Cimber Air A/S v Skatteministeriet.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2004:186
Date25 March 2004
Celex Number62002CC0382
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-382/02
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. DÀMASO RUIZ-JARABO COLOMER
présentées le 25 mars 2004(1)



Affaire C-382/02

Cimber Air A/S
contre
Skatteministeriet


[demande de décision préjudicielle formée par le Vestre Landsret (Danemark)]

«Sixième directive TVA – Exemptions – Transports internationaux – Avitaillement et services aux aéronefs – Interprétation de l'article 15, points 7 et 9»






1. Les compagnies de navigation aérienne assurant le transport international de passagers opèrent généralement sur les marchés domestiques également. Le Vestre Landsret (juridiction territoriale de l’Ouest) (2) (Danemark) se demande si, en pareil cas, les prestations fournies aux avions assurant les liaisons intérieures d’un pays doivent être exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après, la «TVA»). 2. Afin de dissiper ces doutes, il a saisi la Cour d’une demande préjudicielle concernant l’interprétation de l’article 15, points 6, 7 et 9, de la sixième directive (3) . Il lui a ainsi adressé deux questions relatives à la portée des exonérations prévues par ces dispositions et aux critères permettant de déterminer si l’activité principale d’une entreprise est le commerce aéronautique entre plusieurs pays. I – Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles 3. Cimber Air A/S (ci-après «Cimber Air») fait partie du groupe homonyme qui appartient à une société holding du même nom et à l’entreprise SAS. Elle a pour activité essentielle d’assurer des liaisons aériennes régionales en Europe en coopération avec la compagnie SAS et avec la Lufthansa. Elle propose des vols intérieurs au Danemark ainsi que des vols entre ce pays et l’étranger; elle couvre également des lignes avec départ et arrivée en dehors du territoire danois (4) . 4. La société possède une flotte de dix aéronefs (5) , dont l’exploitation est organisée de manière à ce qu’un même appareil puisse être utilisé indistinctement pour toutes les destinations. 5. Les activités de Cimber Air comprennent donc une partie «nationale» et une partie «internationale». Le volume d’affaires de l’une ou de l’autre varie en fonction de l’unité de mesure retenue. Si l’on utilise le volume d’activité ou les ratios «sièges/kilomètres offerts» et «passagers/kilomètres transportés», le trafic extérieur accuse une légère avance. En revanche, la part «nationale» s’avère plus importante en termes de nombre de passagers ou lorsque l’unité de mesure retenue est celle des fréquences cumulées (6) . 6. Cimber Air a demandé au Skatteministeriet (ministère danois des Finances) le remboursement de la TVA qu’elle avait acquittée au cours de la période comprise entre le 1er mai 1996 et le 30 avril 2001 au titre des fournitures de biens et des prestations de services destinés à des vols intérieurs commerciaux de voyageurs. Elle lui a également demandé de lui reconnaître le droit à ce que les unes et les autres opérations soient exonérées de la taxe à partir de la seconde date dans la mesure où son activité principale consiste à assurer des liaisons internationales. L’administration défenderesse n’a accédé ni à l’une ni à l’autre demande. 7. Les débats engagés devant le Vestre Landsret portaient sur l’étendue des exonérations prévues par l’article 15, points 6, 7 et 9, de la sixième directive et, plus particulièrement, sur le point de savoir si les deux dernières de ces dispositions comprennent les opérations concernant les avions assurant des liaisons intérieures. 8. La juridiction danoise hésite sur la portée qu’il convient de donner à ces dispositions dont dépend la solution du litige. Il a donc adressé les deux questions préjudicielles suivantes à la Cour:
«1)
les dispositions de l’article 15, points 7 et 9, ainsi que du [point] 6, de la sixième directive (directive 77/388/CEE du Conseil) doivent-elles être interprétées dans ce sens qu’un État membre peut ne pas accorder l’exonération de la TVA pour les livraisons destinées à un aéronef utilisé pour effectuer un vol intérieur, indépendamment du fait que la compagnie de navigation aérienne utilisant cet aéronef pratique essentiellement un trafic international, ou cet État membre a-t-il l’obligation d’exonérer de la TVA de telles livraisons?
2)
Dans l’affirmative, quels critères, par exemple de chiffre d’affaires, de sièges-kilomètres, de passagers-kilomètres ou de nombre de passagers ou de vols, sont pertinents pour déterminer si une compagnie de navigation aérienne pratique essentiellement un trafic international au sens de l’article 15, [point] 6?»
