Commission of the European Communities v Hellenic Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:638
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-489/06
Date20 November 2008
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - fondé
Celex Number62006CC0489

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN Mazák

présentées le 20 novembre 2008 (1)

Affaire C‑489/06

Commission des Communautés européennes

contre

République hellénique

«Manquement d’État – Libre circulation de marchandises – Directives 93/36/CEE et 93/42/CEE – Acquisition par un hôpital de dispositifs médicaux munis du marquage CE – Mesures de sauvegarde – Marchés publics de fournitures»





1. Par son recours, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en rejetant les offres de dispositifs médicaux présentant un marquage de certification CE, sans que, en tout état de cause, les pouvoirs adjudicateurs compétents des hôpitaux grecs aient suivi la procédure prescrite par la directive 93/42/CEE du Conseil, relative aux dispositifs médicaux (2), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 93/36/CEE du Conseil (3) (relative aux marchés publics de fournitures) et en vertu des articles 17 et 18 de la directive 93/42.

I – Cadre juridique

A – Droit communautaire

2. Comme nous l’expliquerons au point 33 des présentes conclusions, nous considérons que, par son arrêt rendu dans l’affaire Medipac-Kazantzidis (4) – prononcé après la clôture de la procédure écrite dans la présente espèce, la Cour a, pour ce qui concerne la directive 93/42, dorénavant réglé la question relative aux obligations des pouvoirs adjudicateurs et à la procédure devant être appliquée par ceux-ci dans des cas comme ceux dont il s’agit en l’espèce. C’est pourquoi nous considérons qu’il n’est pas nécessaire d’exposer la totalité du cadre légal de la directive 93/42, comme cela a été fait de manière exhaustive dans l’arrêt Medipac-Kazantzidis.

3. Les paragraphes 1 à 4 de l’article 8 de la directive 93/36 stipulent que:

«1. Les spécifications techniques visées à l’annexe III figurent dans les documents généraux ou dans les documents contractuels propres à chaque marché.

2. Sans préjudice des règles techniques nationales obligatoires, pour autant que celles-ci soient compatibles avec le droit communautaire, les spécifications techniques visées au paragraphe 1 sont définies par les pouvoirs adjudicateurs par référence à des normes nationales transposant des normes européennes, ou par référence à des agréments techniques européens ou par référence à des spécifications techniques communes.

3. Un pouvoir adjudicateur peut déroger au paragraphe 2:

a) si les normes, les agréments techniques européens ou les spécifications techniques communes ne contiennent aucune disposition concernant l’établissement de la conformité ou s’il n’existe pas de moyens techniques permettant d’établir de façon satisfaisante la conformité d’un produit avec ces normes, avec ces agréments techniques européens ou avec ces spécifications techniques communes;

b) si l’application du paragraphe 2 nuit à l’application de la directive 86/361/CEE du Conseil [(5)] […] ou de la décision 87/95/CEE du Conseil [(6)] […] ou d’autres instruments communautaires dans des domaines précis concernant des services ou des produits;

c) si ces normes, ces agréments techniques européens ou ces spécifications techniques communes obligeaient le pouvoir adjudicateur à acquérir des fournitures incompatibles avec des installations déjà utilisées ou entraînaient des coûts disproportionnés ou des difficultés techniques disproportionnées, mais uniquement dans le cadre d’une stratégie clairement définie et consignée en vue d’un passage, dans un délai déterminé, à des normes européennes, à des agréments techniques européens ou à des spécifications techniques communes;

d) si le projet concerné constitue une véritable innovation et que le recours à des normes, à des agréments techniques européens ou à des spécifications techniques communes existants serait inapproprié.

4. Les pouvoirs adjudicateurs qui ont recours au paragraphe 3 en indiquent, si possible, les raisons dans l’appel d’offres publié au Journal officiel des Communautés européennes ou dans le cahier des charges, en indiquant dans tous les cas ces raisons dans leur documentation interne, et fournissent cette information, sur demande, aux États membres et à la Commission.»

4. L’annexe III de la directive 93/36, intitulée «Définition de certaines spécifications techniques», stipule:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

«1) ‘spécifications techniques’: l’ensemble des prescriptions techniques contenues notamment dans les cahiers des charges, définissant les caractéristiques requises d’un matériau, d’un produit ou d’une fourniture et permettant de caractériser objectivement un matériau, un produit ou une fourniture de manière telle qu’ils répondent à l’usage auquel ils sont destinés par le pouvoir adjudicateur. Ces caractéristiques incluent les niveaux de qualité ou de propriété d’emploi, la sécurité, les dimensions y compris les prescriptions applicables au matériau, au produit ou à la fourniture en ce qui concerne le système d’assurance de la qualité, la terminologie, les symboles, les essais et méthodes d’essai, l’emballage, le marquage et l’étiquetage;

