Georgios Kontogeorgas v Kartonpak AE.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1996:274
Docket NumberC-104/95
Celex Number61995CC0104
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date04 July 1996
61995C0104

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. GEORGES COSMAS

présentées le 4 juillet 1996 ( *1 )

1.

Dans la présente affaire, le Polymeles Protodikeio Athinon invite la Cour à statuer à titre préjudiciel, pour la première fois, sur l'interprétation de l'article 7, paragraphe 2, de la directive 86/653/CEE du Conseil, du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants ( 1 ) (ci-après la « directive »).

I — Le litige au principal

2.

Ainsi qu'il ressort du jugement de renvoi, M. Kontogeorgas a introduit devant le Polymeles Protodikeio Athinon une action contre la société anonyme dénommée « Kartonpak AE Anonymos Viomichaniki kai Emboriki Etairia Eidon Suskevassias » dont le siège est établi dans la commune de Neochorouda à Thessalonique (ci-après « Kartonpak »). Dans son action, le demandeur expose ce qui suit: le 10 février 1981, il a conclu avec la défenderesse un contrat d'agence commerciale en vertu duquel il a été convenu qu'à partir du 1er janvier 1981 il serait l'agent commercial de la défenderesse pour la commercialisation des produits de celle-ci dans les nomes d'Achaïa et d'Ilia, en échange d'une commission de 3 % sur les ventes réalisées dans ce secteur. Selon les allégations du demandeur, la défenderesse a, à partir de 1988, commercialisé ses produits auprès de clients du secteur précité, en cachant au demandeur ces transactions, afin de le priver des commissions auxquelles il avait droit. Le demandeur avance en outre que la défenderesse a résilié le contrat qui les liait sans respecter le délai de deux mois qui avait été convenu. En conséquence, le demandeur a conclu à ce qu'il plaise au Tribunal, condamner la défenderesse à lui payer une somme déterminée représentant les commissions dues et à lui verser une indemnité pour le non-respect du délai de préavis de deux mois prévu pour la résiliation du contrat.

3.

La défenderesse réfute les allégations du demandeur et fait valoir dans ses conclusions devant le Polymeles Protodikeio Athinon que: a) en 1985, la société dénommée « Anonymos Etairia kataskevis kai emborias kartokivotion kai loipon eidon suskevassias Kartonpak AE » a fusionné avec la société « Saint Ritsis Ellas AVEE » qui avait le même objet social que la défenderesse, et b) que le demandeur n'avait pas droit à la commission parce que, d'une part, les clients auxquels il se réfère ne sont pas des clients qu'il avait découverts lui-même, mais d'anciens clients de la société fusionnée Saint Ritsis, et que, d'autre part, certains d'entre eux n'avaient pas leur siège dans le secteur d'activité du demandeur.

4.

Le Polymeles Protodikeio Athinon a considéré que l'affaire en instance devant lui soulevait une question d'interprétation du droit communautaire et, plus particulièrement, de l'article 7, paragraphe 2, de la directive et a donc décidé de surseoir à statuer et de soumettre certaines questions préjudicielles à la Cour, en vertu de l'article 177 du traité CE.

II — Les questions préjudicielles

5.

Le Polymeles Protodikeio Athinon invite la Cour à statuer sur les questions suivantes ( 2 ):

« 1)

Lorsque l'agent commercial est chargé d'un secteur géographique déterminé, son droit à la commission s'applique-t-il aux opérations qui ont été conclues sans son intervention, à quelque stade que ce soit, qu'il ait ou non prospecté lui-même la clientèle concernée, ou ce droit ne s'applique-t-il qu'aux opérations qui ont été conclues dans son secteur d'activité, à la suite de son intervention et avec des clients qu'il a lui-même trouvés, et

2)

Quelle est la signification des termes ‘client appartenant’ à ce secteur? Plus spécialement, lorsque le client est une société, et que le siège de cette société n'est pas situé au lieu d'exploitation et d'exercice de son activité commerciale, le terme ‘appartenant’ vise-t-il le siège de cette société, ou vise-t-il le lieu d'exercice effectif de son activité commerciale et/ou éventuellement d'implantation de ses usines ou autres installations, destinataires de l'opération pour laquelle la commission est réclamée, étant entendu que c'est dans ce lieu, relevant du secteur géographique d'activité de l'agent commercial, qu'a été conclue l'opération concernée, ouvrant pour ce dernier un droit à la commission? » ( 3 ).

