Commission of the European Communities v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2002:638
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-283/00
Date07 November 2002
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62000CC0283
EUR-Lex - 62000C0283 - FR 62000C0283

Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 7 novembre 2002. - Commission des Communautés européennes contre Royaume d'Espagne. - Manquement d'État - Marchés publics - Directive 93/37/CEE - Procédure de passation de marchés publics de travaux - Société commerciale d'État régie par le droit privé - Objet social consistant en l'exécution d'un plan d'amortissement et de création de centres pénitentiaires - Notion de 'pouvoir adjudicateur'. - Affaire C-283/00.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-11697


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1. Le présent recours en manquement porte sur la délimitation du champ d'application personnel de la directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux . Le royaume d'Espagne considère que les entreprises commerciales dans le capital desquelles les pouvoirs publics ont une participation, mais qui sont organisées conformément au droit privé ne relèvent pas de la notion d'«organisme de droit public» au sens de la directive.

II - Cadre juridique

2. Aux termes de l'article 1er, sous b), de la directive 93/37 «sont considérés comme pouvoirs adjudicateurs l'État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public et les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou de ces organismes de droit public.

On entend par organisme de droit public tout organisme:

- créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial

et

- doté de la personnalité juridique

et

- dont soit l'activité est financée majoritairement par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public, soit la gestion est soumise à un contrôle par ces derniers, soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié est désignée par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public.»

3. Cette disposition a été transposée en droit national espagnol par la ley 13/1995 de Contratos de las Administraciones Públicas (ci-après la «loi 13/1995»). L'article 1er, paragraphe 3, de cette loi dispose que:

«[...] Devront également exercer leur activité de passation des marchés conformément à la présente loi les organismes autonomes dans tous les cas et les autres entités de droit public dotées d'une personnalité juridique propre, liées à une administration publique ou dépendant d'elle, qui répondent aux critères suivants:

a) avoir été créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial;

b) être des entités dont soit l'activité est financée majoritairement par les administrations publiques ou d'autres entités de droit public, soit la gestion est soumise à un contrôle par ces dernières, soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié est désignée par les administrations publiques et d'autres entités de droit public.»

4. La sixième disposition additionnelle de cette même loi, intitulée «Principes de passation des marchés dans le secteur public», est libellée comme suit:

«Les sociétés commerciales dans le capital desquelles les administrations publiques ou leurs organismes autonomes ou des entités de droit public détiennent une participation, directe ou indirecte, majoritaire respectent les principes de publicité et de concurrence dans leur activité de passation de marchés, sauf si la nature de l'opération à réaliser est incompatible avec ces principes.»

III - Faits et procédure précontentieuse

5. La Sociedad Estatal de Infraestructuras y Equipamientos Penitenciarios SA (ci-après la «SIEPSA») a été créée par l'État et a entamé ses activités le 7 avril 1992. À l'origine, elle avait été constituée pour une durée de huit ans maximum à compter du début de son entrée en fonction. L'article 4 des statuts, qui prévoyait ce terme, a cependant été modifié en octobre 1999 et prévoit désormais que la société existe pour une durée indéterminée.

6. Conformément à l'article 2 de ses statuts, la SIEPSA a pour mission de développer et d'exécuter les programmes et activités prévus dans le Plan de Amortización y Creación de Centros Penitenciarios approuvé par le Conseil des ministres. Il s'agit, d'une part, de localiser et d'acquérir des terrains pour la construction de nouveaux centres pénitentiaires en régie propre ou à l'intervention de tiers, ce qui comporte le lancement des appels d'offres y afférents et la réalisation des travaux de planification et de construction nécessaires à la mise en service des centres ainsi que le financement de ces travaux et, d'autre part, d'aliéner les installations désaffectées. L'État espagnol est le seul actionnaire de la SIEPSA. Celle-ci est dirigée par un conseil d'administration dont les membres sont choisis par le gouvernement. À l'exception des règles de droit public relatives au budget, à la comptabilité et au contrôle financier, la société est régie par le droit privé.

7. Dans le cadre de l'édification du Centro Educativo Penitenciario Experimental de Ségovie, la SIEPSA a lancé un appel d'offres qui, s'il était conforme aux exigences de la loi 13/1995, ne l'était pas, comme le gouvernement espagnol l'a lui-même reconnu, aux règles que la directive 93/37 énonce en ce qui concerne la publicité (article 11) , le délai de présentation des offres (article 12), les critères d'accès à la procédure (articles 24, 27 et 29, paragraphe 3), les critères d'adjudication (articles 18 et 30) et le traitement à réserver aux offres anormalement basses (article 30, paragraphe 4).

