Wählergruppe "Gemeinsam Zajedno/Birlikte Alternative und Grüne GewerkschafterInnen/UG", and Bundesminister für Wirtschaft und Arbeit and Others.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2002:758
Docket NumberC-171/01
Celex Number62001CC0171
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date12 December 2002
EUR-Lex - 62001C0171 - FR 62001C0171

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 12 décembre 2002. - Wählergruppe "Gemeinsam Zajedno/Birlikte Alternative und Grüne GewerkschafterInnen/UG", en présence de Bundesminister für Wirtschaft und Arbeit et autres. - Demande de décision préjudicielle: Verfassungsgerichtshof - Autriche. - Association CEE-Turquie - Libre circulation des travailleurs - Article 10, paragraphe 1, de la décision nº 1/80 du conseil d'association - Principe de non-discrimination en ce qui concerne les conditions de travail - Effet direct - Portée - Législation d'un État membre excluant les travailleurs turcs de l'éligibilité aux chambres du travail. - Affaire C-171/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-04301


Conclusions de l'avocat général

1 La décision n_ 1/80 (1) adopté par le conseil d'association institué par l'accord créant une association entre la Communauté européenne et la Turquie (2) interdit toute discrimination fondée sur la nationalité en ce qui concerne la rémunération et les autres conditions de travail, de ressortissants turcs travaillant dans les États membres. Le Verfassungsgerichtshof (Cour constitutionnelle) (Autriche) s'interroge sur la question de savoir si cette disposition s'oppose à une loi nationale qui ne reconnaît pas à des travailleurs turcs le droit à l'éligibilité à l'assemblée plénière d'une chambre du travail, et dans l'affirmative, si cette disposition a un effet direct.

Le cadre juridique

L'accord d'association et la décision n_ 1/80

2 Les finalités de l'accord d'association sont essentiellement d'établir des liens plus étroits et de promouvoir le renforcement des relations commerciales entre la Turquie et la Communauté européenne, de développer l'économie de la Turquie et de relever le niveau de l'emploi et des conditions de vie du peuple turc, en vue de l'adhésion de la république de Turquie à la Communauté européenne à une date ultérieure. Il prévoit une phase préparatoire, une phase transitoire - actuellement en cours - et une phase définitive (3).

3 Au titre de l'article 9 de l'accord d'association, les parties contractantes reconnaissent que, dans le domaine d'application dudit accord, toute discrimination exercée en raison de la nationalité est interdite en conformité du principe énoncé dans ce qui est actuellement, après modification, l'article 12 CE.

4 Les articles 12 à 14 de l'accord d'association prévoient la mise en oeuvre graduelle de la libre circulation des travailleurs, de la liberté d'établissement et de la libre prestation des services. Au titre dudit article 12, les parties contractantes conviennent de s'inspirer des articles 48 et 49 du traité CE (devenus, après modification, articles 39 CE et 40 CE) ainsi que 50 du traité CE (devenu article 41 CE) pour réaliser graduellement la libre circulation des travailleurs entre elles.

5 Un protocole additionnel (4), annexé à cet accord, arrête les conditions, modalités et rythmes de réalisation de la phase transitoire. Les articles 36 à 40 dudit protocole concernent la libre circulation des travailleurs. Au titre de l'article 36, «la libre circulation des travailleurs entre les États membres de la Communauté et la Turquie sera réalisée graduellement conformément aux principes énoncés à l'article 12 de l'accord d'association [...]. Le Conseil d'association décidera des modalités nécessaires à cet effet».

6 L'article 37 du protocole additionnel prévoit: «Chaque État membre accorde aux travailleurs de nationalité turque employés dans la Communauté un régime caractérisé par l'absence de toute discrimination fondée sur la nationalité par rapport aux travailleurs ressortissant des autres États membres de la Communauté en ce qui concerne les conditions de travail et la rémunération».

7 L'article 6 de l'accord d'association institue un conseil d'association qui assure l'application et le développement progressif du régime d'association. Au titre de l'article 22, paragraphe 1, de cet accord le conseil d'association dispose d'un pouvoir de décision dans les cas prévus par ledit accord et les parties contractantes sont tenues de prendre les mesures que comporte l'exécution des décisions prises. Conformément à l'article 23 de l'accord d'association, le conseil d'association est composé de membres des gouvernements des États membres, du Conseil, de la Commission et du gouvernement turc.

8 La décision n_ 1/80 prévoit à son article 10, paragraphe 1: «Les États membres de la Communauté accordent aux travailleurs turcs appartenant à leur marché régulier de l'emploi un régime caractérisé par l'absence de toute discrimination fondée sur la nationalité par rapport aux travailleurs communautaires en ce qui concerne la rémunération et les autres conditions de travail».

