Europäische Schule München v Silvana Oberto (C-464/13) and Barbara O’Leary (C-465/13).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2169
Docket NumberC-464/13
Celex Number62013CC0464
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date04 September 2014
62013CC0464

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 4 septembre 2014 ( 1 )

Affaires jointes C‑464/13 et C‑465/13

Europäische Schule München

contre

Silvana Oberto (C‑464/13),

Barbara O’Leary (C‑465/13)

[demandes de décision préjudicielle formées par le Bundesarbeitsgericht (Allemagne)]

«Statut des écoles européennes — Compétence de la chambre de recours des écoles européennes ou des juridictions du siège des écoles pour statuer sur un contrat de travail à durée déterminée conclu entre l’école européenne et un enseignant non affecté ou détaché par un État membre»

I – Introduction

1.

Des litiges relatifs au caractère déterminé de la durée des contrats de travail conclus, de manière répétée pendant plusieurs années, entre le directeur d’une école européenne et ses chargés de cours relèvent-ils de la compétence des juridictions de l’État du siège de ladite école ou de celle de la chambre de recours des écoles européennes, en vertu de l’article 27, paragraphe 2, de la convention portant statut des écoles européennes, conclue à Luxembourg le 21 juin 1994 ( 2 ) entre les États membres et les Communautés européennes (ci-après la «convention de 1994»)?

2.

Tel est, en substance, l’objet des questions préjudicielles déférées par le Bundesarbeitsgericht (Cour fédérale du travail, Allemagne) dans le cadre de deux procédures opposant l’Europäische Schule München (école européenne de Munich) à deux de ses chargés de cours, Mmes Oberto et O’Leary, qui ont exercé cette activité depuis respectivement l’année 1998 et l’année 2003, sur la base de contrats à durée déterminée d’un an, renouvelés périodiquement par le directeur de cette école, en application du statut des chargés de cours des écoles européennes recrutés entre le 1er septembre 1994 et le 31 août 2011, approuvé par le conseil supérieur des écoles européennes (ci-après le «statut des chargés de cours») ( 3 ).

3.

Par deux recours introduits devant l’Arbeitsgericht München (tribunal du travail de Munich), Mmes Oberto et O’Leary ont attaqué la limitation à un an de la durée de leurs contrats de travail, dont les derniers ont expiré au mois d’août 2011. Elles soutiennent devant l’Arbeitsgericht München que les juridictions allemandes sont compétentes pour statuer sur la validité des limitations de durée de la relation de travail les liant à l’Europäische Schule München. En revanche, cette dernière allègue qu’elle ne serait pas soumise à l’ordre juridictionnel allemand, le litige au principal relevant de la compétence exclusive de la chambre de recours des écoles européennes.

4.

Par un jugement intermédiaire, l’Arbeitsgericht München a déclaré le recours recevable, ce qui a été confirmé en appel. Saisi d’un recours en «Revision» introduit par l’Europäische Schule München, le Bundesarbeitsgericht s’interroge sur l’interprétation de l’article 27, paragraphe 2, première phrase, de la convention de 1994.

5.

C’est ainsi que le Bundesarbeitsgericht a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

L’article 27, paragraphe 2, première phrase, de la convention [de 1994] doit-il être interprété en ce sens que les chargés de cours recrutés par une école européenne qui ne sont pas détachés par les États membres doivent être considérés comme faisant partie des personnes visées à la[dite] convention et ne sont pas exclus de l’application de la réglementation, contrairement au personnel administratif et de service?

2)

Dans l’hypothèse où la Cour donnerait une réponse affirmative à la première question:

L’article 27, paragraphe 2, première phrase, de la convention [de 1994] doit-il être interprété en ce sens qu’il vise aussi la légalité d’un acte faisant grief fondé sur la[dite] convention ou sur les règles arrêtées en application de celle-ci, pris à l’égard des chargés de cours par le directeur d’une école dans l’exercice de ses attributions?

3)

Dans l’hypothèse où la Cour donnerait une réponse affirmative à la deuxième question:

L’article 27, paragraphe 2, première phrase, de la convention [de 1994] doit-il être interprété en ce sens que la conclusion d’une convention entre le directeur d’une école européenne et un chargé de cours, portant sur la limitation de la durée de la relation de travail du chargé de cours, constitue un acte pris par le directeur à l’égard du chargé de cours et faisant grief à ce dernier?