8. Au terme d'une procédure précontentieuse infructueuse, au cours de laquelle elle lui a adressé une lettre de mise en demeure le 6 novembre 1998 et un avis motivé le 25 août 1999, la Commission a engagé le présent recours contre le royaume d'Espagne.

IV - Conclusions des parties

9. La Commission demande à la Cour:

1) de déclarer qu'à n'avoir pas respecté l'ensemble des dispositions de la directive 93/37, et plus précisément les règles de publicité prévues à l'article 11, paragraphes 2, 6, 7 et 11, ainsi que les dispositions des articles 12, paragraphe 1, et 29, paragraphe 3, 18, 27 et 30, paragraphe 4, lors de l'appel d'offres concernant la réalisation des travaux du Centro Educativo Penitenciario Experimental de Ségovie, lancé par la SIEPSA, société couverte par la définition de pouvoir adjudicateur contenue à l'article 1er, sous b), de la directive et dont le montant excède largement le seuil qu'elle prévoit, le royaume d'Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire et

2) de condamner le royaume d'Espagne aux dépens.

10. Le royaume d'Espagne demande à la Cour:

1) de rejeter le recours et

2) de condamner la Commission aux dépens.

V - Les arguments des parties

11. Dans son mémoire en défense et dans la duplique, le royaume d'Espagne n'a pas abordé en détail les infractions à la directive 93/37 dont il lui est fait grief. Dans une lettre datée du 16 juillet 2002, cependant, il a reconnu expressément que l'appel d'offres litigieux n'était pas conforme aux exigences de la directive 93/37 invoquée par la Commission. Par conséquent, le litige porte uniquement sur la question de savoir si la SIEPSA doit ou non être considérée comme un pouvoir adjudicateur au sens de la directive. C'est pourquoi nous ne reproduirons les arguments des parties que dans la mesure où ils portent sur ce point précis.

12. Les parties s'entendent à reconnaître que la SIEPSA dispose d'une personnalité juridique propre et qu'elle est contrôlée par les pouvoirs publics. Elles sont, en revanche, divisées sur la question de savoir dans quelle mesure la SIEPSA satisfait des besoins ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial.

A - La Commission

13. La Commission estime que la SIEPSA satisfait des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial. Elle fonde son analyse moins sur les activités que la SIEPSA exerce que sur le but dans lequel elle a été fondée.

14. La Commission base sa conviction en premier lieu sur l'article 2 des statuts de la SIEPSA. Conformément à ceux-ci, la SIEPSA a été fondée dans le but de réaliser les projets approuvés par le Conseil des ministres dans le Plan de Amortización y Creación de Centros Penitenciarios. Elle s'occuperait ainsi de la construction et de l'équipement de centres pénitentiaires et de l'aliénation d'installations désaffectées, contribuant ainsi à la mise en oeuvre de la politique pénitentiaire de l'État. Se référant à l'arrêt Mannesmann Anlagenbau Austria e.a. , la Commission souligne que l'exécution de ces tâches d'intérêt général est étroitement liée au maintien de l'ordre public et confère à l'État un monopole en matière de pouvoir de répression et d'application des peines privatives de liberté.

15. En outre, la SIEPSA dépendrait fonctionnellement de l'administration ministérielle. Dans l'accomplissement de sa mission, elle suivrait les recommandations de la direction générale de l'administration des établissements pénitentiaires, élément qui confirmerait lui aussi l'appartenance de la SIEPSA au secteur public.

16. La Commission estime, de surcroît, que les activités exercées par la SIEPSA ne sont pas non plus des activités industrielles ou commerciales. La construction de centres pénitentiaires et l'aliénation d'installations désaffectées ne sont pas une activité pour laquelle il existerait un marché général. L'État serait le seul demandeur sur le marché de la construction de pareils établissements que nécessite la mise en oeuvre de sa politique en matière pénale.

17. Quand bien même l'on voudrait classer les activités de la SIEPSA au nombre des activités industrielles ou commerciales, cela n'empêcherait cependant pas l'application de la directive...

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