Dispositions du traité et règlement (CEE) n_ 1612/68

9 Ainsi qu'indiqué ci-dessus, l'accord d'association fait référence à plusieurs dispositions du traité, à la lumière desquelles il doit être interprété.

10 L'article 12 CE dispose: «Dans le domaine d'application du présent traité [...] est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité». L'article 39 CE assure la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté et prévoit, à son paragraphe 2, qu'une telle liberté de circulation implique «l'abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail» (5). Toutefois, au titre du paragraphe 4, les dispositions dudit article ne sont pas applicables «aux emplois dans l'administration publique». Aux termes de l'article 40 CE, le Conseil arrête, par voie de directives ou de règlements, les mesures nécessaires en vue de réaliser la libre circulation des travailleurs, telle qu'elle est définie à l'article 39 CE.

11 Une de ces mesures est le règlement (CEE) n_ 1612/68 du Conseil (6) dont l'article 7, paragraphe 1, prévoit: «Le travailleur ressortissant d'un État membre ne peut, sur le territoire des autres États membres, être, en raison de sa nationalité, traité différemment des travailleurs nationaux, pour toutes conditions d'emploi et de travail, notamment en matière de rémunération, de licenciement, et de réintégration professionnelle ou de réemploi s'il est tombé au chômage». Au titre de l'article 8, paragraphe 1, dudit règlement (7), un tel travailleur «bénéficie de l'égalité de traitement en matière d'affiliation aux organisations syndicales et d'exercice des droits syndicaux, y compris le droit de vote et l'accès aux postes d'administration ou de direction d'une organisation syndicale; il peut être exclu de la participation à la gestion d'organismes de droit public et de l'exercice d'une fonction de droit public. Il bénéficie, en outre, du droit d'éligibilité aux organes de représentation des travailleurs dans l'entreprise [...]».

L'affaire ASTI

12 En 1991, la Cour a rendu un arrêt dans l'affaire ASTI (8). Le litige devant la juridiction nationale concernait l'obligation de payer des contributions à la chambre des employés privés, une chambre professionnelle à Luxembourg, pour le compte d'employés, ressortissants de la Communauté européenne mais non pas du Luxembourg, qui, au titre des dispositions applicables au Luxembourg, étaient contraints de s'affilier à ladite chambre mais, du fait de leur nationalité, n'avaient pas la qualité d'électeur des membres de cette chambre.

13 La Cour a principalement examiné la question à la lumière de l'article 8, paragraphe 1, du règlement n_ 1612/68 qui, selon elle, «déborde le cadre des organisations syndicales proprement dites et inclut, notamment, la participation des travailleurs à des organismes qui, tout en n'ayant pas la nature juridique d'organisations syndicales, exercent des fonctions analogues de défense et de représentation des intérêts des travailleurs» (9) et «s'oppose à ce qu'une législation nationale refuse aux travailleurs étrangers le droit de vote aux élections des membres d'une chambre professionnelle à laquelle ils sont obligatoirement affiliés, à laquelle ils doivent cotiser, qui est chargée de la défense des intérêts des travailleurs affiliés et qui exerce une fonction consultative dans le domaine législatif» (10).

14 En statuant, la Cour a rejeté un argument soulevé par le gouvernement luxembourgeois selon lequel une telle chambre professionnelle relève de l'exception prévue à l'article 8, paragraphe 1, du règlement n_1612/68 en raison de sa nature d'organisme de droit public et de son association à l'exercice de la puissance publique par le biais de sa fonction consultative. La Cour a souligné que l'exclusion (qui correspond à l'exception prévue à l'article 39, paragraphe 4, CE) permet seulement d'exclure éventuellement les travailleurs des autres États membres de certaines activités qui impliquent la participation à la puissance publique (11).

15 Subséquemment, dans l'affaire Commission/Luxembourg (12), la Cour a confirmé l'arrêt ASTI, précité, et a en outre jugé que, «en maintenant une législation qui exclut les travailleurs ressortissants des autres États membres, employés [au Luxembourg], du droit d'élire ou d'être élu lors des élections organisées au sein des chambres professionnelles luxembourgeoises», le grand-duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 48 du traité et 8, paragraphe 1, du règlement n_ 1612/68.

Le cadre législatif autrichien applicable

16 En Autriche, des organismes connus sous le nom de «Kammern für Arbeiter und Angestellte» (chambres du travail et des employés, ci-après les «chambres du travail») dans chaque Land, qui forment ensemble la Bundeskammer für Arbeiter und Angestellte (chambre fédérale du travail et des employés, ci-après la «Bundesarbeitskammer»), représentent et promeuvent les intérêts sociaux, économiques, professionnels et culturels des travailleurs. Au titre de l'Arbeiterkammergesetz...

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