu pour le MIB de verser une indemnisation au titre de l'accord et, dans l'affirmative, le montant à accorder par le MIB au demandeur (clause 16).

- L'arbitre est choisi sur une liste d'arbitres composée d'avocats de la Couronne (Queen's Counsels) désignés par le Lord Chancellor ou le Lord Advocate (clause 18).

- L'arbitre statue sur le recours en se fondant sur les documents qui lui sont soumis, bien qu'il/elle ait le droit d'inviter le MIB à procéder à tout examen complémentaire qu'il/elle estime souhaitable et sur les résultats duquel le demandeur a le droit de présenter des observations (clause 17).

- Chacune des parties au recours supporte ses propres dépens afférents à l'arbitrage (clause 21). Le MIB a l'obligation de payer les honoraires de l'arbitre, sauf dans le cas où l'arbitre estime qu'il n'existait pas de motifs justifiant raisonnablement l'introduction du recours, auquel cas l'arbitre peut décider que le demandeur est tenu de lui payer ses honoraires (clause 22).

7 L'accord ne contient aucune disposition expresse concernant l'octroi d'intérêts sur l'indemnisation allouée ni sur le remboursement des dépens afférents à la procédure devant le MIB.

III - Faits et procédure

8 Le 25 décembre 1991, M. Samuel Sidney Evans (ci-après le «demandeur») a été victime d'un accident qui lui a causé un dommage corporel. Il a été heurté par une voiture alors que, de la chaussée, il se baissait vers sa voiture en stationnement pour y prendre un paquet. Le conducteur de l'autre véhicule impliqué n'a pas été identifié.

9 Le 11 juin 1992, le demandeur a saisi le MIB d'une demande d'indemnisation au titre de l'accord susvisé. Le 11 janvier 1996, le MIB a informé le demandeur qu'il avait décidé de fixer l'indemnisation à...

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