Britannia Alloys & Chemicals Ltd v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2007:128
CourtCourt of Justice (European Union)
Date01 March 2007
Docket NumberC-76/06
Celex Number62006CC0076
Procedure TypeRecurso de anulación

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES Bot

présentées le 1er mars 2007 (1)

Affaire C‑76/06 P

Britannia Alloys & Chemicals Ltd

contre

Commission des Communautés européennes

«Pourvoi – Concurrence – Entente – Marché du phosphate de zinc – Article 81 CE – Amende – Article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 – Lignes directrices pour le calcul du montant des amendes – Plafond légal de l’amende – Chiffre d’affaires pertinent – Exercice social précédent – Égalité de traitement – Principe de sécurité juridique»





1. La présente affaire a pour objet le pourvoi formé par la société Britannia Alloys & Chemicals Ltd (ci‑après «Britannia» ou la «requérante») à l’encontre de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 29 novembre 2005, Britannia Alloys & Chemicals/Commission (ci‑après l’«arrêt attaqué») (2).

2. Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours en annulation introduit par la requérante contre la décision 2003/437/CE de la Commission (3), qui sanctionnait Britannia, au titre de l’article 81, paragraphe 1, CE et de l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3, ci‑après l’«accord EEE»), pour avoir participé à un accord continu et/ou à une pratique concertée dans le secteur du phosphate de zinc. À l’appui de ce recours, la requérante faisait valoir une violation de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 du Conseil (4), ainsi qu’une violation des principes de proportionnalité, d’égalité de traitement et de sécurité juridique. Britannia reprochait à la Commission des Communautés européennes d’avoir tenu compte de son chiffre d’affaires résultant d’un exercice social autre que celui précédant l’adoption de la décision litigieuse, aux fins de la détermination du plafond de l’amende qui lui avait été infligée.

3. Dans le présent pourvoi, la requérante reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis diverses erreurs de droit en considérant que la Commission pouvait retenir une telle méthode de calcul. Elle invite la Cour à se prononcer sur le point de savoir si, ce faisant, le Tribunal a, dans l’arrêt attaqué, violé l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 ainsi que les principes d’égalité de traitement et de sécurité juridique.

4. Dans les présentes conclusions, nous soutiendrons que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en jugeant que la Commission était en droit, aux fins du calcul du montant maximal de l’amende applicable à la requérante, de se référer à un exercice social autre que celui précédant l’adoption de la décision litigieuse.

5. En revanche, nous constaterons que le Tribunal a manqué à l’obligation de motivation qui lui incombe en vertu des articles 36 et 53 du statut de la Cour de justice en omettant de répondre à un argument soulevé par la requérante dans le cadre du recours en annulation introduit devant lui. Par conséquent, nous proposerons à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué sur ce point. Le litige étant en état d’être jugé, nous inviterons la Cour à l’évoquer et à statuer définitivement sur le moyen d’annulation soulevé en première instance. Nous soutiendrons que ce moyen n’est pas fondé et, au regard des éléments déjà constatés par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, nous proposerons à la Cour de rejeter le recours en annulation introduit par Britannia.

I – Le cadre juridique

6. L’article 81 CE interdit «tous accords entre entreprises, toutes décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun».

7. En cas de violation de cette disposition, la Commission peut, conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, «infliger aux entreprises et associations d’entreprises des amendes de [1 000 euros] au moins et [de 1 million d’euros] au plus, ce dernier montant pouvant être porté à dix pour cent du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l’infraction».

8. En vue d’assurer la transparence et le caractère objectif de ses décisions tant à l’égard des entreprises qu’à l’égard du juge communautaire, la Commission a publié, en 1998, des lignes directrices dans lesquelles elle énonce la méthode de calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 (5).

9. Les lignes directrices disposent, à leur point 1, que, pour le calcul du montant des amendes, le montant de base est déterminé en fonction des critères retenus à cette disposition, à savoir la gravité et la durée de l’infraction.

