Commission of the European Communities v Kingdom of Belgium.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1992:488
CourtCourt of Justice (European Union)
Date02 December 1992
Docket NumberC-173/91
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number61991CC0173
EUR-Lex - 61991C0173 - FR 61991C0173

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 2 décembre 1992. - Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique. - Manquement d'État - Égalité de rémunération entre hommes et femmes - Indemnités complémentaires pour licenciement. - Affaire C-173/91.

Recueil de jurisprudence 1993 page I-00673


Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1. Dans la présente affaire, la Commission demande à la Cour de constater, conformément à l' article 169 du traité CEE, que, en maintenant une législation qui exclut les travailleurs féminins âgés de plus de 60 ans du bénéfice des indemnités complémentaires pour licenciement, le royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l' article 119 du traité et, subsidiairement, en vertu de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l' égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l' accès à l' emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40).

Les antécédents du litige

2. Cette affaire trouve son origine dans une plainte reçue en 1987 par la Commission. Cette plainte comprenait deux aspects. Premièrement, le plaignant alléguait que les dispositions de la loi belge autorisant le licenciement, avec un préavis réduit, des travailleurs féminins âgés de 60 à 65 ans était incompatible avec le droit communautaire. Deuxièmement, il suggérait que la législation belge relative aux indemnités complémentaires pour certains travailleurs en cas de licenciement était discriminatoire à l' égard des femmes et était également contraire au droit communautaire.

3. La plainte a abouti à l' ouverture d' une procédure contre le royaume de Belgique au titre de l' article 169. Au cours de la procédure précontentieuse, la législation belge relative aux conditions dans lesquelles les travailleurs pouvaient être licenciés avec un préavis réduit a été modifiée dans un sens qui, de l' avis de la Commission, satisfaisait aux exigences du droit communautaire. La Belgique niait toutefois que son régime d' indemnités complémentaires fût illégal. La Commission a donc décidé de porter la question devant la Cour.

4. La convention collective de travail n 17 du 19 décembre 1974, conclue au sein du Conseil national du travail, a institué un régime d' indemnités complémentaires pour certains travailleurs âgés, en cas de licenciement. La convention a été rendue obligatoire par un arrêté royal du 16 janvier 1975 (Moniteur belge du 31.1.1975, p. 1055). Selon les articles 3 et 4 de l' arrêté royal, les travailleurs âgés de 60 ans et plus qui sont licenciés ont droit, pour autant qu' ils bénéficient d' allocations de chômage, à une indemnité complémentaire mensuelle à charge de leur dernier employeur. Les limites d' âge pour le bénéfice des allocations de chômage sont fixées par l' arrêté royal du 20 décembre 1963, article 144, tel que modifié par l' arrêté royal du 7 août 1984. Selon l' article 144, les hommes cessent d' avoir droit aux allocations de chômage lorsqu' ils atteignent l' âge de 65 ans, tandis que les femmes cessent d' y avoir droit lorsqu' elles atteignent l' âge de 60 ans. En conséquence, le régime d' indemnités complémentaires mis en place par la convention collective bénéficie uniquement aux travailleurs masculins.

5. Il est communément admis que la différence de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne les limites d' âge pour le bénéfice des allocations de chômage est liée à la différence de traitement en matière d' âge de la retraite qui existait à une certaine époque en droit belge. Toutefois, une loi belge du 20 juillet 1990 a instauré un âge flexible de la retraite entre 60 et 65 ans pour les travailleurs des deux sexes, remplaçant le système antérieur dans lequel l' âge de la retraite était fixé à 60 ans pour les femmes et à 65 ans pour les hommes. La loi du 20 juillet 1990 a également autorisé l' adoption d' arrêtés royaux en vue de mettre la législation antérieure en concordance avec ses dispositions. Toutefois, aucune modification n' a été apportée à l' article 144 de l' arrêté royal du 20 décembre 1963. Un travailleur féminin âgé de plus de 60 ans qui est licencié continue donc à ne pas pouvoir bénéficier de l' indemnité complémentaire puisqu' il n' a pas droit aux allocations de chômage. En vertu de l' article 5 de l' arrêté royal du 16 janvier 1975, l' indemnité complémentaire est égale à la moitié de la différence entre une rémunération de référence et l' allocation de chômage, et le gouvernement belge admet que, dans la plupart des cas, le montant combiné de l' allocation complémentaire et des allocations de chômage est supérieur au montant de la pension. Il n' est, dès lors, pas contesté que les femmes âgées de plus de 60 ans sont susceptibles de recevoir moins d' argent qu' un homme du même âge, licencié dans les mêmes circonstances, puisqu' elles n' ont pas droit à l' indemnité complémentaire.

6. La Commission estime que le régime institué par la convention collective est incompatible avec l' article 119 du traité CEE qui prévoit "l' application du principe de l' égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail". La Commission ajoute que, si la Cour devait estimer que les conditions d' application de l' article 119 ne sont pas réunies, la législation contestée serait alors incompatible avec l' article 5, paragraphe 1, de la directive 76/207. Nous examinerons successivement ces arguments.

Article 119

7. La Commission est d' avis que l' indemnité complémentaire fait partie de la "rémunération" au sens de l' article 119 et invoque les arrêts de la Cour du 9 février 1982, Garland (12/81, Rec. p. 359), et, spécialement, du 17 mai 1990, Barber (C-262/88, Rec. p. I-1889). La Commission relève que l' indemnité complémentaire présente les caractéristiques suivantes: elle résulte d' une convention collective conclue entre employeurs et travailleurs; elle est à la charge du dernier employeur du travailleur licencié; et elle est due en raison de la relation de travail. La Commission conclut que l' indemnité complémentaire satisfait à toutes les conditions qui, selon l' arrêt Barber, doivent être remplies pour qu' un avantage relève de la notion de "rémunération".

8. Le gouvernement belge conteste le point de vue de la Commission. Il se réfère à l' arrêt de la Cour du 25 mai 1971, Defrenne/Belgique (80/70, Rec. p. 445), et soutient que l' indemnité complémentaire constitue un avantage de sécurité sociale qui ne relève pas du champ d' application de l' article 119. Le gouvernement belge allègue que, bien que l' indemnité complémentaire soit payée en cas de licenciement, elle ne constitue pas, en tant que telle, une indemnité de licenciement. Au soutien de cet argument, il fait observer que, selon l' article 9 de la convention collective, l' indemnité complémentaire ne peut être cumulée avec d' autres indemnités versées en cas de licenciement. En outre, contrairement à une indemnité de licenciement dont le montant est calculé exclusivement sur la base du salaire et du nombre d' années de travail professionnel, l' indemnité complémentaire dépend du montant du salaire et du montant de l' allocation de chômage. Le gouvernement belge allègue, en outre, que l' existence d' un lien entre l' indemnité et la relation de travail ne signifie pas nécessairement que l' indemnité relève du champ d' application de l' article 119. En effet, en droit belge, le lien avec le contrat de travail existe pour toutes les prestations de sécurité sociale. Le facteur qui déterminerait le caractère de la prestation n' est pas le lien qu' elle a avec le contrat de travail, mais la nature du régime auquel elle est soumise. Selon le gouvernement belge, l' indemnité complémentaire fait partie intégrante d' un système sui generis, en l' occurrence, la pension anticipée prévue par des conventions collectives de travail (prépension conventionnelle). La prépension conventionnelle est constituée de deux éléments: l' allocation de chômage et l' indemnité complémentaire. Cette dernière est octroyée en vertu de la convention collective n 17 et d' autres conventions collectives de travail conclues dans des secteurs d' activité spécifiques. Le gouvernement...

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