Ismeri Europa Srl v Court of Auditors of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2001:243
CourtCourt of Justice (European Union)
Date03 May 2001
Docket NumberC-315/99
Procedure TypeRecurso de casación - infundado
Celex Number61999CC0315
EUR-Lex - 61999C0315 - FR 61999C0315

Conclusions de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 3 mai 2001. - Ismeri Europa Srl contre Cour des comptes des Communautés européennes. - Pourvoi - Programmes MED - Rapport spécial nº 1/96 de la Cour des comptes - Principe du contradictoire - Désignation nominative de tiers - Nécessité et proportionnalité. - Affaire C-315/99 P.

Recueil de jurisprudence 2001 page I-05281


Conclusions de l'avocat général

I. Introduction

1 Ismeri Europa Srl (ci-après, «Ismeri») avait saisi le Tribunal de première instance, conformément aux articles 178 et 215 du traité CE (devenus articles 288 et 235 CE), d'une demande en réparation des préjudices qu'elle prétendait avoir subis à cause des critiques dont elle avait fait l'objet dans le rapport spécial n_ 1/96 de la Cour des comptes relatif aux programmes MED.

2 Elle avait conclu à ce qu'il plaise au Tribunal:

1_) constater «la violation du principe fondamental du droit à la défense et au débat contradictoire, et donc l'illégalité du comportement de la Cour des comptes»;

2_) constater, en conséquence, «la responsabilité extracontractuelle» de cette institution et

3_) ordonner à la Cour des comptes «de publier les observations de la société au Journal officiel des Communautés européennes et d'en donner sans tarder communication officielle et formelle au Parlement, reconnaissant le droit d'Ismeri Europa Srl de faire connaître ses explications en ce qui concerne les programmes MED, tel qu'il est conféré aux diverses institutions contrôlées par la Cour des comptes en vertu des dispositions de l'article 206, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne».

3 Le Tribunal de première instance ayant rejeté le recours par arrêt du 15 juin 1999, (1) Ismeri a saisi la Cour d'un pourvoi le 24 août 1999.

II. Les faits du litige

4 Voici les faits que l'on retiendra de l'arrêt aux fins de la procédure de pourvoi:

- les programmes MED font partie de la politique d'aides de l'Union européenne aux pays tiers méditerranéens. Ils sont l'expression de la volonté de la Communauté de développer la coopération multilatérale avec ces pays et de promouvoir leur coopération entre eux.

Ils ont été conçus de manière à permettre le développement de certains secteurs (2) au moyen d'une coopération décentralisée, concrétisée par la mise en oeuvre de projets dans lesquels la Commission apporte le complément financier et l'aide technique nécessaires.

- La Commission a confié l'administration et la gestion financière des budgets destinés aux programmes MED à une association belge sans but lucratif créée spécialement à cette fin, à savoir l'Agence pour les Réseaux transméditerranéens (ci-après, «Agence»). Le suivi technique de l'exécution des programmes a été confié à des bureaux d'assistance technique, qui sont généralement des cabinets de consultants.

- Les projets sont approuvés par un comité, dit comité d'engagement, qui se compose de représentants de l'agence et de représentants des bureaux d'assistance technique, ces derniers assistant aux débats pour fournir un avis technique et n'ayant pas de droit de vote. Le comité est présidé par l'administrateur responsable de la commission.

- Dans son rapport spécial n_ 1/96, du 30 mai 1996, (3) la Cour des comptes a formulé diverses critiques sur la gestion de ces programmes MED, mettant notamment en évidence des confusions d'intérêts dans le système global de gestion. Elle a signalé que, jusqu'au mois d'avril 1995, deux des quatre administrateurs de l'agence dirigeaient deux bureaux d'assistance technique chargés du suivi des programmes et elle a épinglé la particularité que ces deux entreprises avaient obtenu des contrats qu'elles avaient contribué à élaborer dans le cadre du conseil d'administration de l'agence. Un des deux bureaux de consultants nommément visés dans le rapport est Ismeri.

- Le 31 janvier 1997, Ismeri a demandé à la Cour des comptes de rectifier les inexactitudes que contenait le rapport spécial en question. Elle estimait en outre qu'elle aurait dû être consultée avant sa publication. La Cour des comptes a rejeté sa demande en lui répondant qu'elle avait suivi la procédure correcte. À deux reprises, à savoir le 24 avril et le 12 juin 1997, Ismeri a réitéré sa demande et a de nouveau été déboutée à chaque fois.

- Au cours de la session du 17 juillet 1997, le Parlement européen a adopté une résolution sur le rapport spécial n_ 1/96 de la Cour des comptes, (4) dans laquelle il souscrit à l'exposé des faits donné par la Cour des comptes. Il souligne que 62 % du total des dépenses d'assistance technique sont allées à deux bureaux d'assistance technique, à savoir précisément ceux qui étaient représentés à l'agence par un administrateur chacun. Le Parlement en a déduit «qu'un cas manifeste de confusion d'intérêts s'est perpétué des années durant» (5) et que les administrateurs en question s'étaient retrouvés «dans une situation peut être délictueuse au regard du code pénal des États membres concernés» (6). Le Parlement a conclu en signalant le caractère exemplaire de l'affaire et il a invité la Commission «dont la crédibilité [était] en jeu» à prendre des mesures énergiques afin d'éviter que des situations analogues se reproduisent dans le cadre d'autres programmes de coopération (7).