4)

Dans l’hypothèse où la Cour donnerait une réponse négative aux deuxième ou troisième questions:

L’article 27, paragraphe 2, première phrase, de la convention [de 1994] doit-il être interprété en ce sens que la chambre de recours qui y est visée a compétence exclusive de première et de dernière instance pour statuer, après épuisement de la voie administrative, sur des litiges portant sur la limitation de la durée d’un contrat de travail que le directeur d’une école conclut avec un chargé de cours, lorsque cet accord est fondé essentiellement sur la prescription du conseil supérieur qui figure au point 1.3 du statut des chargés de cours […], qui prévoit des contrats de travail annuels?»

6.

Ces questions ont fait l’objet d’observations écrites de la part des parties au principal ainsi que de la Commission européenne. Ces parties intéressées ont été également entendues oralement lors de l’audience du 15 mai 2014.

II – Analyse

A – Sur la compétence de la Cour pour répondre aux questions préjudicielles

7.

La compétence de la Cour pour répondre aux questions préjudicielles a été mise en doute dans les observations écrites de l’Europäische Schule München en raison de la nature internationale de la convention de 1994. Bien que l’Europäische Schule München ait à juste titre renoncé à cette objection lors de l’audience, cette question, au demeurant d’ordre public, mérite cependant qu’on s’y attarde quelque peu.

8.

Il est vrai que, lors de leur création, les écoles européennes, dont l’objet est d’assurer l’éducation en commun des enfants du personnel des institutions de l’Union européenne du cycle maternel au cycle secondaire ( 4 ), étaient régies par le statut de l’école européenne, signé à Luxembourg le 12 avril 1957 ( 5 ), et le protocole concernant la création d’écoles européennes, établi par référence au statut de l’école européenne, signé le 13 avril 1962 ( 6 ), instruments conclus entre les six États membres qui étaient à l’origine des Communautés européennes, ces dernières n’ayant, quant à elles, pas accédé à ces instruments.

9.

La Cour a déduit du caractère intergouvernemental du statut de 1957 son incompétence à interpréter les stipulations de ce statut, tantôt dans le contexte d’un renvoi préjudiciel tantôt dans celui de la procédure prévue à l’article 226 CE visant à faire constater un manquement d’un État membre à ses obligations lui incombant en vertu du traité CE ( 7 ). En effet, cet instrument ayant été conclu exclusivement par les États membres, il ne faisait pas partie intégrante du droit communautaire ( 8 ).

10.

Le statut de 1957 et le protocole concernant la création d’écoles européennes ont cependant été annulés et remplacés par la convention de 1994, conformément à l’article 34 de cette dernière.

11.

Or, la convention de 1994 a été conclue non pas uniquement par les États membres, mais également par les Communautés européennes, la participation desquelles a fait l’objet de la décision 94/557/CE, Euratom du Conseil, du 17 juin 1994, autorisant la Communauté européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique à signer et à conclure la convention portant statut des écoles européennes ( 9 ).

12.

Partant, cette convention constitue un accord conclu par le Conseil de l’Union européenne qui, en ce qui concerne aujourd’hui l’Union européenne, implique qu’il forme partie intégrante de son ordre juridique à compter de l’entrée en vigueur dudit accord, à savoir le 1er octobre 2002. Il s’ensuit que la Cour est compétente pour statuer à titre préjudiciel sur l’interprétation des stipulations de la convention de 1994 ( 10 ).

13.

Cette appréciation n’est pas infirmée par l’arrêt Miles e.a. ( 11 ) qui portait non pas sur la nature de la convention de 1994 au regard de l’ordre juridique de l’Union, mais sur la qualification de la chambre de recours des écoles européennes en tant que «juridiction d’un des États membres», au sens de l’article 267 TFUE.

14.

J’ajoute que la compétence de la Cour pour répondre, à titre préjudiciel, aux questions posées par la juridiction de renvoi quant à l’interprétation des stipulations de la convention de 1994 s’étend également, à mon sens, aux actes adoptés sur la base de ces stipulations et auxquels ces dernières renvoient, en particulier aux fins d’en appréhender la portée. En effet, ces actes permettent d’interpréter la portée exacte desdites stipulations. Ils font nécessairement corps avec ces dernières et ne sauraient dès lors être omis par la Cour.

15.

Comme les développements relatifs à la réponse à donner aux questions préjudicielles ci-après le montreront, parmi ces actes figure, en l’occurrence, le statut des chargés de cours, acte de portée générale, adopté par le conseil supérieur des écoles européennes, lequel constitue l’organe décisionnel principal commun auxdites écoles et dont la composition comprend, notamment, les représentants des États membres et de la Commission ( 12 ). Au demeurant, la juridiction de renvoi est elle-même parfaitement consciente de la nécessité d’une telle démarche lorsqu’elle se réfère explicitement au statut des chargés de cours dans sa quatrième question préjudicielle aux fins de...

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