Livia Balestra v Istituto Nazionale della Previdenza Sociale (INPS).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1996:389
Docket NumberC-139/95
Celex Number61995CC0139
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date17 October 1996
EUR-Lex - 61995C0139 - FR 61995C0139

Conclusions de l'avocat général Elmer présentées le 17 octobre 1996. - Livia Balestra contre Istituto nazionale della previdenza sociale (INPS). - Demande de décision préjudicielle: Pretura circondariale di Genova - Italie. - Directives 76/207/CEE et 79/7/CEE - Egalité de traitement entre hommes et femmes - Calcul des crédits de cotisations complémentaires de retraite. - Affaire C-139/95.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-00549


Conclusions de l'avocat général

1 Dans la présente affaire, la Pretura circondariale di Genova (Italie) a déféré à la Cour des questions concernant l'interprétation de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (1), et de la directive 79/7/CEE du Conseil, du 19 décembre 1978, relative à la mise en oeuvre progressive du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale (2).

2 Ces questions sont posées dans le cadre d'un régime national qui prévoit que les femmes salariées d'une entreprise déclarée en crise peuvent prendre leur retraite anticipée à partir de l'âge de 50 ans et bénéficier d'un crédit de cotisations de retraite complémentaires pour la période les séparant du jour de leurs 55 ans, tandis que les limites d'âge correspondantes pour les hommes sont respectivement de 55 et 60 ans.

La législation nationale applicable

3 En vertu de l'article 9 de la loi n_ 218/1952, les travailleurs masculins ont droit à la retraite à l'âge de 60 ans, tandis que les travailleurs féminins y ont droit à l'âge de 55 ans. Pour les deux catégories de travailleurs, ce droit est subordonné à la condition que l'intéressé soit crédité d'au moins 180 cotisations mensuelles ou 780 cotisations hebdomadaires.

4 Dans son arrêt n_ 371 du 6 juillet 1989 (3), la Corte costituzionale a déclaré que tant les hommes que les femmes avaient le droit de travailler jusqu'à l'âge de 60 ans. Une femme qui choisit de ne pas prendre sa retraite à l'âge de 55 ans a le droit de continuer à verser des cotisations et donc de se constituer une retraite plus importante pour le jour où elle quittera le marché du travail.

5 L'article 16 de la loi n_ 155 du 23 avril 1981 (4) (ci-après la «loi») régit la préretraite des salariés des entreprises déclarées en crise par le CIPI (Comitato interministeriale per il coordinamento della politica industriale). Le droit à la préretraite appartient dans de telles entreprises aux femmes qui ont atteint l'âge de 50 ans et aux hommes qui ont atteint l'âge de 55 ans, sous réserve toutefois qu'ils aient versé au moins 180 cotisations mensuelles. Le régime de pension est calculé sur la base de la durée de cotisation, augmentée d'une période égale à celle comprise entre la date de la résiliation du contrat et la date anniversaire de leurs 55 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes. Le bénéfice de la pension de vieillesse est ainsi avancé de 5 ans au maximum et le travailleur, qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme, est crédité de cotisations complémentaires pour la période le séparant de l'âge normal de la retraite. Initialement, le coût de cette mesure était supporté par l'État. Actuellement, l'entreprise doit toutefois verser au Trésor public un montant égal à 50 % de ce coût.

Les faits de l'espèce

6 Livia Balestra était salariée d'une entreprise déclarée en crise par le CIPI et a adressé à l'Istituto nazionale della previdenza sociale (ci-après l'«INPS») une demande de retraite anticipée conformément à l'article 16 de la loi. A cette date, Livia Balestra était âgée de 54 ans et 7 mois et l'INPS l'a créditée de 5 mois de cotisations, c'est-à-dire la période qui lui manquait, lors de la rupture de son contrat de travail, pour avoir 55 ans et donc droit à une pension de retraite.

7 Le 13 avril 1993, Livia Balestra a introduit un recours devant la Pretura circondariale di Genova en concluant à l'obtention d'un crédit de cotisations pour toute la période de 5 ans prévue par l'article 16 de la loi, en faisant valoir qu'il y avait eu discrimination en raison du sexe en violation des articles 3, 37 et 38 de la constitution italienne.

8 Par arrêt n_ 404, du 18 novembre 1993, dans l'affaire Miniati/INSP (5), la Corte costituzionale a déclaré que le régime prévu par l'article 16 de la loi est compatible avec la constitution italienne, car il instaure une parfaite égalité de traitement entre hommes et femmes, modulée en fonction de l'âge de la retraite.

