Gmina Wrocław v Minister Finansów.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:431
Docket NumberC-276/14
Celex Number62014CC0276
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date30 June 2015
62014CC0276

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 30 juin 2015 ( 1 )

Affaire C‑276/14

Gmina Wrocław

contre

Minister Finansów

[demande de décision préjudicielle formée par le Naczelny Sąd Administracyjny (Pologne)]

«Renvoi préjudiciel — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée — Directive 2006/112/CEArticles 9 et 13 — Articles 5, paragraphe 3, et 4, paragraphe 2, TUE — Activités économiques accomplies par une entité organisationnelle communale en une qualité autre que celle d’autorité publique — Entité organisationnelle communale dont les activités économiques ne remplissent pas le critère d’indépendance — Possibilité de qualifier une telle entité d’assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée au sens des dispositions de la directive 2006/112»

I – Introduction

1.

La présente demande de décision préjudicielle, formée par le Naczelny Sąd Administracyjny (Cour suprême administrative), soulève la question de savoir si une entité organisationnelle communale, dont les activités économiques ne remplissent pas le critère d’indépendance au sens de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2006/112/CE ( 2 ), peut être qualifiée d’assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée (ci‑après la «TVA») séparément de la commune dont elle fait partie, pour les opérations économiques réalisées par cette entité pour le compte de la commune.

2.

En particulier, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur le point de savoir si cette notion d’indépendance, au sens de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2006/112, doit être prise en compte pour pouvoir qualifier d’assujettis à la TVA les organismes de droit public tels que les entités budgétaires communales visées dans la demande de décision préjudicielle, compte tenu de l’article 13, paragraphe 1, de cette directive ainsi que des articles 4, paragraphe 2, et 5, paragraphe 3, TUE, relatifs aux principes de subsidiarité et d’autonomie institutionnelle.

3.

L’enjeu de l’affaire, du point de vue de la République de Pologne, est lié au fait que, en Pologne, les communes exercent leurs missions de service public de manière autonome, par le biais d’entités organisationnelles créées à cette fin, notamment les entités budgétaires communales ( 3 ), qui ont, jusqu’à ce jour, été considérées comme des assujetties à la TVA distinctes de la commune. La présente affaire soulève donc une question d’interprétation des articles 9 et 13 de la directive 2006/112 impliquant de déterminer comment il convient d’apprécier la manière dont ces entités organisationnelles, notamment les entités budgétaires communales, exercent leurs activités économiques.

4.

La question concernant les principes de subsidiarité et d’autonomie institutionnelle établis dans les articles 5, paragraphe 3, et 4, paragraphe 2, TUE a été soulevée par la juridiction de renvoi dans la mesure où elle estime que l’impossibilité d’enregistrer les entités budgétaires communales, telles que celles visées dans l’affaire au principal, comme des assujetties à la TVA séparément de la commune, pourrait avoir des conséquences sur le modèle de fonctionnement des collectivités territoriales en Pologne. Il convient alors d’examiner si ces dispositions du droit primaire ont, à cet égard, une incidence sur l’interprétation des dispositions pertinentes de la directive 2006/112.

5.

Comme l’ont souligné les parties ayant présenté des observations dans la présente affaire, la jurisprudence de la Cour concernant ce critère d’indépendance a porté sur l’application de celui‑ci aux activités des personnes physiques accomplissant des fonctions publiques et des entités privées. Par conséquent, la juridiction de renvoi a invité la Cour à examiner s’il convient d’appliquer de la même manière cette jurisprudence aux organismes de droit public.

II – Le cadre juridique

A – La directive 2006/112

6.

La directive 2006/112 a abrogé et remplacé, à compter du 1er janvier 2007, la législation communautaire existant en matière de TVA, notamment la sixième directive ( 4 ).

7.

L’article 9, paragraphe 1, de la directive 2006/112 dispose:

«Est considéré comme ‘assujetti’ quiconque exerce, d’une façon indépendante et quel qu’en soit le lieu, une activité économique, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.

Est considérée comme ‘activité économique’ toute activité de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est en particulier considérée comme activité économique, l’exploitation d’un bien corporel ou incorporel en vue d’en tirer des recettes ayant un caractère de permanence.»

8.

