Administration de l'enregistrement et des domaines v Eurodental Sàrl.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:426
Date22 June 2006
Celex Number62005CC0240
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-240/05

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

DÁMASO RUIZ-JARABO COLOMER

présentées le 22 juin 2006 (1)

Affaire C-240/05

Administration de l’enregistrement et des domaines

contre

Eurodental Sàrl

[demande de décision préjudicielle formée par la cour d’appel (Luxembourg)]

«Sixième directive TVA – Opérations à l’intérieur d’un pays – Exonérations – Prothèses dentaires – Droit à déduction – Livraisons de biens et prestations de services intracommunautaires – Exonérations – Opérations intracommunautaires qui seraient aussi exemptées si elles étaient purement internes – Principe de neutralité»





I – Introduction

1. La sixième directive relative à la taxe sur la valeur ajoutée (2) (ci-après la «TVA») vise les exonérations internes, qui ne confèrent pas le droit de déduire la taxe payée, ainsi que celles qui favorisent certaines opérations intracommunautaires, bénéficiant de cette déduction.

2. La cour d’appel (Luxembourg) désire savoir si une activité économique qui, se déroulant dans un État membre, se trouve exonérée sans déduction de la taxe payée en amont l’est aussi lorsqu’elle franchit ses frontières.

3. Cette question préjudicielle attire l’attention sur les liens entre les exonérations applicables à certaines activités internes, énumérées à l’article 13 de la sixième directive, et celles prévues pour les transactions entre États par l’article 15, concernant les prestations de services et les livraisons de biens avant le 1er janvier 1993, et par l’article 28 quater (3), concernant cette dernière catégorie de transactions après cette date.

4. Elle vise en particulier à clarifier si la fabrication et la réparation de prothèses dentaires au Luxembourg, qui bénéficient de l’avantage fiscal précité, ouvrent droit à la déduction de la taxe en amont lorsque les clients résident en Allemagne.

II – La sixième directive

A – Les exonérations à l’intérieur du pays

5. La sixième directive soumet à la taxe les livraisons de biens et les prestations de services (4) effectuées à titre onéreux dans un pays par quiconque accomplit, d’une façon indépendante, des activités de production, de commerce ou de prestation de services, y compris les activités des professions libérales (articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphes 1 et 2).

6. Le titre X régit les exonérations, et l’article 13 porte sur celles qui se rapportent à des opérations internes, et son titre A, qui vise les exonérations en faveur de certaines activités d’intérêt général, mentionne «les prestations de services effectuées dans le cadre de leur profession par les mécaniciens-dentistes, ainsi que les fournitures de prothèses dentaires effectuées par les dentistes et les mécaniciens-dentistes» [paragraphe 1, sous e)].

7. De ce que l’on déduit, a contrario, de l’article 17, paragraphes 1 et 2, ces avantages fiscaux font obstacle à la déduction de la taxe acquittée, à moins que l’assujetti n’utilise les biens et les services pour les besoins de ses opérations taxées.

8. Le paragraphe 3, sous a), de l’article 28 a autorisé les États membres, pendant la période fixée en son paragraphe 4, à continuer à appliquer la taxe aux opérations qui en sont exonérées en vertu de l’article 13, et dont la liste est reprise à l’annexe E, dont le point 2 fait référence à l’article 13, titre A, paragraphe 1, sous e). Selon l’article 4, point 14, quatrième phrase, de la loi sur la taxe à la valeur ajoutée (l’Umsatzsteuergesetz de 1991) (5), l’exonération applicable aux médecins et aux dentistes ne s’applique pas à la livraison ou à la réparation de prothèses dentaires et d’appareils orthodontiques si l’exploitant les fabrique ou les répare dans son propre cabinet.

B – Les exonérations sur les opérations intracommunautaires

1. Avant le 1er janvier 1993

9. Dans la rédaction originaire de la sixième directive, cette catégorie de transactions était assimilée aux transactions extracommunautaires, et était couverte par l’article 15, dont les paragraphes 1 à 3 exonéraient les livraisons de biens exportés ou transportés hors d’un État membre et les prestations de services se rapportant à ces biens (6).

10. L’article 17, paragraphe 3, sous b), autorisait dans ces cas à déduire la taxe acquittée.

2. Après le 1er janvier 1993

11. La directive 91/680 a ajouté à la sixième directive un nouveau titre XVI bis, intitulé «Régime transitoire de taxation des échanges entre les États membres» afin de faciliter, une fois supprimés les contrôles fiscaux aux frontières intérieures à partir du 1er janvier 1993, le passage à un régime définitif de taxation des échanges entre les États membres dans le système commun de TVA (7).

12. Dans cette organisation provisoire, sont soumises à la TVA les «acquisitions intracommunautaires» à titre onéreux, à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel, ou par une personne morale non assujettie, lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel [article 28 bis, paragraphe 1, sous a), premier alinéa].

13. Sont exonérées les livraisons de biens «expédiés ou transportés par le vendeur ou par l’acquéreur ou pour leur compte, […] effectuées pour un autre assujetti, ou pour une personne morale non assujettie, agissant en tant que tel dans un État membre autre que celui du départ de l’expédition ou du transport des biens» [article 28 quater, titre A, sous a)]. Sont aussi exonérées les acquisitions intracommunautaires de biens dont la livraison par des assujettis serait en tout état de cause exonérée à l’intérieur du pays [article 28 quater, titre B, sous a)].

14. Enfin, l’article 17, paragraphe 3, modifié par l’article 28 septies, paragraphe 1, autorise la déduction de la TVA acquittée, si l’assujetti utilise les biens et les services pour les besoins: 1) de ses opérations relevant des activités économiques soumises à la taxe, effectuées à l’étranger, qui ouvriraient droit à déduction si ces opérations étaient effectuées à l’intérieur du pays [sous a)]; et 2) de ses opérations exonérées conformément à l’article 15 et à l’article 28 quater, titres A et C [sous b)].

III – Le litige au fond et les questions préjudicielles

15. La société luxembourgeoise Eurodental Sàrl (ci-après «Eurodental») a pour activité la fabrication et la réparation de prothèses dentaires pour le compte de clients établis en Allemagne.

16. Par décision du 26 mars 1997, l’Administration de l’enregistrement et des domaines lui a refusé la déduction de la TVA ayant grevé les biens utilisés pour effectuer des livraisons et des prestations de services dans le pays voisin. Elle a estimé que l’article 44 (qui instaure une dispense pour les prothèses dentaires) de la loi du 12 février 1979...

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