2) ‘normes’: les spécifications techniques approuvées par un organisme reconnu à activité normative pour application répétée ou continue, dont l’observation n’est pas, en principe, obligatoire;

3) ‘normes européennes’: les normes approuvées par le comité européen de normalisation (CEN) ou par le comité européen de normalisation électronique (Cenélec) en tant que ‘normes européennes (EN)’ ou ‘documents d’harmonisation (HD)’, conformément aux règles communes de ces organisations;

4) ‘agrément technique européen’: l’appréciation technique favorable de l’aptitude à l’emploi d’un produit, basée sur la satisfaction des exigences essentielles pour la construction, selon les caractéristiques intrinsèques de ce produit et les conditions établies de mise en œuvre et d’utilisation. L’agrément européen est délivré par l’organisme agréé à cet effet par l’État membre;

5) ‘spécifications techniques communes’: les spécifications techniques élaborées selon une procédure reconnue par les États membres et qui aura fait l’objet d’une publication au Journal officiel des Communautés européennes

B – Droit national

5. La directive 93/36 a été transposée en droit grec, et notamment par le décret présidentiel n° 370 (FEK A 199/1995). L’article 16 de ce décret reprend, pour l’essentiel, les termes de l’article 8 de la directive 93/36.

6. La décision interministérielle n° DY7/oik.2480, du 19 août 1994 (FEK B 679), adaptant la législation grecque à la directive 93/42, a transposé cette dernière en droit grec.

7. De plus, l’Ethnikou Organismos Farmakon (l’autorité grecque responsable de la mise en œuvre des directives communautaires relatives aux dispositifs médicaux, relevant du ministère de la Santé, ci-après l’«EOF») a été désigné comme autorité compétente en matière de dispositifs médicaux conformément à l’article 19 de la loi n° 2889/2001.

II – Faits, procédure précontentieuse et conclusions des parties

8. La Commission avait reçu une plainte concernant un phénomène de rejet de dispositifs médicaux – notamment de sutures chirurgicales – dans le cadre d’avis de marché de fournitures pour des hôpitaux publics en République hellénique, pour des motifs liés au «caractère suffisant et sûr, dans l’ensemble, de l’utilisation» des dispositifs médicaux, malgré leur certification par le marquage CE (7) et, en tout état de cause, sans application de la procédure de sauvegarde prévue par la directive 93/42.

9. Le 20 avril 2004, les autorités grecques ont, dans le cadre de l’enquête de la Commission, transmis à cette dernière la circulaire de l’EOF n° 19384 du 2 avril 2004 (ci-après la «circulaire n° 19384»). Cette circulaire reconnaissait que «certains comités chargés des marchés dans les hôpitaux ont […] rejeté pour non-conformité des offres présentées par des sociétés et concernant de nombreux dispositifs médicaux, alors que ceux-ci revêtaient le marquage CE, sans examen préalable par l’EOF» et que, «dans certains cas, la non-conformité concernait des spécifications arbitrairement fixées par les hôpitaux». Elle a poursuivi en indiquant que «les sociétés concernées ont donc saisi les tribunaux grecs et les institutions européennes compétentes et ont obtenu gain de cause». Selon les autorités grecques, la circulaire n° 19384 présentait donc un rappel et des précisions concernant la procédure légale que les comités étaient tenus de respecter.

10. À la lumière des évolutions précitées, les services de la Commission ont informé le plaignant de leur intention de classer l’affaire. Or, par lettre du 8 novembre 2004, le plaignant a soumis des éléments complémentaires, selon lesquels, malgré la diffusion de la circulaire, les comités compétents de certains hôpitaux (notamment les hôpitaux généraux de Komotini, Messolonghi, Agios Nikolaos en Crète et Venizeleio-Pananeio de Heraklion en Crète) continuaient à commettre les mêmes manquements.

11. À titre d’exemple, lors d’un appel d’offres, l’hôpital général de Komotini a rejeté une partie importante de l’offre du plaignant pour non-conformité des dispositifs, alors que ceux-ci revêtaient le marquage CE et que leur fabrication répondait aux exigences de la pharmacopée européenne. Bien qu’il eût déjà reçu la circulaire de l’EOF, l’hôpital a refusé de l’appliquer et de transmettre les dispositifs en cause pour un contrôle par l’EOF.

12. En outre, l’hôpital général de Messolonghi a rejeté l’offre du plaignant et clôturé la procédure sans en informer l’EOF et sans lui transmettre d’échantillon pour examen. Il en a été de même pour un appel d’offres organisé par l’hôpital général d’Agios Nikolaos en Crète.

13. Enfin, lors d’un appel d’offres organisé par l’hôpital général de Heraklion en Crète, l’hôpital en question, bien qu’ayant informé l’EOF au préalable conformément à la circulaire, a refusé de se conformer à...

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