Aux termes de l’article 10 de la directive 2006/112:

«La condition que l’activité économique soit exercée d’une façon indépendante visée à l’article 9, paragraphe 1, exclut de la taxation les salariés et autres personnes dans la mesure où ils sont liés à leur employeur par un contrat de louage de travail ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail et de rémunération et la responsabilité de l’employeur.»

9.

L’article 13, paragraphe 1, de ladite directive est libellé comme suit ( 5 ):

«Les États, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas considérés comme des assujettis pour les activités ou opérations qu’ils accomplissent en tant qu’autorités publiques, même lorsque, à l’occasion de ces activités ou opérations, ils perçoivent des droits, redevances, cotisations ou rétributions.

Toutefois, lorsqu’ils effectuent de telles activités ou opérations, ils doivent être considérés comme des assujettis pour ces activités ou opérations dans la mesure où leur non‑assujettissement conduirait à des distorsions de concurrence d’une certaine importance.

En tout état de cause, les organismes de droit public ont la qualité d’assujettis pour les activités figurant à l’annexe I et dans la mesure où celles‑ci ne sont pas négligeables.»

B – Le droit polonais

10.

L’article 15, paragraphe 1, de la loi du 11 mars 2004, sur la taxe sur les biens et les services ( 6 ), transpose en droit polonais l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2006/112 et est libellé comme suit:

«Sont considérées comme assujetties les personnes morales, les entités organisationnelles n’ayant pas la personnalité juridique et les personnes physiques qui accomplissent, d’une façon indépendante, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.»

11.

L’article 15, paragraphe 6, de la loi TVA nationale prévoit que ne sont pas considérés comme assujettis les organes d’autorités publiques et les bureaux de ces organes en ce qui concerne les missions instituées par des dispositions spécifiques et pour la réalisation desquelles ils ont été désignés, à l’exclusion des activités réalisées en vertu de contrats de droit privé.

III – Le litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour

12.

Dans le système administratif polonais, les communes exécutent les missions qui leur ont été confiées en vertu de la loi du 8 mars 1990 sur les communes ( 7 ) avec le concours des établissements budgétaires territoriaux et des entités budgétaires communales ( 8 ). Ces dernières, qui ne sont pas dotées d’une personnalité juridique propre, contribuent essentiellement à réaliser les missions de la commune et n’ont pas vocation à exécuter une activité économique, laquelle peut tout au plus intervenir à l’occasion d’une autre activité principale. Les revenus et les dépenses de ces entités budgétaires communales, y compris ceux qui sont liés à leurs activités économiques soumises à la TVA, font partie du budget de la commune. Ces entités incluent entre autres des écoles et des maisons culturelles.

13.

Le litige au principal, opposant la Gmina Wrocław (commune de Wrocław) au Minister Finansów (ministre des Finances polonais, ci‑après le «ministre des Finances»), trouve son origine dans des demandes d’interprétation du droit fiscal faites par cette commune.

14.

La commune de Wrocław a demandé au ministre des Finances si une entité budgétaire communale peut être enregistrée comme assujettie à la TVA séparément de la commune pour des opérations relevant de la TVA ou si la commune elle‑même doit être enregistrée en tant qu’assujettie pour les opérations effectuées par son entité budgétaire. Selon cette commune, ces entités budgétaires communales ne rempliraient pas le critère d’indépendance pour l’assujettissement à la TVA, prévu à l’article 15, paragraphes 1 et 2, de la loi TVA nationale et, par conséquent, ne pourraient pas être enregistrées séparément. En outre, l’enregistrement des entités budgétaires communales séparément de la commune entraînerait certains inconvénients d’ordre pratique ( 9 ).

15.

Par ses rescrits, le ministre des Finances a estimé que, dès lors que les entités budgétaires communales, distinctes de la structure de la commune, réalisent des activités économiques de façon indépendante au regard de critères objectifs et exécutent à cette occasion des activités assujetties à la TVA, elles devraient être considérées comme étant assujetties à la TVA séparément de la commune.

16.

La commune de Wrocław a introduit des recours auprès du Wojewódzki Sąd Administracyjny we Wrocławiu (tribunal administratif de voïvodie à Wrocław) contre ces rescrits du ministre des Finances. Ce tribunal ayant rejeté les recours, cette commune a formé un pourvoi en cassation devant la juridiction de renvoi.

17.

...

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