Ditta Angelo Celestini v Saar-Sektkellerei Faber GmbH & Co. KG.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1996:350
Docket NumberC-105/94
Celex Number61994CC0105
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date26 September 1996
EUR-Lex - 61994C0105 - FR 61994C0105

Conclusions de l'avocat général Fennelly présentées le 26 septembre 1996. - Ditta Angelo Celestini contre Saar-Sektkellerei Faber GmbH & Co. KG. - Demande de décision préjudicielle: Tribunale civile e penale di Ravenna - Italie. - Organisation commune du marché viti-vinicole - Contrôle des vins provenant d'un autre Etat membre - Méthode de recherche des isotopes de l'oxygène dans l'eau au moyen de la spectrométrie de masse à rapports isotopiques. - Affaire C-105/94.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-02971


Conclusions de l'avocat général

1 «Et lorsqu'il prenait place pour rompre le pain, Noé avait coutume de dire à sa femme `peu m'importe où va l'eau si elle ne se mélange pas au vin'» (1). L'adjonction d'eau au vin, peut-être la plus simple de toutes les fraudes dans le commerce du vin, est naturellement également une des plus difficiles à détecter. La présente demande de décision préjudicielle qui émane d'une juridiction italienne porte essentiellement sur la compatibilité avec le droit communautaire de l'utilisation par les autorités allemandes d'une méthode de contrôle spécifique permettant de détecter l'adjonction d'eau. Toutefois, le manque d'informations à ce sujet dans l'ordonnance de renvoi ainsi que le degré de consensus entre les parties à l'affaire au principal ont suscité des doutes, s'agissant de l'existence d'un litige réel et, à titre subsidiaire, en ce qui concerne la recevabilité d'au moins certaines des questions déférées à la Cour.

I - Le contexte légal et factuel

A - La législation communautaire pertinente

2 Le vin est énuméré à l'annexe II du traité (2) comme produit agricole au sens de l'article 38 du traité (3) et a été soumis depuis longtemps en droit communautaire à une organisation commune de marché (4). Le régime applicable est désormais le règlement (CEE) n_ 822/87 du Conseil, du 16 mars 1987, portant organisation commune du marché viti-vinicole (5) (ci-après le «règlement de 1987»), tel que modifié par le règlement (CEE) n_ 1972/87 du Conseil, du 2 juillet 1987 (6). L'article 1er, paragraphe 4, du règlement de 1987 renvoie à l'annexe I de ce règlement pour la définition, entre autres, du vin. Le point 10 de l'annexe précitée définit le vin comme suit:

«Vin: le produit obtenu exclusivement par la fermentation alcoolique, totale ou partielle, de raisins frais, foulée ou non, ou de moûts de raisins.»

3 L'article 15, paragraphe 4, du règlement de 1987 dispose que l'adjonction d'eau au vin «est interdite», sauf dérogations décidées par le Conseil. L'article 73, paragraphe 1, dispose (en prévoyant une possibilité analogue de dérogation décidée par le Conseil) que les vins «ayant fait l'objet de pratiques oenologiques non admises par la réglementation communautaire ou, à défaut, par les réglementations nationales ne peuvent être offerts ou livrés à la consommation humaine directe». Il impose les mêmes restrictions aux vins qui ne sont pas «sains, loyaux ou marchands» ou qui ne «répondent pas aux définitions figurant à l'annexe I ou à celles arrêtées en application du présent règlement».

4 Ces interdictions reflètent les règles qui avaient été fixées antérieurement dans le cadre du règlement de 1970. L'article 28 définissait au départ les conditions que devaient remplir les vins avant de pouvoir «être livrés à la consommation humaine directe». Il a été remplacé par l'article 28 bis qui a été inséré dans le règlement précité par l'article 28 du règlement (CEE) n_ 1160/76 du Conseil, du 17 mai 1976, modifiant le règlement (CEE) n_ 816/70 (7). Conformément à l'article 28 bis, les vins qui ont «fait l'objet de pratiques oenologiques non admises par les réglementations communautaires, ou, à défaut, par les réglementations nationales, ou bien non conformes aux dispositions du présent règlement ou à celles arrêtées en application de celui-ci» ne sauraient «être offerts ou livrés à la consommation humaine directe». En application de l'article 2 du règlement (CEE) n_ 1678/77 du Conseil, du 19 juillet 1977, complétant le règlement (CEE) n_ 816/70 par l'introduction de nouvelles dispositions relatives aux pratiques et aux traitements oenologiques (8), «ne sont autorisés que les pratiques et traitements oenologiques visés au présent règlement et en particulier à l'annexe II bis (insérée dans le règlement par l'article 4) ou à d'autres dispositions communautaires applicables au secteur viti-vinicole». L'annexe II bis (telle que modifiée) n'a jamais autorisé l'adjonction d'eau au vin. A cet égard, le règlement (CEE) n_ 1972/78 de la Commission, du 16 août 1978, fixant les modalités d'application pour les pratiques oenologiques (9) (ci-après le «règlement de la Commission de 1978»), qui est encore en vigueur , dispose en son article 1er, premier alinéa, que «les vins qui, en vertu de l'article 28 bis du règlement (CEE) n_ 816/70, sont impropres à la consommation humaine directe ne peuvent être détenus sans motif légitime par un producteur ou par un commerçant» (10). Le règlement de la Commission de 1978 prévoit deux possibilités lorsqu'il est établi que les vins sont impropres à la consommation humaine: ils peuvent être «détruits» ou être transportés, mais uniquement à destination «d'une distillerie, d'une vinaigrerie ou d'un établissement les utilisant pour des usages ou des produits industriels». En outre, en application du second alinéa de l'article 1er, les États membres ont la faculté, pour être assurés que ces vins n'atteignent pas les consommateurs, «de faire procéder à l'adjonction aux vins de dénaturants ou d'indicateurs afin de mieux les identifier».