- Le 20 octobre 1997, Ismeri a engagé devant le Tribunal le recours que celui-ci a rejeté par l'arrêt en cause dans la présente affaire.

III. L'arrêt entrepris

5 En ce qui concerne le fond de l'affaire (8), l'arrêt du Tribunal de première instance contient deux parties clairement distinctes. La première porte sur la violation alléguée du principe du contradictoire et la seconde sur le caractère prétendument diffamatoire pour Ismeri des critiques que contient le rapport spécial n_ 1/96 de la Cour des comptes.

6 Voici ce que le Tribunal de première instance a déclaré à propos de la violation du principe du contradictoire: (9)

- La responsabilité de la Communauté pour faute extracontractuelle ne peut être engagée que si le requérant prouve non seulement l'illégalité du comportement reproché à l'institution concernée et la réalité d'un préjudice, mais également l'existence d'un lien de causalité entre ce comportement et ce préjudice.

- À supposer que la Cour des comptes ait été obligée de permettre à la requérante de faire valoir son point de vue avant l'adoption et la publication du rapport spécial et qu'à ne pas l'avoir fait, elle se soit rendue coupable d'un comportement illégal, le contenu du rapport n'en eût pas été modifié. Le Tribunal de première instance aboutit à cette conclusion parce que la Cour des comptes avait rejeté toutes les observations qu'Ismeri lui avait transmises dans sa lettre du 31 janvier 1997. Il résulte de sa réponse à cette lettre qu'elle n'aurait pas modifié le contenu du rapport spécial même si Ismeri avait été en mesure de lui présenter ses observations avant son adoption.

7 À propos du caractère diffamatoire des critiques adressées à Ismeri dans le rapport, le Tribunal de première instance a déclaré ce qui suit: (10)

- Le souci de s'acquitter efficacement de sa mission peut amener la Cour des comptes à dénoncer exceptionnellement les faits constatés d'une façon complète et donc à désigner nommément les personnes tierces directement impliquées. Une telle désignation s'impose plus particulièrement lorsque l'anonymat risque de prêter à confusion ou encore de jeter le doute sur l'identité des personnes impliquées, ce qui est susceptible de nuire aux intérêts de personnes concernées par l'enquête de la Cour des comptes, mais non visées par ces appréciations critiques. En tout état de cause, les appréciations portées sur des personnes tierces dans ces conditions sont soumises à un contrôle complet du Tribunal. Elles sont de nature à constituer une faute, et donc à engager, le cas échéant, la responsabilité extracontractuelle de la Communauté (11).

- Dans l'accomplissement de sa mission, la Cour des comptes était tenue de dénoncer une situation dans laquelle un marché public avait été adjugé à une personne qui avait participé à l'évaluation et à la sélection des offres. La société Ismeri était en mesure d'influencer la procédure de décision et de favoriser ses intérêts privés puisqu'un de ses dirigeants faisait partie de l'agence. Ismeri se trouvait donc dans une situation de conflit d'intérêts (12).

- La Cour des comptes affirme dans son rapport spécial que la Commission avait insisté auprès des dirigeants des deux bureaux d'assistance technique pour qu'ils démissionnent du conseil d'administration de l'agence, mais qu'Ismeri avait renâclé. Ces affirmations sont fondées sur des faits établis et correctement interprétés. Le dirigeant d'Ismeri qui occupait un poste au conseil d'administration de l'agence n'a démissionné que deux ans après que la Commission l'eut invité à le faire et eut accepté les conditions de sa démission, conditions relatives à l'élection de son successeur et à l'attribution d'un contrat d'assistance technique (13).

- L'appréciation de la qualité du travail accompli par Ismeri et des résultats qu'il a permis d'obtenir n'est pas un critère susceptible de mettre en cause la pertinence des constatations effectuées par la Cour des comptes dans son rapport spécial n_ 1/96 (14).

IV. Le pourvoi

8 Le recours d'Ismeri s'articule autour de six moyens, que je vais résumer successivement avec la réponse que la Cour des comptes a donnée à chacun d'entre eux. Je les analyserai ensuite l'un après l'autre au paragraphe V des présentes conclusions.

Premier moyen: vices de procédure; le Tribunal de première instance ne s'est pas prononcé sur la demande d'audition de témoins et n'a pas suffisamment instruit l'affaire

9 Selon Ismeri, le fait que le Tribunal de première instance n'ait pas répondu à sa demande d'audition de témoins constitue un vice de procédure parce que la juridiction est...

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