10. L’évaluation de la gravité de l’infraction doit prendre en considération la nature propre de l’infraction, son impact concret sur le marché lorsqu’il est mesurable et l’étendue du marché géographique concerné (point 1 A, premier alinéa, des lignes directrices). Dans ce cadre, les infractions sont classées en trois catégories, à savoir les «infractions peu graves», pour lesquelles le montant des amendes envisageable est compris entre 1 000 euros et 1 million d’euros, les «infractions graves», pour lesquelles ce montant peut varier entre 1 million d’euros et 20 millions d’euros, ainsi que les «infractions très graves», pour lesquelles ledit montant va au‑delà de 20 millions d’euros (point 1 A, deuxième alinéa, premier à troisième tiret). À l’intérieur de chacune de ces catégories, et notamment pour les catégories dites «graves» et «très graves», l’échelle des sanctions retenues permet de différencier le traitement qu’il convient d’appliquer aux entreprises selon la nature des infractions commises (point 1 A, troisième alinéa). Il est, en outre, nécessaire de prendre en considération la capacité économique effective des auteurs de l’infraction à créer un dommage important aux autres opérateurs, notamment aux consommateurs, et de déterminer le montant de l’amende à un niveau qui lui assure un caractère suffisamment dissuasif (point 1 A, quatrième alinéa).

11. Il peut également être tenu compte du fait que les entreprises de grande dimension disposent la plupart du temps des connaissances et des infrastructures juridico‑économiques qui leur permettent de mieux apprécier le caractère infractionnel de leur comportement ainsi que les conséquences qui en découlent du point de vue du droit de la concurrence (point 1 A, cinquième alinéa).

12. À l’intérieur de chacune des trois catégories retenues ci-dessus, la Commission peut, dans certains cas, pondérer le montant déterminé, afin de tenir compte du poids spécifique, et donc de l’impact réel, du comportement infractionnel de chaque entreprise sur la concurrence, notamment lorsqu’il existe une disparité considérable dans la dimension des entreprises auteurs d’une infraction de même nature et d’adapter en conséquence le montant de base selon le caractère spécifique de chaque entreprise (point 1 A, sixième alinéa).

13. Quant au facteur relatif à la durée de l’infraction, les lignes directrices établissent une distinction entre les «infractions de courte durée» (en général inférieure à 1 an), pour lesquelles le montant retenu pour la gravité ne devrait pas être majoré, les «infractions de moyenne durée» (en général de 1 à 5 ans), pour lesquelles ce montant peut être majoré jusqu’à 50 %, et les «infractions de longue durée» (en général au‑delà de 5 ans), pour lesquelles ledit montant peut être majoré pour chaque année de 10 % (point 1 B, premier alinéa, premier à troisième tiret).

14. Ensuite, les lignes directrices citent, à titre d’exemple, une liste de circonstances aggravantes et atténuantes qui peuvent être prises en considération pour augmenter ou diminuer le montant de base, puis elles se réfèrent à la communication de la Commission du 18 juillet 1996, concernant la non‑imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (6).

15. En tant que remarque générale, le point 5, sous a), premier alinéa, des lignes directrices précise que le résultat final du calcul du montant de l’amende selon ce schéma (montant de base affecté des pourcentages d’aggravation et d’atténuation) ne peut en aucun cas dépasser 10 % du chiffre d’affaires mondial des entreprises, conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17. Selon le point 5, sous a), second alinéa, de ces lignes directrices, l’exercice comptable auquel le chiffre d’affaires mondial se réfère doit être, dans toute la mesure du possible, celui correspondant à l’exercice qui précède l’année de la prise de décision et, dans l’hypothèse où ces données ne seraient pas disponibles, l’exercice immédiatement antérieur.

16. De plus, le point 5, sous b), desdites lignes directrices prévoit qu’il convient, selon les circonstances, après avoir effectué les calculs décrits ci‑dessus, de prendre en considération certaines données objectives telles que le contexte économique spécifique, l’avantage économique ou financier éventuellement acquis par les auteurs de l’infraction, les caractéristiques propres des entreprises en cause ainsi que leur capacité contributive réelle dans un contexte social particulier, pour adapter, in fine, le montant des amendes envisagé.

17. Il s’ensuit que, suivant la méthode énoncée dans les lignes directrices, le calcul du montant des amendes est effectué en fonction des deux critères mentionnés à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, à savoir la gravité de l’infraction et la durée de celle‑ci, tout en respectant la limite maximale par rapport au chiffre d’affaires de chaque entreprise, établie par la même disposition.

II – Le cadre factuel

18. Les faits, tels qu’ils ressortent de l’arrêt attaqué, peuvent être résumés de la manière suivante.

19. Britannia, société de droit anglais, est une filiale de M. I. M. Holdings Ltd (ci‑après «MIM»), une société de droit...

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