5 L'article 74, paragraphe 1, du règlement de 1987 (tel que modifié) prévoit l'adoption par la Commission, conformément à une procédure de comité de gestion, «des méthodes d'analyse permettant d'établir la composition [... du vin] ... et les règles permettant d'établir si ces produits ont fait l'objet de traitements en violation des pratiques oenologiques autorisées». L'article 74, paragraphe 2, décrit les méthodes d'analyse qui peuvent être appliquées en l'absence de règles communautaires. Ce sont:

«a) les méthodes d'analyse reconnues par l'assemblée générale de l'Office international de la vigne et du vin (OIV) et publiées par le soin de celui-ci;

ou

b) lorsqu'une méthode d'analyse appropriée ne figure pas parmi celles visées au point a), une méthode d'analyse conforme aux normes recommandées par l'Organisation internationale de normalisation (ISO); ou

c) en l'absence d'une des méthodes visées aux points a) et b) et en raison de son exactitude, de sa répétabilité et de sa reproductibilité:

- une méthode d'analyse admise par l'État membre concerné,

ou

- en cas de nécessité, toute autre méthode d'analyse appropriée».

6 Les deux premiers alinéas de l'article 79, paragraphe 1, du règlement de 1987 disposent que:

«Les États membres prennent les mesures nécessaires en vue d'assurer le respect des dispositions communautaires dans le secteur viti-vinicole. Ils désignent une ou plusieurs instances qu'ils chargent du contrôle du respect de ces dispositions.

Ils communiquent à la Commission le nom et l'adresse: - des instances visées au premier alinéa,

- des laboratoires autorisés à effectuer des analyses officielles dans le secteur du vin.

La Commission en informe les autres États membres.»

7 Sur la base de l'article 74 du règlement de 1987, la Commission a adopté le règlement (CEE) n_ 2676/90, du 17 septembre 1990, déterminant des méthodes d'analyse communautaires applicables dans le secteur du vin (11) (ci-après le «règlement de la Commission de 1990»). L'article 1er, du règlement de la Commission de 1990 prévoit un grand nombre de méthodes officielles d'analyse communautaires en vue de démasquer des pratiques oenologiques interdites. Ces méthodes sont exposées à l'annexe dudit règlement, annexe dont les dimensions sont très importantes. L'article 2 fixe certaines règles concernant les notions de «répétabilité» et «reproductibilité». L'article 3 autorise, en les soumettant à des conditions d'exactitude, de répétabilité et de reproductibilité, l'utilisation de méthodes d'analyses automatisées mais, prévoit, qu'en cas de litige, les méthodes figurant à l'annexe doivent s'imposer. Cette annexe ne comporte toutefois pas de méthodes permettant de vérifier s'il y a eu adjonction d'eau au vin.

8 L'article 3, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 2048/89 du Conseil, du 19 juin 1989, portant règles générales relatives aux contrôles dans le secteur viti-vinicole (12) (ci-après le «règlement de 1989»), impose aux États membres de prendre «les mesures nécessaires pour améliorer le contrôle du respect de la réglementation viti-vinicole, notamment dans les domaines particuliers visés à l'annexe». L'annexe fait référence, entre autres, à «des pratiques oenologiques...» et «à la vérification de la composition des produits viticoles». L'article 3, paragraphe 2, dispose que:

«Les contrôles dans les domaines visés à l'annexe sont exécutés soit systématiquement, soit par sondages. En cas de contrôles par sondage, les États membres s'assurent, par le nombre, la nature et la fréquence de ces contrôles, que ceux-ci sont représentatifs pour l'ensemble de leur territoire et correspondent à l'importance du volume des produits viti-vinicoles commercialisés ou détenus en vue de leur commercialisation» (13).

Selon le premier alinéa de l'article 13, «les laboratoires déterminés pour effectuer des analyses dans le cadre de l'application du présent règlement sont choisis parmi ceux visés [c'est-à-dire ceux désignés par l'État membre] à l'article 79, paragraphe 1 [du règlement de 1987]» (14). Le deuxième paragraphe dispose que «les méthodes d'analyses sont celles qui sont visées à l'article 74 du règlement précité».

9 L'article 71, paragraphe 1, du règlement de 1987 prévoit que les vins ne peuvent circuler à l'intérieur de la Communauté que s'ils...

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