II – La procédure devant la Cour 9. Ont présenté des observations écrites dans le délai imparti par l’article 20 du statut CE de la Cour le gouvernement danois, Cimber Air et la Commission. 10. Ont comparu à l’audience du 4 mars 2004 pour y être entendus en leurs observations orales, le gouvernement danois, Cimber Air et la Commission ainsi que le gouvernement allemand. III – Les règles communautaires dont l’interprétation est demandée 11. Les règles d’exonération sont énoncées au titre X de la sixième directive. Celles qui s’appliquent aux opérations intérieures et aux importations figurent à l’article 13 et à l’article 14 respectivement. L’article 15, quant à lui, énonce les exemptions applicables aux exportations en dehors de la Communauté, aux opérations assimilées et aux transports internationaux (7) . Dans cette dernière catégorie, il fait une distinction entre le trafic maritime et le trafic aérien, lequel est spécifiquement visé aux points dont la Cour est invitée à fournir une interprétation. Le texte des dispositions en cause est le suivant: «Sans préjudice d’autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels: […]
6.
les livraisons, transformations, réparations, entretien, affrètements et locations d’aéronefs, utilisés par des compagnies de navigation aérienne pratiquant essentiellement un trafic international rémunéré, ainsi que les livraisons, locations, réparations et entretien des objets incorporés à ces aéronefs ou servant à leur exploitation;
7.
les livraisons de biens destinés à l’avitaillement des aéronefs visés au point 6;
[…]
9.
les prestations de services, autres que celles visées au point 6, effectuées pour les besoins directs des aéronefs y visés et de leur cargaison;
[…]» IV – La déduction et le remboursement, en droit danois, de la TVA grevant les prestations pour les aéronefs 12. Il n’est pas indispensable, pour fournir au Vestre Landsret les réponses qu’il souhaite obtenir, de connaître les règles de droit danois, en particulier celles qui ont trait à la fiscalité applicable à l’avitaillement des avions assurant le trafic aérien et commercial et aux fournitures de services qui leur sont destinées. Néanmoins, la connaissance de ces règles permet de comprendre avec précision les problèmes qui sont à l’origine du litige au principal. 13. Les règles qui régissent la TVA au Danemark sont inscrites dans la lov om mervœrdiafgift (ci-après la «momsloven»). Le texte actuellement en vigueur figure dans la loi codifiée n° 804, qui a été publiée le 16 août 2000 et qui a remplacé la loi antérieure avec effet au 1er juillet 1994. 14. L’article 34, paragraphe 1, exonère de la taxe: 1) les livraisons de biens et les prestations de services destinées à l’équipement et à l’avitaillement des aéronefs effectuant des vols internationaux (point 7); 2) la vente et la location d’aéronefs, à l’exception des avions de tourisme, ainsi que la livraison ou la location de leurs équipements fixes; les réparations, l’entretien et les travaux de réaménagement (points 8 et 9) et 3) les livraisons de biens destinés à l’avitaillement et à la consommation ou à la vente à bord, sans préjudice de la réglementation douanière (point 16). L’exonération dépend donc de la nature du voyage, sauf dans le cas des activités visées aux points 8 et 9, qui sont toujours exonérées, sauf dans le cas des avions de tourisme. 15. Par ailleurs, la momsloven exonère de la TVA le transport domestique et international de passagers (article 13, paragraphe 1, point 15), de sorte que, conformément à l’article 37, paragraphe 1, les compagnies aériennes ne sont pas autorisées à déduire la taxe qui leur est facturée pour l’achat de biens et de services destinés à cette activité commerciale. En ce qui concerne les itinéraires externes, cependant, lorsque l’opération n’est pas exclue par l’article 34, la déduction est possible, car l’article 45, paragraphe 3, permet le remboursement du montant versé au Danemark pour les transactions liées au transport de passagers à destination d’autres pays. 16. En résumé, Cimber Air ne peut pas obtenir le remboursement de la taxe qu’elle a acquittée pour les biens et les services qu’elle a achetés aux fins de ses vols intérieurs en territoire danois. V – Examen des questions préjudicielles A – Quelques précisions à caractère plus que terminologique 17. La circulation internationale des biens est régie par le principe de l’imposition au lieu de destination ou de consommation. Pour éviter l’«exportation» d’impôts indirects en dehors du pays d’origine – ce qui entraînerait une double imposition –, il faut donc mettre en place un régime d’exonération des transactions extérieures (8) . En d’autres termes, comme la Cour l’a déclaré dans l’arrêt Lange (9) , l’objectif des exonérations prévues par l’article 15 de la sixième directive consiste à ne pas assujettir à la TVA les consommateurs des États non-membres (point 20). 18. La sixième directive a...

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