9 Livia Balestra a alors soutenu que l'article 16 de la loi était contraire au principe de l'égalité de traitement énoncé dans les directives 76/207 et 79/7.

Les dispositions pertinentes du droit communautaire

10 L'article 119, premier alinéa, du traité énonce le principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail. Aux termes du deuxième alinéa, par rémunération, il faut entendre le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier.

11 La directive 76/207 comporte notamment les dispositions suivantes:

«Article premier

1. La présente directive vise la mise en oeuvre, dans les États membres, du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, y compris la promotion, et à la formation professionnelle ainsi que les conditions de travail et, dans les conditions prévues au paragraphe 2, la sécurité sociale. Ce principe est dénommé ci-après `principe de l'égalité de traitement'.

2. En vue d'assurer la mise en oeuvre progressive du principe de l'égalité de traitement en matière de sécurité sociale, le Conseil arrêtera, sur proposition de la Commission, des dispositions qui en préciseront notamment le contenu, la portée et les modalités d'application.

Article 2

1. Le principe de l'égalité de traitement au sens des dispositions ci-après implique l'absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement par référence, notamment, à l'état matrimonial ou familial.

...

Article 5

1. L'application du principe de l'égalité de traitement en ce qui concerne les conditions de travail, y compris les conditions de licenciement, implique que soient assurées aux hommes et aux femmes les mêmes conditions, sans discrimination fondée sur le sexe.

...»

12 La directive 79/7 comporte notamment les dispositions suivantes:

«Article premier

La présente directive vise la mise en oeuvre progressive, dans le domaine de la sécurité sociale et autres éléments de protection sociale prévu à l'article 3, du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale, ci-après dénommé `principe de l'égalité de traitement'.

Article 2

La présente directive s'applique à la population active, y compris les travailleurs indépendants, les travailleurs dont l'activité est interrompue par une maladie, un accident ou un chômage involontaire et les personnes à la recherche d'un emploi, ainsi qu'aux travailleurs retraités et aux travailleurs invalides.

Article 3

1. La présente directive s'applique:

a) aux régimes légaux qui assurent une protection contre les risques suivants:

...

- vieillesse,

...

- chômage

...

Article 4

1. Le principe de l'égalité de traitement implique l'absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement par référence, notamment, à l'état matrimonial ou familial, en particulier en ce qui concerne:

- le champ d'application des régimes et les conditions d'accès aux régimes,

- l'obligation de cotiser et le calcul des cotisations,

- le calcul des prestations, y compris les majorations dues au titre du conjoint et pour personne à charge et les conditions de durée et de maintien du droit aux prestations.

...

Article 7

1. La présente directive ne fait pas obstacle à la faculté qu'ont les États membres d'exclure de son champ d'application:

a) la fixation de l'âge de la retraite pour l'octroi des pensions de vieillesse et de retraite et les conséquences pouvant en découler pour d'autres prestations;

...»

Les questions préjudicielles

13 Par ordonnance du 19 avril 1995, la Pretura circondariale di Genova a déféré à la Cour les questions suivantes:

«1) La fixation de limites d'âge différentes pour les hommes et pour les femmes aux fins de l'accès à la retraite anticipée au sens de l'article 16 de la loi n_ 155/81, de la résolution du rapport de travail et du calcul des prestations de préretraite viole-t-elle les directives communautaires précitées (articles 1, 2, 3, 4 et 5 de la directive 79/7/CEE et articles 1, 2 et 5 de la directive 76/207/CEE)?

2) Le traitement différent (sur le plan du rapport individuel de travail ainsi que sur celui de la sécurité sociale) résultant de la fixation de limites d'âge différentes viole-t-il les dispositions précitées des directives communautaires susmentionnées dans un ordre juridique - comme l'ordre juridique italien - où la limite d'âge pour exercer une activité (seule limite pertinente pour la préretraite) est fixée à 60 ans tant pour l'homme que pour la femme?»

14 La formulation des questions déférées n'est pas parfaitement claire. La première question semble concerner, de manière très générale, la portée du principe de l'égalité de traitement en matière de licenciement, de droit à la préretraite et de régime de calcul des prestations. La seconde question reprend dans une large mesure la première question, notamment pour ce qui est du droit à la préretraite et du calcul des prestations, mais en précisant que la question est posée dans le contexte d'un ordre juridique, tel que l'ordre juridique italien, dans lequel tant les hommes que...

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