III — Cadre juridique

6.

L'article 7 de la directive prévoit, au paragraphe 1, ce qui suit:

« Pour une opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission:

a)

lorsque l'opération a été conclue grâce à son intervention

OU

b)

lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre. »

7.

Le paragraphe 2 du même article 7, dont l'interprétation est demandée dans la présente affaire, dispose que:

« Pour une opération conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission:

soit lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminées,

soit lorsqu'il jouit d'un droit d'exclusivité pour un secteur géographique ou un groupe de personnes déterminées,

et que l'opération a été conclue avec un client appartenant à ce secteur ou à ce groupe.

Les États membres doivent insérer dans leur loi l'une ou l'autre possibilité visée aux deux tirets ci-dessus. »

8.

Le législateur hellénique a transposé en droit interne la disposition de l'article 7, paragraphe 2, de la directive par l'article 6, paragraphe 1, du décret présidentiel no 219/91 ( 4 ), qui est rédigé dans les termes suivants:

« Pour une opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission s'il est chargé d'un secteur géographique et que l'opération a été conclue avec un client appartenant à ce secteur » ( 5 ).

IV — Observations sur la recevabilité

9.

Pendant la procedure orale, la défenderesse au principal, se référant aux observations qu'elle avait formulées à cet égard lors de la procédure écrite, a soutenu qu'il n'y avait pas lieu de répondre aux questions préjudicielles sur le fond. En effet, selon son point de vue, elles ne sont pas objectivement nécessaires pour la solution du litige au principal, étant donné que le demandeur au principal n'a jamais eu de lien contractuel avec la société Saint Ritsis qui a fusionné avec Kartonpak et n'a dès lors pas droit, en tout état de cause, à la commission pour des contrats conclus avec des clients de cette première société.

10.

La défenderesse avait en effet soutenu devant la juridiction de renvoi (voir également le point 3 ci-dessus) que l'action dirigée contre elle devait être rejetée comme non fondée au motif, notamment, que les clients auxquels se référait le demandeur étaient d'anciens clients de la société Saint Ritsis avec laquelle il n'avait aucun lien contractuel. Malgré cela, le juge national a considéré (éventuellement parce que le demandeur a soutenu devant lui qu'« il a droit à sa commission ... qu'il ait lui-même trouvé les clients ou que, s'agissant des clients de la société ... Saint Ritsis, il ne soit nullement intervenu dans les ventes conclues avec ces clients ») que, avant de statuer sur le bien-fondé ou non des allégations de la défenderesse, il convenait de soumettre à la Cour des questions préjudicielles afin qu'elle précise la portée exacte de l'article 7, paragraphe 2, de la directive, se réservant, ainsi qu'il le mentionne expressément dans le jugement de renvoi, d'examiner après le prononcé de l'arrêt de la Cour et « à condition que les conclusions formulées dans la demande soient, en principe, fondées en droit ... les exceptions soulevées par la défenderesse ».

11.

Selon la jurisprudence de la Cour, il appartient au juge national d'apprécier, au regard des particularités de l'affaire dont il est saisi, la nécessité d'une décision préjudicielle de la Cour ainsi que la pertinence des questions préjudicielles ( 6 ), mais aussi de décider à quel stade de la procédure il y a lieu de déférer ces questions à la Cour ( 7 ). A la lumière de cette jurisprudence et du fait que les questions préjudicielles posées par le Polymeles Protodikeio Athinon ne peuvent pas être considérées comme étant, à l'évidence, sans importance pour la solution du litige en instance devant lui, il convient de toute façon de rejeter les arguments avancés par la défenderesse au principal lorsqu'elle affirme que ces questions ne sont pas objectivement nécessaires pour la solution du litige. D'autant plus que cette allégation de la défenderesse est liée à l'appréciation d'éléments de fait dont la constatation (surtout lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, les parties sont en désaccord à ce sujet ( 8 )) appartient, dans le système consacré par l'article 177 du traité, au juge national et à lui seul ( 9 ).

12.

La...

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